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3.2 Approche théorique Les théories en études internationales

3.2.2 Les fondements de la théorie réaliste

Le réalisme s‘est établi comme la théorie dominante des relations internationales pendant les trois premières décennies qui ont suivi la Deuxième Guerre mondiale. Beaucoup de réalistes aiment établir une continuité qui remonterait à Thucydide, Machiavelli, Hobbes et Clausewitz dans l‘histoire des relations internationales. Cependant, l‘histoire du réalisme contemporain commence avec les attaques contre l‘idéalisme et prend son essor avec les écrits et les

enseignements de Hans Morgenthau (Politics Among Nations: the Struggle for Power and

Peace, 1958), qui définissent la discipline des relations internationales. Le réalisme est

circonscrit comme une théorie du politique et de la diplomatie qui néglige délibérément l‘économie et le social. Les fondements de la théorie réaliste peuvent être résumés comme suit :

Les réalistes considèrent comme unité d‘analyse les acteurs qui constituent l‘ensemble du système international, c‘est-à-dire les États-nations comme acteurs unitaires, personnifiés, égoïstes et rationnels. Les États représentent essentiellement une extension de la nature humaine, qui est foncièrement mauvaise (Hobbes). Les autres acteurs internationaux, tels que les institutions, sont subordonnés aux intérêts des États et n‘auraient donc pas la capacité d‘agir de façon autonome par rapport à ces derniers. Selon Battistella (2006, 115), « les organisations interétatiques ne sont pas des acteurs autonomes, car ils n‘agissent au mieux que par l‘intermédiaire des États ».

Les États sont motivés avant tout par la défense de l‘intérêt national, qui est souvent considéré comme une donnée fixe (Morgenthau, 2004). Les États poursuivent leurs intérêts propres et accroissent leur puissance afin de : survivre, affirmer leur sécurité, et user de leur influence vis-à-vis des autres États. La « rationalité » telle que définie par les réalistes est instrumentale, soit à l‘image d‘une connexion logique entre les moyens et les fins (Clausewitz, Machiavelli), et subjective, l‘intérêt national étant défini par l‘État lui-même. La conséquence est que l‘intérêt national prime dans le système international dans un cadre d‘anarchie et d‘« auto-défense ».

La nature du système international est anarchique (Waltz, 1979). Cette anarchie signifie qu‘il n‘existe pas d‘autorité centrale qui régisse les relations entre États souverains ou qui serait capable d‘imposer sa volonté de façon légale sur ces derniers. L‘anarchie se trouve donc à être un ordre (le modèle du dilemme du prisonnier). Par conséquent, la sécurité est une préoccupation fondamentale de tous les États.

La politique de la puissance : les relations interétatiques sont avant tout des rapports fondés sur la puissance, et plus particulièrement sur la puissance militaire. Dans un système anarchique où les États sont les seuls acteurs, le pouvoir de l‘État est un concept clé, puisqu‘à travers le pouvoir les États peuvent défendre leurs intérêts. La théorie réaliste qualifie le pouvoir de plusieurs façons : militaire, économique, diplomatique. L‘intérêt est donc défini en termes de puissance. La puissance économique est importante à des fins militaires, car la

puissance est nécessaire à l‘influence de l‘État. À cet égard, les États font des alliances pour contrecarrer la puissance de l‘ennemi, mais ces alliances ne sont pas permanentes. Selon Battistella, « l‘équilibre des puissances est le seul mode de régulation susceptible d‘assurer non pas la paix, mais un ordre et une stabilité internationales forcément précaires, car dans l‘histoire sans fin que constituent les relations internationales, il n‘y a pas de progrès possible » (Battistella, 2006, 114). En conclusion, le pouvoir des États se mesure à travers la distribution matérielle de la capacité militaire qui se trouve de façon ultime à être une déterminante très importante des rapports de politique internationale.

3.2.3 Le paradigme de la théorie réaliste et les relations parmi les États : application

de la théorie à notre recherche

Selon le paradigme réaliste, les relations parmi les États peuvent être expliquées par quatre propositions fondamentales (Mearsheimer, 1994). En premier lieu, les réalistes soulignent que le but principal de l‘État est d‘assurer sa propre survie. Par conséquent, les invasions et les occupations du territoire sont les menaces les plus pressantes qu‘il doit gérer. En effet, le contexte international anarchique dans lequel les États opèrent fait en sorte qu‘ils cherchent constamment à s‘assurer un niveau de pouvoir suffisant pour se défendre et pour faire avancer leurs intérêts matériels. En deuxième lieu, on tient pour acquis que les États sont des acteurs rationnels. Étant donnée la nécessité de survivre, ils agiront dans leurs relations avec les autres pour maximiser leurs chances de survie. Troisièmement, les États possèdent une capacité militaire inconnue des autres États. Il découle de cet état de fait que le système international est incertain et dangereux. En conclusion, la quatrième proposition affirme que les relations entre les États sont influencées et décidées par des « super puissances »31

(Mersheimer, 2001 cité par Slaughter, 2011). En ce qui concerne la coopération, selon les réalistes, les États la pratiquent dans le but d‘assurer leur intérêt national. En effet, d‘après Battistella, « l‘existence et l‘effectivité du droit international et des institutions de coopération sont fonction de leur conformité aux intérêts des États les plus puissants » (Battistella, 2006, 115). D‘après Glaser (1994-1995), chez les réalistes structuralistes (Grieco, Keohane, Waltz, Weber), la coopération entre les États est improbable. Les États vivent et agissent dans un système anarchique où la compétition entre les États les plus puissants est la

31 Notre source pour la définition de « super puissance » est le Dictionnaire de droit international public, sous la

direction de Jean Salmon (2001). « Superpuissance » est l‘une des expressions (grande puissance, puissance régionale) employées dans le vocabulaire diplomatique pour définir le concept de puissance (p. 911)

condition normale. Ainsi, même pendant les périodes de paix, les États évitent la coopération. En effet, selon Waltz, le système anarchique, « make the cooperation of parties difficult [...]. Rules, institutions, and patterns of cooperation [...] are all limited in extent and modified from what they might otherwise be » (Glaser, 1994-1995, 50). Cependant, les États acceptent de coopérer à certaines conditions. À cet égard, Glaser affirme ce qui suit :

I argue that this pessimism is unwarranted. Contrary to the conventional wisdom, the strong general propensity for adversaries to compete is not an inevitable logical consequence of structural realism‘s basic assumptions. Structural realism properly understood predicts that, under a wide range of conditions, adversaries can best achieve their security goals through cooperative policies, not competitive ones, and should, therefore, choose cooperation when these conditions prevail. (Glaser, 1994-1995, 51)

Dans le paragraphe suivant, nous chercherons de mettre en évidence les liens entre les concepts que nous allons étudier dans ce travail de recherche et le paradigme de la théorie réaliste. Nous examinerons en particulier, dans ce contexte, le concept de l‘intérêt national et de la souveraineté étatique et la réticence des États à coopérer.

3.2.4 Principaux liens entre la théorie réaliste et notre question de recherche.

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