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L’élaboration d’un style sous le Consulat et le Premier empire (1799-1814/5)

A. Du bon exercice de l’autorité par les préfets

La lecture des discours, des circulaires284 et des lettres adressés aux préfets, ainsi que

d’un certain nombre de documents conservés dans les dossiers personnels des préfets

283 Pierre KARILA-COHEN, La Masse et la plume… op. cit., p. 10. De manière plus générale, on peut renvoyer, sur ce sujet, à l’ensemble du chapitre 1.

284 On peut définir une circulaire comme « une instruction formulée par écrit, destinée à un groupe plus ou moins importants d’agents du même ordre, qui statue de manière générale sur un objet », « elle définit les modalités pratiques de l’application de la loi » (Igor MOULLIER, Le Ministère de l’intérieur… op. cit., thèse consultée en ligne, non paginée). Les circulaires permettaient d’encadrer l’action de leurs représentants en province.

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témoigne sans ambiguïté de l’importance que les dirigeants accordaient aux relations entre les préfets et la population.

1. Définir l’exercice de l’autorité

Dans un premier temps, les gouvernants s’efforcèrent de définir les règles que devaient respecter les préfets dans leurs relations avec leurs administrés par des discours et par des circulaires. Le 19 ventôse an VIII, Napoléon Bonaparte s’adressa aux préfets nouvellement nommés. Puis son frère, Lucien Bonaparte, devenu ministre de l’Intérieur,

adressa au préfet une circulaire et une lettre le 21 ventôse an VIII (12 mars 1800)285 pour leur

délivrer ses instructions.

Ces exposés des principes généraux qui devaient guider l’administration des nouveaux préfets constituaient, pour les nouveaux chefs de l’administration des départements, un véritable bréviaire de la manière dont ils devaient, idéalement, exercer leur autorité pour rétablir et renforcer l’autorité de l’Etat dans le pays, même si le terme autorité n’apparaissait nulle part dans le sens où nous l’entendons dans ce travail. Ils fixaient, en effet, trois règles fondamentales en ce domaine, qui participaient toute d’un même objectif fondamental : les

préfets devaient parvenir à se faire obéir non par la contrainte, mais la persuasion286. Ils

devaient, en premier lieu, s’assurer de l’obéissance de tous aux ordres du gouvernement, en particulier en matière fiscale – il fallait faire rentrer les contributions – mais aussi dans le domaine essentiel de la conscription. Ils devaient donc, pour cela, faire preuve de fermeté,

afin que les lois soient appliquées dans toute leur rigueur287

. Ils devaient, en outre, travailler au

bonheur et à la prospérité de leurs administrés, condition sine qua non de l’autorité de l’Etat,

en encourageant le développement de l’agriculture et du commerce, en facilitant les communications, en venant en aide aux déshérités, en favorisant l’éducation et les arts. Cela imposait, notamment, aux préfets de faire l’éloge du régime, d’assurer les différentes catégories de la population de l’attention portée par le gouvernement à leurs intérêts particuliers, et éventuellement de justifier les décisions prises. Enfin – et c’est sans doute la dimension la plus importante du point de vue de l’exercice de l’autorité – pour que « les

285 « Exposé de la nature des fonctions confiées aux préfets et des devoirs qu’ils ont à remplir », circulaire de Lucien Bonaparte, ministre de l’Intérieur, aux préfets, 21 ventôse an VIII (12 mars 1800), inRecueil des lettres circulaires… op. cit., p. 139-148 ; et lettre de Lucien Bonaparte aux préfets, 21 ventôse an VIII, Moniteur Universel, n° 173, 23 ventôse an VIII (14 mars 1800).

286Lettre de Lucien Bonaparte aux préfets, 21 ventôse an VIII, Moniteur Universel, n° 173, 23 ventôse an VIII (14 mars 1800).

