• Aucun résultat trouvé

Rôle de l'orpaillage dans le système d'activités des ménages en milieu agricole : cas de la commune rurale de Gbomblora dans la région sud-ouest du Burkina Faso

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Rôle de l'orpaillage dans le système d'activités des ménages en milieu agricole : cas de la commune rurale de Gbomblora dans la région sud-ouest du Burkina Faso"

Copied!
182
0
0

Texte intégral

(1)

Rôle de l’orpaillage dans le système d’activités des

ménages en milieu agricole : cas de la commune rurale

de Gbomblora dans la région sud-ouest du Burkina

Faso

Mémoire

Oumar SANGARE

Maîtrise sur mesure en développement rural intégré

Maître ès arts (M.A.)

Québec, Canada

(2)

Rôle de l’orpaillage dans le système d’activités des

ménages en milieu agricole : cas de la commune rurale

de Gbomblora dans la région sud-ouest du Burkina

Faso

Mémoire

Oumar SANGARE

Sous la direction de :

Pr Patrick Mundler

(3)

iii

Résumé

L’orpaillage est un sujet à controverse qui ne laisse personne indifférent; si pour les uns il est source de nuisance, pour les autres, il représente un moyen de lutte contre la pauvreté. Pour mieux comprendre le phénomène, la présente étude a été menée auprès de trois groupes d’acteurs de la commune rurale de Gbomblora que sont les agriculteurs, les orpailleurs et les agro-orpailleurs. L’analyse comparative démontre que l’orpaillage est non seulement un élément central du système d’activités des ménages agricoles qui contribue à lutter contre la pauvreté, mais que la pratique parallèle de l’orpaillage permet également aux agriculteurs de faire fonctionner leurs exploitations agricoles. L’étude a aussi permis de montrer que contrairement aux idées selon lesquelles les sites d’orpaillage sont des espaces de désordres et de non-droit, l’activité est plutôt régie par une forme de gouvernance collective qui permet d’assurer son fonctionnement en dépit de quelques insuffisances.

Mots-clés : orpaillage, système d’activités des ménages, agriculture, développement rural

(4)

iv

Abstract

Panning for gold is a controversial issue that leaves no one indifferent; if for some it is a source of nuisance for others it represents a way to fight against poverty. To better understand the phenomenon, this study was conducted nearby three groups of actors in the rural commune of Gbomblora Department that are farmers, miners and agro-miners. Benchmarking shows that gold panning is not only a central element of the system of activities of farming households that contributes to the fight against poverty, but the practice of parallel gold panning also enables farmers to run their farms . The study also demonstrated that contrary to ideas that panning for gold are spaces of disorder and lawlessness, the activity is rather governed by a form of collective governance that ensures its operation despite some shortcomings.

Keywords: gold panning, system of household activities, agriculture, integrated rural

(5)

v

Table des matières

Pages

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des tableaux ... vi

Liste des figures ... vii

Liste des abréviations ... viii

Dédicace ... ix

Remerciements ... x

1. Introduction ... 1

1.1. Contexte national ... 2

1.2. Contexte de la commune rurale de Gbomblora ... 17

2. Problématique ... 21

2.1. Les défis de la commune rurale de Gbomblora ... 21

2.2. Question et objectifs de recherche ... 26

3. Cadre conceptuel et hypothèses de recherche ... 27

3.1. Du concept du Système d’activités des ménages ... 27

3.2. Du concept de développement rural intégré (DRI) ... 32

3.3. Du concept de Gouvernance des biens communs ... 37

4. Méthodologie ... 41

4.1. La méthode de recherche ... 41

4.2. Les critères de choix de la zone et de la population d’étude ... 44

4.3. La construction des guides d’entretien ... 51

5. Présentation des résultats ... 52

5.1. Gouvernance des sites d’orpaillage ... 52

5.1.1. Organisation institutionnelle du secteur aurifère au niveau national ... 52

5.1.2. Gouvernance locale de l’orpaillage ... 58

5.1.3. Organisation structurelle des orpailleurs ... 70

5.2. Relation agriculture et orpaillage ... 89

5.2.1. Typologie des chefs de ménages rencontrés ... 89

5.2.2. Facteurs déterminant la pratique ou non de l’orpaillage ... 93

5.2.3. Organisation du système d’activités des ménages ... 95

5.3. L’orpaillage et le développement territorial ... 110

5.3.1. Conséquences de la pratique de l’orpaillage ... 110

6. Discussion et intérêt de l’étude ... 123

6.1. La gestion institutionnelle de l’orpaillage ... 123

6.2. L’orpaillage comme élément du système d’activités des ménages ... 127

6.3. L’orpaillage comme moyen intégré de développement rural ... 130

6.4. La réalité de la gouvernance locale de l’orpaillage ... 133

6.5. Les forces et faiblesses de l’orpaillage dans le système d’activités des ménages 137 6.6. La responsabilité partagée des acteurs ... 138

7. Conclusion et recommandations ... 141

BIBLIOGRAPHIE ... 144

(6)

vi

Liste des tableaux

Pages

Tableau 1:Répartition des enquêtés ... 46

Tableau 2: Difficultés et reformes en cours d’élaboration ... 55

Tableau 3. Revenu mensuel moyen/ personne et par type d’emplois sur le site d’orpaillage ... 87

Tableau 4: Unités de mesure et valeurs correspondantes ... 88

Tableau 5. Tranche d’âge des chefs de ménages agricoles ... 90

Tableau 6. Tranche d’âge des chefs de ménages orpailleurs ... 91

Tableau 7. Tranche d’âge des chefs de ménages agro-orpailleurs... 92

Tableau 8: Répartition des tâches dans les ménages ... 97

Tableau 9: Répartition des tâches dans les ménages d’orpailleurs ... 99

Tableau 10: Répartition des tâches dans les ménages d’agro-orpailleurs ... 102

Tableau 11: Échelle de notation ... 105

Tableau 12: Ordre de priorité dans l’utilisation des revenus de l’orpaillage ... 107

Tableau 13: Situation des taxes recouvrées sur la contribution du secteur informel ... 112

Tableau 14: Situation des taxes recouvrées sur la dégradation sur le domaine public ... 112

Tableau 15: Situation des abattages en 2013 ... 114

Tableau 16: Situation des abattages en 2014 ... 114

Tableau 17: Prix moyen des bovins ... 115

Tableau 18: Prix moyen des petits ruminants et la volaille ... 115

Tableau 19: État comparatif des 8 principes de conception d’Elinor Ostrom ... 135

(7)

vii

Liste des figures

Pages

Figure 1. L’inégale répartition du peuplement à l’échelle nationale en 2006 ... 15

Figure 2. Carte administrative de la commune de Gbomblora ... 18

Figure 3. Découpage du site d’orpaillage en 3 zones spécifiques ... 72

Figure 4. Responsabilité et liens entre les différents acteurs ... 86

Figure 5. Typologie des chefs de ménages rencontrés ... 90

Figure 6. Organisation du système d’activités de ménages pratiquant essentiellement l’agriculture ... 98

Figure 7. Organisation du système d’activités de ménages pratiquant essentiellement l’orpaillage ... 100

Figure 8. Organisation du système d’activités de ménages agro-orpailleurs ... 104

Figure 9. Performance par groupe en production céréalière et financière ... 106

Figure 10. Réalisations à partir de l’argent de l’orpaillage ... 109

Figure 11. Distribution spatiale des sites d’exploitions artisanales d’or agréés au Burkina Faso ... 171

(8)

viii

Liste des abréviations

AFD : Agence française de développement AN : Assemblée nationale

BCEAO : Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest CAPES : Centre d’Analyse des Politiques économiques et sociales FIDA : Fonds international de développement agricole

FICOD : Fonds d’investissement pour les collectivités décentralisées INADES : Institut Africain pour le Développement Économique et Social INSPQ : Institut national de santé publique du Québec

INSD : Institut national de la statistique et la démographie IRIN: Integrated Regional Information Networks

MAFAP: Monitoring Analysing Food and Agricultural Policies MASA : Ministère de l’Agriculture et de la Sécurité alimentaire MATS : Ministère de l’Administration territoriale et de la Sécurité MEF : Ministère de l’Économie et des Finances

MED : Ministère de l’Environnement et du Développement MICA : Ministère de l’Industrie du commerce et de l’artisanat MME : Ministère des Mines et de l’Énergie

MIJARC : Mouvement international de la Jeunesse agricole et rurale catholique NDI : National Democratic Institute’s

OMS : Organisation mondiale de la santé

ONUDI : Organisation des Nations Unies pour le développement industriel PAM : Programme alimentaire mondial

P.A.S : Programmes d’ajustement structurel PCD : Plans communaux de Développement PM : Premier Ministère

PNUD : Programme des nations unies pour le développement RTB : Radiodiffusion Télévision du Burkina

TVA : Taxe sur la valeur ajoutée

SP/CPSA : Secrétariat permanent de coordination des politiques sectorielles agricoles UNESCO : Organisation des Nations Unies pour l’éducation la science et la culture

(9)

ix

Dédicace

Ce travail est spécialement dédié :

À mon regretté père, arraché prématurément à notre affection, pour son exemple d’humilité et de combativité.

