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Section II. Le cadre juridique de la preuve moderne en droit du travail

A. Le formalisme électronique des actes juridiques en droit du travail

152.-Aucun principe juridique ne s’oppose a priori à l’élaboration d’un contrat de

travail électronique, à l’exercice de formalités électroniques par voie électronique, ou à l’envoi d’une lettre recommandée électronique, et ce quelle que soit la phase du contrat de travail en cause. Toutefois, il semble nécessaire de poser des limites à cette acceptation généralisée de la voie électronique en droit du travail.

153.-Le contrat de travail électronique. Inappliquée en pratique, l’assimilation du

contrat de travail électronique au contrat de travail littéral est en théorie totale. L’imprécision juridique qui pèse sur la possibilité ou non de conclure un contrat de travail par voie électronique ainsi que l’exclusion du contrat de travail du champ d’application de la directive 2000/31/CE relative au commerce électronique, sèment le doute dans la doctrine. Pourtant les dispositions de la loi du 13 mars 2000 ne permettent pas ce doute, tant leur clarté est peu usuelle en la matière. Elles posent en principe que « l’écrit sous forme électronique est admis en preuve, au même titre que l’écrit papier ». La pratique du contrat de travail électronique, malgré les inquiétudes légitimes qu’elle suscite, est ainsi de

399 Le Code du travail contient actuellement 68 articles relatifs à l’emploi de la voie électronique parmi lesquels 18 articles sur la mise en œuvre générale des formalités électroniques.

400 A ce jour, nous comptons 24 arrêts de la chambre sociale de la Cour de cassation sur le contentieux de la voie électronique.

401 Parmi les analyses sur le sujet, retient toute notre attention la thèse de DEMOULAIN (M.), Nouvelles technologies et droit des relations de travail. Essai sur une évolution des relations de travail, éd. Panthéon Assas, Paris, 2012.

mise en droit français. Néanmoins, certaines raisons techniques, juridiques et pratiques s’opposent à son utilisation en droit du travail.

154.-Pour être valable, le contrat de travail électronique doit répondre aux exigences

d’un acte sous seing privé électronique. Outre les conditions essentielles requises par l’article 1108 du Code civil402 à la validité d’un acte juridique, le contrat de travail électronique doit garantir, selon les dispositions précédemment étudiées de l’article 1316-1 du Code civil, l’intégrité de son contenu et permettre l’authentification de ses signataires. Sa conservation exige d’être organisée de manière à ne pas altérer l’information qu’il contient.

155.-La signature électronique sécurisée définie à l’article 1316-4 du Code civil a pour

finalité de garantir aussi bien la perfection de l’acte, l’échange de consentements que l’identification des parties et l’intégrité du contenu. Toutefois, la mise en place de ce type de signature relève d’une grande complexité, notamment dans le milieu des relations de travail. En vertu de l’article 1316-4 alinéa 2 du Code civil, la signature électronique ne peut simplement revêtir la forme du nom des cosignataires ou de leurs initiales apposées en bas du document électronique comme l’autorise la signature d’un contrat de travail sur support papier. Ce type de signature, ne s’assimilerait pas au « procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache » défini par le Code civil. Aussi, la signature électronique sécurisée nécessite-t-elle pour parfaire la conclusion d’un contrat de travail électronique, l’intervention d’un tiers à l’entreprise, maîtrisant « la cryptographie à clés asymétriques »403. C’est dire si elle est inadaptée à la pratique des relations de travail.

156.-La signature électronique non sécurisée requiert également le recours à une

méthode d’authentification, composée de codes électroniques secrets élaborés par des experts en informatique. Contrairement à la signature sécurisée, cette signature dite «simple », n’entraîne pas de présomption de fiabilité lorsqu’elle est apposée à un document électronique. Cette précision a des conséquences importantes au regard de l’ordre de la

402 C. civ. art. 1108 : « Quatre conditions sont essentielles pour la validité d’une convention : le consentement de la partie qui s’oblige ; Sa capacité de contracter ; Un objet certain qui forme la matière de l’engagement ; Une cause licite dans l’obligation ».

