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L’impact du facteur économique sur l’emploi des seniors : une incidence contrastée selon les pays

Dans le document Emploi des salariés âgés  (Page 119-123)

4. La position des salariés âgés

4.1. L’impact du facteur économique sur l’emploi des seniors : une incidence contrastée selon les pays

Même si les seniors ne l’expriment pas comme premier élément dans leur souhait de poursuite d’une activité professionnelle, on comprend aisément que la diminution des revenus ou l’absence de protection sociale peut les contraindre à se maintenir ou à reprendre une activité. En France, le facteur économique apparaît comme contraignant pour une minorité de CSP. Pour la majorité des seniors français, il est pris en compte afin de maintenir le niveau de vie antérieur. Enfin, dans tous les cas, cet élément est étroitement lié aux incertitudes de la conjoncture économique.

Ce n’est toutefois pas le cas dans les pays ayant mis en œuvre une politique dite « libérale », comme par exemple en Amérique du Nord et au Royaume Uni où ce facteur reste déterminant.

4.1.1 L’incidence du facteur économique sur l’activité des seniors français

4.1.1.1 Un critère contraignant pour une minorité de catégories socioprofessionnelles (CSP)

Certaines catégories continuent à travailler car ils n’ont pas d’autre solution.

C’est souvent le cas des agriculteurs. Dans un discours le 9 septembre 2008123, François Fillon a annoncé des mesures en faveur des exploitants : Le minimum retraite sera calculé sur la base du minimum vieillesse du régime général, correspondant à 633 euros pour 37 ans et demi de cotisations. Par ailleurs, les veuves pourront bénéficier à partir de 2010 de la retraite complémentaire obligatoire acquise par leur conjoint.

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En mars 2008, 1/3 des retraités ont touché le minimum contributif soit 4 millions de personnes. Ce minimum est soumis à des restrictions : si la personne n’a pas travaillé le nombre de trimestres requis, sa pension sera diminuée proportionnellement au nombre de trimestres manquants. Une femme qui a par exemple exercé une activité professionnelle 15 ans seulement recevra une pension proportionnelle à son activité. Il est clair dans ce cas que certaines personnes à faibles revenus aient intérêt à continuer à exercer une activité professionnelle. L’ASPA (allocation de solidarité aux personnes âgées) remplace l’ancien « revenu minimal de retraite » depuis le 1er janvier 2007. Elle s’adresse aux personnes de plus de 65 ans (60 ans dans certains cas : anciens combattants…) ayant peu ou pas cotisé pour leur retraite et qui peuvent ainsi bénéficier d’un revenu minimal. Le montant de l’ASPA est égal à la différence entre le revenu du demandeur et le plafond : 7537,30 € pour une personne seule et 13521,27 € pour un couple.

Les petits commerçants et artisans font également partie des catégories pour lesquelles le poids des facteurs financiers est important. Bénéficiant rarement de retraite complémentaire, la vente de leur fonds de commerce constitue le seul capital qui leur permet d’avoir un niveau de vie décent pendant la retraite. La frilosité du marché de l’immobilier vient donc les frapper de plein fouet et retarde leur départ à la retraite.

4.1.1.2 Le souhait de maintenir le niveau de vie antérieur pour la majorité des seniors

Le choix de l’âge de cessation d’activité est au centre d’un réseau de relations complexes qui combine de nombreux facteurs. C’est ce que mettent en exergue Didier Blanchet et Thierry Debrandt dans leur étude « Souhaiter prendre sa retraite le plus tôt possible : santé, satisfaction au travail et facteurs monétaires »124. Ils ont créé une équation entre les aspirations en matière d’âge de départ en retraite et un certain nombre de variables selon les pays, monétaires et non monétaires.

- les déterminants non monétaires : niveau d’étude, type d’emploi, situation de famille, coordination avec le départ en retraite du conjoint, préférence pour le loisir, l’inactivité, la santé, les conditions de travail, l’environnement, la nature, l’organisation du travail et enfin l’espérance de vie anticipée.

- Les déterminants monétaires : barèmes de retraite

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Ils mettent en évidence que les individus décident de partir en retraite sitôt que la perte en revenu net qui en résulte est inférieure à la valeur qu’il donne au loisir, ou plus précisément à la combinaison loisir/activité non marchande qu’ils adopteront une fois qu’ils seront à la retraite.

Les incitations financières ont un effet significatif sur les comportements au niveau individuel, mais moins marqué que les variables non monétaires. Au niveau d’un pays, les facteurs monétaires sont comparables voire supérieurs car ils rendent compte des spécificités de chaque pays.

Les variables non monétaires les plus discriminantes sont la satisfaction globale au travail, la reconnaissance, l’insertion dans l’entreprise et la crainte que des problèmes de santé ne limitent la capacité de travail avant l’âge normal de la retraite. En revanche, la satisfaction en matière de salaire n’intervient pas comme un des facteurs les plus déterminants.

