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1 M´ ethode des perturbations

1.1 Le probl`eme `a r´esoudre

Consid´erons le probl`eme aux valeurs propres :

Hˆ=W|ψ (9.1)

d’un hamiltonien ˆH. Nous supposons que ˆH peut se mettre sous la forme d’un terme principal ˆH0et d’une perturbation qu’il est commode d’´ecrireλHˆ1, o`u λest un param`etre r´eel :

Hˆ = ˆH0+λHˆ1 . (9.2)

On suppose connue la solution du probl`eme aux valeurs propres de ˆH0: Hˆ0|n, r=En|n, r , r= 1,2, . . . , pn (9.3) o`u la d´eg´en´erescence de la valeur propreEn estpn, et o`u lespn´etats propres orthonorm´es|n, ravecr= 1,2, . . . , pn engendrent le sous-espace propreEn. On suppose ´egalement que le terme λHˆ1 est suffisamment faible pour n’ap-porter que de petites perturbations au spectre de ˆH0.

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Exemple. On d´esire calculer le d´eplacement des niveaux d’´energie d’un atome d’hydrog`ene sous l’influence d’un champ ´electrique externe (effet Stark).

En l’absence de champ externe, les ´energies de liaison de l’hydrog`ene sont de l’ordre de quelques ´electronvolts, les dimensions de l’atome de l’ordre de quelques angstr¨oms. Par cons´equent, le champ ´electrique cr´e´e par le proton et vu par l’´electron est donc de l’ordre de 1010 V m−1. Cela est gigantesque par rapport `a tout champ statique que l’on peut cr´eer en laboratoire. Le champ statique appliqu´e sera donc trait´e comme une perturbation faible du champ coulombien du proton. Le param`etreλ est dans ce cas l’intensit´e du champ appliqu´e, mesur´ee en unit´e de l’´echelle pertinente du probl`eme, c’est-`a-dire le champ coulombien typique 1010 V m−1.

1.2 D´eveloppement des ´etats et des ´energies propres

Nous ferons l’hypoth`ese que les niveaux d’´energieW de ˆH varient analyti-quement enλ. Siλest faible, ces niveaux, et les ´etats propres correspondants, sont donc proches de ceux de l’hamiltonien non perturb´e ˆH0.

La m´ethode des perturbations consiste `a d´evelopperetW en puissances deλ:

= 0+λ|ψ1+λ2 2+. . . (9.4) W = W(0)+λ W(1)+λ2 W(2)+. . . (9.5) et `a d´eterminer les coefficients successifs de ces d´eveloppements. Reportons pour cela ces d´eveloppements dans l’´equation aux valeurs propres (9.1) :

Hˆ0+λHˆ1 0+λ|ψ1+. . . =

W(0)+λ W(1)+. . . 0+λ|ψ1+. . . (9.6) et identifions chaque puissance deλ:

Hˆ00 = W(0)0 (9.7)

Hˆ01+ ˆH10 = W(0)1+W(1)0 (9.8) Hˆ02+ ˆH11 = W(0)2+W(1)1+W(2)0 (9.9)

. . . = . . . Par ailleurs, la condition de normalisation :

1 = ψ|ψ= ψ00+λ

ψ01+ ψ10

+. . . (9.10) entraˆıne :

ψ00 = 1 (9.11)

Re ψ01 = 0 (9.12)

. . . = 0.

1 . M´ethode des perturbations 191 Puisque la description du syst`eme perturb´e se fait dans le mˆeme espace de Hilbert que le syst`eme non perturb´e, chaque termeipeut se d´evelopper sur la base propre de ˆH0 :

i=

n pn

r=1

γin,r|n, r (9.13)

La s´erie d’´equations (9.7–9.11) permet de calculer de proche en proche lesi et lesW(i). On aura donc, en s’arrˆetant `a un ordre donn´e, une approximation de la solution.

Notons que l’´equation (9.7) implique que 0 est vecteur propre de ˆH0, et que W(0) est une des valeurs propres deH0. Par cons´equent :

W(0)=En (9.14)

et 0un vecteur du sous-espace propre correspondantEn.