403 DEVEZE (J.), « Vive l’article 1322 ! Commentaire critique de l’article 1316-4 du Code civil », in Etudes offertes à P. Catala, Litec, Paris,2001, p. 529.

preuve, puisqu’il incombe à celui qui invoque l’acte, de prouver que la signature se rattache effectivement au signataire et qu’elle a bien pour fonction de préserver l’intégrité de l’acte. Les juges du fond ont décidé qu’une signature scannée ne peut s’apparenter à ce type de signature électronique404.

Compte tenu de leurs caractères techniques, les deux formes affairées à la signature électronique ne trouveraient pas de résonance dans le contentieux du contrat de travail.

157.-L’enjeu de la création d’un cadre spécifique du contrat de travail électronique

réside ainsi dans la prise en compte des spécificités de la relation de travail et dans la simplification des exigences de droit commun. A côté des formalités procédurales de droit commun, des formalités légales spécifiques pourraient être édictées pour atteindre ces objectifs et garantir une protection optimale du salarié. Il ne s’agit pas, sous prétexte de modernité, de réduire à néant le réalisme intrinsèque au droit des relations professionnelles. La spécificité du contrat de travail électronique appelle donc la recherche d’un équilibre entre l’interdiction du contrat électronique en droit de la famille et la promotion en droit des contrats de cette nouvelle forme de convention.

158.-La mise en œuvre de la procédure dématérialisée - certains la nomment

« procédure déshumanisée »405 - n’a pu raisonnablement s'appliquer à tous les types de contrat. La nature anthropologique de certains contrats en marge, allait à l'encontre de son installation généralisée. Tel est le cas notamment du contrat de mariage ; il semble incohérent que ce type de contrat qui met en relation deux êtres humains puisse se conclure de manière électronique. C’est d’ailleurs ce que prévoit l’article 1108-2 du Code civil créé par la loi du 21 juin 2004, il énonce que « lorsqu’un écrit est exigé pour la validité d’un acte juridique, il peut être établi et conservé sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 1316-1 et 1316-4 et, lorsqu’un acte authentique est requis, au second alinéa de l’article 1317 ». Le texte prévoit également que lorsqu’une mention écrite de la main même de celui qui s’oblige est exigée, ce dernier peut l’apposer sous forme électronique. L’article 1108-2 du code civil pose deux exceptions à cette règle. Elles

404 CA Fort de France, ch. civ., 14 déc. 2012, n° 12/00311, note CAPRIOLI (E), Comm. com. élec., mai 2013, n°5, comm. 60.

405 AMRANI-MEKKI (S.), « L’impact des nouvelles technologies sur l’écrit et l’oral en procédure civile », in La parole, l’écrit et l’image en justice : quelle procédure au XXe siècle ?, Presses universitaires de Limoges, 2010, p. 157-196.

concernent les « actes sous seing privé relatifs au droit de la famille et des successions » et ceux « relatifs à des sûretés personnelles ou réelles, de nature civile ou commerciale, sauf s’ils sont passés par une personne pour les besoins de sa profession ».

Le danger de rendre la relation contractuelle superficielle, eu égard à l’absence de contact physique qu’entraînent les TIC, s’étend au contrat de travail qui comporte également un fort caractère intuitu personae. Aussi, il apparaît préférable que la conclusion du contrat de travail électronique à durée déterminée (puisqu’il faut un écrit obligatoirement pour ce type de contrat comme pour le contrat d’intérim), comprenne un aménagement des règles de droit, pour qu’avant le début de la relation de travail, le salarié et l'employeur se rencontrent physiquement (l’entretien

d’embauche se déroulant de plus en plus par « Skype », « MSN » ou

visioconférence406).

159.-L’absence de clarté et de visibilité en matière de contrat de travail électronique,

nous amène à tirer des enseignements des systèmes étrangers ayant appliqué la Directive du 13 décembre 1999. En Belgique la loi du 3 juin 2007407 autorise expressément la signature du contrat de travail électronique dans le cadre de la relation individuelle de travail. Elle définit la signature électronique, donne force probante au contrat de travail électronique et met en place un système d’archivage électronique propice à la conservation des preuves. Toutes les formes de contrat sont concernées par la loi : à durée indéterminée, à durée déterminée, intérimaire408, etc. La validité du contrat de travail électronique est soumise à des exigences particulièrement strictes et fait l’objet d’un contrôle renforcé409. Il doit nécessairement être conclu sous signature électronique sécurisée410 avec l’accord exprès des parties411 et être archivé électroniquement chez un prestataire de service

406 NICOLET (S.), « Candidats et recruteurs : les nouvelles connections », Les cahiers du DRH, déc. 2007, n° 138, p. 18-23 ; TRICOIT (J.-Ph.), « Recrutement, rupture du contrat de travail et TIC », JCP S, oct. 2013, n° 40, p. 9-14.

