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3. Cadre conceptuel et hypothèses de recherche

3.3. Du concept de Gouvernance des biens communs

Le concept de la gouvernance des biens communs a été développé par Elinor Ostrom (1990) qui montre, par son analyse, qu’une gestion efficace des ressources communes par des associations d’usagers est possible. Elle désigne la ressource commune comme

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étant « unsystèmederessourcesuffisammentimportant pour qu’il soit coûteux (mais pas impossible) d’exclure sesbénéficiaires potentiels de l’accès aux bénéfices liés à son utilisation» (Ostrom, 1990). Ses travaux montrent qu’il est possible de gérer les ressources naturelles de manière durable sans les détruire à condition que les acteurs (usagers) soient organisés de sorte à élaborer ensemble des règles de gouvernance commune devant réglementer l’usage de ces ressources. Selon elle, seule une gestion rationnelle pourrait assurer la pérennité de l’exploitation de la ressource naturelle, pour cela des règles de gestion doivent être nécessairement établies par les acteurs de sorte à réglementer l’activité selon un calendrier bien établi qui conduira à une gestion rationnelle et plus durable dans le temps. En un mot cela permettra à chacun d’avoir un peu sur un long terme plutôt que de prélever abondamment, récolter beaucoup sur un court terme et voir l’activité disparaitre définitivement.

Si pour éviter l’épuisement des ressources naturelles certains auteurs, comme Hardin (1968), pensent qu’il n’ y a que deux grands types de solutions, à savoir la privatisation des ressources et la suppression du bien commun ou sa nationalisation et le recours à une autorité publique incarnée par un Étatfort, Ostrom (1990) montre que ni le marché ni l’État ne constituent des solutions universelles, mais que l’action collective des communautés est une alternative face à la privatisation et la gestion étatique. En outre, elle estime que dans certains cas, les communautés d’individus parviennent à de meilleurs résultats en organisant elles-mêmes l’exploitation de leurs ressources communes.

De ces deux points de vue, il ressort que, contrairement à Hardin dont la théorie est basée sur le fait que les individus auront toujours besoin d’être organisés par des autorités externes dans la mesure où ils sont incapables de s’organiser eux-mêmes, Ostrom croit à la capacité des individus à s’organiser et à gérer des biens communs. Cela dit, il n’en demeure pas moins que pour la gouvernance efficace des ressources naturelles, l’organisation, en tant que mode de gouvernance, est indispensable qu’elle soit endogène (à la communauté) ou imposée par les pouvoirs publics.

Pour assurer une gestion collective efficace de biens communs, Ostrom a édicté 8 principes (présentés dans le tableau comparatif des 8 principes, p. 141)dont la satisfaction permettrait une gouvernance durable des ressources naturelles par une communauté organisée.

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Même s’il est vrai que la théorie des biens communs ne concerne pas les ressources naturelles non renouvelables comme l’or, ces 8 « principes de conceptions » peuvent nous servir de grille d’analyse pour apprécier la viabilité du système de gouvernance mis en place pour l’exploitation de l’or sur le site d’orpaillage de Gbomblora.

Du reste, la situation apparemment anarchique du site d’orpaillage laisse penser qu’il y a des déficits dans la gestion collective des biens communs au niveau du site d’orpaillage de Pélinka à Gbomblora. Pour apprécier le type de gouvernance appliqué sur le site, il est intéressant d’inclure dans cette étude une investigation spécifique concernant la gouvernance de la question aurifère à Gbomblora, afin de voir où se situent les défaillances. Et pour analyser ces défaillances, nous nous appuyons sur la grille d’Ostrom, pour apprécier certains éléments saillants de la gouvernance tels que : la gestion institutionnelle de l’orpaillage, l’orpaillage comme élément du système d’activités des ménages, l’orpaillage comme moyen intégré de développement rural et les forces et faiblesses de l’orpaillage dans le système d’activités des ménages. Ces éléments sont développés dans la section consacrée aux discussions et intérêts de l’étude.

En définitive, la discussion des résultats de l’étude se fera principalement autour des trois concepts que sont: le système d’activités des ménages, le développement rural intégré et la gouvernance des biens communs. Ces trois concepts serviront de grilles d’analyse transversale pour mieux appréhender le rôle de l’orpaillage dans le système d’activités des ménages de la commune rurale de Gbomblora.

À la lumière de différentes conceptions, décrites dans les sections précédentes, en rapport avec la contribution et le rôle de l’orpaillage dans les milieux ruraux, on retient que les conséquences de l’orpaillage sont doubles. D’une part, il constitue un facteur de destruction au vu des nuisances créées autour des sites aurifères tant du point de vue environnemental, sanitaire que social. D’autre part, il représente un élément de résilience des ménages par rapport à la pauvreté rurale. À partir de ce constat et compte tenu de l’engouement observé autour de l’orpaillage et tenant compte du niveau de pauvreté des populations, nous formulons les hypothèses que :

- L’orpaillage est un élément central du système d’activités des ménages agricoles qui contribue à lutter contre la pauvreté dans la Commune rurale de Gbomblora,

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- La pratique parallèle de l’orpaillage permet aux agriculteurs de faire fonctionner leurs exploitations agricoles,

- Les nuisances décrites sont fortement liées à la faiblesse du système de suivi de l’activité, au manque d’organisation de la filière et au manque d’accompagnement des différents acteurs. La pratique de l’orpaillage souffre donc d’une absence de gestion commune.

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