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Des facteurs partagés par l’ensemble des CSP et des sexes selon un ordre différent

Dans le document Emploi des salariés âgés  (Page 135-143)

4. La position des salariés âgés

4.2. La prégnance des conditions de travail et de la santé pour l’emploi des salariés âgés

4.2.2 Les conditions de travail et l’état de santé : facteurs prégnants du maintien de la capacité de travail des

4.2.1.5 Des facteurs partagés par l’ensemble des CSP et des sexes selon un ordre différent

Les conditions de travail étroitement liées aux différentes facettes de la pénibilité, qui incluent les notions de motivation, de satisfaction au travail et retentissant sur la santé sont les facteurs, plus que ceux économiques qui incitent les salariés à liquider leur retraite.155

A- Des facteurs partagés par l’ensemble des CSP quels que soient les sexes156

Dans l’article de la DARES publié en juillet 2008157, un tiers des salariés âgés de 35 à 55 ans ne s’estime pas capable de continuer à faire le même travail jusqu’à 60 ans mais cette statistique varie suivant :

- le sexe : les femmes sont plus sensibles : 36% et 32% des hommes - les catégories socio professionnelles :

- les cadres : 29% des cadres estiment qu’ils ne pourront pas continuer en raison des horaires et de l’intensité du travail

- les professions intermédiaires : 32% estiment qu’ils ne pourront pas continuer en raison des tensions liées à l’organisation du travail

- les employés administratifs : 29% estiment qu’ils ne pourront pas continuer en raison de risques physiques et d’un travail monotone - les employés de commerce et de service : 41% estiment qu’ils ne

pourront pas continuer en raison de la marque des tensions avec le public

- les ouvriers : 38% estiment qu’ils ne pourront pas continuer en raison du sentiment de précarité de l’emploi. En fait, lorsqu’ils se jugent incapables de faire le même travail jusqu’à 60 ans, ce peut être aussi parce qu’ils ne sont pas certains d’avoir encore un travail à cet âge.

Ce sont donc les employés de commerce et de service majoritairement féminins et les ouvriers non qualifiés majoritairement masculins qui subissent des conditions de travail qui, selon eux, ne leur permettront pas de continuer jusqu’à 60 ans.

155

Premières synthèses DARES juillet 2008 « Se sentir capable de faire le même travail jusqu’à 60 ans » 156

cf note bas de page précédente 157

Au niveau individuel158, il apparaît que la santé et la satisfaction au travail constituent des déterminants importants du souhait de prendre sa retraite le plus tôt possible : être globalement satisfait de son travail réduit de 16,4 points la probabilité de souhaiter partir au plus tôt. Recevoir une reconnaissance méritée pour son travail la réduit aussi de 6,7 points. En sens inverse, nous avons vu dans l’étude « se sentir capable de faire le même travail jusqu’à 60 ans » que seule la catégorie des cadres n’était pas touchée par l’absence de motivation et de reconnaissance au travail. De même, ils ne sont pas concernés par la pénibilité physique. C’est donc la catégorie qui potentiellement serait la plus prête à continuer de travailler.

B- Le poids des pénibilités physiques pour les ouvriers

La pénibilité physique est liée à l’existence de contraintes physiques constitutives de certains métiers. Par exemple, le port de charges lourdes pour des manutentionnaires, l’exposition à des intempéries pour les métiers du bâtiment. Les chercheurs établissent un lien clair entre la pénibilité résultant de contraintes physiques et la morbidité accrue des salariés. Ainsi, une enquête de l’INSEE de 2002-2003 montre que l’espérance de vie sans incapacité, d’un ouvrier de sexe masculin à 35 ans est de 40,9 ans contre 46,6 ans pour un cadre supérieur l’écart est donc de 5,7 points. Concernant les femmes l’écart entre ces mêmes CSP est de 2,3 points.

