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Grande-Bretagne

C. Historique de l’attribution stratigraphique et culturelle

10. King Arthur's Cave (Whitchurch, Herefordshire)

A. Localisation

C’est la plus grande grotte d’une série de cavités s’ouvrant dans une falaise sur la rive droite de la rivière Wye. Orientée au nord-ouest et creusée dans du calcaire carbonifère, elle présente deux entrées et est constituée de deux chambres principales (la « Main Chamber » et la « Second Chamber ») reliées par une galerie (le « Passage »). Devant la grotte, une large terrasse se situe 90 m au-dessus de la Wye (fig. 14.2 ; Campbell 1977 : 43-45 ; ApSimon et al. 1992 : 183).

B. Historique des fouilles

En 1870, des mineurs à la recherche de minerai ferreux découvrent des ossements pléistocènes. Les premières fouilles ont lieu en 1871 sous la direction de W.S. Symonds et W.B. Dawkins et il apparaît qu’une grande partie des dépôts sont perturbés. Cependant, dans les zones en place, deux couches de « Cave Earth », séparées par un niveau stalagmitique, ont

été rencontrées. Des éclats et des nucléus en silex et en chert accompagnés d’une faune pléistocène furent découverts (Evans 1872 : 475-476 ; Campbell 1977 : 43-45 ; ApSimon et al. 1992 : 188).

D’autres fouilles sont menées par la University of Bristol Spelaeological Society entre 1925 et 1929, sous la direction de T. Hewer et de H. Taylor. Celles de 1925 concernent le « Passage », les autres zones de la grotte et la terrasse sont explorées dans les années suivantes. L’abbé Breuil examine les artefacts en 1937.

En 1952, de nouvelles fouilles de l’UBSS, sous la direction de A.M. ApSimon et de H. Taylor, se concentrent dans la « Main Chamber » mais ne livreront pas de résultats concluants (ApSimon et al. 1992 : 188-190).

Récemment, de nouvelles recherches dirigées par N. Barton ont eu lieu, elles ont principalement rencontré des dépôts remaniés et ont livré des artefacts mésolithiques et du Paléolithique supérieur récent (Barton et al. 1997 ; Barton 2001).

C. Historique de l’interprétation stratigraphique et culturelle

D. Garrod (1926 : 76-79) reconnaît peu d’éléments typiques parmi l’industrie, excepté des fragments de pièces à dos interprétés comme des pointes de la Gravette. Elle note le peu de différences entre les artefacts provenant de la partie supérieure et de la partie inférieure des dépôts. Elle signale la découverte récente d’une pointe « protosolutréenne » qui confirme l’attribution de ce matériel à l’ « Aurignacien supérieur », âge déjà suspecté sur base de la faune.

À partir des données des fouilles des années 20, J. Campbell (1977 : 44-45) propose une révision de la stratigraphie. À l’intérieur de la grotte, les dépôts se présenteraient comme suit : - « Cave Earth » supérieur : dépôt rougeâtre avec éboulis tranchants contenant les pièces du Early Upper Palaeolithic ;

- sable rouge supérieur, stérile ;

- « Cave Earth » inférieur : dépôt rougeâtre avec lentilles de concrétions stalagmitiques, artefacts probablement paléolithiques moyen ;

- stalagmite ;

- limon rouge inférieur, stérile ; - limon jaune inférieur, stérile ;

Il ne classe dans cet Early Upper Palaeolithic qu’un seul fragment de pointe foliacée laminaire et y ajoute au moins une dizaine d’artefacts lithiques ayant été détruits durant la Seconde Guerre mondiale mais sans en donner de description. Il reprend l’information selon laquelle la pointe foliacée était associée à un foyer (Campbell 1977 : 146).

Plus d’informations sont livrées par A.M. ApSimon et al. (1992). Le fragment de pointe de Jerzmanowice a été découvert dans le « Passage » lors des fouilles des années 20. Trois couches peuvent être définies dans cette zone :

- « Unit 1 » : débris de surface, environ 10 cm d’épaisseur ;

- « Unit 3e » : limon sableux brun grisâtre comprenant des fragments de calcaire anguleux, d’une épaisseur de 45 à 100 cm. La faune comprise dans cette couche correspond à une occupation par l’hyène lors du « Middle Devensian », c’est-à-dire l’Interpléniglaciaire (ApSimon et al. 1992 : 213). De nombreux ossements portent en effet les traces de l’action de ce carnivore. Les espèces présentes sont, outre l’hyène, l’ours, le mammouth, le rhinocéros laineux, le cheval, le cerf rouge, le renne, le lièvre et le mouton (uniquement dans les dix premiers centimètres pour ce dernier). Dans la partie inférieure de cette couche (« Unit 3e.2 »), un foyer a été découvert, d’une surface de 1,2 x 1,5 m, sur 2,5 cm d’épaisseur. Cinquante-quatre artefacts proviennent de cette couche ; parmi lesquelles se trouve le fragment de pointe de Jerzmanowice. Mais cet ensemble comprend également des pièces d’allure plus récente (Mésolithique et Paléolithique final). Par ailleurs, des fragments de poterie romaine ont également été découverts dans ce niveau, confirmant la perturbation des dépôts (Idem : 224) ; - « Unit 3f » : limon rougeâtre infiltré dans les crevasses de la roche en place.

Malgré l’aspect manifestement perturbé des dépôts, les auteurs considèrent que l’on a un foyer en place, auquel se rattache la pointe de Jerzmanowice, occupation correspondant à une halte de chasse qui aurait précédé la fréquentation de cette zone par les hyènes (Idem : 227).

Des datations ont été réalisées sur des ossements provenant de la terrasse (Hedges et al. 1989 : 212) et ne sont donc pas rattachées au dépôt ayant livré le fragment de pointe de Jerzmanowice. Le Paléolithique supérieur récent a été daté de 12.250 ± 100 B.P. (Barton 2001).

Par ailleurs, de l’Aurignacien est identifié dans le matériel provenant de l’« unit 2d » de la terrasse et deux éclats sont classés dans le Paléolithique moyen (ApSimon et al. 1992). Cette dernière attribution chronologique sera démentie par la suite, il s’agit, en fait, d’éclats d’avivage de plan de frappe de nucléus à lame (ApSimon 2003 ; Jacobi 2003).

D. Description du matériel

Un seul artefact est attribuable au LRJ, il s’agit d’un court fragment proximal de pointe de Jerzmanowice, de ca. 3,5 cm de longueur portant des retouches proximales ventrales envahissantes et dont les bords sont ébréchés (fig. 15.1).

E. Conclusion

Cette grotte a donc livré un fragment de pointe de Jerzmanowice trouvé dans un dépôt manifestement perturbé contenant notamment de la poterie romaine et des pièces mésolithiques et du Paléolithique supérieur final. Par ailleurs, la faune associée est liée à une occupation de la grotte par les hyènes. Il n’est pas possible de raccorder cette couche du « Passage » à celles datées de la terrasse, qui sont, elles aussi, perturbées. L’idée selon laquelle la pointe foliacée serait liée au foyer proche est une hypothèse gratuite.

S’il n’y a pas de Paléolithique moyen, la présence d’Aurignacien n’est pas convaincante non plus. Elle se base sur un grattoir (à épaulement ?) sur éclat et sur un burin dièdre venant d’une couche ayant livré des pièces du Paléolithique supérieur récent. Ces pièces sont loin d’être typologiquement caractéristiques (fig. 146.3 et 4) et ne semblent pas suffisantes pour parler d’une occupation aurignacienne dans cette grotte.