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4. Méthodologie

4.2. Les critères de choix de la zone et de la population d’étude

Il existait au moment de l’enquête six sites d’orpaillage en exploitation dans la commune rurale de Gbomblora21. Nous avons choisi de mener l’étude sur le premier site appelé Pélinka. Il fait partie de la commune et compte environ 229 habitants. Nous avons choisi de retenir ce site (Pélinka) parce qu’il est plus animé et le nombre d’orpailleurs y est plus élevé contrairement aux autres sites où les activités sont fortement réduites en raison de l’appauvrissement du filon.

Pour la réalisation de la présente étude, deux niveaux de sélection ont servi à l’identification de l’échantillon : le choix du village et le choix de la population d’étude.

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Les deux niveaux de sélection ont été soumis à des critères dont la satisfaction conditionne l’inclusion dans l’échantillon d’étude.

 Critères de choix du village

La commune de Gbomblora a été retenue en raison d’un certain nombre de critères qui sont à la fois d’ordre biophysiques/miniers et géographiques.

 du point de vue des conditions biophysiques et des ressources minières

La région du Sud-ouest dont fait partie la commune rurale de Gbomblora est la quatrième région la plus pauvre du Burkina Faso avec un taux de pauvreté estimé à 56,6% (FIDA. 2011). Dans ce contexte de pauvreté générale, la Commune dispose de trois sites aurifères exploités depuis plusieurs années et mobilisant aussi bien des personnes originaires de la localité que des personnes venues d’autres contrées du pays voire même de l’extérieur du Burkina (Sawadogo, 2011). Sur l’ensemble de la province du Poni (province de tutelle de Gbomblora), en plus des nombreux sites d’or en exploitation artisanale, de très importants gisements de cuivre ont été mis en évidence entre Malba, Boussera et Gbomblora depuis 2009 (Sawadogo, 2011). Les ressources probables sont estimées à 82 600 000 tonnes soit 0,40 % de cuivre et 0,40 g/t d’or soit un total de 330 400 tonnes de cuivre métal et plus de 33 tonnes d’or métal. Selon la même source (Sawadogo, 2011), le cuivre-or de Malba et de Boussera (villages voisins de Gbomblora) est considéré actuellement comme l’un des gisements les plus importants en Afrique de l’Ouest (Sawadogo, 2011).

Face à la situation de pauvreté existant en dépit de la présence de ces ressources minières , nous avons estimé qu’il serait intéressant de connaitre le type d’organisation mis en place par les populations locales pour faire face à la précarité et avoir une meilleure compréhension de la place de l’orpaillage dans le système d’activités des ménages.

 du point de vue géographique

En plus des flux migratoires favorisés par les facilités d’accès, il convient de préciser que ce mouvement saisonnier des populations touche essentiellement les jeunes à la recherche de travail manuel agricole dans les plantations ivoiriennes (Zongo, 2003). C’est généralement par cette voie que les jeunes gens arrivaient à se faire de l’argent qu’ils envoyaient à leurs familles restées au village (Lachaud, 1999; Zongo, 2003).

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Cette migration contribue au système d’activités des populations de la région et permet de surmonter les moments difficiles durant les périodes de soudures.

Il nous a semblé fort intéressant d’observer si, avec la fin de la crise ivoirienne, les jeunes du village continuent à prendre le chemin de l’exode en direction de ce pays malgré le développement de l’orpaillage. Au cas où l’exode serait toujours pratiqué de façon saisonnière par les jeunes du village il serait bon de savoir aussi ce que représente la contribution de ces personnes dans les systèmes d’activités des ménages du village.

 Critères de choix de la population d’étude

L’étude s’est intéressée à six groupes cibles pour retenir initialement 43 personnes à interviewer.

Tableau 1:Répartition des enquêtés

Ménages pratiquant essentiellement l’orpaillage Ménages pratiquant agriculture et orpaillage Ménages pratiquant essentiellement l’agriculture

Notables services techniques Responsables et administratifs Responsables communaux et villageois Total Participants

à l’étude Chefs de Ménages Chefs de Ménages Ménages Chefs de

1 Chef de village 1 Chef de terre 1 Agriculture, 1 Élevage, 1 Environnement, 1 DRED22, 1 Préfecture 1 Maire 1 Conseiller communal 1 CVD23 Total prévu 11 11 11 2 5 3 43 Total rencontré 12 07 06 2 5 3 35

En partant du nombre d’habitants de Pélinka (zone abritant le site d’orpaillage retenu), estimé à 229 habitants (MATDS, 2012), avec une moyenne de 7 personnes par ménage (INSD, 2006), nous avons estimé le nombre de ménages à environ 33. Nous avons sur cette base décidé de retenir à priori 33 chefs de ménages. En définitive, sur les 33 chefs de ménages prévus, seulement 25 ont été interviewés.

