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CHAPITRE 2: LA CONSTRUCTION DE L’ÉTAT MODERNE

2.3 Les caractéristiques du modèle de l’État moderne

2.3.2 L’affirmation du principe de souveraineté

Dans Le Prince, Machiavel oriente davantage sa réflexion sur l’émergence d’un monarque unique et absolu qui institue et défend, avec ses ressources propres, un État sur un territoire. De ce point de vue, il n’a pas clairement théorisé dans son œuvre, comme le rappelle Simone Goyard-Fabre, le principe de souveraineté89. C’est plutôt des auteurs comme

Bodin, Loyseau et Hobbes qui s’y sont consacrés de manière plus particulière. Pour ces auteurs en effet, la souveraineté est fondamentalement indissociable de l’État; de fait, elle constitue même l’autre nom de l’État90, de sorte que sans souveraineté aucun État ne pourrait

subsister. Dans cette section, on examinera ainsi succinctement, l’une après l’autre, les pensées politiques de Bodin, de Loyseau et de Hobbes pour mettre en évidence la centralité du principe de souveraineté au cœur même du modèle de l’État moderne.

Bodin est d’abord et avant tout un critique de Machiavel. Selon lui, la pensée politique de Machiavel n’est rien moins que destinée à apporter un puissant appui aux tyrans91; en ce

sens, pour Bodin, Machiavel conforte, dans ses travaux de politique, aussi bien l’injustice, la tyrannie que l’athéisme, dont l’impact sur la communauté politique ne peut être que délétère. Au rebours de la pensée politique de Machiavel, Bodin estime que, pour la stabilité de l’État, il est plutôt essentiel d’apporter sa caution aux bons et sages princes, c’est-à-dire, au sens strict du terme, aux monarques ou rois légitimes92, qu’il convient de distinguer radicalement

des tyrans93.

En revanche, comme Machiavel, Bodin n’entend pas suivre la voie platonicienne de la cité idéale (-428 à -348)94 ou celle de la cité utopiste de Thomas More (1478-1535)95. À

89 Simone Goyard-Fabre, L’État, figure moderne de la politique. Paris, Armand Colin, 1999, p. 10.

90 « Il n’y a pas d’État sans souveraineté, déclarent Jean Bodin, puis Charles Loyseau, puis Thomas Hobbes,

qui en fixent ainsi la schème critériologique». Simone Goyard-Fabre, Op.cit, p. 22.

91 Jean Bodin « Préface sur les six livres de la République» Les six livres de la République. Paris, Librairie

Générale Française, 1993, pp. 48-49.

92 Jean Bodin, Op. cit, 1993, p. 45.

93 Jean Bodin «Second Livre. Chapitre IV : De la monarchie tyrannique» Les six livres de la République. Paris,

Librairie Générale Française, 1993. pp. 212-213.

94 Platon, La République, Paris, Flammarion, 1966.

ce titre, il pense s’en tenir aux faits et montrer ce qu’est un État dans son acception la plus noble96. Cependant, en dépit de son attitude scientifique ou positiviste qui n’a d’égard que

pour les faits, Bodin ne tourne guère le dos aux considérations morales et religieuses. C’est pourquoi il définit l’État, pour reprendre le terme qu’il emploie généralement, comme «un droit gouvernement de plusieurs ménages, et de ce qui leur est commun, avec puissance souveraine97».

Il est intéressant de remarquer, de prime abord, que Bodin recourt aux ménages et surtout à l’image de la famille dans son effort d’intellection et de compréhension de l’État. Empiriquement, il estime, ce qui n’est du reste pas nouveau, que les familles ou les ménages constituent la base d’une communauté politique98, en quoi il est héritier de la pensée politique

classique. Mais au-delà de l’empiricité des ménages, il semble que l’image ou la métaphore de la famille ait une fonction normative dans la pensée politique de Bodin.