1.3 Perturbations au premier ordre dans le cas non d´eg´en´er´e Si le niveau En n’est pas d´eg´en´er´e, nous notons simplement |n l’´etat propre correspondant. La solution au premier ordre est alors particuli`erement simple. Soient n = n0+λ|ψn1+. . . l’´etat perturb´e et Wn = Wn(0)+ λ Wn(1)+. . . le niveau d’´energie correspondant. D’apr`es (9.7), on a :

0n=|n Wn(0) =En , (9.15) ce qui traduit la proximit´e de l’´etat et de l’´energie perturb´es par rapport aux quantit´es non perturb´ees. Prenons le produit scalaire `a gauche par n| de l’´equation (9.8). En tenant compte de (9.15) et du fait que n|Hˆ0 =En n|, on obtient en posant ∆En(1)=λ Wn(1) :

∆En(1)= n|λHˆ1|n . (9.16) Au premier ordre, le d´eplacement ∆En(1) du niveau En est ´egal `a la valeur moyenne de l’hamiltonien de perturbation dans l’´etat|n.

1.4 Perturbations au premier ordre dans le cas d´eg´en´er´e

Supposons que le niveau En du hamiltonien ˆH0 pr´esente une d´eg´en´ e-rescence d’ordre pn. Notons |n, r, r = 1, . . . , pn une base orthonorm´ee du sous-espace propre associ´e. En g´en´eral, la perturbationλHˆ1l`evera la d´eg´en´ e-rescence et le niveau En sera cliv´e en pn sous-niveaux En +λWn,q(1), q = 1, . . . , pn. Nous noterons n,q les ´etats propres correspondants, et 0n,q d´esignera l’ordre z´ero enλde chacun de ces ´etats propres. Comme indiqu´e `a la fin du paragraphe§1.2, chaque0n,qappartient au sous-espaceEn. Notons qu’il n’y a aucune raison pour que les n,q0 co¨ıncident avec les vecteurs de

base|n, r, puisque ces derniers ont ´et´e choisis de mani`ere arbitraire. et nous voulons d´eterminer les coefficientsCq,r.

Multipliant (9.8) `a gauche par n, r|, nous obtenons :

pn

r=1

n, r|λHˆ1|n, rCq,r = λ Wn,q(1)Cq,r . (9.18) Pour chaque valeur deq, nous reconnaissons un probl`eme aux valeurs propres pour la matrice pn×pn dont les ´el´ements sont donn´es par n, r|λHˆ1|n, r.

Lespn d´eplacements au premier ordre ∆En,q(1) =λWn,q(1) du niveauEn sont les solutions del’´equation s´eculaire1 :

correspondant `a ces valeurs propres.

En r´esum´e : dans tous les cas (d´eg´en´er´e ou non), le d´eplacement au premier ordre d’un niveau d’´energieEns’obtient endiagonalisant la restrictionde l’hamiltonien de perturbation au sous-espace propre correspondant.

1.5 Etats propres `a l’ordre 1 des perturbations

Consid´erons le cas non d´eg´en´er´e. En utilisant (9.8) et en prenant le produit scalaire par l’´etat propre|kpour k=n, nous obtenons :

(En−Ek) k|ψ1n= k|Hˆ1|n. L’´equation (9.11) implique Re

n|ψn1

= 0. En faisant le changement de phase

n →eiλαndans (9.4), nous pouvons choisir αtel que Im n|ψn1

= 0

1La m´ethode des perturbations a ´et´e introduite en m´ecanique c´eleste par Laplace et Lagrange. Le but initial ´etait de calculer les perturbations apport´ees au mouvement d’une plan`ete autour du soleil (terme dominant) par la pr´esence d’autres plan`etes (terme pertur-bateur). Poisson et Cauchy montr`erent qu’il s’agissait d’un probl`eme aux valeurs propres (matrice 6×6 jusqu’`a Saturne, 8×8 jusqu’`a Neptune).