407 L. du 3 juin 2007 portant des dispositions diverses relatives au travail : Titre III « l’utilisation de la signature électronique pour la conclusion des contrats de travail et l’envoi et l’archivage électronique de certains documents dans le cadre de la relation individuelle de travail », M.B. 23 juil. 2007, n° 29, p. 39313. Elle modifie toutes les lois relatives au contrat de travail et notamment les lois belges du 3 juillet 1978 relatives aux contrats de travail et du 24 juillet 1987 sur le travail temporaire.

408 Art. 9 et 11 L. 3 juin 2007, M.B. 23 juil. 2007, n° 29, p. 39313.

409 Art. 3 bis : «un contrat de travail signé au moyen de la signature électronique créée par la carte d’identité électronique ou d’une signature électronique qui satisfait aux mêmes conditions de sécurité que celles présentées par la carte d’identité électronique est assimilée à un contrat de travail papier signé au moyen d’une signature manuscrite ».

410 Dite « signature créée par la carte d’identité électronique ».

411 Art. 3 L. 3 juin 2007, M.B. 23 juil. 2007, n° 29, p. 39313 : «Le travailleur ne peut être contraint de conclure un contrat de travail au moyen d’une signature électronique ».

d’archivage412. Ces conditions formelles seraient la clé de voûte du bon fonctionnement de ce procédé électronique et de la garantie du libre consentement du salarié.

L’attrait notoire de l’emploi de ce procédé en droit du travail résiderait dans la préconstitution d’une preuve et sa conservation par un tiers au contrat. Elle aurait pour mérite de contrebalancer l’inégalité des armes probatoires, en prenant acte de la réalité des rapports sociaux et de la spécificité du contentieux du contrat de travail : alors que « le droit civil rechercherait […] ‘la Paix sociale’ au travers d’une ‘politique de désarmement’ […], le droit du travail met en place les conditions d’une ‘Paix armée’, une sorte de politique de dissuasion, d’aucun dirait un équilibre de la terreur»413.

160.-La doctrine française ne fait pas montre de prolixité sur le sujet bien que certains

auteurs modernistes se félicitent de l’inauguration par le droit belge d’un tel procédé et sollicite son intégration dans le code du travail français414. D’autres auteurs trouvent dans le contrat électronique une utilité manifeste, en termes de gestion du personnel et d’efficacité415. Selon M. DEMOULAIN, il permettrait de reporter automatiquement les informations relatives au salarié dans un logiciel de gestion des données de ressources humaines, assurerait une conclusion accélérée du contrat et remplirait, par nature, l’exigence de la pluralité d’exemplaires propre à l’acte sous seing privé416.

Cet engouement peut paraître excessif. Le délai de latence entre l’accord et la signature matérielle du contrat de travail, n’a selon nous rien d’un obstacle au bon déroulement de la conclusion de ce type de contrat417. Au contraire, elle permet aux parties de donner leur consentement en ayant mesuré toute l’importance de leur engagement. Des contraintes pratiques se profilent également quant à la procédure à

412Cf. site du Service public fédéral belge Emploi, Travail et Concertation sociale. SCHMIDT (H.), « Contrat de travail et simplification administrative : ne pas se fier aux apparences », mai 2008, [http://www.avcb-vsgb.be/fr/Publications/documents.html ?doc_id=222&vID=250].

413 RADE (Ch.), « La contrainte en droit du travail », in La contrainte, Economica, 2007, p. 83-100.

414 BENSOUSSAN (A.), « La Belgique inaugure le contrat de travail électronique », 13/04/2007. En ligne : [http://www.01net.com].

