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ESSAI DE SYNTHÈSE

2. Caractère et répartition géographique des ensembles

Dans le cadre de cette synthèse, 36 sites ont été retenus et 21 ont été rejetés du LRJ (Carte 1). Parmi ces ensembles rejetés, il s’agit parfois d’attributions manifestement erronées, parfois de sites douteux pouvant être LRJ mais dont l’attribution est trop incertaine. Ces derniers sont laissés de côté car cette synthèse cherche à s’établir sur les bases les plus rigoureuses afin de ne pas être faussée et d’affaiblir la validité des comparaisons qui seront proposées par la suite. Ces sites rejetés sont des « ensembles » très pauvres, il s’agit le plus souvent de pièces isolées, généralement sans contexte stratigraphique précis et se situant dans des régions où d’autres ensembles rattachés au LRJ sont présents. Leur rejet ne modifie donc ni la répartition géographique, ni la chronologie, ni les caractéristiques typologiques et technologiques globales du LRJ.

Le terme « site » désigne ici des réalités très différentes (fig. 116). Il s’agit parfois d’un assemblage homogène découvert dans un horizon clairement défini (même s’il cela peut, en fait, correspondre à une succession de « passages » plus qu’à une occupation unique). Cela peut concerner des sites en plein air (p. ex., Glaston) ou des sites en grotte (p. ex., Ranis 2). Cependant, les ensembles stratifiés et homogènes sont largement minoritaires ; bien souvent ils consistent en une partie d’une industrie stratifiée hétérogène, issue d’un mélange dû aux processus géologiques et taphonomiques et/ou aux méthodes de fouilles (p. ex., Spy). Certains « sites » ne correspondent, en fait, qu’à des pièces isolées, découvertes en stratigraphie (p. ex., White Colne Pit I) ou en surface (p. ex., Warren Hill).

Ainsi, les sites en grotte sont-ils au nombre de 19 ; 16 sont en plein air, 13 dans des dépôts stratifiés et il y a quatre pièces en surface. Vingt et un de ces sites sont, en fait, des pièces isolées et neuf ne comprennent qu’entre un et dix artefacts. Seuls quatre sont plus « riches », dont le site de Glaston, où l’ensemble consiste surtout en esquilles et déchets.

Il est difficile d’évaluer la richesse réelle de la plupart de ces assemblages. Les industries mélangées conduisent à un isolement des seules pièces typologiquement caractéristiques (pointes foliacées) et donc forcément à la création d’ensembles appauvris et classés comme halte de chasse. Cependant, les sites où ces problèmes ne se posent pas n’ont pas livré d’ensembles très abondants : 63 artefacts à Ranis 2, 277 pour les couches 6 à 4 de la grotte Nietoperzowa, 182 pour Glaston (dont 177 esquilles et petits éclats), 141 pour Beedings. Au final, seul ce dernier site, par l’importance des déchets de débitage et surtout par une typologie plus variée (grattoirs, burins, …), peut être considéré comme n’étant pas une simple halte de chasse.

Vingt-huit de ces sites sont en Grande-Bretagne, répartis de manière homogène dans l’Ouest, le centre et l’Est (Carte 1). Dans le bassin mosan belge, les grottes de Spy et de Goyet ont livré des artefacts rattachés au LRJ. Contrairement à ce qui avait été hypothétiquement proposé (Flas 2002 : 26), le territoire luxembourgeois n’a fourni aucune pièce suffisamment caractéristique pour y être intégré. Deux sites sont présents en Allemagne : Ranis en Thuringe et Zwergloch dans le Nord de la Bavière. Dans le sud de la Pologne, trois sites ont été retenus : deux pièces isolées provenant des grottes de Koziarnia et Puchacza Skała et les ensembles plus riches de la grotte Nietoperzowa. On peut donc remarquer une présence nettement plus forte des ensembles LRJ en Grande-Bretagne par rapport à la partie continentale de la plaine septentrionale. Cette différence ne s’explique pas par une histoire de recherche moins longue ou par un nombre de sites paléolithiques moins importants. Le cas du bassin mosan est significatif à cet égard : malgré plus d’un siècle de fouilles dans plusieurs dizaines de grottes, seules deux ont livré des artefacts attribués au LRJ. On pourrait dire la même chose du bassin moyen du Rhin ou du Jura cracovien.

La présence de pointes foliacées laminaires en Bohême, dans la grotte Nad Kačákem, et en Moravie, avec principalement les collections de surface de Dubicko, d’Ondratice, et de Líšeň, ainsi que celle de la grotte Pekárna, doit être discutée dans le cadre de la problématique des rapports entre le LRJ, le Szélétien et le Bohunicien (cf. infra). Ces pièces ne sont donc pas prises en compte, dans un premier temps, et leur statut sera discuté par la suite. Il en est de même pour l’importante collection de Kostenki 8-I (cf. infra).

Outre les sites qui ont été présentés et discutés dans la première partie, W. Chmielewski (1961 : 45-47) avait également mentionné quelques artefacts d’origines diverses qu’il rapprochait hypothétiquement du Jerzmanowicien. Il s’agit de pièces provenant de Privolnoie (ou Solo Voiskovie) et de Vasilievka-point III dans le bassin du Dniepr (fig. 117), ainsi que d’un ensemble issu de la grotte de Sakajiia dans le Caucase. En Moravie, il mentionne des pièces foliacées à Předmost et à Tišnova. Les illustrations et la description qu’il donne de ces pièces montrent des artefacts peu caractéristiques. Elles ont un contexte stratigraphique et chronologique flou et une répartition géographique très large, parfois éloignée des ensembles rattachés au LRJ. Il est difficile de comprendre pourquoi W. Chmielewski a proposé d’y voir de potentiels ensembles jerzmanowiciens, si ce n’est pour donner une base plus substantielle à une « civilisation » qui ne comportait que quelques sites. Il ne mentionne d’ailleurs plus ces pièces dans ses publications ultérieures (Chmielewski 1972, 1975a). Il n’y a donc aucune raison de les retenir ici.