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L’immixtion dans la gestion du personnel

Partie I. La recherche de la responsabilité de la société mère du fait de ses filiales au niveau national

Section 2. La responsabilité de la société mère dans le cadre extracontractuel

2. L’immixtion dans la gestion du personnel

Dans beaucoup de cas, la création ou la disparation d’une société du groupe est tributaire du bon vouloir de la société tête de file, qui, au nom de l’intérêt social, n’hésite pas à immoler353

au nom de cet intérêt, une ou des filiales, sans égard pour les salariés de ces sociétés. Quelle responsabilité ça suppose pour la société mère ?

L’existence d’un lien de subordination entre la société mère et les salariés de la filiale a longtemps été le passage obligé vers la reconnaissance de la qualité de coemployeur de la société mère354.

La cour de cassation conditionnait dans un premier temps, la reconnaissance d’une situation de coemploi à la démonstration d’une triple confusion d’intérêts, d’activités et de direction, puis ,la preuve d’un rapport de subordination direct entre les salariés de la filiale et la société dominante, la chambre sociale a cependant renoncé, récemment, à exiger la constatation de cette seconde condition355.

Ainsi, dans un groupe de sociétés, si un salarié renvoyé parvient à démontrer qu’il se trouvait en situation de coemploi, il pourrait appeler la responsabilité des autres sociétés du groupe. C’est ce qui ressort d’un arrêt récent de la cour de cassation, dans le cas d’espèce , la société Metaleurop nord, filiale à 99% de la société recyclex (ex Metaleurop SA) a du procéder à des

353 T.C Orléans, 1 juin 2012,

354 Les risques encourus par la société mère en cas de procédures collectives de sa filiale française, Dr&Expertise, Mercredi 3 septembre 2012

355 Cass.soc, 18 janvier 2011, pourvoi n° 09.69.199, bull.civ V, n°23, la cour de casstion semble en effet abondonner ,le triptyque classique de confusion d’intérêts, d’activités et de direction au profit d’una anlayse sociale du pouvoir de al socité mère sur les salariés de la filiale ;Antonmattei (P.H) groupe de sociétés :la menace du co-employeur se confirme !semaine sociale Lamy,21 mars 2011,n°1484

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licenciements pour motif économique à la suite de l’élaboration d’un projet de restructuration et d’un plan de sauvegarde s’y rapportant ; les salariés licenciés ont engagé des poursuites auprès de la cour prud’homale demandant la condamnation des deux sociétés pour préjudice subi.

Ces décisions jurisprudentielles356 ont en commun des caractéristiques récurrentes comme peuvent l’être l’immixtion dans la gestion ou l’assujettissement d’une société à une ou plusieurs autres sociétés. Tous ces indices sont l’apanage des groupes de sociétés, aussi, nous pensons que la jurisprudence est restée trop sommaire quant à la délimitation du concept d’immixtion, autrement dit, à partir de quel moment peut-on reprocher à une société mère de s’être mêlée des affaires de ses filiales ?

II. La faute de la société mère

Celui qui commet une faute, doit réparer le dommage qui en découle, c’est un principe juridique et moral, universellement adopté et appliqué, en effet, « l’idée de la réparation est l’une des plus vielles idées morales de l’humanité357 ». Ce dommage peut exister en dehors de

tout contrat, et c’est là qu’entre en jeu la théorie de la responsabilité délictuelle, qui donne un fondement très solide, pour rendre une personne responsable, et par conséquence, débitrice d'une autre, en absence de tout contrat, les créanciers d'une filiale peuvent donc y avoir recours, pour mettre à la charge de la société mère les dettes de sa filiale.

356Versailles, 27 octobre 1988(13 ch) J.C.P,éd,n°7,études et commentaires (1989),Viandier (A) et Caussin(J.J) , dans le cas d’espéce, la filiale du groupe avait rompu un contrat de sous-traitance puis été mise en liquidation de biens, la société contractante se retourna alors contre la société mère qu’elle considérait comme l’instigatrice de la rupture

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L’émergence du principe de précaution, il y a quelques années maintenant, ouvre une nouvelle voie à explorer, puisque la violation d’un devoir de précaution pourrait être constitutive de faute et engager la responsabilité civile de son auteur358.

Mais, à ce moment, il faut arriver à déceler la faute qui

,

d’après Planiol359, « est la violation

ou le manquement à une obligation préexistante ». À ce niveau, il faudrait éviter de confondre la faute avec les « simples erreurs »360, commise par cette société mère, et qui a occasionné le dommage subi par les créanciers, quoique la jurisprudence n’ait jamais ratifié expressément une définition précise de la faute.

C’est pourquoi, c’est aux juges qu’échoit cette mission, «s’il appartient aux juges du fond de constater souverainement les faits d’où ils déduisent l’existence ou l’absence d’une faute, la qualification juridique de la faute relève du contrôle de la cour de cassation »361.

Aussi, même si le créancier apporte la preuve des éléments constituant la faute, c’est aux juges d’en apprécier la valeur. C’est ce qui ressort de la décision du tribunal de commerce de Nancy362 qui avait refusé la qualification de faute, pour les avances de trésorerie dont a bénéficié une filiale en graves difficultés, de la part de sa société mère ,puisque le créancier n’est pas arrivé à démontrer que la mère avait maintenu artificiellement sa fille en vie.

Donc, si la faute est le fondement sur lequel la société mère peut être poursuivie, il faut que cette faute soit personnelle, quoiqu’une responsabilité du fait d’autrui ne soit pas à écarter.