À ma mère, pour tant de sacrifices consentis pour notre éducation après la disparition de notre père.

À mes frères et sœurs pour leurs soutiens multiformes.

A mes enfants, Yéro Ben Idriss, Bello Amir, Noura Lobo et Pendo Charida.

Et enfin à mon épouse bien aimée, Maïmouna, pour son amour, son soutien permanent, la patience, les sacrifices et les privations consenties tout au long de mes études

(10)

x

Remerciements

La réalisation de ce projet a été rendue possible grâce au soutien financier du programme canadien de bourses de la francophonie à qui nous resterons toujours reconnaissant. Nos remerciements vont à l’endroit de toute l’équipe du PCBF (passée comme présente) et particulièrement à ses premiers responsables, Mr Alou Dicko et Mme Jeanne Gallagher dont la générosité, la disponibilité et la grande capacité d’écoute nous ont toujours impressionnés.

Nous remercions, particulièrement le Pr Patrick MUNDLER notre directeur de recherche et directeur du programme de DESS en développement rural intégré, pour ses qualités techniques et humaines. Sa grande connaissance des questions rurales, son amour du métier et sa patience nous ont ouvert les voies de la connaissance et permis d’atteindre nos objectifs. À son contact, chaque jour qui passe nous renforce dans notre conviction d’être au bon endroit et d’avoir choisi le bon programme : le développement rural intégré

(DRI).

Nos remerciements vont également à l’endroit de toutes les personnes qui ont d’une manière ou d’une autre contribué à la réussite de ce travail ; il s’agit notamment de :

L’ensemble des enseignants émérites de l’Université Laval, Le Pr Maurice Carel, ancien directeur du programme de DRI,

L’ensemble du personnel du FICOD et particulièrement Mrs Zongo Abdoulaye, Coulibaly Seydou, Ouédraogo Charles Gustave et Kambou Fiacre au Burkina Faso.

Mr François Lompo, Ministre de l’Agriculture et de la Sécurité alimentaire du Burkina Faso et l’ensemble des responsables de son département.

Dr Djiguemdé Amedé Prosper, Ministre de la Santé du Burkina Faso. Drs Isaïe Médah et François Drabo, nos responsables hiérarchiques.

L’ensemble des techniciens des différents départements ministériels visités : Santé, Ressources animales, Environnement, Mines et énergie, Économie et Finances.

Tous nos camarades étudiants pour leur contribution et leur soutien tout au long du cursus universitaire.

L’ensemble des responsables coutumiers, communaux, administratifs et techniques de la région du sud-ouest du Burkina Faso pour leur contribution à la réussite de notre mission de collecte de données sur le terrain.

L’ensemble des Orpailleurs et chefs de ménages de Gbomblora, qui pour survivre, malgré les éboulements multiples et leurs lots de morts, ont décidé d’aller arracher aux entrailles de la terre leurs pitances quotidiennes

(11)

1

1. Introduction

L’orpaillage artisanal, largement pratiqué dans les campagnes du Burkina Faso, est devenu un élément majeur de l’économie rurale. Cette pratique qui mobilise des milliers de personnes sur toute l’étendue du territoire national burkinabé ne laisse personne indifférent, d’où l’importance de la controverse qu’il suscite chez les uns et les autres. Les acteurs sont constitués d’un ensemble de personnes travaillant sur les sites aurifères avec des rôles et des niveaux de responsabilité différents allant de l’extraction, au traitement jusqu’à l’obtention de l’or. Parmi les personnes désignées dans ce travail sous le vocable « orpailleurs » il y a le responsable du site d’orpaillage, les propriétaires de trous, les creuseurs de trous, les laveurs de minerais, les concasseurs et les broyeurs.

Pour ce qui concerne l’activité en elle-même, s’il est vrai que le sujet nourrit tant de controverses, c’est essentiellement du fait de ses aspects négatifs liés à la dégradation environnementale, sanitaire et sociale qui sont le plus souvent documentés et qui marquent le plus les esprits. Cela dit, les apports de cette activité extractive, à savoir les potentialités qu’elle représente en termes de création d’emplois et de retombées économiques tant au niveau du budget communal que de l’amélioration du pouvoir d’achat des ménages ruraux semblent faire l’objet de peu d’investigations. Ce constat est à la base de la présente étude, qui vise à apporter une part de lumière sur le rôle de cette activité extractive dans le système d’activités des ménages dans la commune rurale de Gbomblora.

À travers les chapitres qui suivent, l’étude tente d’apporter un éclairage aux questionnements suivants : L’orpaillage doit-il être seulement perçu comme un facteur de désolation ou bien faut-il prendre le recul nécessaire pour le considérer comme un potentiel à mettre à contribution pour assurer le développement du milieu rural, au vu de l’engouement qu’il suscite auprès des ménages ruraux? Autrement dit, compte tenu de la conjoncture économique actuelle, l’orpaillage peut-il être perçu comme une opportunité qu’il faut mettre à profit pour lutter contre la pauvreté et améliorer le niveau de vie des ménages en milieu rural?

L’ensemble de ces questionnements a été analysé et présenté à travers six chapitres comprenant la description du contexte national, la problématique ainsi que les questions et objectifs de la recherche, le cadre conceptuel, les hypothèses formulées par la recherche, la

(12)

2

méthodologie employée pour la réalisation de l’étude, la présentation des résultats et enfin la présentation de la discussion ainsi que les intérêts de l’étude.

1.1. Contexte national

Le Burkina Faso, 181e pays sur 187 au classement de l’indice de développement humain en 2014 (PNUD, 2014), est un pays sahélien sans débouché sur la mer situé au cœur de l’Afrique de l’Ouest. Sur les 17 millions d’habitants que compte le pays, 80% vivent de l’agriculture en milieu rural (Banque mondiale, 2014).

Considéré comme un des pays les plus pauvres du monde, le Burkina Faso a pratiqué, sur prescription des institutions financières de Bretton Woods, plusieurs programmes d’ajustements structurels (P.A.S) successif, dont le premier cycle est intervenu de 1991 à 1993, suivi d’un deuxième de 1994 à 1996 et un troisième exécuté de 1997 à 1999. À partir de 2000 le cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (C.S.L.P) a pris le relais. Cette politique conduite sous le leadership de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international a produit des résultats très variables d’un contexte â l’autre et d’un pays à l’autre. Les effets les plus visibles tels que la dévaluation du franc CFA, la hausse du prix des produits de première nécessité, la montée du chômage, la baisse des revenus, les émeutes de la faim, etc. (Mahieu, et Jarret, 1991; UNESCO, 1995; Nassar, 2008), ont été ressentis en milieu rural en dépit de l’existence de potentialités agricoles non négligeables. Selon les résultats de l’enquête intégrale sur les conditions de vie des ménages (INSD, 2010) 43,9% des ménages vivent en dessous du seuil de pauvreté estimé à 108 454 FCFA par an, soit 230 dollars canadiens. La pauvreté est plus accentuée en milieu rural, touchant 50,7 % des ménages contre 19 % en milieu urbain (INSD, 2010). En 1994 déjà, la pauvreté touchait les ménages d’agriculteurs et particulièrement ceux d’agriculteurs vivriers (INSD, 2000). L’espérance de vie est de 57 ans (Banque Mondiale, 2014).