4.1.1.3 Des préoccupations financières étroitement liées aux incertitudes de la conjoncture économique.

Les incertitudes liées à la conjoncture économique vont dans certains cas inciter à la poursuite d’une activité et dans d’autres, elles vont avoir un rôle d’accélérateur dans la décision de départ en retraite.

En effet, aujourd’hui, les salariés n’ont pas intérêt à liquider leur retraite. Pour la première fois, les revenus des retraités repassent sous ceux des actifs125. Le taux de remplacement du dernier salaire se situe à moins de 40%. Chacun a compris que la retraite serait de moins en moins rentable. Une étude internationale126 montre que 53% des sondés accepteraient de travailler après la retraite essentiellement pour des questions financières. Mais seulement 14% des Français pensent qu’ils trouveront facilement un emploi contre 46% des Danois.

L’inquiétude sur le système de retraite modifie également la décision sur le départ en retraite. Ainsi, selon l’enquête réalisée par la CNAV durant l’été 2007127, les assurés se déclarent inquiets quant à l’avenir du système de retraite. Ils craignent des modifications des

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Serge Guérin et Gérard Fournier, le Management des seniors , éditions d’organisation, EYROLLES, mars 2009 126

Kelly Services 2008 dans « le Management des Seniors » 127

Enquête menée par la CNAV « Les motivations de départ en retraite » - Caroline Berteau-Rapin et Corinne Mette - mars 2008 dans Cadrage n°2

règles de calcul en leur défaveur voire une remise en question totale. Cette vision les amène à précipiter la liquidation de leur retraite.

Dans cette même étude, il apparaît que les assurés cherchent à optimiser leur départ à la retraite pour le rendre le plus rentable possible. Les assurés font part de leurs inquiétudes face à la baisse du pouvoir d’achat. Les considérations financières sont alors quasiment les seules à jouer aussi nettement ou du moins, à être clairement exprimées sur la décision du recul du départ en retraite. Chez les personnes en emploi, la prolongation d’une activité professionnelle jusqu’à l’obtention d’un niveau de pension jugé correct est le premier moyen envisagé pour pallier la perte de pouvoir d’achat due au passage à la retraite. Quant à celles qui ne sont pas en emploi, le niveau de pension attendu conduit à différer le moment de liquidation, lorsque cela est possible. C’est le cas des chômeurs indemnisés n’ayant pas encore atteint le taux plein.

En conséquence, qu’ils aient ou non un emploi, les assurés subissent, d’une façon ou d’une autre, le poids de la conjoncture. Pour une partie de ceux qui ont la possibilité de choisir le moment de leur départ en retraite, les inquiétudes concernant l’emploi, en particulier, les incitent à partir le plus tôt possible et à minimiser l’importance des avantages financiers qu’ils pourraient retirer d’une prolongation d’activité.

4.1.2 Le poids du facteur économique dans les pays dits « libéraux » : l’exemple des Pays d’Amérique du Nord et du Royaume Uni

Deux interviews de seniors américains diffusés sir le site www.senioragir.fr sont éloquentes : ces seniors, un homme de 75 ans, Bob J., et une femme de 66 ans, Adrien K., n’ont pas d’autre choix que d’être actifs. Bob J. alors qu’il a travaillé pendant 40 ans reprend une activité pour bénéficier d’un revenu complémentaire, sa pension étant insuffisante pour lui permettre de vivre décemment. Adrien K. alors qu’elle a été femme au foyer durant toute son existence est obligée de travailler suite à son divorce pour subvenir à ses besoins, aucune couverture sociale ne lui permettant de vivre décemment. Ces deux seniors américains montrent bien évidemment une certaine pudeur à mettre en avant le facteur financier dans leur reprise d’activité.

Cet état de fait est confirmé par Stephen Groff, Directeur adjoint à la Direction de la Coopération pour le Développement de l’OCDE à Paris dans une interview diffusée sur le même site : « Aux Etats-Unis, l’absence de couverture maladie pour les non- salariés contraint les seniors à retourner travailler ». Les résultats de cette politique restrictive sont un taux d’emploi des seniors de 61% en 2007.

Pour les Canadiens, un sondage présenté en 2007 par le groupe Investors montre que 58% des travailleurs canadiens pensent travailler à la retraite. En effet, 56% d’entre eux pensent ne pas avoir suffisamment d’argent pour vivre s’ils s’arrêtent de travailler complètement, même s’ils évoquent également pour justifier leur souhait le désir de maintenir un réseau social et de vivre de nouvelles expériences.

L’aveu du poids du facteur financier vient plus facilement de la part des femmes. Elles sont 34% à reconnaître que l’argent est un important facteur de motivation pour continuer de travailler une fois à la retraite.128

Le Royaume Uni a contraint les seniors à travailler en libéralisant le marché du travail, en diminuant le niveau des retraites et en augmentant la flexibilité du travail.

Nous avons déjà examiné les caractéristiques de la politique publique britannique en matière d’emploi des seniors, dans la première sous partie relative à la position de l’état.

4.2. La prégnance des conditions de travail et de la santé pour l’emploi des salariés

Dans le document Emploi des salariés âgés  (Page 119-123)

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