• Aucun résultat trouvé

Les formulations renvoyant directement à des actes illocutoires explicites dans les recensions se limitent à décrire et résumer des actes de langages attribués à l’auteur du texte source, aux personnages ou encore à un autre recenseur. Ils ne marquent pas, à cet égard, de nouveaux actes de langage au sein des recensions et ne peuvent ainsi pas servir d’indicateur de la fonction textuelle. Il n’y a rien d’étonnant à cela, car, comme cela a précédemment été souligné, les actes illocutoires à l’échelle d’une phrase conviennent pour des actes de langage simples. Or, la recension a recours à des actes de langage plus complexes qui peuvent être décomposés en une série d’actes textuels, pour reprendre la formulation de W. Zillig (1982 : 199) et dont les marqueurs ne sont pas des formules préconçues dont on pourrait établir une liste.

En s’appuyant sur le modèle de W. Zillig (1982), qui a relevé les principaux actes textuels constitutifs des recensions scientifiques, il convient ici de mesurer à présent son degré d’adaptabilité à la recension journalistique. En ce qui concerne les actes textuels simples relevant de la fonction informative, la transposition est assez aisée. On retrouve les informations de fond sur le contenu de l’ouvrage [4] ou bien sur l’activité de l’auteur [9].

[9.] Sem-Sandberg ist weit von einer solchen Vereinnahmung des Holocaust entfernt. Er verfolgt ein anderes literarisches Erkenntnisinteresse. Er stellt vor allem die Frage nach der Selbstkorrumpierung der jüdischen Ghetto-Leitung (Schmid, nzz, 28.01.12., nous soulignons).

Le troisième type d’information de fond présente en revanche des différences notables. Alors que dans les recensions scientifiques, certains actes textuels servent à désigner le type de lectorat auquel s’adresse l’ouvrage, dans le cas du corpus établi pour cette étude, le lectorat semble former une entité uniforme. Les évocations récurrentes du lecteur rappellent l’existence d’un destinataire [10], mais sans être discriminant. Les seules occurrences où le lectorat n’est pas une entité universelle, ne signifient pas une restriction du destinataire. En [11], on évoque les lecteurs de l’auteur américain Stewart O’Nan, qui peuvent être certes plus avertis, mais le nouveau roman de l’auteur s’adresse à tous. Enfin, la distinction opérée en [12] et désignant par une périphrase tous ceux qui aiment les histoires structurées, ne constitue pas un acte textuel simple, il est corrélé à une évaluation.

[10.] Es ist ein ferner, seltsamer Klang, der den Leser mit den ersten Sätzen ergreift, die Sprache kräuselt sich sanft wie Wellen, die auf den Horizont zulaufen (Diez, spieg, 13.02.12., nous soulignons).

[11.] O’Nan-Leser kennen das Personal, denn der Autor hat sich hier, erstmals, für die Fortsetzung einer Geschichte entschieden (anonyme, spieg, 23.01.12., nous soulignons).

[12.] Wer klar strukturierte Geschichten mag, sollte von dem Buch „Wir können alles verlieren. Oder gewinnen“ die Finger lassen. Die finnische Autorin Seita Parkkola hat einen spannenden Jugendroman geschrieben, der allerdings vor Wirrnissen strotzt (Knabenhans, nzz, 01.02.12., nous soulignons).

Le simple paramètre du destinataire entraîne par conséquent une différence majeure dans la réalisation des actes textuels constitutifs de la recension. Contrairement à la recension scientifique où le public est segmenté en fonction de disciplines et de domaines de spécialités et où les ouvrages s’adressent tantôt aux spécialistes de tel domaine, tantôt aux néophytes curieux de telle discipline, la recension journalistique traite des ouvrages littéraires dont la portée se veut universelle.

Les informations d’arrière-plan, renseignant sur les conditions de production, les travaux de recherches effectués jusqu’à présent et la réception réservée à l’ouvrage, peuvent être transposées à la recension journalistique en les adaptant un peu. Il est très courant de trouver des actes textuels informant sur l’arrière-plan, notamment historique comme en [13] et [14]. À travers ces composantes constitutives de la recension, le recenseur replace dans son contexte les ouvrages publiés et rappelle ainsi au lecteur des informations essentielles à la bonne compréhension de ces ouvrages.

[13.] Selten wurden Kriege über Jahrhunderte hinweg so erbittert und grausam geführt wie im Kaukasus - wir haben die schrecklichen Bilder von halbverhungerten Menschen im Schnee der Ruinenstadt Grosny und die zerlumpten, verstümmelten Flüchtlinge aus Bergkarabach noch vor Augen. Aus dieser traumatisierten Gegend, in der bis heute der Ausnahmezustand herrscht, stammt Olga Grjasnowa, die in ihrem mitreißenden Debüt „Der Russe ist einer, der Birken liebt" von ihrem Alter Ego Mascha Kogan erzählt, die, wie sie selbst, 1996 als jüdischer Kontingentflüchtling aus Baku nach Deutschland kam (Henneberg, faz213, 25.02.12., nous soulignons).