La famille, selon Bodin, est traditionnellement le lieu par excellence de la hiérarchie et du sens de l’obéissance; père, mère comme enfants y tiennent leur place et se doivent mutuellement obéissance si tant est que la famille voudrait se maintenir dans la stabilité. En conséquence, une famille où les différents membres perdent le sens de la hiérarchie est assurément exposée aux turpitudes et, si on n’y prend garde, à la division. En ce sens à travers la métaphore de la famille, on pourrait comprendre, toute proportion gardée, d’une part le présupposé philosophique de la pensée politique de Bodin et, d’autre part, pourquoi il prend finalement fait et cause pour la monarchie royale et pense en conséquence qu’un régime populaire ou démocratique est, de façon incontestable, politiquement au rebours de la métaphore de la famille au sens traditionnel du terme.

Mais à travers le choix qu’il fait de la monarchie absolue, Bodin apparaît surtout comme un théoricien du modèle de l’État moderne, comme on peut clairement l’apercevoir

96 Jean Bodin «Premier Livre. Chapitre I : Quelle est la fin principale de la République bien ordonnée» Les six

livres de la République. Paris, Librairie Générale Française, 1993. p. 61.

97 Jean Bodin, Op.cit, p. 57.

98 « La seconde partie de la définition de la République que nous avons posée, touche la famille, qui est la vraie

dans la définition qu’il donne de l’État. À cet égard, il énonce un certain nombre d’exigences normatives qu’une communauté devrait pouvoir remplir, de façon exhaustive, pour avoir tous les attributs d’un État. En l’espèce, estime-t-il, il faut au préalable entre autres que la communauté ait, de façon qualitative sur son territoire, une structure de commandement ou de gouvernement qui soit droite, c’est-à-dire qui édicte juridiquement les lois civiles auxquelles sont soumis les citoyens, les magistrats et les ministres subalternes99. Ensuite,

cette structure de commandement ou de gouvernement doit être porteuse d’un projet politique commun pour l’ensemble de la communauté100 mais aussi et surtout, ce qui est le plus

important aux yeux de Bodin, elle doit être, au final, dépendamment du régime politique, souveraine101.

Il insiste d’autant plus sur la souveraineté étatique qu’il pense qu’une communauté politique sans souveraineté, en dépit d’autres éléments constitutifs qu’elle pourrait avoir comme un gouvernement et un projet commun, ne saurait être considérée au sens strict comme un État102. Dans cette perspective, il énumère un certain nombre de pouvoirs par

lesquels on peut reconnaître la souveraineté d’un État et du monarque103. À titre illustratif, il

cite le pouvoir de faire et de casser les lois, le pouvoir de ne recevoir aucune loi de personne, de faire la guerre et de conclure les traités de paix, de rendre justice, et bien d’autres104. Il en

découle que, pour Bodin, la souveraineté est le fondement sans lequel un État ne pourrait exister; à cet égard, elle se confond, à strictement parler, à l’État. C’est pourquoi on ne peut donc pas à bon droit, selon lui, imaginer un État sans souveraineté. La souveraineté c’est l’État, et l’État c’est la souveraineté.

99 Jean Bodin, Op. cit, p. 120.

100 « Mais outre la souveraineté, il faut qu’il y ait quelque chose de commun, et de public […] car ce n’est pas

la République s’il n’y a rien de public». Jean Bodin, Idem, p. 70.

101 « La souveraineté est la puissance absolue et perpétuelle d’une République […] c’est-à-dire la plus grande

puissance de commander […] car celui est absolument souverain, qui ne reconnaît rien plus grand que soi après Dieu». Jean Bodin, Ibidem, p. 111-114.

102« […] aussi la République sans puissance souveraine, qui unit tous les membres et parties de celle-ci, et tous

les ménages, et collèges en un seul corps, n’est plus République» ». Jean Bodin, Op. cit, p. 68.

103 Une fois de plus, on peut noter ici le rapport étroit entre les caractéristiques du modèle de l’État et de la

monarchie absolue.

