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4.2 Opérationnalisation des intérêts économiques chinois et des limites politiques

4.2.2 Opérationnalisation des limites politiques potentielles : Les pressions

4.2.2.3 L‘American Service-Membrers‘ Protection Act (ASPA) et les accords

L‘American Service-Members‘Protection Act (ASPA ou « Hague Invasion Act »)80, a été

votée en 2002 dans le cadre de l‘administration W. Bush. Le but principal de cette loi est d‘interdire toute coopération des États-Unis avec la Cour pénale internationale (Coulée, 2003, 49; Granger, 2005; Pittman, 2005; Stompor, 2006). Selon Granger, les raisons de cette loi concernent la possibilité qu‘il puisse y avoir « some level of contact » (Granger, 2005, 67) entre le Procureur de la Cour et les citoyens américains et, surtout le personnel militaire américain. À cet égard, Granger rapporte une déclaration, rendue par un fonctionnaire du Département d‘État américain, qui atteste de la préoccupation de l‘administration W. Bush relativement au jugement de militaires américains par la CPI : « The exposure faced by the United States goes well beyond people on active duty and it includes decision-makers in our government‖, said a high-ranking State Department official who was authorized to speak about the policy but only if he was not identified. ―We're not hallucinating that our officials are at risk‖ […] » (Granger, 2005, 77). Cette loi fait état de l‘approche d‘opposition de l‘administration Bush face à la CPI comme faisant aussi partie d‘une plus vaste stratégie de sécurité nationale américaine à la suite des événements du 11 septembre 2001 (Granger, 2005 ; Pittman, 2005). Selon certains auteurs, dont notamment Granger, la logique de l‘ASPA et de la politique extérieure américaine, est liée au concept de liberté d‘action américaine qui ne peut pas être restreint (Granger, 2005, p. 69). En outre, doivent être pris en considération deux aspects de la politique extérieure américaine tout au long de l‘administration du président G.W. Bush, soit l‘aspect idéologique et l‘approche souverainiste et géopolitique des affaires internationales. En effet, l‘ASPA (2 août 2002) contient une section intitulée « Assistance to International Efforts », ou Dodd Amendment, qui autorise le gouvernement américain à participer à une ample gamme d‘efforts dans le domaine de la justice internationale. Cette section souligne ce qui suit : «Nothing in this title shall prohibit the United States from rendering assistance to international efforts to bring to justice Saddam Hussein, Slobodan Milosevic, Osama bin Laden, other members of Al Queda, leaders of Islamic Jihad, and other foreign nationals accused of genocide, war crimes or crimes against humanity. » (ASPA 2002, « Assistance to International Efforts », section 2015).

80 Le Congrès américain ayant adopté l‘American Servicemembers‘ Protection Act (ASPA), le président G. W.

Bush le signe le 2 août 2002. Le document est disponible à l‘adresse :

Les accords bilatéraux d’immunité (BIAs)

Selon certains auteurs et ONG (par exemple la Fédération internationale des ligues des droits de l‘Homme (FIDH))81 les États-Unis ont mené une campagne agressive contre la CPI. En

effet, les États-Unis ont conclu des accords bilatéraux dits « d‘immunité » (BIAs) avec des États parties au Statut de Rome, conformément à l‘article 98 du Statut de Rome, pour éviter tout transfert de ressortissants américains devant la CPI (Coulée, 2003, 58-70; Stompor, 2006 ; cf. Annexe II)82. De fait, ces initiatives se fondaient en étroite relation avec l‘ASPA.