[14.] Der tschechische Schriftsteller und Dissident Ludvik Vaculik hatte keinen Anlass zur Freundlichkeit, als er „Die Meerschweinchen“ schrieb. Er sass seit 1969 beschäftigungslos zu Hause. Aus der kommunistischen Partei hatte man ihn bereits 1967 ausgeschlossen, nach einer Rede auf dem 4. Schriftstellerkongress gegen den Machtanspruch der Partei (Plath, nzz, 28.01.12., nous soulignons).

213 Désormais l’abréviation faz sera employée pour désigner le quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung.

En revanche, comme les ouvrages sources sont des romans et non des ouvrages scientifiques, on ne peut pas trouver d’actes textuels informant sur les recherches menées jusqu’ici par les auteurs. On peut cependant très facilement trouver un équivalent dans le rappel des œuvres publiées par l’auteur [15] ou par un bref rappel de détails à caractère biographique [16].

[15.] Daniel Glattauers großartiger E-Mail-Roman, 2006 publiziert, wird in der Komödie am Kurfürstendamm von Tanja Wedhorn und dem „Tatort“- Kommissar Oliver Mommsen kongenial umgesetzt. Das Buch machte den Autor – zusammen mit der Fortsetzung „Alle sieben Wellen“ (2009) – zum Auflagenmillionär (anonyme, spieg, 06.02.12.).

[16.] Er war in Schweden Kritiker, Übersetzer und Journalist. Anders als andere Autoren, die über den Holocaust geschrieben haben, hat er keine jüdischen Wurzeln. Er ist ein leiser, höflicher Intellektueller, der mit seiner runden Brille und dem haarscharf gezogenen Scheitel aussieht wie den zwanziger Jahren entschlüpft (Spörl, spieg, 23.01.12.).

Comme pour les ouvrages scientifiques, les ouvrages littéraires sont des publications qui donnent lieu à de multiples recensions. Or, cette réception des œuvres trouve écho dans des actes textuels informatifs, comme en [17], [18] et [19].

[17.] In der Begründung der „Time“-Liste wurde sie für die „unverkennbare Klarheit“ ihres Schreibstils und für ihre „verwegene Klugheit“ gelobt (Höbel, spieg, 13.02.12.).

[18.] Deutschen Kritikern war die Vielseitigkeit dieser Schriftstellerin bisher verdächtig. Ihr Stil sei zu makellos, ihre Handlungsstränge zu geschickt verwoben, hieß es in eher miesepetrigen Besprechungen (Höbel, spieg, 13.02.12., nous soulignons).

[19.] Sem-Sandbergs Buch ist ein internationaler Erfolg (Spörl, spieg, 23.01.12.).

De manière générale, le paramètre qui impose des changements pour les informations d’arrière-plan, est le statut des auteurs, mais les actes textuels auxquels il donne lieu sont comparables. Il en va de même pour les informations techniques. L’ouvrage littéraire est, au même titre que l’ouvrage scientifique, un objet qui peut être décrit en termes de nombre de pages [20], [21], de prix [22], ou encore de couverture [23].

[20.] Über fünfhundert Seiten instrumentiert Harbach seine Schicksalssinfonie, der er beständig neue Motive hinzufügt (Mejias, faz, 24.01.12., nous soulignons).

[21.] Ein umfassendes Alters- und Monumentalwerk soll es sein, an die tausend Seiten, mit einer Vielzahl von Protagonisten prallvoll von ungeheuerlichen Geschichten, irrwitzigen Situationen, grundstürzenden Debatten, ausschweifenden Handlungsbögen und karnevalesker Energie. Man nimmt es mit großer Erwartung zur Hand – und ist maßlos enttäuscht (Döring, faz, 26.01.12., nous soulignons).

[22.] „Sommerfest" heißt Frank Goosens neues Opus, das erste nach dem Verlagswechsel von Eichborn, wo ja nun auch Strukturwandel herrscht, zu Kiepenheuer und Witsch (319 S., geb., 19,99 [Euro]), und wird hier in exklusiver Vorpremiere den Frontfrauen präsentiert (Jungen,

faz, 31.01.12., nous soulignons).

[23.] Schon der Buchdeckel verspricht ein Gemetzel. „35 Tote“ steht dort in blutroten Lettern. Schlägt man den Roman von Sergio Álvarez auf, erweist sich der ohnehin reißerische Titel als Euphemismus (Borchmeyer, faz, 12.01.12., nous soulignons).

