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La production du bâti urbain dans la ville postcoloniale

5. Le bidonville, un mode de production spontané

5.2. Genèse des bidonvilles

Le choix est porté sur une nouvelle génération de bidonvilles dont le développement est relativement récent. Deux d'entre eux sont aujourd'hui complètement démolis et un autre en voie d'éradication. L’accent est mis sur la nature de cet habitat sordide, sur les conditions de son émergence et les objectifs des actions de résorption et de recasement. En d’autres termes, comment cet habitat se produit-il ? L’essentiel des matériaux analysé est puisé dans deux sources suivantes : l'enquête menée en 1992487 et le recensement488 exhaustif de l’habitat précaire et insalubre à Saïda mené en 2007 dans le cadre d'une opération nationale d'éradication des bidonvilles. Dhar Chih, Oued Brimou et Douar El Kherba489 se situent au Nord, au Nord-est et au Nord-ouest de la ville juste au-delà des limites d’extension urbaine. Ils occupent les valons et crêtes rocheuses considérés jusqu'alors inconstructibles par les anciens plans d'urbanisme. Du fait de l’amélioration de la gestion urbaine et des contrôles d’urbanisme (Réserves Foncières et Z.H.U.N.) les potentialités de création "spontanée" de bidonvilles dans la ville de Saïda ou à sa périphérie immédiate n'étaient plus possibles.

Tous les terrains libres en ville sont intégrés dans les réserves foncières communales en vue de leur affectation pour les zones d’extension. De ce fait, l’habitat précaire était repoussé au-delà des terrains urbanisables (Z.H.U.N-Nord, Z.H.U.N-Est, Z.H.U.N-Ouest). Ces trois bidonvilles appartiennent à la nouvelle génération de bidonvilles. Ils se sont développés à partir de petits noyaux d’habitat rural abritant les ouvriers des domaines agricoles E.A.C et E.A.I.

487 Mebarek.O & Belmamoun. A : Habitat précaire à Saida : étude de trois poches, Dhar Chih, Douar El Kharba et Oued Brimou, mémoire d'ingénieur en géographie, I.G.A.T, Université d’Oran, 1992.

488 Recensement de l'habitat précaire à Saïda, D.U.C. de Saïda, avril 2007.Plan local de l’Habitat 1993.

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Photo 4 : L'urbanisation atteint le bidonville de Dhar Chih au Nord, 2012.

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Ils sont devenus de véritables bidonvilles en croissance rapide : à Douar El-Kherba, 25 familles ont été recensées en 1982, alors qu'elles n’étaient que 19 en 1980. Dhar Chih comptait en 1983 environ 100 familles. Là aussi l’accroissement était important puisqu'il ne comptait que 69 en 1982 (A.P.C de Saïda 1983). L'ensemble de ces bidonvilles n'étaient pas pris en compte dans les opérations d'éradication des bidonvilles puisqu'ils n'étaient pas situés sur des terrains intégrés dans le périmètre d'urbanisation (photo n°3 et 4). Depuis 1995 et avec l’étalement urbain, ils font pleinement partie de la zone d’extension et de ce fait ils posent de sérieux problèmes d’extension spatiale et d’aménagement urbain.

Tableau n° 20 : Répartition des ménages des bidonvilles selon la date d’installation.

Années Effectif Part (%)

Avant 1970 117 22,5

1970 - 1977 132 25,5

1978 – 1984 123 24

1985 - 1992 144 28

Total 516 100 %

Source : Enquêtes ménage février 1992. Etat de l'habitat

précaire à Saïda D.U.C de Saïda, 2007.

L’installation de la population dans les bidonvilles (tab. n° 20) s’est opérée progressivement depuis les années soixante dix. La vague la plus massive est venue dans les milieux des années soixante dix. Cette période correspond à l’application du Plan spécial de wilaya (P.S.W.) en 1971 qui a amené de nombreux investissements créateurs d'emplois. La deuxième vague coïncide avec le début des années quatre vingt caractérisée par l’ouverture des chantiers de réalisation des programmes d’habitat urbain (Z.H.U.N) et des équipements publics. La manifestation des bidonvilles est liée à la multiplication des chantiers de bâtiment pourvoyeurs de travail et les contrôles d’urbanisme renforcés par les autorités locales depuis le début des années 1970. Les anciens bidonvilles (Amrous, Daoudi Moussa) étant saturés, les arrivants se regroupent hors du périmètre urbain à proximité des chantiers, lieux de travail. L'occupation des terrains non urbanisables confinés au-delà du périmètre d'urbanisation est tolérée par les pouvoirs publics (photo n°5). La répartition détaillée de tous les ménages révèle un ralentissement des arrivées à Dhar Chih et à Douar El-kharba depuis les milieux des années quatre vingt et une relative stagnation des arrivées au début des années quatre vingt dix. L'apport chronologique des flux le plus important s'est effectué entre 1970 et 1985 soit 74% à Dhar-Chih et 70% à Douar El-Kharba. En revanche, à Oued Brimou, plus récent et moins important, l'apport le plus important est intervenu dans la courte période de