415 Les auteurs ne peuvent néanmoins perdre de vue que cette conception utilitaire des TIC les inscrit dans la réflexion actuelle sur valeurs d’efficacité et de productivité attribuées à la science et aux instruments techniques qui servent avant tout l’intérêt économique. Sur les risques que ces valeurs supplantent les valeurs véhiculées par le droit, voir l’étude canadienne : CASTELLI (M. D.), « sciences et droit : relation et rapports de force », Les Cahiers de droit, 1996, vol. 37, n° 1, p. 93-119. En droit français : BAUDOUIN (J.-L.) et LABRUSSE-RIOU (C.), Produire l'homme, de quel droit ?, PUF, Paris, 1987, p. 278.

416 DEMOULAIN (M.), Nouvelles technologies et droit des relations de travail. Essai sur une évolution des relations de travail, éd. Panthéon Assas, Paris, 2012, p. 81.

suivre en cas de changement d’employeur ou sur les personnes à informer en cas de modification du contrat de travail. Dès lors, la voie prise par la doctrine européenne vers un cadre spécifique, simple et protecteur du salarié pour les contrats de travail électroniques fait sens418.

161.-Les formalités contractuelles accomplies par voie électronique. Outre son

obligation principale de rémunération, il incombe à l’employeur, dans le rapport de travail, de satisfaire une myriade d’obligations complémentaires telles que les obligations d’information ou d’adaptation. L’obligation d’information du salarié s’étend de la conclusion à la rupture du contrat de travail. L’emprunt de la voie électronique419 permet la réalisation preste et simplifiée des formalités contractuelles découlant de la conclusion du contrat.

L’écrit sur support électronique entérine les négociations précontractuelles et facilite les échanges à ce sujet. Il est reconnu que l’employeur peut, par lettre simple, respecter son obligation de remettre au salarié lié par un contrat à durée déterminée ou indéterminée, dans les deux mois qui suivent l’embauche, un ou plusieurs documents comportant des informations sur les éléments essentiels du contrat

conformément aux exigences communautaires420. De même, aux termes du Décret du

2 février 2011, l’envoi du contrat de travail par lettre recommandée électronique est juridiquement recevable. Selon les dispositions de l’article 1316-2 du Code civil, seule l’acceptation du salarié est nécessaire pour la mise en place du procédé électronique : « les informations qui sont demandées en vue de la conclusion d’un contrat ou celles qui sont adressées au cours de son exécution peuvent être

417 L’argument de DEMOULAIN (M.) selon lequel : « il peut être ainsi évité qu’un candidat intéressant tout particulièrement l’entreprise ne cède aux sirènes d’un autre employeur », peut être réfuté par la vision solidariste, selon laquelle l’employeur s’enrichira d’un salarié ayant mesuré l’importance de l’engagement qu’il prend vis-à-vis de l’entreprise plutôt que d’un salarié s’engageant sur un coup de tête.

418 SCHMIDT (H.), loc. cit.

419« Le modèle du ‘ traitement de texte’ suppose ‘une temporalité circulaire, réversible et résolument instable, […] le texte est en état de réécriture permanente’ et peut faire ‘l'objet de versions successives, multiples, produites avec la plus grande aisance ». OST (F.), cité par RAYNOUARD (A.), « Adaptation du droit de la preuve aux technologies de l’information et à la signature électronique-Observations critiques », Defrénois, 30 mai 2000, n°10, p. 593.

420L’employeur doit informer le salarié de l’identité des parties, le lieu, la date de l’exécution du contrat et la durée du travail, la nature de l’emploi, le salaire, la durée du congé payé, la convention collective applicable, etc.

Directive CE 91/533 14 octobre 1991 relative à l’obligation de l’employeur d’informer le travailleur des conditions applicables au contrat ou à la relation de travail ; MINGANT (N.), « L’ordonnance relative à l’accomplissement de certaines formalités contractuelles par voie électronique », Lexbase Hebdo éd. soc. juil. 2005, n° 175.

transmises par courrier électronique si leur destinataire a accepté l’usage de ce moyen ».