Le choix des 33 chefs de ménages, remplissant les conditions, a été fait sur la base d’un échantillonnage par choix raisonné (ou au jugé): cette méthode permet de sélectionner les unités considérées caractéristiques du phénomène à l’étude (Durant, 2002). En pratique, la méthode au jugé permet de choisir des unités (quartiers, îlots, écoles...) en fonction de certaines caractéristiques avant de procéder ensuite à l’échantillonnage à l’intérieur de chacune des grandes unités sur la base du hasard. L’avantage de la méthode au jugé consiste à permettre de recueillir des caractéristiques objectives des

22Direction régionale de l’économie et du développement 23Conseil Villageois de Développement

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grandes unités. (Durand, 2002). Il s’agit d’une technique d’échantillonnage non aléatoire (non probabiliste) qui contrairement aux techniques d’échantillonnage aléatoire (probabiliste), présente l’avantage d’être beaucoup moins coûteuse, plus rapide et plus simple à réaliser. Ce qui correspondait parfaitement à ce dont nous avions besoin compte tenu de nos limites en termes de finances et de temps nécessaires pour la réalisation de l’étude.

Toutefois, avec ce type de technique, on ne peut généraliser les résultats à l’ensemble de la population, puisque toutes les unités statistiques n’ont pas la même chance d’être choisies ce qui influence la représentativité de l’échantillon.

La désignation des exploitants agricoles pratiquant l’agriculture sans l’orpaillage a été faite par l’agent du service agricole. À l’intérieur de ce groupe, les agriculteurs ont été retenus sur la base du volontariat.

Pour ce qui concerne le groupe pratiquant essentiellement l’orpaillage ainsi que les agro-orpailleurs, ils ont été désignés sur le site d’orpaillage par le responsable du site, qui à défaut de posséder une liste nominale des différents acteurs, connait le domaine d’activité de chaque acteur. Par la suite nous avons appliqué la même méthode pour procéder à l’intérieur de chacun des deux groupes à l’identification de chaque chef de ménage sur la base du volontariat.

Cette méthode nous a paru la plus adaptée au type de populations auxquelles nous nous intéressons, à partir du moment où nous ne disposions pas, au départ, du nombre exact d’orpailleurs travaillant sur le site, encore moins d’une liste nominale des habitants. Pour ce qui concerne les autres groupes cibles (les responsables techniques et administratifs ainsi que l’équipe communale), compte tenu de leur nombre limité, ils ont tous été systématiquement interviewés.

 les chefs de ménages

S’il est vrai qu’au départ nous avions prévu d’interviewer un échantillon de 33 chefs de ménages, en définitive, nous n’avons pu réaliser les entrevues qu’avec 25 chefs de ménages, comme indiqué dans la section précédente; les autres ont, au dernier moment, refusé de participer à l’étude24. Respectant nos engagements vis-à-vis du comité

24L’étude a été menée durant la période post insurrectionnelle. Cette insurrection populaire qui s’est déroulée les 30 et 31 octobre 2014, s’est soldé par la chute du président Blaise Compaoré après 27 ans de règne et la répression qui s’en est suivi a causé la mort d’une trentaine de personnes et plus de 600 blessés (Jeune Afrique, 26 novembre 2014). La chute du régime a été suivie de la

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d’éthique et nos principes éthiques en matière de liberté de participation ou de refus de participation des personnes à l’étude, nous avons respecté leur décision. Ce qui fait qu’au total, nous avons interviewé 12 chefs de ménages pratiquant essentiellement l’orpaillage, 7 chefs de ménages pratiquant cumulativement l’agriculture et l’orpaillage que nous désignons comme des agro-orpailleurs et 6 chefs de ménages pratiquant essentiellement l’agriculture.

Pour être retenus, ces orpailleurs devaient pratiquer l’orpaillage sur le site aurifère du village.

La répartition des ménages en trois groupes en fonction du degré de diversification des activités incluant ou non l’orpaillage dans le système d’activités répond au souci de diversification des situations existant dans le même espace géographique. Cette diversification nous a permis non seulement d’avoir trois situations et trois expériences différentes mais aussi d’apprécier la différence de niveau de vie qui existeentre ces trois groupes de ménages.

Le chef de ménage pourrait être un homme ou une femme, lorsque l’on prend en considération la définition du ménage ordinaire donnée par les services statistiques du Burkina Faso. Cette définition considère le ménage comme étant : « une unité socio- économique de base au sein de laquelle un ou plusieurs membres, apparentés ou non, vivent dans la même maison ou concession, mettent en commun leurs ressources et satisfont en commun à l’essentiel de leurs besoins alimentaires et autres besoins vitaux, sous l’autorité de l’un d’entre eux appelé chef de ménage » (INSD, 2009b :38). Ces ménages doivent pratiquer leurs activités depuis au moins une année.