Les contraintes précitées entraînent à court terme l’apparition de troubles musculo squelettiques (TMS), puis à moyen terme l’exclusion du travail par l’invalidité ou l’inaptitude. Dans les professions intermédiaires (techniciens, agents de maîtrise, commerciaux, cadres B de la fonction publique…), 34% déclarent des postures pénibles ou fatigantes avec des risques d’accident de travail. Dans les employés administratifs, 28% restent debout longtemps dans leur travail. Chez les employés de commerce et de service, ils sont 51% à subir des postures pénibles ou fatigantes. Enfin, les ouvriers subissent aussi une pénibilité physique. En revanche, les expositions à des risques à effets différés « fumées, poussières » ou « produits dangereux » ne semblent pas être considérés comme pénibles.

Ces formes de contraintes ont largement diminué avec le développement de l’automatisation du travail et les technologies. Pour autant, certaines persistent et on parle parfois de « pénibilité irréductible » car inhérentes aux métiers. Il ressort également de l’Enquêtes DARES sur les conditions de travail de 1984 à 2005 que la pénibilité physique est stabilisée sauf pour les ouvriers.

158

« Souhaiter prendre sa retraite le plus tôt possible : santé, satisfaction au travail et facteurs monétaires » par Didier Blanchet et Thierry Debrand parue dans Economie et Statistiques, n°403-404, 2007

La pénibilité physique résulte également d’un rythme de travail imposé ou de contraintes extérieures, par exemple pour le travail de nuit ou le travail en horaires atypiques (métiers de la santé). Le travail de nuit ne pourra pas être réalisé dans une ambiance diurne, les hôpitaux devront toujours être ouverts de façon continue. De même, l’exposition aux intempéries pour les travailleurs du BTP est une pénibilité irréductible.159

C- Inégalités de santé liées à la trajectoire professionnelle

Dans son étude « Trajectoire professionnelle et état de santé déclaré des seniors en activité », Aurélia Ortiz160 souligne en outre, la corrélation de deux variables qui tiennent à la qualité de trajectoire professionnelle avec l’état de santé perçu des salariés de 50 ans et plus en activité :

− La peur du chômage : les salariés de 50 ans et plus se déclarent plus facilement en mauvaise santé, s’ils ont une faible probabilité de retrouver du travail rapidement en cas de licenciement. Ce paramètre est lui-même largement lié au niveau de qualification des individus.

− Les interruptions de carrière pour raison médicale : avoir connu une ou deux, voire plus de deux interruptions de carrière pour raison médicale quelle qu’elle soit augmente fortement la probabilité de se déclarer en mauvaise santé.

Or, la qualité de trajectoire professionnelle est un facteur particulièrement discriminant dans la mesure où elle n’est pas liée à des paramètres sur lesquels l’individu peut agir en opérant des choix rationnels. Le sentiment d’insécurité face au chômage et les arrêts médicaux ne peuvent pas évoluer par la seule volonté d’une personne. Ces éléments entraînent une discontinuité dans les périodes d’emploi et une fluctuation importante des droits sociaux (santé, formation, retraite). Ces salariés seront également ceux qui auront, de fait, les revenus les plus bas durant leur retraite.

Ainsi, elle estime que « les risques associés à la flexibilité (conditions de travail pénibles, insécurité, instabilité de l’emploi) pèsent essentiellement sur les salariés les moins qualifiés aggravant les risques de stigmatisation et d’accumulation des inégalités économiques,

159

Source : Rapport POISSON pages 75 et 76 - Notion de pénibilité irréductible 160

sociales et sanitaires ». Elle souligne également compte tenu de ces paramètres, la limite des politiques publiques d’incitation au maintien dans l’emploi.

Originale et partisane, sa réflexion confirme avant tout la nécessité de sécuriser les parcours professionnels pour favoriser un vieillissement actif.