Les recensions journalistiques sont, à n’en pas douter, constituées de composantes informatives qui se répartissent, conformément à ce qui vient d’être vu, entre des informations de fond, des informations d’arrière-plan et des informations techniques. Mais en ce qui concerne les actes textuels qui servent à évaluer, le parallèle avec les recensions journalistiques est plus complexe. Seuls les actes textuels qui évaluent la forme de l’ouvrage littéraire, rappellent ceux qui évaluent l’ouvrage scientifique. On retrouve du moins des évaluations sur le degré d’intérêt de l’ouvrage [21] et [24], ainsi que sur le style de l’auteur [25]. En [21], l’évaluation de l’intérêt est couplée avec des informations sur l’objet livre. Alors que le livre apparaît comme un ouvrage monumental de mille pages, promettant autant de personnages et de situations originales, sa lecture en est d’autant plus décevante. En [24], en revanche, l’intérêt de l’ouvrage réside dans son humour, dans le tour de force mêlant la rigueur de l’analyse et le sarcasme. Par ailleurs, des remarques sur le style de l’auteur, comme en [25], sont très courantes, elles prétendent évaluer la qualité littéraire de l’ouvrage, tout en donnant un avant-goût au lecteur.

[24.] Das Kunststück dieser Prosa liegt – angesichts der Thematik entgegen aller Wahrscheinlichkeit – in ihrem Witz. St Aubyn gelingt eine rare Gratwanderung zwischen analytischer Tiefenschärfe und Sarkasmus, zwischen psychologischer Einsicht und Gesellschaftsbeobachtung. Zu den brillantesten Eigenschaften dieses Autors gehört sein Blick für die Klischees der Elendsbeschreibung: Aus der Demaskierung gängiger Betroffenheits-Floskeln und Denkweisen angesichts zahlreicher vorstellbarer Lebenskatastrophen bezieht der letzte Band seiner Familiengeschichte, ebenso wie seine Vorgänger, seinen Esprit (Löhndorf, nzz, 15.02.12.). [25.] Der lockere, flapsige Stil ändert sich gemäß der inneren Wandlung in einen ernsteren, aber

nie schwermütigen Ton (Gilli, stand, 05.05.12., nous soulignons).

Ce genre d’actes textuels n’est pas spécifique aux recensions journalistiques, contrairement à un type particulier d’évaluation récurrente qui n’est, en tout cas, pas relevé par W. Zillig. Il s’agit d’une évaluation sur la forme et plus précisément sur la qualité de la traduction. Ce paramètre est de nouveau en lien avec la portée universelle revendiquée par les œuvres

littéraires. Le recenseur évalue la qualité de la langue et donc, dans le cas d’une œuvre étrangère, la qualité de la traduction, comme en [26], [27] et [28].

[26.] Ausdauernd schwelgt sie in freundlichen Lästereien, die Andreas Gressmann geschickt übersetzt hat (bähr, faz, 19.04.12., nous soulignons).

[27.] Auf fünf Selbstmorde und einen Mord brächte es die zusammengenommene Genealogie, erzählte der Schriftsteller freimütig, als er in diesen Tagen in Deutschland war, um sein soeben - in der gewohnt glänzenden Übersetzung von Miriam Mandelkow - erschienenes neues Werk vorzustellen: „Die Unermesslichkeit“ (Von Lovenberg, faz, 21.04.12., nous soulignons). [28.] Nebenbei widerlegt er dabei die Behauptung, man müsse kurze Sätze formulieren, um

verständlich zu bleiben. Seine sind manchmal gezählte zwölf oder mehr Buchzeilen lang, und man kann trotzdem - oder gerade deswegen - nicht aufhören zu lesen. Dazu mag im Übrigen die hervorragende Übersetzung beitragen (Freund, stand, 17.03.12., nous soulignons).

Dans les recensions scientifiques, W. Zillig (1982) identifie des actes textuels évaluant les aspects de la recherche et de la scientificité du propos. Or, ces deux aspects n’ont pas lieu d’être évalués dans le cas du corpus établi ici puisque le paramètre de l’objet de la recension est différent. On peut, au mieux, imaginer une évaluation de la littérarité d’un texte, de son rôle joué dans le domaine littéraire comme en [29]. Le recenseur pose comme l’une des principales missions de la littérature le fait de représenter l’inhumain. À l’aune de cette ambition, le recenseur juge que le roman parvient à un résultat en demi-teinte :

[29.] Die Darstellung von Unmenschlichkeit ist eine der Kernaufgaben von Literatur. Steve Sem- Sandberg hat sich am Holocaust-Drama des Ghettos von Lodz versucht – mit zwiespältigem Resultat (Schmid, nzz, 28.01.12.).