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1992. La régression des flux caractérisant les deux premiers bidonvilles était compensée par le gonflement de l'Oued Brimou en recevant plus des trois cinquièmes (61 %) des arrivées. Cette régression des installations dans les bidonvilles trouve son explication dans la fermeture des chantiers de construction et la récession du développement local.

Deux facteurs expliquent la tendance observée dans la formation des bidonvilles : d'abord, le contrôle d’urbanisme renforcé avant 1980 a repoussé en situation de rejet les bidonvilles. Depuis la fin des années quatre vignt. Cette rigueur a cédé place au laxisme et le laisser-faire dans une conjoncture politique trouble ayant caractérisée la décennie quatre vingt dix. Cette situation a encouragé les populations sans abri à envahir des terres urbanisables à court et moyen terme dans le but d’obliger les autorités locales à les reloger dans un contexte où le logement est devenu une denrée rare et difficilement accessible. Enfin, l’appartenance des terrains à des agricultuers absentéistes a favorisé l’invasion de quelques parcelles par les populations sans abri à Oued Brimou. Les propriétaires n'étant pas motivés par la valorisation agricole de leurs terrains préfèrent les laisser en friche en attente d’une affectation plus rentable. Effectivement, ce terrain profitant d'une situation de rente a été intégré dans le périmètre d'urbanisation et exproprié par les domaines pour le lancement de nouveaux programmes d'habitat. Le bidonville fut totalement éradiqué pour laisser place à l'urbanisation et les 75 familles relogées dans la nouvelle cité collective à Bordj.

Tableau n° 21 : L'ancienne résidence des ménages des bidonvilles.

Dhar-Chih490 Douar El-Kheba491 Oued Brimou Lieu d'origine Nombre Part (%) Nombre Part (%) Nombre Part (%)

Ville de Saïda - - - - 75 74,25

Communes rurales 191 69,5 117 82,5 16 15,85

villes du Sud 48 18 14 9,5 5 4,95

Villes de l'Ouest 33 12,5 11 8 5 4,95

Totaux 272 100 % 143 100 % 101 100 %

Source : Enquêtes ménage février 1992. Etat de l'habitat précaire à Saïda D.U.C de Saïda, 2007.

490 Ce bidonville comptait 366 constructions en 2007 (D.U.C. de Saïda). Le nombre de construction s'est accru de 94 nouvelles constructions depuis 1992.

491 Ce bidonville coincé entre l'Oued Nezreg et la zone industrielle de Saïda, exactement à la charnière de la limite administrative qui sépare les communes de Saïda et de Rebahia. Il a connu, depuis 1992, une augmentation sensible du nombre de baraques. La dernière enquête menée par la D.U.C de Saïda (2007) a fait état de 272 constructions. Le nombre de constructions a presque doublé.

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Deux remarques principales (tab. n°21) caractérisent l'origine géographique des populations : une origine rurale de la population de Dhar Chih (69,5%) et de Douar-Kharba, (82,5%) et un exode urbain très marqué à Oued Brimou. Les chefs de ménages d'origine rurale proviennent des communes limitrophes (Ouled Brahim, Ouled Khaled, Ain El Hadjar, et El Hassasnas) et leurs localités respectives. Un ménage sur sept (18 %) à Dhar-Chih et un ménage sur neuf à

Douar-Kharba sont issues de la région steppique Sud-oranaise, pays aux conditions naturelles

difficiles et aux potentialités économiques maigres qui a toujours constitué un foyer d’immigration vers Saïda. Les chefs de ménages originaires des villes de l'Ouest (Mascara, Sidi Bel Abbes, et Tiaret) participent à 12,5% des arrivées à Dhar-Chih et à 8% à Douar

El-Kharba. À Oued Brimou, Un peu moins des trois quarts (74,25%) des ménages sont

originaires de la ville de Saïda ; ils y sont nés et y résidaient au sept dixième (69%) avant de venir s’installer dans ce bidonville. Ils habitaient à l'étroit dans les quartiers populaires denses de la ville (Amrous, Daoudi Moussa, Oued El-Oukrif, Bokhors, Sersour, Mejdoub).