1 . M´ethode des perturbations 193 sans perte de g´en´eralit´e. La perturbation au premier ordre 1n au vecteur d’´etat est donc compl`etement d´etermin´ee par :

n1=

k=n

k|Hˆ1|n

En−Ek |k . (9.20)

1.6 Perturbation des niveaux d’´energie au deuxi`eme ordre

Consid´erons ici encore le cas non d´eg´en´er´e. En utilisant le r´esultat qui pr´ec`ede pour le vecteur d’´etat au premier ordre, et en prenant le produit sca-laire de (9.9) avec l’´etat|n, nous obtenons la correction des niveaux d’´energie au deuxi`eme ordre enλ:

Potentielharmonique de raideur modifi´ee. Consid´erons un oscillateur harmonique perturb´e par un potentiel lui-mˆeme harmonique. Nous prenons donc ˆH = ˆH0+λHˆ1 avec : l’ha-miltonien ˆH correspond aussi `a un oscillateur harmonique, nous connaissons

´

egalement ses niveaux d’´energie pourvu queλ >−1 : Wn =

n+1

2 ¯hω√

1 +λ . (9.23)

La th´eorie des perturbations donne au premier ordre (cf. (9.16)) :

∆En(1)= n|λ

22xˆ2|n. (9.24)

Ce d´eplacement d’´energie se calcule ais´ement en utilisant l’expression de ˆxen termes d’op´erateurs cr´eation et annihilation :

ˆ

Ce r´esultat co¨ıncide bien avec le premier ordre du d´eveloppement en puis-sances deλdu r´esultat exact (9.23).

Potentielanharmonique. Consid´erons maintenant un potentiel harmo-nique perturb´e par un potentiel quartique :

Hˆ0= pˆ2 2m+1

22xˆ2 , λHˆ1=λm2ω3

¯

h xˆ4 . (9.27) o`u λest un param`etre r´eel sans dimension. En utilisant de nouveau l’expres-sion de ˆx en termes d’op´erateurs cr´eation et annihilation, on trouve que le d´eplacement du niveau d’´energieEn= (n+ 1/2) ¯s’´ecrit au premier ordre :

∆E(1)n =λm2ω3

¯

h n|ˆx4|n=3λ

4 ¯(2n2+ 2n+ 1). (9.28) 1.8 Remarques sur la convergence de la th´eorie des perturbations En faisant les d´eveloppements (9.4) et (9.5), nous avons suppos´e explicite-ment que la solution ´etait d´eveloppable en s´erie enti`ere enλ, donc analytique au voisinage de λ = 0, et que cette s´erie convergeait pour λ suffisamment petit.

Dans le premier exemple donn´e ci-dessus, correspondant `a un oscillateur harmonique de raideur modifi´ee, le r´esultat exact est connu : Wn = (n+ 1/2) ¯hω√

1 +λ. On voit que la s´erie converge pour −1 < λ 1, ce qui se comprend fort bien physiquement. Pourλ <−1, le potentielmω2(1 +λ)x2/2 est r´epulsif et il n’y a pas d’´etats li´es. Pourλ >1, c’est le terme2x2/2 qui est«petit»compar´e `aλ mω2x2/2, et c’est lui qui doit ˆetre trait´e comme une perturbation.

Le cas de l’oscillateur anharmonique (notre deuxi`eme exemple) est quelque peu pathologique en ce sens qu’on d´emontre que le d´eveloppement en puis-sances de λne converge jamais ! Cependant, le r´esultat (9.28) constitue une bonne approximation de la valeur exacte tant que le terme correctif est petit devant le terme principal (n+ 1/2)¯hω. Pour une valeur donn´ee de λ(petite devant 1), ceci ne peut se produire que pour desn inf´erieurs `a une certaine valeur nmax(λ) puisque le terme correctif croˆıt commen2. On comprend ce r´esultat physiquement car :

– Le terme λx4 n’est faible que si l’extension de la fonction d’onde est suffisamment petite ; il l’emporte d`es que x2est grand.

– Pour λ 0, le potentiel m ω2 x2/2 +λx4 comporte des ´etats li´es, mais siλest n´egatif, aussi petit soit-il, la force devientr´epulsivepourx suffisamment grand : l’hamiltonien n’est pas born´e inf´erieurement et il n’y a pas d’´etats li´es. Par cons´equent, au passage parλ= 0, la nature physique du probl`eme change compl`etement et cela se manifeste dans les propri´et´es math´ematiques du d´eveloppement enλ. Il y a une singularit´e de la solution en λ = 0 et le d´eveloppement en puissances de λ au voisinage de l’origine a un rayon de convergence nul.

Un exemple, bien connu en math´ematiques, de s´erie qui ne converge pas mais dont les premiers termes donnent une excellente approximation est la