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Une interrogation reste en suspens, comment définir et qualifier ces conflits ? Quel cadre juridique est applicable ? Nous dresserons une analyse précise de la question dans le

B. Délimitation du cadre

20. Une interrogation reste en suspens, comment définir et qualifier ces conflits ? Quel cadre juridique est applicable ? Nous dresserons une analyse précise de la question dans le

corps de la thèse cependant, certains éléments peuvent être utiles à la compréhension des différents enjeux. Nous devons juridiquement statuer sur le type de conflit auquel nous faisons face dans notre étude. Se référant aux Conventions de Genève (1949 – art.2 Commun), nous utiliserons la notion de « conflit armé » et non de « guerre » qui semble plus que jamais polysémique et soumise à une dialectique banalisée.

80 Le sens de l’État importé correspond à la logique énoncée par B. Badie dans son ouvrage éponyme, il s’agit

d’une domination politique exercée par l’occident sur les « pays du sud ».

81 J. FERNANDEZ, Relations Internationales, op.cit., p.16.a. 82 Cité par J. FERNANDEZ, Idem., p.17.

Dans un premier temps, nous pourrions évoquer une situation de « conflit civil ». Selon M. Couston, « la notion de « guerre civile » provient d’une cohésion sociétale préexistante, d’une unité

politique et de frontières déjà délimitées. Unité à partir de laquelle et contre laquelle vont émerger :

ð Soit des divergences fortes sur le système politique et/ou économique ou religieux

ð Soit un séparatisme identitaire et un refus de vivre ensemble pour des raisons diverses Dans tous les cas, les acteurs de la guerre civile cherchent à conserver ou à gagner le pouvoir et à contrôler l’État (...) »83. D’aspect contemporain, il convient de nommer cette catégorie de conflits

asymétriques comme étant des « conflits armés non-internationaux ».

Pour ce, l’article 3 commun aux Conventions de Genève, le Protocole II de 1977 ou encore l’article 8 du statut de la CPI abordent cette dimension du conflit.

Mais une première lacune surgit à la lecture de l’article 3 Commun aux quatre Conventions, « (...) il s’agit d’un conflit ne présentant pas un caractère international, d’un conflit

territorialement localisé et d’un conflit entre « Parties » ». Tenant compte de l’évolution des

conflits régionaux, de leurs conséquences sur les États occidentaux, des ralliements djihadistes issus du monde entier, ou encore, des réponses militaires issues d’États étrangers ou de coalitions, ne sommes-nous pas en mesure de nous interroger sur la nature réelle de ces conflits ? Une lecture pleine de sens se doit de corréler la dimension juridique à l’évolution temporelle de ces luttes pour lesquelles l’ampleur et la définition n’est pas la même de l’instant T à l’instant T+1.

Autre limite, celle de la dimension territoriale. Nous sommes confrontés à des « hostilités transfrontalières entre États et des acteurs non-étatiques », ce qui selon M. Couston, n’est pas couvert par l’article 3. Nous prendrons point par point chacun des critères évoqués par ces instruments juridiques afin de déceler leurs capacités d’application.

Les fragilités des Conventions de Genève sont existantes. Les articles Communs 2 et 3, mais également l’article 1 du Protocole II ne définissent pas de manière explicite et encadrée la notion de conflit armé. La doctrine ou la jurisprudence permet alors de compléter ces lacunes. Pour ce, nous étudierons les dispositions entreprises par le CICR ou encore la Commission du Droit International.

1977, les conflits étudiés dans notre champ ne relèvent pas d’une lutte contre « la domination coloniale ». En effet, les trois notions clés introduites par le Protocole (« luttes anticoloniales, luttes contre une occupation étrangère, luttes contre un régime raciste ») ne semblent pas s’appliquer de manière naturelle. Cependant, il conviendra d’étudier si la notion de « lutte contre une occupation étrangère » n’est pas applicable au cas irakien. En effet, suite à la dissolution de l’armée irakienne en 2003, un nombre conséquent d’attaques issues de rebelles nationalistes, groupes terroristes et milices ont fait surface. L’armée du Mahdi s’est ainsi posée en principale force de résistance militaire à la coalition. Un socle semble unir chacune des définitions des conflits armés, la notion « d’intensité, d’ampleur et de prolongation », cependant, ces caractéristiques sont également lacunaires car elles ne relèvent que de l’appréciation discrétionnaire des juges.

In fine, nous démontrerons qu’une lecture judicieuse de ces conflits permet de les qualifier

de « conflits multidimensionnels ». Selon J. Flauss, il s’agit de conflits « qui présentent aussi

bien des traits de caractère internationaux qu’internes, soit parce qu’internes à l’origine, ils connaissent une internationalisation, soit à l’inverse parce qu’internationaux au départ, ils s’internalisent, soit encore parce que de par leur nature il n’est possible de les rattacher ni à la dimension interne ni à la dimension internationale »84.

L’étude de la jurisprudence du Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) (15 juillet 1999) nous éclaire sur la dimension du conflit interne internationalisé, « Un

conflit armé interne qui éclate sur un territoire d’un État peut devenir international ou, selon les circonstances, présenter parallèlement un caractère international si les troupes d’un autre État interviennent dans le conflit ou encore, si certains participants au conflit armé interne agissent au nom de cet autre État »85. Le professeur A. Clapham parlera de « casse-tête » juridique pour qualifier

le conflit syrien arguant que le système juridique international n’est pas construit pour prévoir ce cas de figure »86.

84 J. FLAUSS (Dir.), Les nouvelles frontières du droit international humanitaire, Bruxelles, Bruylant, 2003. 85 TPIY, 15 Juillet 1999, Procureur cl Tadic, Aff. Tadic, n°IT-94-1-A, I.L.M., 1999, vol.38, p.1518.

86 Entretient A. CLAPHAM par L. LEMA, La guerre en Syrie ? Un casse-tête juridique incroyable, Le Temps,

10.12.2015.

Enfin, peut-être sera-t-il pertinent de développer le concept de « guerre hybride » défini par la Commission européenne comme étant « un mélange d’activités coercitives et subversives, de

méthodes conventionnelles et non conventionnelles, susceptibles d’être utilisées de façon coordonnée par des acteurs étatiques ou non étatiques en vue d’attendre certains objectifs, sans que le seuil d’une guerre déclarée officiellement ne soit dépassé. Généralement, le principal objectif recherché est d’exploiter les vulnérabilités de la cible visée et de créer de l’ambiguïté pour entraver les processus décisionnels »87.

L’énonciation descriptive des cadrages analytiques utiles à la construction de cette recherche vise à mette en lumière l’intérêt du sujet de thèse. Les approches conçues au sein de ces différents cadres s’appuieront selon une méthodologie issue de biais transdisplinaires permettant de fournir une étude comparée et non une juxtaposition d’éléments scientifiques.

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