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INDEX DE LA STRUCTURE ET L'OBJET, OUVRAGE DE JEAN FRANÇOIS PIRSON

DEUXIEME PARTIE

2. L'INDEX THEMATIQUE DANS LES DOCUMENTS PRIMAIRES : LES LIVRES SUR L'ART.

2.3. DANS LES LIVRES SUR L'ART CONTEMPORAIN 1 SITUATION GLOBALE

2.3.2.1 INDEX DE LA STRUCTURE ET L'OBJET, OUVRAGE DE JEAN FRANÇOIS PIRSON

Il en existe un, cependant, que nous allons analyser, parce qu'il démontre que l'absence d'indexation des sujets, en dehors des contraintes éditoriales et de toute considération financière, n'est pas une fatalité, mais bien l'indice d'un choix (et si c'était une négligence elle aurait alors valeur de symptôme). Un choix qui a pris forme de modèle, au nom, peut-être, de cette peur que les mots ne réduisent le contenu de l'œuvre d'art, ou au nom d'une perpétuation des catégories dominantes du travail historique qui conditionnent à leur tour les catégories dominantes, onomastique et chronologique, de l'édition et des index. Malgré son intitulé modeste : "Index des noms

cités et, de manière non exhaustive, de quelques matières", l'index de l'ouvrage La structure et l'objet56,

écrit par Jean-François PIRSON, est pourtant l'un des plus pertinents qui ait été conçu pour les arts plastiques, parmi ceux que nous avons observés. Est-ce lié au fait que l'auteur, praticien, mais aussi enseignant57, ait obéi à des exigences didactiques dans la manière d'organiser son livre ? On peut noter, en tout état de cause, que son ouvrage, témoignant à la fois de réflexions théoriques sur l'architecture et les arts plastiques, ainsi que de recherches et d'expériences pédagogiques diverses menées avec ses étudiants, n'est pas strictement orienté par une approche biographique mais par une analyse attentive des

56 PIRSON, Jean-François, La structure et l'objet : essais, expériences et rapprochements, Bruxelles : P. Mardaga éd., 1984, 134 p.

57 "Jean-François Pirson : Né en 1950, architecte : vit cette spécificité à travers différents champs d'expérimentation : l'autoconstruction d'un habitat évolutif (depuis 1975), le dessin, la sculpture, l'écriture et le travail pédagogique. Enseigne à l'Institut Supérieur d'Architecture Lambert Lombard à Liège, anime des ateliers de construction et d'analyse. A publié La structure et l'objet (Liège, Métaphores, 1984)." Notice biographique extraite de la revue La part de l'œil (Bruxelles), n°2, 1986, p.207. Son livre commence par un exergue où il précise : "Cet essai ouvre un questionnement de l'acte de créer à partir des premiers gestes du construit et du bâti. En même temps, il tente de donner, par fragments, quelques éléments de réponses aux questions qu'il soulève. La première partie de l'essai propose une articulation de ces fragments. La seconde partie est

constituants de l'œuvre : un trait qui se réfléchit parfaitement dans l'index.

Ce dernier comporte des mots-clés affinés qu'il convient d'observer pour leurs caractères exemplaires ; dans le sens où ils sont à la fois des exemples et de judicieuses propositions. Ils permettent en effet de percevoir tout l'intérêt d'utiliser des unités verbales extrêmement précises pour identifier les sujets. D'un autre point de vue, on pourrait qualifier les termes de "partiels" ou de "réducteurs" en ce qu'ils désignent des îlots de sens détachés de la totalité sémantique de l'œuvre. C'est nonobstant de cette réduction-là, qu'on dit également "pointue", dont les usagers ont besoin. Des mots tels qu'"oripeau, pont ou système" seront, dans bien des cas, d'un secours plus efficace que les noms de mouvements pour répondre aux besoins d'une recherche thématique.