Le Burkina Faso est un pays agricole dont l’économie est essentiellement basée sur l’agriculture et l’exploitation minière. Depuis 2009 l’exportation de l’or est passée en tête des produits d’exportation du pays, devançant le coton, faisant du pays le quatrième producteur d’or du continent après l’Afrique du Sud, le Ghana et le Mali (Airault, 2012). Le pays enregistre ces dernières années une croissance économique de 5,5%, due au boom minier et aux bonnes récoltes de coton, mais sans retombées sensibles sur la majorité de la population confrontée à l’insécurité alimentaire et nutritionnelle qui sont considérées

(13)

3

comme chroniques dans certaines parties du pays (Dabat, 2011; MASA, 2013b; PAM, 2014). À côté de ces deux piliers de l’économie nationale, il y a la migration qui génère des revenus à travers les transferts d’argent annuellement effectués par les migrants burkinabés vers leur pays d’origine.

Les paragraphes qui suivent présentent la situation des activités agricoles et non agricoles ainsi qu’une vue globale du phénomène migratoire qui, de par les transferts d’argent effectués, est considéré comme une source de revenus importante pour les ménages ruraux.

 Les activités agricoles

L’agriculture mobilise 80% de la population du pays; c’est une agriculture familiale de subsistance, caractérisée par de petites unités de production agricole où propriété et travail sont intimement liés à la famille1 (Lamarche, 1991; Zoundi et Hatimana, 2007), menée avec

des outils rudimentaires et soixante-dix pour cent des denrées alimentaires produites sont consommées par les ménages eux-mêmes (FIDA, 2011).

Au Burkina Faso, l’agriculture est de type extensif caractérisé par des exploitations d’une superficie moyenne de 3ha par producteur et une faible mécanisation (MASA, 2014). Les sols exploités sont généralement pauvres et le niveau d’utilisation des fertilisants estimé en moyenne à 8,3 kg/ha (contre une moyenne mondiale de 107 kg/ha) est jugé très faible (Bictogo, 2010; Coulibaly, M, 2013). Cette situation est généralement liée à l’accessibilité très limitée des producteurs aux intrants, tant du point de vue de la disponibilité que des coûts de ces produits. Selon le ministère de l’agriculture et de la sécurité alimentaire du Burkina Faso (MASA, 2014), les sols sont peu ou pas amendés à cause de la faiblesse du niveau du pouvoir d’achat des producteurs, et du coût élevé des engrais chimiques ce qui a pour conséquence, des rendements assez bas qui entrainent des situations d’insécurité alimentaire quasi chroniques (SP/CPSA, 2003; MASA, 2014). Cette situation impacte aussi bien les cultures vivrières que les cultures de rentes qui jouent pourtant un grand rôle dans la résilience et la lutte contre la pauvreté des ménages ruraux. Même si elles ne bénéficient pas des mêmes traitements, ces deux filières agricoles sont toutes deux confrontées à des défis de degrés et de natures variables.

1 Cette conception est l’opposé du modèle industriel d’Aaron basé sur la séparation de l’entreprise et de la famille, la division du travail, l’accumulation du capital, des calculs rationnels et la concentration ouvrière sur le lieu de travail (Sourisseau, J-M, et al. 2012).

(14)

4

 Agriculture vivrière

En ce qui concerne les cultures vivrières, à l’instar de nombreux pays africain au sud du Sahara, la situation est marquée par un certain désengagement de l’Etat en milieu rural et particulièrement en ce qui concerne l’appui au secteur agricole vivrier depuis l’avènement des programmes d’ajustement structurel et des dévaluations du franc CFA2 (Wampfler, 2005; Moupou et Mbanga, 2008).

Afin de remédier à cette situation, des actions ont été menées par l’État à travers la mise en œuvre successive de plusieurs initiatives visant à booster le milieu rural parmi lesquelles on peut citer, entre autres: le Programme d’ajustement structurel agricole (PASA), la stratégie de croissance durable des secteurs agricoles et de l’élevage et par la nouvelle stratégie de développement rural à l’horizon 2015, le Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté (CSLP), et depuis 2009, la Stratégie de Croissance Accélérée et de Développement Durable (SCADD) (SCADD, 2013). Malgré ces efforts des pouvoirs publics, des insuffisances persistent.

Présentement, seules les productions de rente destinées à l’exportation, comme le coton, continuent à bénéficier d’un appui important et structuré de l’état. Cette situation paraît préoccupante dans la mesure où les filières vivrières notamment les cultures pluviales peuvent jouer un rôle essentiel dans la lutte contre la pauvreté et l’amélioration des conditions de vie des populations. Cette amélioration pourrait se manifester aussi bien à travers l’approvisionnement des villes en produits locaux qu’à travers l’accroissement des revenus des agriculteurs par la création d’emplois en milieu rural (AFD, 2011). En dépit des potentialités qu’elles affichent, ces filières intéressent peu la recherche et souffrent de l’insuffisance de l’appui financier des partenaires au développement (AFD, 2011), contrairement aux cultures de rentes que nous développerons dans la prochaine section. Placées dans ce contexte, les cultures vivrières se positionnent comme les parents pauvres de l’agriculture burkinabé. Pour un pays sahélien comme le Burkina Faso, oùla menace de l’insécurité alimentaire est quasiment chronique (Garrido et Sanchez, 2015), cette politique visant à favoriser la promotion des cultures de rente, au détriment des cultures vivrières, est

2Crée le 26 décembre 1945 le franc CFA est la dénomination de la monnaie commune de 14 pays africains membres de la Zone franc. A

sa création, il signifiait "franc des Colonies Françaises d’Afrique" avant de devenir par la suite "franc de la Communauté Financière Africaine" pour les États membres de l’Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA), et "franc de la Coopération Financière en Afrique Centrale" pour les pays membres de l’Union Monétaire de l’Afrique Centrale (UMAC), (BCEAO, 2012 a).

(15)

5

un choix non seulement paradoxal, mais également risqué lorsqu’on fait le rapprochement avec les « émeutes de la faim » qui ont secoué nombre de pays subsahariens, dont le Burkina Faso, durant la période 2007-20083 . Ces crises sont en partie liées à la faible disponibilité alimentaire avec pour conséquence la hausse brutale des prix des produits alimentaires, les rendant du coup financièrement inaccessibles aux plus pauvres de la population. Cette faiblesse de la disponibilité alimentaire a également des conséquences sur le plan de la santé publique lorsqu’on sait que 30 % de la population souffre de la malnutrition (Bainville, 2009).

Malgré cette insuffisance de la production céréalière, le pays affiche des résultats variables d’une campagne agricole à l’autre. Pour la campagne agricole 2014-2015, la production céréalière nationale définitive est évaluée à 4 469 300 tonnes. Cette production comparée à la production de la campagne passée qui était de 4 869 723 tonnes est en baisse de 8,2%, mais en hausse de 3,3% par rapport à la moyenne des cinq dernières campagnes (MASA, 2013.a; MARHA, 2015).

Toutefois, il convient de préciser qu’en dépit de ces performances, caractérisées par des variations inter annuelles, il n’en demeure pas moins que, du fait de la forte croissance démographique (3,1%/an) observée ces dernières années, le pays importe annuellement plus de 340 000 tonnes de céréales afin de couvrir ses besoins de consommation alimentaire (MASA, 2013a; MARHA, 2015).

Cette production agricole essentiellement familiale connait des difficultés caractérisées par des conditions d’exercice difficile liées à la conjonction d’un ensemble de facteurs structurels comme la faible accessibilité aux intrants agricoles, la faible accessibilité aux crédits agricoles, l’insécurité foncière, le faible niveau des prix et les difficultés à l’écoulement (INADES, 2013). Ces obstacles structurels pèsent sur les filières vivrières qui, comparativement à la production cotonnière, se caractérisent par une faible structuration et des problèmes de commercialisation en rapport avec la faiblesse du réseau de communication (pistes rurales) qui impactent sur leur capacité d’intégration du marché sous régional et mondial (MAFAP, 2013).

