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T ITRE V L A DÉTENTION PRÉVENTIVE

Dans le document Procédure pénale (Page 173-177)

§ 3 Les voies de recours contre les arrêts de la chambre des mises en accusation

T ITRE V L A DÉTENTION PRÉVENTIVE

CHAPITRE I

LE DROIT COMMUN DE LA DETENTION PREVENTIVE

SECTION 1 DEFINITION ET OBJECTIFS

La détention préventive est la privation de liberté que subit l’auteur présumé d’un crime ou d’un délit avant que les juridictions de fond aient statué de manière définitive sur sa culpabilité et, le cas échéant, sur la sanction à lui infliger499.

C’est une mesure exceptionnelle et provisoire dans la mesure où elle contrarie le principe de liberté et la présomption d’innocence de l’inculpé qui est garantie, notamment, par l’article 6, § 2 de la Convention européenne des droits de l’homme. La détention préventive doit donc « apparaître comme la solution ultime qui se justifie seulement lorsque toutes les autres options disponibles s’avèrent insuffisantes ».

La détention préventive vise un double but. D’une part, elle consiste à empêcher le délinquant de poursuivre l’accomplissement de ses desseins, de fuir, de faire disparaître le corps du délit ou les preuves ou encore de suborner ou menacer les témoins. D’autre part, elle vise à faciliter l’instruction en tenant l’intéressé à la disposition du magistrat instructeur.

SECTION 2 LE CADRE JURIDIQUE

La détention préventive est régie essentiellement par trois textes : - L’article 12 de la Constitution qui prévoit que :

La liberté individuelle est garantie.

Nul ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi, et dans la forme qu'elle prescrit. Hors le cas de flagrant délit, nul ne peut être arrêté qu'en vertu de l'ordonnance motivée du juge, qui doit être signifiée au moment de l'arrestation, ou au plus tard dans les vingt-quatre heures.

499La structure de ce Titre s’inspire largement de D. VANDERMEERSCH, Eléments de droit pénal et de procédure pénale, 4e éd., La Charte, 2012, pp. 643-687.

- L’article 5 de la Convention européenne des droits de l’homme qui dispose que :

1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales :

(…)

c) s’il a été arrêté et détenu en vue d’être conduit devant l’autorité judiciaire compétente, lorsqu’il y a des raisons plausibles de soupçonner qu’il a commis une infraction ou qu’il y a des motifs raisonnables de croire à la nécessité de l’empêcher de commettre une infraction ou de s’enfuir après l’accomplissement de celle-ci ;

(…)

2) Toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu’elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle.

3) Toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1.c du présent article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et a le droit d’être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure. La mise en liberté peut être subordonnée à une garantie assurant la comparution de l’intéressé à l’audience.

4) Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale.

5) Toute personne victime d’une arrestation ou d’une détention dans des conditions contraires aux dispositions de cet article a droit à réparation.

- La loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive (ci-après LDP).

SECTION 3 L’ARRESTATION JUDICIAIRE

L’arrestation judiciaire, qui est régie par les articles 1er et 2 de la loi du 20 juillet 1990

relative à la détention préventive, est la privation de liberté d’une personne à la suite de l’intervention de l’autorité pendant une durée maximale de 24 heures.

En ce qu’elle traduit le passage d’un état dynamique à une situation statique, l’arrestation apparaît comme une notion déterminée par des éléments de fait : « La perte de la liberté d’aller et de venir (…) est une question factuelle qui s’apprécie in concreto à la lumière des circonstances propres à chaque espèce ».

Le délai de garde à vue ne peut, comme nous l’avons souligné, excéder 24 heures, à moins que soit signifié, entre-temps, à la personne arrêtée un mandat d’amener, un mandat d’arrêt ou une ordonnance de prolongation du juge d’instruction.

Le magistrat instructeur, d’office ou sur réquisition du ministère public, peut en effet prolonger, à une seule reprise, le délai initial de privation de liberté de 24 heures (ou le délai de privation de liberté couvert par le mandat d’amener) d’une nouvelle durée de 24 heures maximum à compter de la signification de l’ordonnance de prolongation (art. 15bis loi 20 juillet 1990)500. Pour ce faire, il rend une ordonnance motivée qui mentionne les éléments justifiant l’ouverture d’un nouveau délai, à savoir les indices sérieux de culpabilité relatifs à un crime ou à un délit ou les circonstances particulières de l’espèce.

Cette ordonnance doit être signifiée dans le délai de 24 heures de l’arrestation ou de la signification du mandat d’amener, à défaut de quoi l’inculpé doit être remis en liberté.

Durant la nouvelle période de 24 heures, l’inculpé a le droit de se concerter une seconde fois confidentiellement avec son avocat pendant 30 minutes.