Du point de vue qualitatif, les vingt-cinq (25) chefs de ménages nous semblent suffisants pour atteindre un degré de saturation raisonnable.

 les notables du village

Les deux premiers responsables hiérarchiques de la chefferie traditionnelle au niveau du village sont le chef de village et le chef de terre. Le chef de village assure la gestion morale et « politique » du village, tandis que les «chefs de terre» « jouent encore aujourd’hui un rôle important dans de vastes zones du continent, et ce dans deux domaines: dans les discours sur le fait d’être autochtone et dans la question de l’accès suspension des conseils municipauxpar le gouvernement de transition et leur remplacement par des délégations spéciales dirigées par les préfets. Ce qui pourrait expliquer le climat de méfiance qui régnait dans les villages (Ouaga.com, 19 novembre 2014).

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aux ressources. Cela vaut particulièrement pour des sociétés telles que celles du sud- ouest du Burkina Faso qui, à l’époque précoloniale, ne disposaient pas d’institutions politiques centralisées » (Kuba, 2004 :63). Les responsables coutumiers occupent une place prépondérante dans cette société. Ce sont des leaders d’opinion, des personnes ressources et des autorités morales qui détiennent la légitimité coutumière; ce qui fait un total de deux notables. Hormis ceux qui occupent les terres de manière clandestine, sans l’autorisation des gens du village (ce qui est source de conflits), généralement les nouveaux arrivants veillent à obtenir l’autorisation (verbale) des gens du village et en l’occurrence les propriétaires terriens qui en informent les autorités coutumières chargées d’organiser les rituels sacrificiels qui s’imposent en pareilles circonstances.

 les responsables des services administratifs et techniques

Au niveau de la commune de Gbomblora, les principaux services techniques et administratifs décentralisés, concernés par la question de l’orpaillage sont les directions régionales de l’agriculture, de l’élevage, de l’environnement, de l’économie et du développement ainsi que la préfecture. Le premier responsable de chacune de ces cinq structures publiques a été interviewé. Ce qui fait un total de 5 responsables.

Ces services sont les structures en charge du suivi des activités dans leurs domaines de compétence ; de ce fait, ils sont confrontés à la réalité technique et administrative du village. Ils sont une source importante de documentation à travers leur connaissance du terrain (structure, processus et climat), les activités de terrain qu’ils mènent et les rapports techniques et administratifs qu’ils produisent périodiquement.

Cela dit, il est important de noter que certains services techniques administratifs couvrant le village sont domiciliés à Gaoua, le chef-lieu de province situé à 22 km du village, faute de logement ou de personnel.

 les responsables communaux et les membres des CVD

La commune est gérée par un maire qui préside le conseil communal composé de quelques conseillers qui sont issus de différents secteurs d’activités de la communauté. Ces conseillers communaux représentent différentes composantes géographiques de la commune. À travers son enracinement dans cette communauté, l’équipe communale a été identifiée comme étant une source incontournable pour la collecte d’informations pertinentes sur la société, le fonctionnement, les secteurs d’activités, la situation de

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l’exode, la situation économique, etc. De plus, la commune est directement concernée par la situation des sites d’orpaillage qui sont implantés sur son territoire. À ce sujet, le code minier du Burkina Faso en son article 82 stipule que « 20 % du montant de la taxe superficiaire doivent être versés à la collectivité où se trouve la superficie » (AN, 2003). Théoriquement, de par ces dispositions réglementaires, la commune est impliquée, de droit, dans le fonctionnement des sites aurifères opérant sur son territoire.

Aussi, au niveau de la Mairie, nous avons interviewé le président de la délégation spéciale représentant le Maire ainsi qu’un conseiller communal et un membre du conseil villageois de développement (CVD); ce qui fait un total de 3 responsables communaux. Le Conseil Villageois de Développement (CVD) est une structure villageoise composée d’habitants élus démocratiquement par les populations25.

Pour une meilleure compréhension du contexte local, il est important de préciser que le découpage administratif du Burkina Faso est organisé dans une structuration pyramidale. En partant du haut vers le bas nous avons :

- L’État

- La région, dirigée par un Gouverneur de région

- La province, dirigée par un Haut-commissaire de province

- La commune, dirigée par un maire

- Le village qui est l’entité de base de cette pyramide est dirigé sur le plan administratif par un conseiller villageois qui est la courroie de transmission entre la population et l’administration (NDI, 2010). Le conseiller villageois est un habitant du village élu par la population.

Au niveau village, deux types de gouvernance se côtoient, il y a d’une part les structures administratives et formelles représentées par les conseillers villageois et le Maire; d’autre part il y a les structures traditionnelles représentées par le chef de village, le chef de terre, etc., mais qui n’ont aucun rôle administratif formel. Leur rôle est purement traditionnel et coutumier.

25 « Le CVD est chargé sous l’autorité du conseil municipal de contribuer à l’élaboration et à la mise en œuvre des Plans communaux de

Développement (PCD), de contribuer à la promotion du développement local dans le village et de participer aux activités des différentes commissions mises en place par le conseil municipal pour la gestion et la promotion du développement local » (NDI, 2010 :19).

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