À côté de ces difficultés d’ordre structurel, il y’a des contraintes biophysiques de survenue cyclique et récurrente. En effet, de 1991 à 2009, le pays a connu une succession de

(16)

6

catastrophes naturelles (inondations, sécheresses, invasion de criquets pèlerins, etc.). La dernière crise survenue en 2011 a causé un déficit céréalier important de 150 000 tonnes affectant plus de 3 millions de personnes et touchant 170 communes dans 10 régions du pays (PAM, 2012). La survenue fréquente de ces catastrophes naturelles influe négativement sur la productivité agricole qui est généralement incapable de satisfaire les besoins du marché local,. De plus, les petites tailles des superficies exploitées et la faible mécanisation qui caractérise cette agriculture de subsistance réduisent les perspectives d’amélioration de la production et des revenus des ménages (CAPES, 2011).

En plus des difficultés liées à la production, le milieu rural est également confronté au manque de moyens d’acheminement des productions d’une localité à une autre (mauvais état des pistes rurales) et au problème d’insuffisance de communication entre producteurs des différentes régions concernant les prix des céréales sur les marchés. Ce qui fait qu’au moment où une région a une bonne récolte, l’autre côté du pays peut être confronté à un sérieux déficit céréalier et est de ce fait menacé de crise alimentaire. Ce qui amène à penser, à la suite d’A. Sen que les crises alimentaires ne sont pas seulement liées au manque de vivres, mais aussi au manque de politique de distribution à l’échelle du territoire (Sen, 1981). Cette situation de sous information et d’enclavement géographique pousse souvent les paysans à brader leur production à des prix dérisoires aux commerçants spéculateurs qui profitent amplement de la situation.

 Agriculture de rente

À côté des cultures vivrières décrites ci-dessus, il y’a les cultures de rentes. Les principales cultures de rente et d’exportation du Burkina Faso sont le coton, la canne à sucre, le sésame, l’amende de karité, la noix de cajou, la gomme arabique, ainsi que les fruits et légumes comme le haricot vert, les mangues et la tomate. Dans cette gamme de produits, le coton représente à lui seul 60% des recettes d’exportation de produits agricoles, participe pour 25% au PIB et fait vivre environ 2 millions de burkinabés4.

Les résultats de la dernière campagne agricole (2014-2015) estiment à près de 1 600 000 tonnes, la production des cultures de rente, ce qui représente une hausse d’environ 22,9% par rapport aux résultats de la campagne agricole précédente. Cette augmentation générale est entrainée par la hausse des productions de sésame et de coton respectivement de 134,3%

4 FASO-DEV, 2014

(17)

7

et 16,8% par rapport à la campagne agricole passée et cache les baisses des productions de l’arachide (4,1%) et du soja (30,8%) (MARAH, 2015).

Parmi ces productions de rente, la culture du coton, qui occupe la première place depuis quelques années, mobilise plus de 350 000 producteurs et 250 000 exploitations agricoles; le nombre de bénéficiaires directs de la culture cotonnière est estimé à 3 000 000 de personnes (AICB, 2008), ce qui laisse penser que la production cotonnière est un moyen de résilience des populations rurales contre la pauvreté et permet, de ce fait, une amélioration de leurs conditions d’existence. Aussi, le coton qui est la principale culture de rente et la plus importante pour le pays (Banque mondiale, 2014) occupe de plus en plus les meilleures terres notamment dans l’Ouest, le Centre-ouest, l’Est et le sud-ouest du pays (INADES, 2013). En termes de production, la campagne cotonnière 2013-2014 a enregistré une production de 643 000 tonnes contre 630 000 tonnes pour la campagne 2012-2013 ce qui place le pays en tête des pays africains producteurs de coton et douzième producteur mondial5 (Guissou et Ilboudo, 2012). Cette production record a permis d’engranger une recette brute de 160 milliards de FCFA, dont 100 milliards reversés aux producteurs après décompte de tous les crédits de campagne6. Cette performance est liée à l’intérêt et à l’accompagnement dont la filière bénéficie de la part de l’État et des partenaires financiers du pays, toutes choses qui amènent à croire que l’État mène une politique sectorielle en matière de développement rural. Les limites de cette approche sont analysées plus loin dans la section consacrée à l’approche du développement rural intégré développée au niveau du cadre conceptuel.

Toutefois, en dépit de cet accompagnement, sur le plan de l’organisation, de la logistique, des intrants et de la formation technique, les producteurs de coton sont confrontés, de manière récurrente, à un ensemble de facteurs endogènes et exogènes dont la maitrise leur échappe totalement. Parmi les difficultés endogènes rencontrées par les producteurs il y’a des difficultés liées à la dégradation des sols et aux caprices pluviométriques. Quant aux facteurs exogènes qui pèsent le plus sur les efforts des paysans, il y a la volatilité des cours mondiaux et la non-maitrise des prix. Ces facteurs créent une situation d’insécurité pour le producteur qui ne sait jamais à l’avance ce que son travail et son investissement vont lui apporter.

5RTB, 11 avril 2013 2013; Ambassade de France au Burkina Faso, 2014; aouaga.com, 10 juin 2014. 6 RTB, 2013.

(18)

8

Tous ces facteurs concourent à rendre la production cotonnière moins attractive pour le paysan lorsqu’il fait le rapport entre ces investissements personnels, les difficultés rencontrées, les aléas climatiques et la fragilité du marché. Cela constitue une source d’insécurité dans laquelle les paysans sont de moins en moins prêts à s’engager.

 L’exploitation aurifère comme activités complémentaires des ménages ruraux

En plus des activités agricoles déjà mentionnées, certains ménages ruraux mènent d’autres activités non agricoles qui occupent une place non moins importante dans leur système d’activités. La plus importante de ces activités non agricoles est présentement l’exploitation traditionnelle de l’or (orpaillage) qui mobilise de plus en plus de personnes.

Au Burkina Faso, le secteur minier a connu un essor extraordinaire au cours de la seconde moitié des années 2000, permettant à l’or de se positionner comme le premier produit d’exportation du pays (Giles, 2012; Arnaldi di Balme & Lanzano, 2014).

En 2011 les principaux produits d’exportation du pays étaient l’or (76,7 %), le coton (11,7 %), les noix de cajou (2,6 %), les graines de sésame (2,4 %) et les graines de karité (1,3 %). Ces cinq produits représentent à eux seuls 94,8 % des exportations réalisées en 2011 (MICA, 2012).

En 2012, avec plusieurs mines industrielles en production, le pays est devenu le quatrième producteur d’or du continent; durant la même année, la production industrielle d’or était estimée à près de 30 tonnes. Du fait de la hausse des cours mondiaux, l’exploitation industrielle de l’or a rapporté à l’État burkinabé, en termes de recettes fiscales, plus de 46 milliards en 2010, plus de 127 milliards en 2011 et plus de 189 milliards en 20127. Cette relative performance pourrait s’expliquer par le contexte favorable du marché mondial où le cours moyen de l’once d’or était de 1 668,98 dollars US en 2012, avant de chuter à 1 195 dollars US en juillet 2013, soit une baisse de 39,66%, provoquant des licenciements au niveau de certaines compagnies minières (Kassiro, 2014). En 2014, avec une production de 36 tonnes d’or, le budget de l’État a enregistré plus de 168 milliards francs CFA (256 millions d’euros). Le produit intérieur brut du Burkina Faso est composé à plus de 12% par les ressources aurifères8. Le pays compte présentement huit sociétés de catégorie A9, une

7Journal, LE PAYS, 20 juin 2013.

(19)

9

société de catégorie B10 et dix-neuf sociétés de catégorie C11 (Chambre des Mines du Burkina, 2011). Ces sociétés d’exploitation minières sont installées dans différentes régions du territoire national avec un niveau de production variable.

Au Burkina Faso, l’exploitation aurifère est exercée selon trois modalités en fonction du degré d’équipement et du volume de production: l’exploitation industrielle, l’exploitation semi-mécanisée et l’exploitation artisanale encore appelée « orpaillage ». Cette forme d’exploitation qui nous intéresse particulièrement, dans le cadre de la présente étude, est définie par le Code minier12 (AN, 2003) du Burkina Faso comme étant « toute opération qui consiste à extraire et concentrer des substances minérales et à en récupérer les produits marchands pour en disposer en utilisant des méthodes et procédés traditionnels et manuels. Elle n’utilise pas d’équipements ni d’énergie mécanique et n’est pas fondée sur la mise en évidence d’un gîte ou d’un gisement » (AN, 2003). Cette forme d’exploitation de l’or est pratiquée dans de nombreuses régions du monde pour des raisons diverses. Au Burkina Faso, à l’instar des autres pays africains, l’orpaillage est connu des populations qui le pratiquent depuis des siècles comme source principale, ou complémentaire de revenus (Gilles, 2012).