Bien que cet article 15bis ait toujours été justifié par le temps nécessaire à l’intervention de l’avocat501, elle n’impose pas au juge d’instruction de motiver son ordonnance sur la base de ce motif, puisqu’il lui suffit de constater l’existence d’indices sérieux de culpabilité et de mentionner les circonstances particulières de l’espèce. La prolongation du délai ne doit donc pas nécessairement être proportionnée à l’intervention de l’avocat. Dans son avis, la section législation du Conseil d’État ne s’est pas attardée sur ce point, tandis que le ministre de la Justice a appelé de ses vœux qu’il soit utilisé avec parcimonie et de manière exceptionnelle502. Plus

fondamentalement, jusqu’à ce que la Cour constitutionnelle ne se prononce, la constitutionnalité de cet article 15bis laissait plus d’un juriste sceptique : cette disposition ne viole-t-elle pas le délai

500Sur l’ordonnance de prolongation de la détention préventive, voy. C.C. n° 201/2011, 22 décembre 2011 ; Cass. (2e ch.), 22 janvier 2013, RG P.13.0068.N, N.C., 2013, p. 443, note J. HUYSMANS, Pas., 2013, p. 159, R.A.B.G., 2013, p. 477, note V. VEREECKE, R.W., 2012-2013, p. 1539, note B. DE SMET, T. Strafr., 2013, p. 117, note J. VAN GAEVER ; Cass. (2e ch.), 29 mai 2013, RG P.13.0893.F, Rev. dr. pén., 2013, p. 893 ; O. MICHIELS, « Brevet de constitutionnalité pour le délai de garde à vue de quarante-huit heures », J.T., 2012, pp. 92-94 ; J. DE CODT, « [Le délai d'arrestation] Le délai de vingt-quatre heures et sa prolongation », J.T., 2011, pp. 857-860 ; V. VEREECKE, « De verlenging van de aanvankelijke arrestatietermijn kan niet in alle omstandigheden », R.A.B.G., 2013, pp. 480-482 ; M.- A. BEERNAERT, « La loi Salduz: un premier nihil obstat de la Cour constitutionnelle », J.L.M.B., 2012, pp. 107-112 ;

M. COLETTE, « Bevel tot verlenging in Salduz-wet is grondwetconform, Juristenkrant, 2012, p. 1 ; C. CONINGS, « [Voorlopige hechtenis] Salduz-Wet: bevel tot verlenging », NjW, 2012, p. 139.

501 À partir du moment où le droit d’accès à un avocat dès la phase initiale des poursuites pénales a été évoqué, la question du prolongement du délai de garde à vue s’est imposée dans la mesure où certains ont craint que ce délai soit insuffisant pour permettre à l’avocat d’intervenir, à tout le moins dans certaines affaires complexes.

de garde à vue de vingt-quatre heures garanti par l’article 12 de la Constitution ? Dans un arrêt du 22 décembre 2011503, la Cour constitutionnelle a répondu par la négative.

SECTION 4 LE MANDAT D’AMENER

Le mandat d’amener est réglementé par les articles 3 à 15 de la loi du 20 juillet 1990504. Il s’agit de l’ordre, donné par le juge d’instruction aux agents de la force publique, d’amener devant lui la personne qu’il désigne, si nécessaire par la contrainte, afin de l’interroger, étant entendu que cette personne peut être :

- Un suspect, s’il y a des indices sérieux de culpabilité relatifs à un crime ou un délit et qu’il ne se trouve pas déjà en mesure d’être interrogé par le magistrat instructeur,

- Un témoin, s’il refuse de comparaître à la suite d’une citation qui lui a été donnée conformément à l’article 80 du Code d’instruction criminelle.

Le mandat d’amener est un titre de privation de liberté dans la mesure où l’individu qui en est la cible – suspect ou témoin – ne dispose plus, pendant un espace de temps déterminé, du choix d’aller et venir comme il l’entend.

Le mandat d’amener peut être utile à l’égard des personnes qui n’ont pas répondu aux convocations du juge d’instruction mais aussi à l’égard de celles qui ont été arrêtées dans un autre arrondissement que celui du magistrat instructeur en charge de l’enquête.

Le mandat d’amener doit être signé par le juge d’instruction qui le décerne et revêtu de son sceau. Il doit également être motivé et signifié à l’intéressé au plus tard dans les 24 heures de la privation effective de liberté, à défaut de quoi ce dernier est immédiatement remis en liberté.

Le mandat d’amener est exécuté lorsque la personne qui en est l’objet est mise à disposition du juge d’instruction, c’est-à-dire lorsque celui-ci est en mesure de l’interroger. Les droits à la concertation confidentielle et à l’assistance d’un avocat sont d’application.

503 Voy. M.-A. BEERNAERT,« La loi Salduz : un premier nihil obstat de la Cour constitutionnelle », J.L.M.B., 2012,p. 107 ; O. MICHIELS, « Brevet de constitutionnalité pour le délai de garde à vue de quarante-huit heures », J.T., 2012, pp. 92-94.

504H.-D. BOSLY, D. VANDERMEERSCH et M.-A. BEERNAERT, o.c., pp. 623-625 et 804 ; M. FRANCHIMONT, A.

Si la personne qui fait l’objet du mandat d’amener refuse d’y obéir ou tente de s’y soustraire, il peut être fait usage de la contrainte.

Le mandat d’amener couvre une période de privation de liberté de maximum 24 heures à compter de la privation de liberté en exécution du mandat ou de sa signification si l’inculpé était déjà privé de liberté (par exemple, dans un autre arrondissement). L’interrogatoire doit impérativement intervenir dans ce délai.

Il faut bien garder à l’esprit que, contrairement au mandat d’arrêt, le mandat d’amener n’est pas un titre de détention préventive, mais bien un titre de privation de liberté, puisqu’il n’a pas pour objectif de priver, dans la durée, un individu de sa liberté.

SECTION 5 LE MANDAT D’ARRET

Dans le document Procédure pénale (Page 173-177)