La composition sociale de Dhar chih est assurée à plus des deux cinquièmes (44,5%) par des ménages originaires de la tribu des Ouled Brahim ; elle est également assurée par les Ouled

Ziad, originaires de Regassa, à raison de 7,35% et par la tribu des Derraga originaires de

Bougtob avec 8%. En revanche, à Douar El-Kharba 9,5% des chefs de ménage appartiennent à la tribu des Ouled Ziad. Ces deux tribus originaires des Hautes plaines de la Steppe sud-oranaise (wilaya d’El Bayadh) sont caractérisées par une vieille tradition de migration vers Saïda. Les originaires de la tribu des Ouled Merzouge, issus de la commune de Sidi Boubkeur et de Sidi Amar entrent pour les deux tiers (65%) de la population de Douar El-Kharba. Le développement des bidonvilles s’appuie sur les réseaux de solidarité communautaire et reproduit "inéluctablement des divisions tribales sur l’espace nouvellement investi"492.

En effte, plus des trois quarts soit 77 % des chefs de ménage à Dhar Chih déclarent avoir construit leurs baraques grâce à l’aide apportée par des parents. C’est une forme d’entraide collective dite la "Touiza" nécéssitant la mobilisation de plusieurs memebres de la même tribu. "Dans ces espaces déclassés de la ville, les familles aux faibles revenus, […] toute en

pratiquant l'auto-construction font appel à la tuiza pour édifier leur habitation"493. Plus de la moitie, soit 56 % des ménages avancent avoir été informé par des parents installés avant eux à Dhar Chih. "Chaque famille étendue en amène une autre et il peut paraître normal que

492 B. Semmoud, Op Cit, P.31.

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certains bidonvilles soient composés de communautés villageoises groupant quinze à vingt familles. Les liens tissés au village se consolident, s’affermissent en ville et ce, d’autant plus si l’on a une parenté avec un groupe socio-domestique installé de longue date"171. À Oued

Brimou cette solidarité communautaire est presque inexistante que chez 12 % des ménages

originaires du même lieu géographique. La solidarité communautaire trouve son explication dans la structure sociale même du bidonville. Le développement du bidonville par agglutination successive de constructions au fur et à mesure des arrivées se traduit par des groupements de constructions composés de groupes familiaux appartenant à la même tribu et donnent au bidonville une configuration spatiale particulière. "La proximité spatiale est

guidée par les liens familiaux ou de même origine géographique"494. Le bidonville constitue un lieu de transit entre la campagne et la ville. D’ailleurs, l’habitat sommaire, le mode de vie rural et la pratique de l’élevage l’attestent.

Tableau n° 22 : Répartition des ménages selon le type d'habitat antérieur

Type d'habitat Effectif Part (%)

Kheima495 75 14,5

Gourbis rural 116 22,5

Maison rurale 108 21

Maison en ville 92 18

Habitat précaire en ville 114 22

fermes 11 2

Total 516 100

Source : Enquêtes ménage février 1992.

Etat de l'habitat précaire à Saïda D.U.C de Saïda, 2007.

Les modèles d'urbanisations émergents sont largement dominés par la mémoire et les

références socioculturelles transmises d'une génération à une autre (Souiah, S-A, 2010 : 90).

Les objets reproduits dans l'espace nouvellement investis traduisent l'attachement au mode de vie et au mode d'habiter de la campagne quitté (Souiah, S-A, 2010 : 90)496. La population originaire d'un milieu rural vivait déjà dans des gourbis ou Khaïma avant leur installation dans les bidonvilles en ville (tab. n°22) : elle constitue la majorité de l'ensemble des ménages avec

171 F. Benatia., L’appropriation de l’espace à Alger après 1962, S.N.E.D., 1978.189p, p.45.

494 Souiah. S-A., Op Cit, 91.

495 Khaïma : tente qu’utilise le nomade comme gite familial. Constituée de bandes de toiles tissées avec des poils de chèvres et de chameaux. Plates, peu hautes mais très évasées.

496 Cf. Souiah. S-A., "Dhar Chih : un habitat populaire aux portes de la ville de Saïda", in Cahiers du Gremamo, Recherches urbaines sur l'Algérie, n°14, 1997, pp. 55-64.