Ce mode d’exploitation traditionnelle est pratiqué dans la quasi-totalité des régions du Burkina Faso où il est généralement exercé de manière informelle, avec très peu d’investissements de démarrage par des personnes qui n’ont véritablement aucune formation technique en la matière. À ce jour, plus de six cents sites d’orpaillage sont répertoriés et plus d’un million de personnes vivent directement ou indirectement de cette activité extractive (MME, 2013). Du fait du caractère informel du secteur, le nombre de sites d’orpaillage est en constante évolution.

En termes de revenus, l’orpaillage génère annuellement 82 milliards FCFA répartis entre les différents acteurs (Maradan et al, 2011). Même si la production réelle est généralement sous-évaluée l’activité extractive fait partie intégrale des réalités socioéconomiques du Burkina Faso (CES, 2012); elle constitue une réalité incontournable en milieu rural et une

9Catégorie A : Ceux qui sont détenteurs d’un titre minier relatif à la prospection, la recherche ou l’exploitation conformément au Code minier du Burkina

Faso et en phase de production commerciale.

10Catégorie B: Ceux qui sont détenteurs d’un titre minier relatif à la prospection, la recherche ou l’exploitation conformément au Code minier du Burkina

Faso et en phase de Construction.

11Catégorie C : Ceux qui sont détenteurs d’un permis d’exploitation industrielle de petite mine et/ou d’une autorisation d’exploitation permanente de carrières et/ou d’un permis de recherche

(20)

10

occupation économique au même titre que l’agriculture et l’élevage (Maradan et al, 2011). Depuis quelques années plusieurs sites d’orpaillage ont vu le jour dans différentes régions du pays et particulièrement dans la région du Sud-ouest. Du reste, l’orpaillage est considéré aujourd’hui comme un puissant moyen de lutte contre la pauvreté rurale et les inégalités sociales (Maradan et al., 2011; Teschner, 2014).

Au vu de l’engouement créé par l’orpaillage et compte tenu de la prolifération des sites d’orpaillage dans le pays, tout laisse penser que l’activité apporte un plus aux personnes qui s’y investissent. Cette hypothèse concerne principalement les populations en milieu rural où la pauvreté touche les ménages d’agriculteurs et particulièrement ceux d’agriculteurs vivriers (INSD, 2000). Cette réalité fait que les ménages ruraux connaissent fréquemment des périodes de soudures caractérisées par des déficits vivriers qui surviennent en début de saison des pluies et s’étendent jusqu’aux nouvelles récoltes (Thiombiano et al, 2012). Face à cette situation, les activités non agricoles pratiquées par les paysans en marge de leurs activités agricoles contribuent à améliorer leurs revenus (MED, 2004).

On constate donc que face à l’impossibilité structurelle de l’agriculture à jouer son rôle de facteur de lutte contre la pauvreté rurale, les paysans sont de plus en plus enclins à diversifier les activités et les sources de revenus en menant des activités non agricoles, comme l’orpaillage, en complément des activités agricoles habituelles.

Toutefois, si la pratique de l’orpaillage suscite un engouement certain en milieu rural du fait de ses avantages économiques, il convient de signaler comme indiqué en introduction, qu’elle est également à la base d’une controverse liée à ses inconvénients, qu’il convient de relever.

 Orpaillage comme facteur de nuisance et de désordre social

En termes de reproches, plusieurs études, ainsi que des articles de journaux ont dénoncé des désagréments attribués à la pratique de l’orpaillage sous sa forme actuelle qui est intimement associée à l’usage de substances chimiques toxiques comme le mercure et le cyanure et aux dégâts environnementaux. Ces auteurs relèvent des effets négatifs attribués à la pratique de l’orpaillage tant du point de vue environnemental, sanitaire que social.

Sur le plan environnemental : l’étude commanditée en 2011 par le ministère burkinabé de

l’Environnement et du cadre de vie portant sur l’analyse économique du secteur des mines

(21)

11

base d’une dégradation des sols, de l’écosystème, avec une atteinte grave à l’existence de la faune et de la flore. L’installation d’un nouveau site entraine généralement des dommages tant en surface qu’au niveau du sous-sol. La création et le fonctionnement de ces sites sont marqués par un processus d’abattage systématique de centaines d’arbres (Sawadogo, 2011) dont les troncs et les branches servent à la construction des supports à l’intérieur des trous et des galeries souterraines; cette dynamique de déforestation se poursuit durant toute la durée du site. De plus, sur les sites d’orpaillage, il y a la pollution de l’air, du sol et de l’eau par la poussière, le monoxyde carbonique et les huiles usagées des moteurs ainsi que d’autres produits chimiques tels que les piles usagées abandonnées au fond des puits contenant du manganèse ou du plomb, la perte de la biodiversité, la détérioration du paysage, etc. (Ouédraogo, H,A, 2006 :1). À la fin de l’exploitation aurifère, les sites sont abandonnés, les orpailleurs laissent derrière eux un paysage lunaire jonché de multiples crevasses rendant le terrain inutilisable pour les activités agricoles pour plusieurs années (Yaro, Kaboré et Kobanka, 2011). En plus des désagréments physiques, la contamination chimique des sols et des cours d’eau, consécutive à l’usage de substances toxiques (mercure et cyanure), entraine également une restriction des usages de l’eau aussi bien pour les besoins humains qu’animaux. Ce qui contribue à accroitre les risques sanitaires.

Sur le plan sanitaire : les conséquences de l’utilisation du mercure ont également été

mises en évidence par une étude menée en 2006 sur 11 sites aurifères. Les résultats de ces examens produits par l’Institut Universitaire Romand de Santé au Travail (IST) de Lausanne en Suisse (Ouédraogo, H,A, 2006), ont permis de montrer que 98,9% des travailleurs, soit 92 sujets sur 93, ont des concentrations urinaires en mercure au-delà des valeurs de référence de la population générale ; 68,8% des sujets de l’échantillon (64 personnes sur 93) ont des concentrations urinaires en mercure au-delà des valeurs de référence professionnelles de 35 μg Hg/g créatinine et près de la moitié des sujets ayant subi le dosage du mercure urinaire (49,5%) présente des valeurs supérieures à 100 μg Hg/g (Ouédraogo, H,A, 2006). À cela, il convient d’ajouter le fait que la vapeur de mercure peut être précipitée sous forme de pluie acide ou se propager par l’action du vent et contaminer les sols, les végétaux, les plans d’eau et les aliments non protégés ce qui entraine la contamination de la chaine alimentaire (Ouédraogo, H,A, 2006 ; OMS, 2013 ; Richard., Moher., et Telmer, 2014). L’Organisation mondiale de la santé (2013) aboutit pratiquement

(22)

12

aux mêmes constats en indiquant que l’exploitation artisanale est responsable de 37 % des émissions de mercure et elle représente la source la plus importante de pollution mercurielle de l’air et de l’eau. Cette pollution dépasse presque toujours la limite de 1,0 μg/m3fixée par l’OMS pour l’exposition de la population générale. Au-delà des acteurs directs, les communautés vivant dans les environs des sites aurifères sont également contaminées (OMS, 2013). Au Burkina Faso les symptômes les plus rencontrés sont les céphalées fréquentes, les troubles du sommeil, une fatigue inhabituelle, les tremblements et les troubles visuels. La prévalence de ces symptômes était plus élevée chez les acteurs intervenants à différents niveaux de l’orpaillage : personnes chargées de la préparation d’amalgames or-mercure et au chauffage de ces amalgames, personnes chargées du négoce et de la vente de l’or (Tomicic et al., 2011; Yayu, Masayuki and Koichiro, 2015).

Au-delà des désagréments chimiques, sur lesquels plusieurs sources sont unanimes, la pratique souffre également des insuffisances liées au manque d’organisation, ce qui fait que l’exploitation des sites d’orpaillage en période des pluies, en dépit de l’interdiction formelle des pouvoirs publics, aboutit à des accidents graves occasionnant chaque année des dizaines de morts suite à des éboulements13 (Ouédraogo, 2008 ; Sawadogo, 2011 ; CES, 2012 ; Coulibaly, G,M-M, 2013).