Mais il faut reconnaître que, contrairement au cas des recensions scientifiques, ce genre d’actes textuels est assez marginal. Cela s’explique par le fait, que le travail scientifique repose sur des principes et des méthodes communément admis. Dans le cas de la littérature, le fait même de voir dans la représentation de l’inhumain une des missions principales de la littérature est contestable. Le recenseur ne fait alors qu’évaluer un aspect à l’aune d’un critère qu’il a lui-même défini et auquel le lecteur n’adhère pas nécessairement.

La plupart des actes textuels simples relevés ici, se combinent en réalité à d’autres actes textuels pour former des actes textuels complexes. Dans le cas de l’évaluation, il n’est pas rare de rencontrer des macropropositions évaluatives où les arguments se cumulent comme en [24]. La prose de Edward St Aubyn se démarque par son humour. Elle réussit le tour de force de mêler la profondeur de l’analyse au sarcasme, la perspective psychologique à l’observation de la société. Les qualités de l’auteur sont louées en raison de son regard pour les clichés de la

misère. Ce passage additionne donc les actes textuels évaluatifs portant sur la forme. Mais cette combinaison d’actes textuels évaluatifs peut également se faire sur le mode de l’opposition, comme en [30].

[30.] Der interessanteste Inhalt (dieser reicht gerade für ein Fernsehspiel) hilft wenig, wenn es an Stil und Sprache mangelt (anonyme, spieg, 19.03.12.).

Le contenu est évalué comme intéressant, mais cette évaluation est immédiatement neutralisée par celle de la qualité de la forme, qui manque de style et de langue.

Il reste le cas des actes textuels complexes servant à justifier l’évaluation en corrigeant soit une composante informative [31], soit une composante évaluative [32]. Dans le premier cas, le recenseur fournit une information portant sur le titre du roman et sa date de parution. La partie évaluative de ce passage suit cette information et bloque l’inférence qu’elle pourrait déclencher. Le lecteur pourrait sans doute penser qu’un roman intitulé Ewig Dein raconte une histoire sombrant dans un romantisme sirupeux. Mais en s’exclamant avec soulagement que le titre induit en erreur, le recenseur pose déjà une évaluation positive du contenu.

[31.] In dieser Woche erscheint nun der neue Roman: „Ewig Dein“. Kein leichtes Spiel für Glattauer, 51, der nicht noch einmal auf das Erfolgsrezept des Mail-Dialogs setzen konnte. Der Titel führt, Gott sei Dank, in die Irre (anonyme, spieg, 06.02.12., nous soulignons).

En [32], il s’agit d’une argumentation qui est corrigée par l’évaluation du recenseur. Il mentionne, en effet, des propos liés à la réception du roman de Nicholson Baker. Ce roman qualifié de pornographique a la réputation d’être le plus sale de tous les temps. Or, Georg Diez prend justement le contrepied de cette affirmation en qualifiant le roman de drôle et de politique. Le recenseur justifie donc son évaluation en corrigeant une argumentation.

[32.] Nicholson Baker hat einen Porno-Roman geschrieben, angeblich das versauteste Buch aller Zeiten. Doch in Wirklichkeit ist „Haus der Löcher“ lustig und letztlich politisch (Diez, spieg, 16.01.12.).

En ce qui concerne les actes textuels complexes, on retrouve plus ou moins les catégories relevées par W. Zillig. Cependant, on constate que les actes textuels simples ne sont presque jamais isolés, ils entrent le plus souvent en combinaison avec d’autres actes pour former des composantes informatives et/ou évaluatives denses. Le schéma suivant représente les actes textuels dont la réalisation est attestée dans le cas des recensions journalistiques.

Figure 8 : Le modèle additionnel de W. Zillig (1982) transposé à la recension journalistique

Le modèle additionnel de W. Zillig offre un ensemble de composantes thématico- fonctionnelles constitutives de la recension. Les changements par rapport au modèle initial ont été opérés en fonction de paramètres qui diffèrent par rapport à la recension scientifique : le lectorat, le statut des auteurs, la nature du texte source. Ces changements montrent en quoi la recension est le fruit de ces paramètres. Cependant, on constate également les limites de cette démarche empiro-déductive : W. Zillig aboutit à ces composantes fonctionnelles à partir d’un corpus de textes. Mais cet inventaire ne suppose pas que l’ensemble de ces composantes doive être réalisé au sein d’un même texte. Il existe notamment des recensions qui n’ont aucune composante évaluative. Par ailleurs, il existe sans aucun doute des composantes qui n’ont pas été prises en considération par ce modèle, notamment celles que G. Stegert (1997 : 103) qualifie de fakultative Bausteine. Il semble pourtant difficile, de prime abord, de

distinguer entre des composantes constitutives et des composantes facultatives, dans la mesure où ni les unes ni les autres ne sont obligatoires.