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Le jeux des faces : objet pédagogique pour la conception de serious game

Dans le document ACTES de CONFERENCE INTERNATIONALE E-VIRTUOSES (Page 110-112)

Pierre-André Caron, laboratoire CIREL, université Lille1

pierre-andre.caron@univ-lille1.fr

1. Introduction

Les Serious Game adaptés à l'enseignement [Prenski, 2000], [Johnson, 2005], [Alvarez, 2007], [Alvarez et al 2010], [Djaouti 2011] sont l'objet de nombreuses définitions qui s'accordent sur le fait que les dimensions ludiques, informationnelles et communicationnelles doivent s'articuler au sein de ces jeux aux dimensions pédagogiques, didactiques, et instrumentales pour en faire des instruments favorisant l'apprentissage. Nos précédentes études,[Caron et al 2005], [Caron 2007] [Caron & Varga 2009], [Caron et al 2010] ont par ailleurs montré, la place en enseignement (présentiel hybride ou elearning) que les enseignants artisans et bricoleur tenaient lors de la conception dans l'usage des dispositifs qu'ils utilisaient. Or, non seulement, le processus de conception d'un Serious Game éducatif laisse peu de place à la conception participative des usagers [Flichy 1995] et des enseignants en particulier [Marfisi-Shottman 2009] mais également il relègue à un deuxième temps de conception les considérations pédagogiques [Marne et al 2011]. Cette particularité est due au caractère industriel du processus de production [Tran et al, 2010, p2] qui privilégie l'usage de plate-forme de jeu générique, et des patrons de conception [Marne et al 2011]. La place des enseignant et plus généralement des considérations pédagogique sont alors plus à trouver du côté des détournements dont les jeux font l'objet par les enseignants , ou dans l'usage que ces derniers font dans un cadre éducatif du concept d'usine à jeux [Sauvé 2010]. Pour notre part, nous étudions depuis plusieurs années la possibilité de favoriser, lors du processus initial de conception d'un jeu sérieux, la prise en compte de dimensions propres aux Sciences de l'éducation. Nous avons ainsi présenté dans le cadre de l'école CNRS Game Based Learning et des formations Game IN, pôle image Nord Pas-de-Calais, un objet pédagogique à six faces : le « didactical scenario »1. Cet objet met en parallèle les

premières phases de conception, en proposant une mise en relation de différents concepts propres au Sciences de l'éducation et à la conception du jeu vidéo. Dans la mise en œuvre que nous présentons, notre objet est utilisé pour la résolution d'une étude de cas élaborée dans le cadre du Master Ingénierie Pédagogique Multimédia de l'université Lille1, cette étude porte sur l'apprentissage de la sécurité routière chez les jeunes motocycliste.

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Dans cet article nous mettons en dialogue dans une première partie différents concepts propres au Sciences de l'éducation. Dans une deuxième partie nous présentons la mise en œuvre de notre objet pédagogique au travers l'usage d'un patron pédagogique de type « jigsaw » dans le cadre des présentations faites au GBL et à Game IN. La dernière partie propose une analyse des productions réalisées et conclue en présentant les pistes d'amélioration de notre objet.

2. Mise en relation de différents concepts

Pour aborder la problématique de la conception de jeux sérieux, adaptés ou non à l'enseignement, de nombreux auteurs ont proposé différentes approches. Une première repose sur la définition de patrons de conception. Le principal objectif des patrons de conception [Alexander et al 1977] est d'offrir aux concepteurs des cadres simples et génériques pouvant guider leur activité de conception. Les travaux de [Huynh-Kim-Bang et al 2010] présentent ainsi de tels patterns de conception. Une autre approche consiste à proposer une démarche itérative de conception (ou d'analyse) des jeux vidéo pour favoriser l'élaboration de scénario pédagogiques, [Mariais et al 2011]. Nos travaux à la fois prolongent et se démarquent de ces approches dans la mesure où d'une part nous nous intéressons aux capacités d'un cadre conceptuel à favoriser, comme le fait l'usage des patrons de conception, la conception collaborative et d'autre part nous nous intéressons à la mise en dialogue des concepts abordés plutôt qu'à la définition d'une hiérarchie de ces concepts au sein d'une démarche de conception. Contrairement aux approches décrites précédemment le champ conceptuel que nous adressons concerne essentiellement les dimensions éducatives du jeu sérieux en excluant les dimensions instrumentales ou psychologiques.

Notre approche repose sur la création d'un objet frontière permettant de favoriser le travail de conception et d'argumentation lors de la présentation du Game-Play du jeu. Un objet frontière au sens de Star et Grieseimer est un objet perçu et abordé par tous mais compris différemment par chacun [Star & Griesemer 1989]. Il permet de coordonner les perspectives des différentes composantes d'une communauté en définissant autour de lui un lieu d'échange favorisant la mise en place d'un processus de conception participative.