Sur le plan sanitaire, on note également la pratique de la prostitution au niveau des sites aurifères, dans des conditions de promiscuité et d’hygiène décrites dans les sections suivantes, qui pourrait expliquer la propagation des maladies sexuellement transmissibles, constatée dans de nombreux sites aurifères (Sawadogo, 2011 ; CES, 2012 ; Coulibaly, G,M-M, 2013).

Sur le plan social : la pratique de l’orpaillage est souvent associée à un certain nombre de

fléaux comme la dépravation des mœurs locales avec le développement de la prostitution, le développement du trafic ainsi que l’usage des drogues et l’expansion du banditisme. L’installation des prostituées exerçant de jour comme de nuit sans aucun respect pour la pudeur et les coutumes locales a contribué à l’instauration d’un autre type de rapport vis-à-vis de la sexualité dans une société traditionnelle, habituellement pudique où les discours sur la sexualité se font généralement très discrets. Avec la disponibilité des prostituées, les jeunes ont facilement accès à la sexualité pour peu qu’ils disposent de l’argent nécessaire.

(23)

13

En outre, le non-respect des coutumes locales, la violation des interdits, l’occupation des sites sacrés (forêts…) sont à la base du déclenchement de plusieurs altercations entre orpailleurs et populations locales (Kouadio, 2008 ; Sawadogo, 2011).

Dans les zones où les sites aurifères sont installés dans la région du Sud-ouest, il a été signalé un taux élevé d’abandon scolaire des enfants au profit du travail sur les sites aurifères. En effet, de 2010 à 2011, une école située sur le site aurifère de Bantara (dans la même province que notre zone d’étude), a enregistré 596 cas (269 filles et 327 garçons) d’abandons scolaires attribués à l’orpaillage. 45,97% de ces cas d’abandons sont issus des classes de CE et CM avec un âge moyen de 11 ans (Palé, 2012). Cette situation pose du coup, la cruciale problématique du travail des enfants sur les sites aurifères. De plus, les enfants ne sont pas les seuls concernés par les abandons scolaires, puisque des centres d’alphabétisation pour adultes ferment aussi faute de candidats (Palé, 2012).

 Orpaillage comme facteur de développement

De manière générale, l’orpaillage est perçu comme une source de revenus pour de nombreux ménages ruraux (Doucouré, 2014; Teschner, 2014). Au niveau communal, l’apport de l’orpaillage, à travers les différentes taxes collectées sur les sites et les ristournes annuelles reversées par le trésor public, constitue une source de financement indispensable pour les budgets communaux, comparativement aux communes rurales qui ne possèdent aucun site aurifère. La présence du site d’orpaillage suscite la création d’une diversité d’activités génératrices de revenus qui constitue autant de sources de revenus pour les habitants des villages..

Au niveau des ménages l’orpaillage occupe une place prépondérante dans leur système d’activités. Pour les ménages qui ont décidé d’inclure l’orpaillage dans leur système d’activités, les revenus tirés de l’orpaillage ou des activités annexes permettent de réaliser ou de renforcer les activités agricoles, non agricoles et sociales (Doucouré, 2014; Teschner, 2014). Cela dit, les répercussions de l’orpaillage sont systémiques et ont un effet d’entrainement positif sur les autres activités (Doucouré, 2014). L’orpaillage se positionne, de ce fait, comme une bouée de sauvetage pour des ménages qui n’avaient jusque-là que l’émigration comme alternative en dehors de l’agriculture. Ce rôle salvateur de l’orpaillage comme moyen de recours durant les moments difficiles n’est pas nouveau, car depuis l’époque précoloniale, en passant par les périodes de soudures, les populations ont toujours

(24)

14

fait recours à l’orpaillage pour avoir de l’argent destiné à l’achat des vivres ou à la satisfaction des besoins sociaux. S’il est vrai que la production minière industrielle peut être considéré comme un moyen de développement (Akabzaa, 2010), l’orpaillage également a fait ses preuves dans d’autres pays, aux conditions biophysiques et socioculturelles similaires, comme le Mali où les populations rurales (de la commune rurale de Yallankoro-Soloba au Mali) - à partir de l’argent généré par l’orpaillage - ont pu inverser le cercle vicieux de la pauvreté; les ménages de cette commune rurale du Mali, considérée comme une des plus pauvres du pays, ont pu, avec les revenus de l’orpaillage, renforcer leurs exploitations agricoles par l’achat d’intrants agricoles (les outils, les insecticides, les semences agricoles) et faire face aux besoins sociaux souvent pressants comme les frais médicaux, les frais scolaires, etc. (Teschner, 2014).

À ces activités non agricoles, il conviendrait également d’ajouter d’autres sources d’entrée d’argent comme l’apport des transferts venant de la diaspora burkinabé vivant à l’étranger et principalement dans la république voisine de Côte d’Ivoire.

 Le phénomène migratoire et la contribution de la diaspora

La population burkinabé se caractérise par une longue tradition d’émigration qui date de la période coloniale et qui constitue une dynamique qui a toujours impacté la vie sociale et économique de la population (Zongo, 2003; Loada, 2006; Awumbila et al, 2014). La migration est un phénomène social qui joue un rôle économique incontournable pour le Burkina Faso et particulièrement dans l’économie des ménages en milieu rural. L’importance du phénomène a amené les Nations Unies à classer le Burkina Faso parmi les pays d’émigration; le nombre de migrants qui quittent le pays chaque année est supérieur au nombre de migrants qui y arrivent14. La Côte d’Ivoire est la principale destination des migrants burkinabé (Zongo, 2003; Loada, 2006; Zanou et Lougué, 2009). Le mouvement migratoire en direction de ce pays voisin peut être perçu comme un processus qui a évolué en trois phases majeures commençant par la période coloniale où le phénomène était marqué par la contrainte exercée par l’administration coloniale. Les migrants étaient généralement destinés à travailler dans les plantations pour la production des cultures de rentes comme le café et le cacao destinés à la satisfaction des besoins de l’industrie de la

14IRIN, 5 février 2009.

(25)

15

métropole; cette activité se faisait au détriment de la production vivrière ce qui a entraîné la monétarisation des moyens de subsistance (Blot, 2002-2003).

Cette phase de contrainte migratoire a été suivie de la phase d’expansion économique des principaux pays de destination, qui exerçaient une certaine attraction sur les candidats à l’émigration et enfin la phase de crise qui s’est traduite par des flux inverses de rapatriements plus ou moins volontaires ou forcés, essentiellement de la Côte d’Ivoire en direction du pays d’origine (Blot, 2002-2003; Zongo, 2003; Loada, 2006).

À côté de cette migration internationale, il y a la migration interne qui se fait d’une région à l’autre à l’intérieur du pays. Cette dynamique migratoire interne, essentiellement agricole et économique est caractérisée par un flux migratoire venant des régions du plateau central et du nord du pays à la densité démographique plus élevée, vers la région du sud-ouest à la densité démographique plus faible, réputée plus favorable aux activités agropastorales (Lahmar, 1996 ; Sangli et Tallet, 2012). Ce potentiel agropastoral constitue un facteur attractif d’autant plus que sur le plan des ressources naturelles et des conditions de vie, les régions du plateau centrales et du nord se caractérisent par des conditions biophysiques peu propices à l’agriculture et des terres pauvres et arides soumises à des pressions anthropiques très denses (Lahmar, 1996 ; FAO, 2005; Sangli et Tallet, 2012).

Figure 1. L’inégale répartition du peuplement à l’échelle nationale en 2006

(26)

16

La carte ci-dessus indique les principales zones de densité démographique et le flux migratoire en provenance des régions nord et du plateau central vers la région du sud-ouest. Pour la même période (2006), on note une densité démographique de 82 habitants/km² pour la région du plateau central, 63 habitants/km² dans la région du Nord, contre 38 habitants/Km2 dans la région du sud-ouest; alors que la moyenne nationale est de 47 habitants/Km2 (MED, 2005; MEF, 2009; Billaz, 2012)

Les problèmes économiques sont perçus comme les principales causes des flux migratoires des bras valides du pays, qu’ils soient à l’intérieur du Burkina Faso ou en direction d’autres pays de la sous-région (Awumbila, et al., 2014).