Pour obtenir la signature de ces accords, les États-Unis menaçaient les autres États signataires, principalement du Sud, de suspendre leur soutien financier et militaire. En effet, surtout pendant l‘administration du président G. W. Bush, les États-Unis ont conduit une campagne visant à conclure le plus grand nombre possible d‘accords bilatéraux d‘immunité. Selon l‘American Non-Governmental Organizations Coalition for the International Criminal Court (AMICC), les États-Unis auraient surtout fait des pressions sur les États non membres de l‘OTAN – et donc non alliés –, afin de leur faire signer les BIAs. En conclusion, nous pensons que l‗ASPA et les BIAs constituent une forme de pression sur la communauté internationale pour sauvegarder les intérêts nationaux américains. De façon générale, le Congrès a approuvé – et le président a par après signé – toute une série de lois avec l‘objectif principal d‘éloigner les États-Unis de la CPI. Ces lois prévoient une vaste gamme des mesures vouées d‘une part à limiter la coopération des États-Unis avec la Cour et le financement de la Cour et, d‘autre part, à « punir » les États qui n‘acceptaient l‘approche américaine aux égards de la CPI83. Plusieurs de ces lois ont été amendées ou abrogées,

puisque les fonctionnaires américains ont réalisé qu‘elles nuisaient aux intérêts américains. Le tableau 17 ci-après a été conçu pour schématiser la législation américaine approuvée afin de contrer la compétence de la CPI.

81 www.fidh.org

82 Cette annexe dresse une liste des États africains ayant signés un BIA 83 http://www.amicc.org/usicc/legislation

Tableau 17 : La législation américaine contre la CPI

ANNÉE LÉGISLATION

2000-2001 Admiral James W. Nance and Meg Donovan Foreign Relations Authorization Act

2002 American Service-Members' Protection Act – Dodd Amendment; 2006, 2007,

2008 Amendments

2005 Nethercutt Amendment to the Foreign Operations, Export Financing, and Related Programs Appropriations Act, 2005 (H.R. 4818), Public Law No. 108- 447 (December 8, 2004)

2006 Nethercutt Amendment to the Foreign Operations, Export Financing, and Related Programs Appropriations Act, 2006 (H.R. 3057), Public Law No. 109- 102 (November 14, 2005)

2008 Nethercutt Amendment to the Foreign Operations, Export Financing, and Related Programs Appropriations Act, 2008, a division of the Consolidated Appropriations Act, 2008 (H.R. 2764), Public Law No. 110-161 (December 26, 2007)

2009 Nethercutt Amendment to the Foreign Operations, Export Financing, and Related Programs Appropriations Act, 2009, Public Law No. 111-8 (March 11, 2009)

Source: compilation de l‘auteure

Cependant, force est de constater que les États-Unis, depuis 2007, et surtout au cours de la présidence de Barack Obama, ont changé leur approche face à la compétence de la CPI pour ce qui est du cas du Darfour. Par exemple, parmi les objectifs poursuivis par la Sudan Peace, Security, and Accountability Act of 201284, on compte ce qui suit :

Directs the President to impose specified visa, development assistance, security assistance, property, credit, financial assistance, export, cultural, or scientific sanctions on any person or government that: (1) supported or assisted Sudan in the commission of serious human rights violations in Sudan, including by selling, leasing, or otherwise transferring military equipment to Sudan or providing property, goods, technology, services, or other support in the amount of $500,000 or more that directly and significantly contributes to Sudan

committing or assisting in the commission of serious human rights violations; (2) is interfering or has interfered with the delivery of humanitarian aid to Sudan; (3) is impeding the peace process or threatening the stability of any part of Sudan or the region; or (4) failed to execute an International Criminal Court arrest warrant against any Sudanese official if such person or government had the jurisdictional authority to execute the warrant and failed to make the arrest without reasonable justification.

De plus, le 15 janvier 2013 le président Obama a signé la loi S. 2318 ou la Department of State Rewards Program Update and Technical Corrections Act of 2012. Avec cette loi les États-Unis s‘engagent à payer des récompenses, d‘une valeur de plus de cinq millions de dollars, à qui donnera des informations qui permettront d‘arrêter, extrader ou de condamner les suspects déjà recherchés par la CPI85. À notre avis, l‘approche nouvellement favorable des

États-Unis à l‘action de la CPI rendra plus efficace le mécanisme de coopération avec le CDS pour atteindre l‘objectif de la lutte à l‘impunité et la résolution du conflit au Darfour.

4.3 Opérationnalisation des limites juridiques endogènes à la Cour pénale

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