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37%. L'habitation en gourbi dans la campagne est l'équivalant de la baraque dans le bidonville de la périphérie urbaine. Cela est indicatif de la précarité du mode de vie de cette partie de la population. En ce qui concerne la population issue des milieux urbain, deux ménages sur cinq (40%) habitaient un soit un logement délabré ou se trouvaient à l'étroit. De façon générale, la population des bidonvilles originaires soit d'un milieu rural soit de la périphérie populaire ou exceptionnellement d'un milieu urbain, vivaient déjà dans des conditions d'habitat défavorables. "Le bidonville est le résultat, et l'aboutissement, d'une longue paupérisation de

la majeure partie de la population algérienne et principalement de la population rurale"497. Pour ces pauvres familles aux conditions de vie défavorables et dans le besoin urgent d’un abri, le logement que le système formel est incapable de leur offrir est le seul mobil de cette mésaventure urbaine.

L'étude des lieux d'origines des chefs de ménage montre deux modes de mobilité tout à fait opposés : un exode majoritairement urbain à Oued Brimou et un exode quasi rural à Dhar

Chih et à Douar El-Kherba. Ce dualisme laisse supposer des mobiles divers déclencheurs des

flux ayant alimenter la formation des bidonvilles. Dans tous les cas de figure présentés, les raisons d’installation dans les bidonvilles sont liées aux conditions de vie et d'habitat difficiles. À Oued Brimou, l’installation dans le bidonville est une solution à un cas d’urgence pour la plupart des chefs de ménage, ils se trouvaient tous à l’étroit. Pour les trois quarts (74%) des ménages originaires des anciens quartiers populaires denses et dégradés de la ville, la mobilité est une redistribution voire un rejet de citadins marginalisés ; un tiers (34%) d'entres-eux ont précipité la décision de camper dans le bidonville dans l’espoir d'accéder au logement public pour réacquérir le droit à la cité498. La même proportion, soit 34% des chefs de ménages avancent que la cohabitation avec la famille élargie sous le même toit ou avec des voisins est souvent source de problèmes et de mésentente. Quelques-uns, soit 7 % des ménages, se trouvaient dans l'incapacité de payer un loyer au-dessus de leurs moyens financiers. Sans que les conditions antérieures soient signalées comme dramatiques, ils ont du quitter un logement loué dans la ville pour une baraque implanté dans le bidonville dans la même perspective de bénéficier de l'opération de recasement. Dans le même bidonville, à

497 F. Benatia, Op Cit, P.53.

498 Les habitants des bidonvilles ne peuvent ni louer ni acheter un logement. L'installation dans le bidonville s'inscrit le plus souvent dans une stratégie d'accéder un jour au logement socio-locatif dans les programmes publics. L'enquête menée en 2007 par l'O.P.G.I. de Saïda, montre qu'une proportion importante de locataires "mauvais payeurs" de loyers appartiennent aux recasés des bidonvilles.

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peine 5% des chefs de ménage originaires de Dhar Chih prétendent que la proximité de la ville et du lieu de travail est un motif suffisant pour changer de bidonville.

En effet, la localisation de l'Oued Brimo sur des terrains potentiellement urbanisable situés en lisière du périmètre urbain a encouragé les ménages sans-logis d'y élire domicile. Ce phénomène de “bourgeonnement” d’un nouveau bidonville indique à la fois le dérèglement dans les procédures de contrôle de l’urbanisme et un problème réel d’offre résidentielle pour les jeunes ménages issues des quartiers de la ville dont la seule perspective résidentielle reste la construction d'une baraques dans les tissus interstitiels des anciens quartiers populaires (Mejboub, Boukhors) ou à la lisière du périmètre d'urbanisation (Oued Brimo). Cette mobilité est induite par le processus de résorption des bidonvilles et les possibilités offertes par le recasement pour accéder au logement. À Dhar-Chih et à Douar El-Kharba, les mobiles d'installation des ménages d'origine rurale sont différents. Une migration s’effectuée surtout pour des raisons économiques et professionnelles mais rarement familiales : un ménage sur deux soit 50% à Dhar Chih s'est installé dans le bidonville pour des raisons de travail. Cette vague d’immigration a été croissante depuis 1971, date du démarrage du Plan spécial de wilaya et s’est accélérée tout au long des différents plans de développement quadriennaux par l’appel des chantiers de construction. Un net ralentissement des flux est observé au cours de la période 1985-1992, puisque seulement un ménage sur huit (13%) de l’ensemble s’est installé à Dhar-Chih pour le travail. Cette période est marquée par la fermeture de la plus part des chantiers de construction suite à l’atonie ayant caractérisé le secteur du bâtiment pendant la même période.