Ces migrants burkinabés vivants en Côte d’Ivoire ont été estimés en 1998 à plus de 2,2 millions de personnes, dont 63,2% vivent en milieu rural, ce qui fait de la communauté burkinabé la plus importante communauté étrangère résidant dans ce pays (Zongo, 2003). Cette communauté représente 56,6 % de la population étrangère et 14,6 % de la population totale du pays (Zongo, 2011).

Ces émigrés burkinabés vivants en Côte d’Ivoire envoient régulièrement de l’argent à leurs familles restées au village. Entre 1994 et 2002, ces transferts ont généré annuellement une moyenne de 45 milliards de francs CFA (Ouédraogo; Dabiré et Guengant, 2009). Ces transferts d’argent de la diaspora par les canaux formels ont été chiffrés à 38 milliards en 2008, 39 milliards en 2009, 52 milliards en 2010 (MAECR, 2014). La BECEAO (2013a) indique que 46,9% des ressources reçues par le Burkina Faso proviennent de l’Afrique (dont 39,2% des pays de l’UEMOA, en particulier la Côte d’Ivoire pour 30,9%); vient en seconde position l’Europe avec 32,0%; la troisième place est occupée par le continent américain avec 16,3% (BECEAO, 2013a). Ces transferts d’argent contribuent, pour une part importante, aux revenus des ménages et principalement à ceux des ménages ruraux (Lachaud, 1999; Blot, 2002-2003; Lachaud, 2005; Ouédraogo, L.A, 2014). Selon la Banque centrale des états de l’Afrique de l’Ouest (2012b), ces transferts d’argent ont bénéficié à 84.3% des ménages burkinabés (BCEAO, 2012b). Les principaux bénéficiaires de ces transferts d’argents sont des cultivateurs/éleveurs (29,2%), des élèves/étudiants (15,7%) et des commerçants (14,6%) (BCEAO, 2012b). Cela indique que la majeure partie des bénéficiaires de ces transferts d’argent au niveau du Burkina Faso sont des paysans vivant de l’agriculture/élevage. Cela laisse penser que le ralentissement des transferts

(27)

17

d’argent constaté au moment de la crise sociopolitique en Côte d’Ivoire a pu avoir un impact négatif sur les activités et les conditions de vie en milieu rural.

De ce point de vue, la crise économique ivoirienne des années 1980 et du début de la décennie 1990 suivie par le déclenchement de la rébellion armée en septembre 2002 qui a provoqué le retour d’au moins 200 000 migrants burkinabè a contribué à réduire le flux des transferts d’argent vers le Burkina Faso; ce qui a inévitablement eu un impact négatif sur le niveau de pauvreté dans ce pays et particulièrement sur les conditions de vie en milieu rural, où l’argent reçu de la migration permettait de faire face à des dépenses comme l’achat des vivres durant les périodes de soudure, l’achat du bétail, les dépenses liées à la scolarisation des enfants, les dépenses liées aux cérémonies traditionnelles comme les funérailles, les baptêmes, l’achat des biens d’équipement, etc. (Zongo, 2003; Lachaud, 1999).

Actuellement même si cette crise semble lointaine, et que beaucoup d’anciens rapatriés ont choisi de repartir en Côte d’Ivoire, d’autres par contre ont choisi de demeurer au Burkina Faso (Zongo, 2003; Loada, 2006; Zongo, 2011).

1.2. Contexte de la commune rurale de Gbomblora

Située à une vingtaine de km de Gaoua, le chef-lieu de la région du Sud-ouest, la commune rurale de Gbomblora fait partie des dix (10) départements de la province du Poni. Elle est délimitée au Nord par le département de Bousséra, au Sud par les départements de Legmoin et Midebdo dans la province du Noumbiel, à l’Est par le Ghana et à l’Ouest par le département de Gaoua. Il couvre une superficie de 581 km2. (Commune de Gbomblora, 2014).

(28)

18

Figure 2. Carte administrative de la commune de Gbomblora

Source : Commune de Gbomblora, 2014.

Le village de Gbomblora, chef-lieu de ladite commune, est situé sur l’axe Gaoua - Batié. Cette route principale, longue de 67 kilomètres, bien qu’elle ne soit pas bitumée est praticable en toute saison (Commune de Gbomblora, 2014).

Les activités socioéconomiques dominantes dans la commune sont l’agriculture, l’artisanat et l’orpaillage. Cette dernière activité prend de l’ampleur si l’on considère le nombre de sites d’orpaillage identifiés sur le territoire communal. En 2012 il a été identifié dans la seule commune de Gbomblora six sites d’orpaillage (Bontara, Pélinka Yourbi, Tantouo, Tiémolo et Wadaradouo), tous illégaux (MATS, 2012; Toé, 2013).

Sur le plan géographique, la commune de Gbomblora est contiguë aux frontières ivoirienne et ghanéenne dont elle est encore plus proche. Excepté le marché de Gaoua, , Gbomblora ne dispose pas de marché, les habitants fréquentent les marchés des villages voisins dont les plus proches sont Doudou (10 kms), et Tobo (32 kms) ainsi que celui du chef-lieu de la région, situé à Gaoua (20 kms) (Commune de Gbomblora, 2014). Il s’agit de petits marchés informels hebdomadaires des villages voisins, faits de hangars en paille où l’on trouve les productions agricoles et artisanales. Ces marchés sont les lieux où les paysans vont une fois par semaine vendre les céréales, les tubercules, le bétail, la volaille ainsi que de petits articles d’artisanat et s’approvisionner pour les besoins domestiques ou agricoles. Au-delà

(29)

19

des échanges marchands, ces marchés sont aussi des carrefours sociaux qui servent de prétextes pour se retrouver entre amis, et parents installés dans différents villages, de se retrouver périodiquement et d’échanger des nouvelles.

Si les marchés situés des deux côtés des frontières sont fréquentés aussi bien par les burkinabés que par les voisins ivoiriens et ghanéens, on note toutefois des difficultés d’écoulement des produits agricoles liées à l’enclavement des villages et au mauvais état des pistes rurales reliant ces différents villages entre eux (Commune de Gbomblora, 2014). Pour ce qui est de l’exploitation artisanale de l’or pratiquée dans la commune, ses caractéristiques sont quasiment identiques à celles décrites dans la section précédente consacrée aux activités non agricoles et aux autres sources de revenus. L’exploitation artisanale de l’or est régie par une gouvernance particulière au niveau local qui est traitée dans les prochaines sections.

 Historique et évolution de la pratique de l’orpaillage

Historiquement, l’orpaillage n’est pas une pratique nouvelle dans la commune rurale de Gbomblora et dans la région du Sud-ouest en général. Selon l’ethnologue française Madeleine Père (1992), l’exploitation de l’or est pratiquée dans cette région, considérée comme une des plus anciennes et aussi une des plus grandes zones aurifères du pays, depuis les XIVe-XVe siècle (Père, 1992). À cette époque déjà les autochtones s’adonnaient à la recherche de l’or de manière traditionnelle, qui ressemblait plus à une forme de cueillette en surface (Sawadogo, 2011). L’or était « cueilli » et vendu occasionnellement par les femmes lorsqu’il y’avait un besoin urgent d’argent pour faire face à des dépenses précises telles que l’achat des vivres durant les périodes difficiles ou pour faire face aux dépenses inhérentes aux cérémonies coutumières comme l’achat d’animaux, de volailles pour les sacrifices rituels, l’organisation des funérailles ou des cérémonies d’initiation, etc. (Schneider,1993). À l’instar des autres localités de la région, la recherche et la manipulation de l’or étaient traditionnellement dévolues aux femmes qui se contentaient de chercher l’or le long des cours d’eau, à l’aide de la bâtée (Schneider,1993; Sawadogo, 2011). Cette activité se faisait sans utilisation d’outillages et encore moins de susbstances chimiques comme le mercure et le cyanure. L’orpaillage a connu par la suite un développement et un changement dans sa pratique. Même s’il est admis que l’orpaillage était déjà pratiqué par les autochtones depuis des siècles, le développement de l’activité en tant que pratique

(30)

20

quotidienne intensive, telle que menée actuelle est très récent. L’arrivée massive des orpailleurs dans la région du sud-ouest et l’organisation de la pratique de l’orpaillage dans sa forme actuelle datent des années 90 (Mégret, 2008).

