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Tourisme et croissance : une relation ambigüe

Section 1. L’analyse de la croissance : un domaine fertile pour appréhender l’impact économique du

1.1.2. L’endogénéisation du progrès technique

Une volonté d’expliquer le résidu de Solow en le rendant endogène Des nouveaux modèles voient le jour qui vont au-delà des hypothèses et des conclusions des modèles néoclassiques (Romer, 1990; Grossman, et al., 1991;

Aghion, et al., 1992). Ces nouveaux travaux forment ce qu’on l’appelle aujourd’hui la théorie de la croissance endogène. En effet, cherchent à endogénéiser le résidu du modèle de Solow. Désormais, la croissance s’explique par l’innovation et la production des idées.

129 L’introduction de rendements croissants

L’émergence et le développement de la croissance endogène ont nécessité de dépasser le cadre des modèles néoclassiques, c’est-à-dire de la concurrence pure et parfaite. L’économie de l’innovation et des idées est une économie de biens non rivaux, en partie exclusifs grâce aux brevets. Elle induit donc des externalités positives et des rendements croissants. Les rendements croissants de l’économie des idées impliquent que le coût moyen de production décroît avec la quantité produite. L’idée ne sera donc produite que si le prix est supérieur au coût marginal, c’est-à-dire que s’il y a une concurrence imparfaite.

Les théoriciens de la croissance se sont inspirés des travaux de l’économie industrielle (Loury, 1979; Dasgupta, et al., 1980; Lee, et al., 1980) pour introduire ces problématiques d’externalités et de positions de monopole.

Les modèles de croissance endogène fondent l’émergence de la croissance d’une part sur les choix des agents économiques, choix relatifs à l’accumulation des facteurs propices à l’impulsion de gains de productivité, et d’autre part sur la non-décroissance de la productivité au niveau agrégé, grâce notamment à la prise en compte d’externalités. Les rendements marginaux décroissants du capital sont compensés donc par l’existence d’externalités positives liées d’une part à l’accumulation de facteurs tels que le capital humain, les infrastructures publiques (modèle à capital endogène), et d’autre part à l’innovation et la recherche (modèle à innovation endogène) (Crafts, 1996).

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Figure 29 : Les différents courants de pensée en théorie de la croissance

Source : Auteur

Les modèles à capital endogène

La caractéristique générale des modèles à capital endogène est la présence de rendement constant ou croissant du facteur qui peut être accumulé et d’où provient la croissance (Lucas, 1988; Rebelo, 1991). Ces modèles peuvent être séparés en deux groupes : ceux démontrant que l’investissement crée des externalités telles que les investissements en capital public ou en capital humain, et ceux qui relient le progrès technique aux externalités d’apprentissage.

La littérature économique a depuis longtemps reconnu que l’investissement dans le facteur travail afin d’en améliorer la qualité joue un rôle essentiel dans le processus de croissance. Les économistes classiques (Smith, 1776; Ricardo, 1817) ont déjà mis en évidence l’importance de la qualité de la main-d’œuvre dans la compétitivité. Cette notion de qualité du travailleur est remise en avant par les travaux de Schultz (1961) et de Becker (1964). Ces derniers soulignent que les connaissances acquises par les individus — le capital humain — jouent un rôle crucial dans la société.

Uzawa (1965) et Lucas (1988) modélisent la relation entre croissance économique et capital humain. Ce dernier montre que l’accroissement du

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niveau de qualification de la population active est un déterminant essentiel de la croissance.

Parallèlement, Barro (1990) s’est intéressé au rôle des dépenses d’investissement opéré par l’État et les collectivités dans la croissance. Ces investissements en capital public créent une externalité positive, en permettant de rendre le capital privé plus productif et ainsi d’éviter que sa productivité marginale s’annule progressivement.

La croissance par l’accumulation des connaissances

Le deuxième groupe de modèles à capital endogène fonde la croissance sur l’accumulation des connaissances dans l’entreprise et ses retombées sur la production. L’accumulation d’expérience par la pratique permet d’améliorer la productivité du travail et ainsi d’accroître la production. C’est ce que l’on appelle l’apprentissage par la pratique (« learning by doing »). Arrow (1962) et Sheshinski (1967) ont été les premiers à proposer des modèles décrivant ce phénomène. S’inspirant des travaux d’Arrow, Romer (1986) développe un modèle à rendement croissant dans lequel la croissance résulte de l’accumulation endogène de connaissances. Ainsi, c’est l’effet du stock de connaissances qui détermine le niveau de productivité.

Les modèles à innovation endogène : le progrès technique par l’innovation

« Our knowledge of economic history, of what production looked like 100 year ago, and of current events convinces us beyond any doubt that discovery, invention, and innovation are of overwhelming importance in economic growth » (Romer 1994).

Les modèles à innovation endogène ont été développés par Romer (1978, 1990), Aghion et Howitt (1992) et Grossman et Helpman (1991). Ils formalisent l’idée que le rythme du progrès technologique est déterminé par les forces qui sont internes au système économique (Howitt, 2007). Ces auteurs mettent notamment en avant l’innovation comme l’un des principaux canaux de transmission de la croissance.

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Comme l’explique Aghion (2012), trois grandes idées sont à la base de ces nouvelles théories de la croissance. Tout d’abord, le développement économique est principalement stimulé par le taux d’innovation technologique, sous forme de nouveaux produits, de nouvelles méthodes et de nouvelles façons d’organiser les processus de production. Deuxièmement, la plupart des innovations découlent des activités des entrepreneurs ou d’investissements en recherche et développement (R&D). Enfin, la motivation à investir dans l’innovation est elle-même influencée par l’environnement économique, c’est-à-dire des politiques en matière de concurrence, de propriété intellectuelle, commerce international, etc.

L’innovation peut être horizontale ou verticale. Cela signifie que, dans le premier cas, l’innovation prend la forme de nouvelles variétés de produits (Romer, 1990), tandis que dans le second cas, l’innovation crée de nouveaux produits ou technologies, rendant obsolètes les produits ou technologies anciennes (Aghion, et al., 1998; Grossman, et al., 1991; Segerstrom, 1991) Les critiques des modèles à innovation endogène

Cette nouvelle vague de travaux ne s’est pas faite sans critique. Solow (1994) par exemple insiste sur le côté autoséducteur des modélisations et des hypothèses avancées. D’autres mettent en évidence l’existence de rendement décroissant dans le secteur de R&D, innover devenant de plus en plus difficile au cours du temps (Segerstrom, 2000). Barro (2012) interpelle également sur la difficulté de la validation empirique de la relation entre dépenses en R&D et

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