En Algérie, la prolifération des bidonvilles a été toujours présentée comme les effets d’une croissance démographique galopante et d’un exode rural massif vers les villes conjugués à la crise du logement. Ce schéma classique semble changé avec l'avènement des années quatre vingt et quatre vingt dix. Les cas de figure présentés montrent que le marché de l’emploi urbain n’est pas le seul facteur responsable de l’émergence des bidonvilles. Il faut élargir l'éventail des causes de l'habitat des pauvres aux citadins exclus du système formel de production foncière et immobilière ; il s'agit souvent de familles non solvables qui n'ont d'autre alternative que de camper dans les bidonvilles pour héberger leurs familles. "Ainsi, les

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territoires qui naissent aux abords des villes algériennes représentent donc l'unique solution pour les population en dérive, produit de l'exode rural ou du rejet de la ville formelle"499. Il est évident que les mécanismes qui sous-tendent le développement de cette nouvelle génération de bidonvilles sont différents de ceux qui ont fonctionné avant l’indépendance et pendant les années de développement. L’emploi était le moteur de développement de

Dhar-Chih et de Douar El-Kharba. Il a été un facteur régulateur des mouvements migratoires

pendant les phases d’euphorie et de réalisations (1970-1985). Son effondrement suite au marasme économique qui a frappé la ville pendant la période (1985-1990) a certes fait ralentir les flux des populations rurales, principales composantes sociales des bidonvilles, mais n’a pas pour autant empêché la naissance de nouveau noyaux précaires. Une mobilité intra-urbaine l'entretient cette fois-ci, animée par des mobiles liés au problème du logement : les conditions d'hébergement difficiles et l’accès difficile au logement et au sol sont des facteurs "d’exclusion" des populations défavorisées qui peuvent également engendrer la genèse de ce type d’habitat marginal. Aussi, le vide créé à l’égard des "exclus" des systèmes de production formels se traduit par une urbanisation spontanée en marge de la ville formelle. Il s’agit là d’une décohabitation forcée par la disgrâce de la vie qui a ballotté des familles pauvres et sans abri dans "les camps des démunies". Oued Brimou est un exemple illustratif de cette génération de bidonville (tab. n°23).

Tableau n° 23: Les motifs d'installation des chefs de ménages à Oued Brimou

Motif de mobilité Communes Les quartiers

populaires Effectif Part (%) Effectif Part (%)

Travail 5 26,3 - - Location chère - - 6 7,5 Problème de logement 6 31,6 28 34 Problèmes familiaux 4 21 28 34 Autres 4 21 20 24,5 Total 19 100% 82 100%

Source : Enquêtes ménage 1992. Etat de l'habitat précaire à Saïda, 2007, D.U.C, Saïda.

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Photo 6 : L’alimentation en eau potable est un corvée réservée aux enfants, 2012.

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Les données de l’enquête a permis la compréhension de la nouvelle logique de production des bidonvilles et nous éclaire sur le tournant dans les mécanismes de formation de la nouvelle génération de bidonvilles en ce sens que les installations en bidonville ne sont plus le fait, comme les décennies précédentes (1970 et 1980) des populations rurales quoique les flux d’origine rurale ne sont pas complètement taris puisque l’insécurité dans la campagne participent aussi au développement des bidonvilles.

La vie dans les bidonvilles est un monde à part : les baraques ne possèdent aucune annexe d’hygiène et le raccordement aux réseaux urbains de base est nul. Les eaux usées ruissellent à fleur du sol. L’alimentation en eau potable est un corvée réservée aux enfants qui effectuent de longs trajets quotidiens à dos d’âne ou à pied pour s’alimenter en eau (photo n°5). L’électricité est non plus assurée, mais le câblage électrique pour l’ensemble des baraques, malgré le danger de l’opération, reste un moyen d’acquisition de courant électrique (photo n°6). Toutefois, l’utilisation de la bougie, de la lampe à gaz, rarement une batterie électrique ou un groupe électrogène pour les ménages privilégiés, reste une pratique courante chez la plupart des ménages pour éclairer l’intérieur de leur résidence. A cette précarité, d'autres aspects négatifs caractérisent la vie dans les bidonvilles : le commerce ilicite de l’alcool, la prostitution, le chômage, le commerce inforel500 exercé par les enfants dans les marchés de la