L'objet frontière que nous promouvons (un cube) présente sur chacune de ses faces un aspect du jeu. Les cinq

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premières faces présentent respectivement les cinq concepts suivants: « savoirs de références », « activité de références », « objectif d'apprentissage », « modélisation de la situation didactique », « évaluation de l'apprentissage ». Une dernière face du jeu est complétée par l'énoncé du « Gameplay » du jeu, défini par la tension entre liberté d’action (play) et règles strictes (game) d'un jeu. [Genvo 2006]

Les deux premières faces distinguent et relient les notions de Savoir et de Pratique par le terme Référence. La Référence est constituée par l'ensemble des contenus et de pratiques sociales qui servent à la modélisation des situations d'enseignement et d'apprentissage médiatisées par un artefact numérique. La notion de savoir de référence, se rapporte ainsi au « caractère institué (construit socialement et historiquement), objectivé (construction d’un système théorique, formalisation, etc.) dépersonnalisé et dé-contextualisé de la connaissance.» [Reuters & al, 2007]. La notion de Pratiques de référence [Martinand, 1989] suggère quant à elle que les pratiques sociales peuvent servir de référence à des activités scolaires: « les pratiques renvoient aux activités « réelles » d'un groupe social identifié, qui peut servir de référence pour la conception ou l'analyse d'activités scolaires » [ibib].

La transposition didactique abordée sur la troisième face de notre objet concerne alors autant les savoirs que les pratiques de références. « Un contenu de savoir ayant été désigné comme savoir à enseigner subit […] un ensemble de transformations adaptatives qui vont le rendre apte à prendre sa place parmi les objets d'enseignement. » [Chevallard, 1985]. Cette transposition didactique s'applique également à la transformation des pratiques de référence, « la transposition ne peut prendre directement des pratiques comme référence, du moins non sans un tamis de type théorique » [Joshua ; 1996]. Cette troisième face, « la modélisation des situations d'enseignement et d'apprentissage », finalise ainsi le processus de transposition didactique, et concerne les deux approches précédentes :

• Une première approche, centrée sur les savoirs, consistant à définir à partir des savoirs savants, les contenus d'enseignement (transposition didactique des savoirs). Cette première perspective exige de mener une approche didactique à caractère épistémologique permettant la caractérisation épistémologique du savoir visé, son histoire institutionnelle notamment dans le système d'enseignement au travers une analyse du curriculum, les obstacles épistémologiques et didactiques, les objectifs liés à son enseignement.

• Une deuxième approche, centrée sur l'activité, qui consiste à s’inspirer de la pratique sociale de référence pour proposer une ingénierie didactique professionnelle. Cette deuxième perspective exige de mener une analyse de l'activité professionnelle permettant d'identifier les concepts organisateurs, les buts, les

obstacles, les instruments, cette approche aussi exige que soit spécifié les objectifs liés à son enseignement.

La quatrième face aborde le concept d'objectif d'apprentissage. La pédagogie par objectifs trouve son origine dans le contexte théorique du béhaviourisme. Cette conception rejette la référence à la conscience. Elle postule qu’il faut se centrer sur les comportements observables et mesurables que l’apprentissage permet et que l’on peut produire n’importe quel apprentissage à condition d’utiliser les techniques adéquates. Un comportement observable est la manifestation externe d’une activité interne, il doit être perceptible par au moins l’un des cinq sens d'un observateur qui peut ainsi se rendre compte de l’activité réalisée. [Burns 1975]

Outre la notion de comportement observable, la pédagogie par objectifs s’articule autour de deux notions principales : l’objectif général et l’objectif spécifique [Burns 1975]

• L’objectif général est un énoncé d’intentions pédagogiques décrivant en terme de capacités de l’apprenant l’un des résultats escomptés d’une séquence d’apprentissage.

• L’objectif spécifique ou opérationnel est issu de la démultiplication d’un objectif général en autant d’énoncés rendus nécessaires pour que quatre exigences opérationnelles soient satisfaites :

• décrire de façon univoque le contenu de l’intention pédagogique

• décrire une activité de l’apprenant identifiable par un comportement observable

• mentionner les conditions dans lesquelles le comportement souhaité doit se manifester • indiquer à quel niveau doit se situer

l’activité terminale de l’apprenant et quels critères serviront à évaluer le résultat. La cinquième face de notre objet pédagogique concerne « l'évaluation ». Il nous faut dans un premier temps distinguer avec [De Ketele 1993] plusieurs formes d'évaluation. Si l'évaluation d'un Serious Game peut se concevoir, pour les institutions, dans une perspective d'évaluation de l'efficacité d'un dispositif de formation, paradigme décisionnel et économique dans la synthèse de Jean-Marie De Ketele ; nous nous concentrons, sur cette face, uniquement sur l'explicitation d'un cadre conceptuel permettant de comprendre la mise en œuvre de l'évaluation des apprentissages des étudiants. Les travaux de [Cardinet 1986] montrent qu'il nous faut abandonner l'espoir d'une évaluation absolue, docimologique, au profit d'une évaluation formative, mise à la disposition des étudiants et leur permettant d’évaluer les compétences qu'ils sont capables de mobiliser dans les activités suscitées par le Serious Game. Pour Jean Cardinet, l'évaluation ne peut se concevoir qu'à la première personne : « l'évaluation est l'apport d'information en retour sur le résultat des actions passées, qui permet au sujet d'adapter la suite de ses

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