104 Voir à ce propos Jean Bodin « Premier Livre. Chapitre X : Des vraies marques de souveraineté» Les six

De son côté, Loyseau (1566-1627) s’est intéressé à la notion de seigneurie pour en extraire une signification claire. En ce sens, dans Le traité des Seigneuries, il touche à un point essentiel de la vie féodale: la figure centrale du seigneur. En effet, il va du constat que la seigneurie était, à son époque et aux époques antérieures, mal définie au point que c’est non seulement la possession mais encore et surtout la force ou l’usurpation qui en étaient la marque distinctive. En ce sens, un seigneur avait avantage sur un autre non pas toujours en raison d’un cadre légal bien défini mais à cause de sa force et de ses richesses. En conséquence, cette situation de fait a engendré des querelles interminables, des conflits multiples, des guerres entre seigneurs qui prétendaient avoir un droit égal de juridiction sur quoi que ce soit.

La tâche que se fixe donc Loyseau est de mettre fin à cette confusion autour de la seigneurie; à ce titre, il essaie de définir la seigneurie aussi bien dans sa dimension publique que dans sa dimension privée105. Il est ici important de noter que, dans cet effort de définition

et de distinction, Loyseau vise, en réalité, à fonder en raison un pouvoir suprême, absolu (détenu publiquement par un Prince souverain ou un Seigneur souverain) dont devrait dépendre l’orientation publique d’une société et auquel, par conséquent, devrait se soumettre d’autres dignitaires (les seigneurs subalternes) et membres de la société toute entière.

La thèse de Loyseau consiste donc dans l’idée qu’il ne peut y avoir sur l’étendue d’un même territoire plusieurs seigneurs qui auraient la prétention de jouir d’une même autorité publique. Bien au contraire, il ne doit y avoir qu’un seigneur souverain qui serait au-dessus de tous les autres qui doivent être considérés comme ses subalternes. C’est dans cette perspective que Loyseau a recours à la notion de souveraineté, grâce à laquelle il met en évidence que la seigneurie publique, contrairement à celle privée106, est attachée au sens strict

du terme à l’État, alors que celle privée n’est que la possession réelle des choses. De ce point

105 « […] il est bien raisonnable d’expliquer la seigneurie publique avant la privée » Charles Loyseau, Le traité

des seigneuries, Lyon, Compagnie de Libraires, 1701, p. 1.

de vue, la seigneurie publique apparaît comme l’autorité absolue et souveraine dont est investi le prince souverain ou le monarque à l’intérieur d’un État107.

Il convient de souligner que, selon Loyseau, la seigneurie publique ou l’autorité publique suprême et absolue qui n’est rien d’autre que la souveraineté est ce qui constitue même l’être de l’État. Encore une fois, on peut ici voir à l’œuvre le lien entre la monarchie absolue et les caractéristiques du modèle de l’État moderne. Sans la souveraineté ou seigneurie publique, pour reprendre la formule de Loyseau, il ne peut y avoir d’État. Comme Bodin, Loyseau en indique d’ailleurs les marques distinctives. Il cite, par exemple, le pouvoir de faire les lois, de nommer les officiers ou administrateurs, d’arbitrer la paix et la guerre, de rendre justice et d’émettre la monnaie. Et pour montrer l’importance de la souveraineté comme ce à partir de quoi un État acquiert une existence institutionnellement indépendante, il écrit:

Cette souveraineté est la propre seigneurie de l’État […] la souveraineté est du tout inséparable de l’État, duquel si elle estoit ostée ce ne serait plus un estat, et celui qui l’auroit, auroit l’État, en tant qu’il aurait la seigneurie souveraine […] Car enfin la souveraineté est la forme qui donne l’estre à l’Estat, mesme l’Estat et la souveraineté prise in concreto, sont synonymes et l’État est ainsi appelé, parce que la souveraineté est le comble et la période de la puissance, où il faut que l’Estat s’arreste et s’establisse108.