162.-L’employeur peut également transmettre par voie électronique des documents

informatifs relatifs à l’exécution du contrat de travail, tels que les relevés mensuels des heures supplémentaires, les bulletins de paie421, etc. Un régime spécial relatif à l’utilisation de la voie électronique en droit du travail semble émerger, plusieurs articles précisant dans leur dernier alinéa les modalités d’admission de ce procédé. En ce sens, l’employeur désirant envoyer des bulletins de paie dématérialisés doit respecter deux conditions cumulatives selon l’article L3243-2 du Code du travail inséré par l’article 26 de la loi de simplification des procédures du 12 mai 2009422. D’une part, il lui faut recueillir l’accord exprès du salarié ; d’autre part, ce document électronique doit être de « nature à garantir l’intégrité des données » qu’il contient423. Aussi les TIC assurent-elles la promotion d’une nouvelle forme de « formalisme informatif »424 en droit du travail.

L’arrêt de la chambre sociale du 20 avril 2005425 est l’illustration la plus notable de l’admission des TIC comme vecteur d’information. En l’espèce, elles permettent à l’employeur de remplir son obligation d’information des salariés lors de la phase d’exécution du contrat, et plus particulièrement, l’obligation de l’employeur de porter à la connaissance des salariés à temps partiel la liste des emplois disponibles à temps complet426 en vertu de la priorité qu’ils détiennent sur leur attribution427. Il s’agit de l’application en droit du travail de l’ordonnance du 16 juin 2005 sur l’accomplissement de formalités contractuelles par voie électronique.

A une question novatrice, la Haute juridiction rend une « décision en demi-teinte »428. L’employeur satisfait-il son obligation d’information des salariés prioritaires par la diffusion sur le réseau Intranet de l’entreprise d’une « liste exhaustive et permanente, comportant le titre, la nature du travail, la localisation et la date de disponibilité

421 CAPRIOLI (E.), « La dématérialisation des bulletins de paie », Cahiers de droit de l’entreprise, juill. 2009, n°4, p. 61-63.

422 Loi n°2009-526 du 12 mai 2009 « de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures », JORF n°0110, 13 mai 2009, p. 7920.

423 C. trav. art. L3243-2 c. trav.

424 TERRE (F.), Droit civil les obligations, précis Dalloz, 9 e éd, par. 262 ; AUZERO (G.), « Obligation d’information de l’employeur et clause de dédit-formation », Rev. Dr. Trav. 2007, p. 450.

425 Cass. soc. 20 av. 2005, n°03-41802.

426 C. trav. article L3123-8.

427 MINGANT (N.), loc. cit.

[…] accessibles au moyen d’un code » et permettant à chaque salarié « d’identifier les postes ‘correspondants’ au sien429 » ?

L’employeur, au soutien de ses intérêts, argue que les actuels articles L3123-8, L3123-4 et L3123-5430 du Code du travail ne précisent pas la modalité à employer pour renseigner les salariés. La Cour, tout en reconnaissant à l’employeur le droit de « porter à la connaissance de ses salariés les emplois disponibles par voie de communication électronique, notamment sur le réseau INTRANET de l’entreprise », nuance son propos et affirme que ce procédé n’est pas suffisant au regard des

exigences légales. L’employeur est tenu « de procéder à une diffusion

spécifique concernant les emplois pouvant correspondre à la catégorie professionnelle, ou à un emploi équivalent » 431 des salariés concernés.

A la lecture de cette décision, l’absence de formalité légale particulière permettrait l’emploi de la procédure dématérialisée. Dans cette affaire, les juges s’attachent à limiter la portée de l’emploi du procédé collectif et impersonnel de l’Intranet. Celui-ci doit être accompagné d’une « diffusion spécifique », entendue par certain comme personnelle et nominative432. Force est de constater que l’envoi d’un mél personnalisé de la liste des emplois aux salariés concernés répond à cette exigence. Il devrait en toute logique être admis.

Cet arrêt a pour intérêt de fournir de précieux renseignements sur le rôle des TIC dans le rapport de travail. Elles s’inscrivent dans le giron de l’obligation de bonne foi de l’employeur dans l’exécution du contrat de travail puisqu’elles fournissent aux salariés un accès rapide et en tout lieu à la liste des postes vacants. Sans omettre qu’elles leur offrent également « la possibilité de bénéficier de progressions de carrière dans l’entreprise »433, garantissant ainsi le respect de l’obligation d’adaptation des salariés à leur emploi qui incombe à l’employeur.