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Contraintes du système de production foncière étatique

Production de l'espace urbaine sous l'économie de marché

2. Une nouvelle politique foncière (1990)

2.4. Contraintes du système de production foncière étatique

Dans son principe, la loi d'orientation foncière de 1990 est venue corriger les dysfonctionnements engendrés par l'application de l'ordonnance de 1974, portant création des réserves foncières communales. Cette réorientation de la politique foncière est l'aveu officiel de l'échec de la dite ordonnance dont les dispositions sont abrogées par la loi 29/91 portant orientation foncière. Cependant, nombreux sont les contraintes et défaillances qui ont empêché le nouveau système public de l’offre de terrain d’atteindre de meilleurs niveaux de production. Elles sont inhérentes au fonctionnement du système de production et à son organisation technique et financière.

2.4.1. L'acquisition des terrains, une procédure complexe

Un bref aperçu s'impose sur les activités, la mission et le rôle de l’Administration des Domaines, du Cadastre et de la conservation foncière. Il retrace l'acheminement et l'instruction d'une demande d'acquisition de terrains urbanisables. L’administration des Domaines est chargée d’assurer une gestion rigoureuse et correcte du patrimoine public et du domaine privé de l’Etat (urbain, agricole, bâti, non bâti et mobilier) en veillant à son utilisation, à sa sauvegarde et sa protection. Dans ses prérogatives, cette administration publique met à la disposition des différents services publics, les personnes physiques et

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morales de droit privé ou public les biens mobiliers et immobiliers de l’Etat par voie d’affectation, de cession, de concession ou de location, conformément aux règlements en vigueur. Elle a également le pouvoir pour exercer un contrôle permanent sur l’utilisation du patrimoine de l’Etat (Domaine public et domaine privé) par les services publics concessionnaires ou affermataires. Concernant les attributions du Cadastre, en sa qualité de géomètre de l’Etat, dans le secteur foncier urbain, sa vocation est d’assurer d’une façon contenue et permanent les travaux topographiques nécessaires à l’établissement des plans cadastraux demandés par les services des Domaines. Chemin faisant, la procédure aboutit à l’identification de l’assiette foncière sollicitée pour la répertorier par des références cadastrales, nécessaires pour une maîtrise convenable des mutations et transferts fonciers. Quant aux activités assignées à la direction de la Conservation Foncières, dans le cadre des transferts de terrains, consistent à soumettre les actes de transfert de propriété aux formalités d'enregistrement et de publicité foncière sauf pour les actes en instance de frais d’hypothèque. La procédure de transfert de propriété selon le nouveau cadre juridique semble obéir à une procédure simple555, mais l’action concrète des opérations reste marquée par la bureaucratie et la lourdeur procédurière qui affectent son efficacité. Les blocages qui affectent le processus d’acquisition de terrains peuvent être situés à deux niveaux : d'abord au niveau du Cadastre dont les services éprouvent beaucoup de difficultés à satisfaire la demande. La lenteur des travaux topographiques s'explique l'insuffisance numérique du personnel technique disponible eu égard des missions assignées à ces services. La lenteur de l’établissement des levés cadastraux s’explique par la mission confiée aux services du Cadastre, à savoir l’établissement des matrices et des fichiers cadastraux de toutes les communes de la wilaya de Saïda. C'est un travail minutieux et détaillé qui demande beaucoup de temps et de personnel compétant. L’attente est déjà considérable du fait d’un goulot d’étranglement représenté par le bornage des parcelles objet de transfert de propriété. Les dossiers sont traités par priorité et en fonction de l’opportunité du projet.

Outre les retards accusés dans l’établissement des plans cadastraux nécessaires à l’évaluation du prix de cession de chaque parcelle. Le retard dans le règlement des mémoires de paiement du à l’absence sinon l’insuffisance des crédits mobilisés pour l’acquisition des terrains est aussi une raison principale qui retarde ou bloque dans certains cas la procédure du transfert de propriété. Pour remédier à cet inconvénient qui fait obstacle à la relance de la

555 Arrêté interministériel fixant les conditions et modalités d’aliénation des terrains nus ou à bâtis relevant du Domaine privé de l’Etat et destinés à des opérations d’aménagement foncier et d’urbanisme N° 2 du 07 juin 1994.

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promotion foncière en particulier et aux exigences de l’urbanisation actuelle en général, la procédure a été allégée par l’arrêté interministériel n° 02 du 07 juin 1994. Ce dernier, confère aux walis territorialement compétents la faculté d’affecter les terrains relevant du domaine privé de l’Etat selon une procédure plus diligente pour activer la prise de possession devant faire l’objet d’opération d’aménagement foncier et d’urbanisme. Cette procédure permet aux services des domaines de pratiquer le paiement échelonné à l’égard des concessionnaires. En attendant le paiement intégral du prix de cession et l’établissement de l’acte de propriété pièce maîtresse du dossier d’instruction des actes d’urbanisme (permis de construire et permis de lotir), il est délivré un arrêté d’affectation d’usage faisant foi d’un acte de propriété qui permet aux acquéreurs d’accomplir les actes que confère le droit de propriété à savoir le permis de construire et le permis de lotir. Le bon fonctionnement d'un marché foncier, s'il existe, repose sur certaines conditions incontournables, à savoir : la transparence des transactions, la gestion, la fluidité et la communication de l'information et l'existence de stratégie basée sur une utilisation planifiée et rationnelle des terrains. Or actuellement en Algérie, ces conditions ne semblent pas toutes réunies. La mise à jour du cadastre urbain s'avère une opération de longue halène et les enquêtes foncières demandent plus de temps que prévu. Ceci a pour conséquence de freiner tout changement réel qui s'inscrit dans une problématique plus générale, celle du passage forcé d'un système socialiste vers l'économie de marché.