Dans la même perspective, mais avec un style tout à fait différent, Hobbes (1588- 1679) accordera également dans ses travaux une place particulière à la réflexion sur la souveraineté. Dans une approche propre aux philosophes de son temps, il estime que, pour mieux connaître les principes de politique, il est d’abord et avant tout important de comprendre la nature humaine109. À cet égard, Hobbes s’efforcera de déduire, de façon

mécaniste110, de la nature humaine les principes censés encadrer les relations entre individus

107 «Or d’autant que la souveraineté reluit plus parfaitement en la Monarchie qu’en la Démocratie ou

Aristocratie, aussi que je n’entends traiter que des dignités de notre France Monarchique ». Charles Loyseau,

Idem, p. 8.

108 Charles Loyseau, Op. cit, p. 8.

109 Thomas Hobbes. « Chapitre I : Nature de l’homme composée des facultés du corps et de celles de l’esprit»

De la nature humaine. Traduction du baron d’Holbach. Paris, J. Vrin, 1991. p. 1, § 1.

110 Thomas Hobbes. « Préface» Le citoyen ou les fondements de la politique. Traduction de Samuel Sorbière.

à l’intérieur des limites d’un État. La nature humaine, Hobbes la dépeint en ayant, en effet, recours à la fiction de l’état de nature.

À l’état de nature, tente-t-il de montrer, les hommes sont, d’une part, égaux; ils bénéficient, à quelques distinctions près, des mêmes facultés intellectuelles et physiques. De sorte que tous peuvent, en fait, prétendre jouir de quoi que ce soit111. D’autre part, les hommes

s’y trouvent dans une liberté naturelle telle qu’ils ne sont soumis à aucun pouvoir commun capable de régler les différends qui peuvent les opposer les uns aux les autres112.

Il est aussi indispensable de noter que, pour Hobbes, d’autres caractéristiques de la nature humaine entrent en jeu à côté de celles de liberté et d’égalité. Il s’agit, en l’espèce, de deux caractéristiques sur lesquelles il insiste tant: d’un côté, la convoitise naturelle qui porte les hommes à satisfaire, pour des raisons de conservation de soi, leurs besoins, même au détriment de leurs semblables; et de l’autre, la raison naturelle qui les porte non pas, comme on pourrait s’y attendre, vers les autres, mais à chercher les voies et moyens pour éviter d’être à leur merci. Ainsi, la nature humaine, telle que la présente Hobbes, est moins focalisée sur les relations pacifiques entre hommes que sur la recherche égocentrique de la conservation de soi, savamment orchestrée (parce que les hommes utilisent la ruse et la raison) aux dépens des autres. De ce point de vue, Hobbes en infère que, à l’état de nature, les hommes sont en perpétuelle guerre les uns contre les autres, par quoi il entend non seulement des combats violents à proprement parler mais aussi et surtout la tendance lourde à se considérer en ennemis, qui les met en garde les uns contre les autres.

En revanche, loin de satisfaire les hommes qui sont, du reste, des êtres rationnels, l’état de nature n’est que misère et calamiteuse: c’est pourquoi, usant de leur raison naturelle productrice également de lois ou préceptes moraux, les hommes à l’état de nature décident,

111 Thomas Hobbes. «Chapitre XIII : De la condition naturelle des hommes en ce qui concerne leur félicité et

leur misère» Léviathan ; traité de la matière, de la forme et du pouvoir de la république ecclésiastique et civile. Traduit de l’anglais, annoté et comparé avec le texte latin par François Tricaud. Paris, Sirey, 1971, pp. 121-122.

112 Thomas Hobbes. « Section I : La liberté, Chapitre I : De l’état des hommes hors de la société civile» Du

citoyen. Principes fondamentaux de la philosophie de l’État ; suivi de Léviathan (chapitre XVI et XVII). Paris,

aux fins de mieux se conserver, d’instituer les corps politiques que sont les États113. Il en

résulte que les hommes d’après Hobbes sont des êtres rationnels et calculateurs. Ils savent, en effet, utiliser à la fois leurs passions et leur sens moral (dont ils usent très rarement à l’état de nature à cause des circonstances belligènes et qui est indissociable, pour Hobbes, de la raison instrumentale) pour échapper aux misères de l’état de nature114. En ce sens, ils

parviennent à mettre en place avec succès des corps politiques ou des États.

