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L’empreinte du roman graphique sur les intelligences multiples et spécifiques

Dans le document Le roman graphique (Page 120-123)

À cette époque caractérisée par l’hypertechnicité, l’émiettement des connaissances et la spécialisation à outrance, il s’agit pour le docteur Irampour9 d’apprendre à construire une « synthèse pédagogique » sur la base de données scientifiques. Il est question pour lui de penser un enseignement qui soit le plus naturel possible. Il donne trois conditions pour la réussite d’une formation de synthèse :

- La capacité pédagogique de réunir, d’harmoniser et d’organiser les connaissances, de partager avec les étudiants et de mobiliser les esprits autour des problèmes essentiels. - La maitrise par les enseignants des connaissances diversifiées indispensables à la

construction de synthèse.

- Des recherches et expériences acquises sur le terrain.

Dans le domaine de l’affect, l’esprit est mobilisé et est davantage appelé à s’exprimer. Nous pensons que le fait de ne pas se focaliser sur la possibilité de produire des réponses erronées pourrait développer la créativité de la pensée, suscitant alors la production langagière.

L’enseignant peut intervenir en reformulant, ou en faisant reformuler tout ce qui est échangé en classe. Enclencher la parole des étudiants est un rituel à adopter pour chaque séance afin de développer des compétences multiples ainsi que la créativité de leur pensée en matière de

8 Cf. CBE-Life Sciences Education Vol. 10, Fall 2011.

9 Cyrus Irampour, Médecin, Psychiatre, Docteur en psychologie et en philosophie, président de l’université européenne des sciences et ressources humaines, ancien directeur d’enseignement à l’Université de Paris Nord a travaillé sur l’intelligibilité en libérant l’intuition propre des étudiants.

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réflexion et d’interprétation. Nous rejoignons ainsi la démarche « Project Zéro »10 du groupe de recherche de Harvard University qui vise à consolider la capacité de réflexion et d’interprétation chez les apprenants dans le but de les voir développer leurs compétences orales. Artful Thinking11 qui s’inscrit dans le Projet Zéro, aide les enseignants qui utilisent des œuvres d’art visuelles ainsi que la musique de manière à renforcer la réflexion des apprenants. Les objectifs de ce programme sont d’aider les enseignants à créer des liens entre des œuvres d’art visuelles et le programme d’études, ainsi que d’aider les enseignants à utiliser une forme artistique comme force pour développer l’organisation des pensées des apprenants. Artful

Thinking Palette composée de six pensées qui renforcent les comportements intellectuels des

apprenants, nous parait appropriée à notre travail de recherche. Il s’agit pour l’apprenant de raisonner, d’explorer des points de vue, de mettre en avant la complexité, d’interroger et de faire des recherches, d’observer et de décrire, de comparer et d’établir des liens, comme l’indique la palette ci-dessous.

Figure 2 : Artuful Thiking palette, http://pzartfulthinking.org/?page_id=2

10 Le Projet Zéro fut fondé par le philosophe Nelson Goodman à Harvard Graduate School of Education en 1967. C’est un solide programme de recherche qui s’est élargi pour inclure les enquêtes sur la nature de l’intelligence, la compréhension, la pensée, la créativité, la pensée interdisciplinaire et interculturelle ainsi que l’éthique. Il se déroule à l’échelle nationale et internationale où la grande partie de la recherche se produit dans les écoles, les entreprises, etc. en proposant des symposiums et des ateliers.

11 Le programme Artful Thinking a deux grands objectifs : celui d’aider les enseignants à créer des connexions entre des œuvres et des sujets scolaires, et celui d’aider les enseignants à utiliser une œuvre artistique pour développer l’organisation de la pensée des apprenants.

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Tous les chercheurs qui ont travaillé sur le roman graphique s’accordent à décrire son empreinte perceptible sur les intelligences multiples et spécifiques des lecteurs (C.W. Chun, 2009).

C.W. Chun (2009) a synthétisé leurs propos communs en les résumant comme suit :

Verbale/Linguistique : Que disent les personnages ou à quoi pensent-ils ? Il n’y a aucune limite à ce que les mots peuvent faire dans un roman graphique.

Visuelle/Spatiale : Les dessins des romans graphiques sont naturellement visuels. Placer les personnages dans des ensembles et des milieux encourage l’apprentissage spatial.

Mathématique : La bande dessinée et en particulier le roman graphique dans notre cas a une longue histoire avec le formalisme, qui a toujours impliqué des arrangements mathématiques de panneaux (disposition, taille, etc.).

Cinétique/ Corporelle : Que fait votre personnage ? Tous les dessinateurs à travers le monde attesteront les mouvements du corps et le dessin des expressions et traits de caractère. Les personnages ont souvent les expressions que nous pouvons avoir dans la réalité.

Interpersonnelle : Quels sont les personnages avec lesquels vous sympathisez ? Il y a des jeux de collaboration (pour comprendre l’autre par exemple).

Intrapersonnelle : Quel est l’humour de votre personnage ? À quoi il/elle pense ? Le roman graphique est riche en matière exploration de soi.

Naturaliste : Où votre personnage est-il placé ? Exploration de ses environs naturels.

Musicale/Rythmique : Les romans graphiques sont une narration très rythmée. Il y a répétition des panneaux et histoires fictives qui en découlent.

Les romans graphiques) regorgent de matériaux langagiers. Les utiliser en mobilisant l’affectivité des apprenants qui est un pilier de la motivation, pourrait permettre de créer une communication authentiquement naturelle entre pairs.

S. Witzigmann (2008) déclare que

« Les actes de paroles se développent. Aussi minimes que soient les capacités linguistiques des apprenants, de tels actes de paroles (exprimer sa propre opinion, donner des signes

117 d’accord et de désaccord, confirmer et encourager les autres…) semblent toujours

possibles autour des productions artistiques. Les différentes approches de la discipline « art visuels » permettent de susciter des élocutions subjectives : l’individualité d’une œuvre permet à chaque apprenant d’y découvrir son propre accès. Se sentant ainsi touché, l’apprenant exprime son opinion positive ou négative et aborde un haut degré d’authenticité dans son propos. » (S. Witzigmann, 2008 : 193)

Pour S. Witzigmann (2008 : 189-196), exprimer sa propre opinion, ses ressentis, etc. serait possible pour l’apprenant s’il est exposé à une forme d’« art visuel » et ce, en déployant ses propres moyens linguistiques qui le rapprocheraient le plus possible d’une authenticité recherchée dans la production orale.

Dans le document Le roman graphique (Page 120-123)