Selon les témoignages recueillis sur le terrain, le retour massif de milliers de migrants burkinabés expulsés de la Côte d’Ivoire suite à la crise politico-militaire déclenchée en 2002 dans ce pays voisin a également contribué à augmenter le nombre d’arrivants sur les sites d’orpaillage de la région. Parmi ces migrants rapatriés au pays, 10% se sont installés dans la région du sud-ouest contre 4% dans celle de la Comoé voisine pour la similitude biophysique et la proximité avec la Côte d’Ivoire (Zongo, 2008; Ouédraogo, Dabiré et Guengant, 2009; Zongo,2009). Cela dit, bien avant le déclenchement de la crise, la région était considérée comme une destination de prédilection pour les migrants agricoles depuis les années 70, en provenance des régions situées au nord du pays, chroniquement confronté à la sécheresse (Billaz, 2007, 2012).

 Situation géographique du site d’orpaillage

Le site d’orpaillage de Pélinka dans la commune rurale de Gbomblora, qui fait l’objet de la présente étude est situé dans la partie nord-est du village de Gbomblora, à environ 2000 m de la mairie. Les coordonnées géographiques sont : N : 12-19’-970’’ et W : 001-29’-082’’. Le site a été créé en 2005, il y a de cela dix ans. Au départ le site ne comptait que quelques personnes et au fil des années avec l’arrivée massive des orpailleurs le site s’est vite agrandi pour compter aujourd’hui plus de 200 personnes. Cela dit, cette population est extrêmement fluctuante de sorte que le nombre de personnes varie d’une semaine voire d’un mois à l’autre au gré de nouvelles découvertes qui peuvent occasionner des départs ou des arrivées de nouveaux orpailleurs. Le site a connu plusieurs mouvements de personnes liés au fait que les orpailleurs n’hésitent pas à plier bagage dès lors qu’ils entendent parler de l’ouverture d’un nouveau site d’orpaillage réputé plus productif que là où ils sont. Mais la plupart sont revenus au bout de quelques mois.

(31)

21

2. Problématique

2.1. Les défis de la commune rurale de Gbomblora

La commune, à l’image de l’ensemble de la région, dispose d’importants atouts biophysiques. La pluviométrie est située entre 900 et 1 200 mm par an. La durée des précipitations peut atteindre 6 à 7 mois avec une saison sèche qui peut durer de novembre à mars (5 mois). Les températures oscillent entre 21 °C et 32 °C (Somda, et Somé, 2009). Cette région semble relativement avantagée comparativement à d’autres régions du pays, comme la région du Sahel qui affiche une pluviométrie moyenne allant de 400 à 600 mm par an avec une longue saison sèche de 9 mois contre seulement 3 mois de saison pluvieuse. Dans cette région du sahel burkinabé, les températures varient entre 10 °C à plus de 43 °C (Boly, 2009).

La population de la commune tire l’essentiel de ses revenus des trois principales sources que nous avons présentées dans les sections précédentes. Il s’agit des activités agricoles, des activités non agricoles et des transferts d’argent opérés par les ressortissants partis travailler dans les pays limitrophes comme le Ghana et principalement la Côte d’Ivoire (Commune de Gbomblora, 2014).

En dépit des atouts climatiques existants, la population est confrontée à un certain nombre de problèmes, décrits dans les prochains paragraphes, qui sont de nature à influencer négativement ses conditions de vie.

 Les défis de la production agricole

Pour ce qui concerne les cultures vivrières, l’activité dominante dans ce village est l’agriculture pluviale, axée sur les principales cultures vivrières (mil, sorgho, maïs, riz) et les cultures de rente composées des arachides, du coton et du soja (Commune de Gbomblora, 2014). Pour la campagne 2013-2014, les cultures vivrières ont occupé la plus grande proportion des superficies cultivées avec le sorgho 56,4%, le maïs 26, 88%, le mil 13, 08% et le riz 0,36%.

Pour ce qui concerne les cultures de rentes pratiquées dans la localité, il y a l’arachide (94,3 %), le coton (3,8%), le soja (1,9%) ainsi que d’autres spéculations comme la patate, le niébé et les ignames.

Comme à l’échelle nationale, il s’agit d’une agriculture familiale de subsistance, de type extensif, essentiellement orientée vers l’autoconsommation.

(32)

22

Selon une étude menée en 2012 dans la région du Sud-ouest par Fanny Simphal (2012), il ressort qu’en dépit du potentiel agricole qui existe, des contraintes d’ordre structurel, telles que les difficultés de gestion de la production agricole par les organisations paysannes et leurs membres (stockage, transformation, commercialisation), font obstacle au développement du système agricole donnant lieu à de faibles revenus et à l’endettement des ménages. En outre, ces contraintes affaiblissent les capacités financières des producteurs en termes d’acquisition des intrants agricoles, en termes de satisfaction de certains besoins sociaux fondamentaux en rapport avec l’alimentation, les soins médicaux, la scolarisation, les obligations coutumières, etc. Cette situation crée un besoin urgent à combler; toutes choses qui obligent le paysan à vendre les récoltes à bas prix afin de pouvoir entrer en possession de la liquidité qui lui permet d’honorer rapidement ses obligations sociales (Simphal, 2012). De plus, la faiblesse de la production agricole, associée à l’immensité des besoins domestiques et la nécessité d’acquérir des céréales complémentaires pour couvrir la période de soudure, concourent à introduire le paysan dans un cycle d’endettement dont il lui sera très difficile de sortir (Simphal, 2012).

En définitive, à l’instar du reste du pays, de nombreuses difficultés à la fois structurelles et conjoncturelles, limitent la performance et la productivité de cette agriculture familiale qui souffre des maux comme le sous-équipement des producteurs (la quasi-totalité des producteurs utilise toujours la daba (houe) en lieu et place de la charrue), la faible accessibilité des producteurs aux engrais ainsi qu’aux variétés performantes de semences, la faiblesse des superficies cultivées comprises entre 3 et 6 ha comme dans l’ensemble du pays (INADES, 2013). Ces facteurs concourent véritablement à réduire la productivité. En outre, les obstacles structurels comme le manque d’infrastructures agricoles, le manque d’encadrements techniques, l’inaccessibilité aux crédits, l’insuffisance de paquets technologiques, les difficultés d’écoulement des produits agricoles liées à l’état des pistes et la faible productivité des exploitations associées aux perturbations conjoncturelles liées aux facteurs biophysiques ont contribué à la paupérisation des producteurs (Commune de Gbomblora, 2014). Ce constat pourrait expliquer le taux de pauvreté (56,6%) ainsi que la quatrième place, occupée par la région du sud-ouest, parmi les régions les plus pauvres du pays (FIDA, 2011).

Figure

Figure 1. L’inégale répartition du peuplement à l’échelle nationale en 2006
Figure 2. Carte administrative de la commune de Gbomblora
Tableau 1:Répartition des enquêtés
Tableau 2: Difficultés et reformes en cours d’élaboration
+7

Références

Documents relatifs

Constatant que les avis comminatoires précités se référaient expressément aux loyers de février 2009 et indiquaient clairement les montants dus (de même que le délai de paiement

ƒ To the establishment of a comparison of two different approaches in mapping the vulnerability notably experimental and methodological method (the Belgian approach) and an

Par ailleurs, dans des pays arides ou semi- arides où une importante proportion de la population rurale vit du pastoralisme ou cohabite avec les éle- veurs, il va de soi que

Les excréments importants, comme les bouses de bovins, ne disparaissent cependant pas complètement: «dans la plupart des cas il en reste une quantité appréciable à la surface du

Lorsque Huon se lamente d’être abandonné par Aubéron, on entend très directement le Christ demandant au Père pourquoi il l’a abandonné : « Auberon, sire, se dit Hue li

La communi- cation autour de ce nouvel outil doit être adaptée pour tenir compte des attentes (situations dans lesquelles la PrEP parait nécessaire) et des craintes

Enfin, à partir de J13, le syncitiotrophoblaste émet des travées radiaires qui pénètrent dans l'endomètre et entraînent avec elles un cordon de cellules

Depuis l’atmosphère en passant par la retenue, l’estuaire du Sinnamary et jusqu’à l’océan atlantique, la construction du barrage de Petit-Saut perturbe profondément le