2.4.2. Epuisement des réserves foncières et raréfaction du sol constructible

L'absence d'une politique d'aménagement foncier est à la base de tous les problèmes urbains. L'Agence Foncière n'est pas une création algérienne. Beaucoup de pays occidentaux trouve utile voire indispensable de se doter d'un opérateur public pour mener à bien une politique foncière prédéfinie au service de l'aménagement de l'espace urbain. La finalité de création d'un tel organisme spécialisé est l'acquisition préalable des terrains urbanisable et l'aménagement foncier à la base de toute stratégie d'urbanisme. Son intervention se résume donc à l'achat de terrains nécessaires pour l'activité de promotion foncière ou immobilière à une échelle urbaine réduite. Le P.D.A.U. de révision de Saïda (2014) fait un constat alarmant en ce qui concerne l'épuisement des réserves foncières nécessaires pour le développement urbain futur. Le report de l'urbanisation sur le centre limitrophe de Rébahia apparait comme la seule alternative d'où l'intérêt d'un groupement urbain Saïda-Rebahia. Un périmètre d''intervention digne d'intérêt pour l'agence foncière où elle est à pied d'œuvre depuis quelques années et où son rôle ne peut être qu'efficace à ce niveau intercommunal pour un développement urbain cohérent. En effet, c'est à ces deux échelles (urbaine et périphérique)

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que l'on peut maitriser les prix fonciers et influencer la planification urbaines. Par ailleurs, le budget de fonctionnement de l'Agence foncière exige une manne financière minimum qui ne peut être alimentée que par l'acquisition continuelle de terrains et leur valorisation urbaine, permettant ainsi la constitution d'un patrimoine foncier nécessaire pour sa pérennité. L'épuisement des réserves foncières non renouvelées et la raréfaction du sol ralentissent l'activité de l'Agence foncière en matière de promotion foncière et immobilière. Dans ces conditions, son intervention se limite à un périmètre restreint et inadapté par rapport a sa véritable mission et les objectifs pour lesquels elle a été crée. Elle s'occupe de plus en plus à des opérations de régularisation foncière des constructions illicites et de l'assainissement d'un contentieux foncier légué par la gestion foncière antérieure. Les faibles ressources générées par ces nouvelles missions accessoires couvrent à peine le budget de son fonctionnement d'autant plus que l'Agence foncière est un organisme autonome qui fonctionne sur un budget propre.

A la fin de l'année 2003, le champ de compétence territorial de cet organisme est élargi par la création d'Agence Foncière de Wilaya556. Elle a pour mission557 l'exercice de la fonction d'aménageur et de promoteur foncier. Pour qu'elle soit en phase avec les nouvelles approches de la politique foncière urbaine et les stratégies urbaines développées, elle peut accomplir pour le compte des collectivités locales et de l'Etat plusieurs missions, entres autres, la mise en œuvre d’opération de régulation foncière conformément à la réglementation en vigueur ; l’assistance des collectivités locales dans la préparation, l’élaboration et la mise en œuvre des instruments d’urbanisme et d’aménagement ; l’initiation d’opération d’acquisition et d’aliénation d’immeubles et de droits immobiliers pour son propre compte. Quant à l'utilisation du droit de préemption ou d'expropriation pour l'acquisition d'immeubles ou de terrains urbains dans le cadre des opérations de restructuration spatiale ne semble susciter chez l'Agence foncière aucun intérêt particulier. Portant l'espace central de la ville de Saïda recèle beaucoup de friches urbaines et d'anciens dépôts abandonnés sans affectation précise. La plus part des opérations d'urbanisme réalisées depuis une décennie se sont projetées

556 Décret exécutif n° 03-408 du 05/11/2003 modifiant et complétant les dispositions du décret exécutif n° 90-405 du 22/12/1990 fixant les règles de création et d’organisation des agences locales de gestion et de régulation foncières urbaines ; et l'Arrêté interministériel du 12 juin 2004 portant création de l’A.G.R.F.U.W.SA et délibération de 28 décembre 2003 de l'assemblée populaire de la Wilaya de Saïda (A.P.W.) approuvée par l'arrêté ministériel n 04-23 du 17 avril 2004 du ministère de l'intérieur et des collectivités locales.

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essentiellement sur les terrains domaniaux de la périphérie558. L'action de cet organisme comme support d'une bonne maîtrise foncière demeure hypothétique tant qu'elle se cantonne dans le rôle réductible qui consiste à vendre des terrains à bâtir. Celle-ci depuis sa création depuis 1990, avait mal négocié le virage du changement pour adapter son activité à la politique foncière dessinée dans le cadre de la loi d'orientation foncière de 1990. Sans vouloir idéaliser trop la place de la nouvelle Agence foncière entre les collectivités locales et les services étatiques chargés de l'urbanisme, celle-ci a un rôle important à jouer dans la stratégie d'aménagement foncier et d'urbanisme. Par l'usage raisonné des moyens juridiques et techniques (P.D.A.U, P.O.S, droit de préemption et d'expropriation…) et le partenariat avec les propriétaires privés, son intervention doit s'inscrire dans un périmètre d'intervention pertinent basé sur des études faisabilité du portage foncier à moyen et à long terme...etc. L'adoption d'un système libéral depuis 1990 n'était pas suivie de véritable mutation politique et économique dont dépend le bon fonctionnement du marché foncier, du reste, l'actualisation du cadastre, la modernisation des services des domaines et de la conservation foncière ne semblent pas être à l'ordre du jour. Or, la création d'observatoires fonciers et l'élaboration d'une base de données mise-à-jour sur les transactions foncières est indispensables pour le bon fonctionnement d'un marché foncier d'autant plus que la transparence des transactions foncières et la communication de l'information en dépend.