D- Inégalités de santé liées au niveau d’éducation

Il ressort de l’étude « Santé et pénibilité en fin de vie active : une comparaison européenne » 161

que « les peu qualifiés sont aussi ceux dont les profils de santé et de pénibilité sont les plus mauvais et, à mesure que le niveau de qualification augmente, la santé, la satisfaction et les perspectives s’améliorent ». Or, il y a corrélation entre mauvaise santé, insatisfaction et maintien dans l’emploi.

Le niveau d’éducation va être un facteur discriminant important de maintien dans l’emploi des seniors, comme il peut l’être à tout âge.162

Ainsi, il ressort d’une comparaison européenne que le taux d’emploi des seniors augmente avec le niveau de formation et la différence de taux d’emploi entre les plus diplômés et les moins diplômés augmente avec l’âge. La vraie différence entre les pays membres de l’UE ayant atteint les objectifs de Lisbonne et les autres réside dans le niveau d’emploi de la partie la moins qualifié de leur force de travail : en France le taux d’emploi des 55-64 ans les moins qualifiés est d’environ 30%, il atteint 60% en Suède et au Royaume Uni.

Trois niveaux d’éducation sont retenus dans la comparaison internationale :

- Le premier correspond à l’enseignement pré primaire, primaire et au premier cycle de l’enseignement secondaire ;

- Le deuxième à l’enseignement du deuxième cycle secondaire et à l’enseignement post secondaire qui n’est pas du supérieur ;

- Le troisième correspond à l’enseignement supérieur. La dernière version de classification date de 1997.

Ces données confirment l’importance de favoriser la formation professionnelle tout au long de la vie pour pallier les inégalités liées aux formations initiales.

161

Catherine POLLAK, santé et pénibilité en fin de vie active : une comparaison européenne, CEE, Juin 2009, p.30-31 162

E- Perspectives, autonomie et latitude décisionnelle comme leviers d’un vieillissement actif

L’absence de reconnaissance ou l’impossibilité de développer ses compétences dans le cadre de son travail sont des facteurs de risques psychosociaux bien connus (modèle Karasek). Ce sentiment est partagé par l’ensemble des catégories à l’exception des cadres. En revanche, le fait de changer de poste en fonction des besoins de l’entreprise réduit cette probabilité, comme si cette polyvalence permettait de réduire l’ennui. De même, le manque de moyens pour faire correctement son travail identifié essentiellement par les professions intermédiaires, les employés administratifs, de commerce et de service accentue le risque. Volkoff et Gollac soulignent dans leurs travaux qu’« une situation de travail est bonne quand elle donne au travailleur la possibilité de maîtriser son avenir et de s’y projeter ».163

L’étude précitée164 souligne également que les variables les plus associées à la satisfaction en emploi sont les perspectives, l’autonomie et la latitude décisionnelle. Il semble que la compensation, en particulier à travers le salaire joue beaucoup sur le sentiment de satisfaction.

C’est donc davantage le sentiment de compensation de la pénibilité du travail qui impacte la satisfaction des salariés que les conditions de travail en elles-mêmes. De cette façon, ils estiment en effet que le rapport contribution/rétribution est équilibré.

Il ressort de ces différents éléments que les facteurs clés de succès du maintien dans l’emploi ou de la poursuite de l’activité passeraient par :

- Des marges de manœuvre plus importantes

- Une valorisation des compétences et de l’expérience - Une plus grande souplesse dans l’organisation du travail.

On constate que le désir de partir en retraite est lié à l’évolution personnelle de chaque être, même si les facteurs invoqués (et exprimés dans les enquêtes) sont souvent les mêmes à l’intérieur de chaque catégorie professionnelle.

163

Volkoff, Gollac 2007 164

Serge Guérin165 et Gérard Fournier ont classé les seniors suivant différentes typologies. Certaines correspondent à des seniors qui souhaitent rester en activité (qu’ils soient ou non en poste) : les rebondissants, les florissants, les experts.