Dans ce contexte, l’État chez Hobbes est un artifice, un instrument, mieux une machine, de type contractuel dont les hommes conçoivent d’abord l’épure; ensuite ils en fabriquent les rouages et enfin en usent pour leur conservation. Il est l’avènement de la paix et de la sécurité, parmi les hommes qui, autrefois, étaient égarés dans l’insécurité de l’état de nature. Dit autrement, contrairement à l’état de nature qui est une guerre de tous contre tous au sens particulier où l’entend Hobbes, l’État est bien plutôt la forme d’organisation des rapports entre individus à l’intérieur de laquelle la paix et la tranquillité publique reçoivent l’expression la plus éclatante. C’est d’ailleurs pourquoi, selon Hobbes, c’est seulement à l’intérieur de l’État que les hommes peuvent jouir de la sûreté et se conserver. En conséquence, l’État chez Hobbes représente, d’un point de vue domestique, une fabrique de paix, un havre de tranquillité, de sûreté et de conservation mutuelle115.

113 Thomas Hobbes. «Section II: L’empire, Chapitre X: Comparaison des trois sortes de gouvernement et des

incommodités qui se rencontrent en chaque espèce» Du citoyen. Principes fondamentaux de la philosophie de

l’État ; suivi de Léviathan (chapitre XVI et XVII). Paris, Librairie Générale Française, 1996. pp. 167-168.

114 « Cela suffit comme description de la triste condition où l’homme est effectivement placé par la pure nature,

avec cependant la possibilité d’en sortir, possibilité qui réside partiellement dans les passions et partiellement dans sa raison. Les passions qui inclinent les hommes à la paix sont la crainte de la mort, le désir des choses nécessaires à une vie agréable, l’espoir de les obtenir par leur industrie. Et la raison suggère des clauses appropriées d’accord pacifique, sur lesquelles on peut amener les hommes à s’entendre. Ces clauses sont ce qu’on appelle en d’autres termes les lois naturelles». Thomas Hobbes. «Chapitre XIII : De la condition naturelle des hommes en ce qui concerne leur félicité et leur misère» Léviathan ; traité de la matière, de la forme et du

pouvoir de la république ecclésiastique et civile. Traduit de l’anglais, annoté et comparé avec le texte latin par

François Tricaud. Paris, Sirey, 1971. pp. 126-127.

115 «Et d’autant que les États ont été établis pour le bien de la paix et qu’on recherche la paix pour y trouver la

conservation de la vie en tous ses avantages, le prince qui se servirait de son autorité à autre fin que pour le salut de son peuple, conviendrait aux maximes de la tranquillité publique, c’est-à-dire à la loi de nature fondamentale». Thomas Hobbes. « Section II : L’empire, Chapitre XIII : Des devoirs de ceux qui exercent une puissance souveraine» Du citoyen. Principes fondamentaux de la philosophie de l’État ; suivi de Léviathan

Il est important de souligner, en fait de régime politique, que Hobbes a plus de préférence pour la monarchie absolue. Fidèle à la notion de souveraineté étatique116, il

accorde l’essentiel ou presque tous les pouvoirs au monarque et ne reconnaît pas aux citoyens un droit de résistance qui pourrait, à ses yeux si l’on n’y prend garde, dégénérer en anarchie, c’est-à-dire, en une régression vers l’état de nature. La philosophie politique de Hobbes s’est toujours voulue utile; rappelons ici que Hobbes intervient intellectuellement dans un contexte d’une Angleterre déchirée par des divisions intestines117. En l’espèce, croit-il, une monarchie

absolue soustraite aux turbulences d’un parlement en ébullition est la solution la plus adaptée pour ne pas paralyser d’une part le fonctionnement institutionnel de ce qu’il appelle la République (le Commonwealth) et, d’autre part, pour ne pas provoquer une instabilité politique dont les conséquences seront néfastes pour tous118. Même s’il a dû, au gré des

événements, réviser sa position au sujet des prérogatives du parlement, la monarchie absolue

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