On sait que ces mots n'évoquent qu'une partie, ou tout au plus quelques facettes des œuvres mais il servent, cependant, de clef pour accéder rapidement à une information qu'on aurait eu des difficultés à re-découvrir avec des outils documentaires arrêtant l'indexation à un niveau trop général. Deux systèmes structurent l'index : les entrées directes et les entrées hiérarchisées. Certains mots-clés font l'objet d'entrées directes, à leur nom, dans la suite alphabétique, tandis que d'autres sont ordonnés en mots-clés spécifiques sous des concepts génériques. On compte ainsi dans la liste ordonnée sous la vedette principale "matériau, matière", quatre-vingt-trois mots-clés parmi lesquels "...graphite, herbe, hibou, jonc,

journaux, laine, liane, lumière..." qui révèlent encore

son souci de précision. Par ailleurs, le soin apporté à la spécification des matériaux utilisés rappelle l'importance de cet aspect pour rendre compte d'une dimension importante de l'art contemporain (nous y reviendrons p. 262-263, et p. 300 et suiv.).

L'index mentionne également (seize mots-clés) des figures formelles, planaires et en trois dimensions, telles que : "...cylindre, damier, grille, labyrinthe..."

qui, à l'instar des matériaux, comptent aussi dans les accès à concevoir pour une indexation thématique.

Il est un autre développement de la liste plus inattendu. Il correspond à des thèmes pédagogiques propres à l'auteur et réunit vingt termes tels que "...étui,

filet, grenier, igloo, maison..." sous le terme générique

de "contenant". L'effet de surprise provient du terme générique58 lui-même, plus que des entités qu'il recouvre, car ces dernières renvoient effectivement à des éléments, des configurations ou des thématiques appartenant aux œuvres. L'igloo chez Mario MERZ, pour ne citer que lui, représente bien un constituant significatif de son œuvre, mais on comprend mal pourquoi il est ici uniquement rattaché à la fonction ou à l'image d'un contenant. Tout à

la fois objet-forme-image, et pas seulement d'un

contenant, l'igloo souffre d'une hiérarchisation qui masque certains de ses aspects. Cet inconvénient aurait pu être évité simplement si la liste n'avait pas obéi aux limitations de ces unitermes génériques qui relèvent en fait d'une logique analytique ; comme s'il s'agissait de retrouver une table analytique sous-ordonnée dans un index alphabétique. Même si cette logique n'induit dans ce cas précis que trois mots-clés qui sont "contenant, figures et

matériau", elle empêche malgré tout d'accéder directement

à cent dix neuf termes. Nous proposons donc de restaurer

dans la retranscription de cet index un ordre

d'interrogation alphabétique, avec des doubles entrées, qui rendra ces termes plus accessibles (Voir annexes, p. 482 et p. 485).

Il demeure que, si l'on ajoute aux critères déjà cités les mentions de sujets qui renvoient à des notions aussi larges que "Minimal art" ou aussi précisées qu'"embryogenèse", on pourra constater à la simple lecture, que cet index a su recenser, avec une acuité singulière, les termes qui servent dans de nombreuses questions posées pour accéder aux contenus des œuvres. Il ne s'agit pas d'en conclure que cet index épuise les

termes relatifs au champ de l'art contemporain, ni qu'il réalise complètement ce que pourrait être le modèle d'un outil documentaire appliqué à ce champ, mais au milieu du silence ambiant, il se distingue comme une sorte de liste- témoin, un matériau de travail pour les indexeurs. Par la "nébuleuse" de mots qu'il répertorie, renvoyant à des objets, des notions, des concepts aussi éloignés les uns des autres que "ceinture, froid, nombre ou souple" il illustre les possibilités d'une indexation guidée par le contenu propre des œuvres et démontre a contrario les limites de l'utilisation d'un système indexatoire imprégné d'un vocabulaire pré-établi trop généraliste, ou trop générique. A supposer que cet index en soit resté, pour sa part, aux trois termes génériques précités, et nous perdions une centaine d'entrées. Il y a tout lieu de penser qu'une indexation ouverte permet beaucoup mieux d'accéder aux contenus protéiformes de l'art contemporain qu'une indexation verrouillée par un nombre fini de termes, ceci n'évitant pas de respecter les lois de base d'une indexation avec les renvois nécessaires et le choix de certains termes désamorçant des ambiguïtés.