Les autres en poste sont moins actifs : les attentistes, les dépassés. D’autres encore sont des seniors inactifs : les déphasés, les volontaristes, les démotivés, les singuliers.

Cette classification a le mérite de souligner l’importance des personnalités. Au-delà des caractéristiques que nous avons pu souligner tout au long de cette partie de notre étude (CSP, niveau de qualification, santé, conditions de travail..), l’avancé en âge ne viendra pas modifier fondamentalement la personnalité d’un individu, son attitude face au travail. C’est bien cette dimension, qu’il ne faudra pas négliger de prendre en compte en qualité de professionnel des RH et dirigeants d’entreprises pour parvenir à une gestion dynamique des âges, dans la continuité.

De la même façon que les entreprises font face à des stéréotypes qui influencent leur décision de recrutement ou de maintien dans l’emploi des salariés âgés, les salariés eux- mêmes montrent qu’au-delà des facteurs qu’ils invoquent, c’est avant tout un schéma sociétal du droit au repos entre 58 et 60 ans, qu’ils ont intégrés. Le véritable enjeu du vieillissement actif est un enjeu culturel qui doit être mené par chacun des acteurs.

165

3

ème

PARTIE - LES ENTREPRISES EN PRATIQUE –

Quelles évolutions dans les entreprises face aux

nouvelles obligations légales ?

Dans un contexte d’allongement de la vie professionnelle, de nombreux acteurs, qu’ils soient employeurs, salariés ou partenaires sociaux, plébiscitent encore le retrait anticipé d’activité ou des aménagements de fin de carrière. Une étude de l’ANACT, publiée en avril 2007, confirme ce constat par l’analyse de l’évolution des accords GPEC négociés dans les entreprises.

Face à de telles divergences, l’émergence d’une nouvelle contrainte légale soulève une multitude d’interrogations : Comment les entreprises vont-elles désormais aborder la question du travail des salariés âgés ? Sont-elles prêtes à dépasser leurs préjugés et à s’engager sur le sujet ? Existe-t-il un intérêt perçu à long terme de l’emploi des salariés âgés dans les entreprises ? Ont-elles pris conscience de la nécessité de prolonger l’activité professionnelle de leurs salariés ? Est-ce un paramètre que les RH et les dirigeants sont prêts à intégrer ?

Si de nombreuses études pouvaient répondre à ces questions avant la parution des décrets, peu avaient jusqu’à présent intégré le nouveau contexte réglementaire.

Aussi, nous avons souhaité forger notre propre opinion sur la prise en compte de cette nouvelle obligation et évaluer sa contribution à une convergence d’intérêt entre l’état et les entreprises sur l’emploi des salariés âgés.

Nous présenterons dans un premier temps la méthodologie que nous avons suivie pour cette étude, avec notamment :

- La définition de l’objet de notre recherche et des hypothèses à valider,

- Les modalités de recueil de l’information choisies et techniques d’entretien utilisées.

Puis la construction d’une grille d’analyse doublée d’une restitution du contenu des entretiens réalisés devraient nous conduire à :

- Définir une typologie des comportements des entreprises interrogées face à l’obligation de conclure un accord ou plan d’action en faveur de l’emploi des seniors,

- Identifier dans le détail les domaines d’action choisis par les entreprises et vérifier dans quelle mesure elles apportent une réponse adaptée et innovante à la situation des salariés âgés.

Pour rappel, les entreprises ont pour obligation de conclure un accord ou plan d’action comportant :

- un objectif principal de recrutement ou de maintien dans l’emploi des salariés âgés - au moins 3 dispositifs favorables à la réalisation de ces objectifs, à choisir parmi les 6

domaines suivants : Recrutement, Amélioration des conditions de travail et prévention de la pénibilité, Développement des compétences et accès à la formation, Aménagement des fins de carrière, Transmission des savoirs et développement du tutorat.

1. Démarche méthodologique

Dans le document Emploi des salariés âgés  (Page 135-143)

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