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passions haineuses cessent, que les ressentiments s’éteignent, que les souvenirs douloureux s’éteignent », les préfets devaient imposer la concorde dans leur département. Ils fallait, pour cela, qu’ils fassent preuve, tant dans l’exercice de leurs fonctions que dans leur conduite privée, d’une autorité ferme mais bienveillante : s’il leur fallait accueillir « tous les Français,

quel que soit le parti auquel ils ont appartenu »288, s’ils avaient à juger les individus en

fonction de leur mérite et non de leurs opinions passées ou des « vaines et légères accusations

des partis »289, ils ne devaient pas accepter que l’on rappelât en leur présence « les

qualifications dont les partis divers se sont tour à tour poursuivis »290. Plus fondamentalement

encore, Napoléon comme Lucien Bonaparte considérait que les préfets devaient incarner – au sens fort du terme – la concorde, en agissant en hommes de bien et en veillant à se placer au-dessus des partis. Le Premier consul soulignait ainsi dans son discours du 19 ventôse an VIII :

« Ne soyez jamais les hommes de la Révolution, mais les hommes du gouvernement. Rappelez-vous que vous êtes au-dessus des intrigues comme le gouvernement est au-dessus des factions, et faites que la France date son bonheur de l’établissement des préfectures »291

Dans sa circulaire, Lucien Bonaparte insistait particulièrement sur le rôle de la voix du préfet, chargée de rendre la concorde sensible et de l’imposer, mais aussi sur la manière de s’exprimer. Il invitait ainsi les préfets, dans sa lettre du 21 ventôse an VIII, à adresser à leurs administrés « un langage qui vous montre tels que vous devez, que vous voulez être dans le

cours de votre magistrature »292. C’est donc par le vocabulaire choisi, le ton employé, mais

aussi naturellement la teneur des propos tenus que les préfets devaient imposer la concorde dans leur département et susciter l’obéissance.

On peut d’ores et déjà souligner que les instructions de l’Etat en matière d’autorité étaient porteuses de réelles ambiguïtés. Michel Biard note ainsi, à raison, qu’en se situant au-dessus des querelles partisanes et en s’efforçant d’agir pour le bien de leurs administrés, comme le gouvernement l’exigeait, les préfets pouvaient « tisser rapidement des liens individuels, construire des réseaux de sociabilité, et pour peu qu’ils restent en poste longtemps, devenir l’homme du département et non pas seulement l’homme du pouvoir

central »293. En se conformant aux normes édictées par le pouvoir afin de renforcer et

288« Exposé de la nature … », op. cit., p. 141.

289« Exposé de la nature … », op. cit., p. 142.

290

« Exposé de la nature … », op. cit., p. 142.

291 Discours du Premier Consul, 19 ventôse an VIII [10 mars 180].

292 Lettre de Lucien Bonaparte aux préfets, 21 ventôse an VIII, Moniteur Universel, n° 173, 23 ventôse an VIII (14 mars 1800).

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d’imposer l’autorité de l’Etat, les préfets étaient donc susceptibles, paradoxalement, de renforcer également leur autorité personnelle.

D’autres circulaires relatives à la question de l’exercice de l’autorité furent, par la suite, adressées aux préfets par le ministère de l’Intérieur. Il ne s’agissait, cependant, plus de fixer des règles générales, mais de rappeler aux préfets les limites de leur autorité. La manière dont ils exerçaient leur autorité ne devait, en effet, pas entrer en concurrence avec celle de l’Etat. Plusieurs d’entre eux s’étant manifestement permis de s’exprimer en leur nom propre, Lucien Bonaparte adressa à l’ensemble des préfets le 24 germinal an VIII (13 avril 1800) une circulaire qui leur rappelait sèchement les limites de leurs attributions :

« [Les préfets] n’ont le droit de proclamer ni leur propre volonté, ni leurs opinions ; tout acte émané d’eux doit avoir un objet précis et déterminé.

Plusieurs préfets ont méconnu cette règle ; ils ont publié des écrits dans lesquels ils exposent soit la théorie de leur administration, soit leurs principes, soit leurs sentimens. Je ne puis approuver cette conduite, et je rappelle dans le cercle de leurs fonctions ceux qui en sont sortis. »294

Le ministre précisa ensuite son propos dans une autre circulaire, datée du 6 floréal an VIII (28 avril 1800) :

« Par ma circulaire du 24 germinal dernier, je vous ai fait connaître l’inconvénient et le danger qui peuvent résulter de la manifestation des principes ou des opinions individuels de chacun des Préfets de la République.

Je crois nécessaire de vous rappeler encore les instructions que contient ma lettre et de vous prescrire de nouveau de vous renfermer soigneusement dans l’exercice de vos fonctions locales […].

Toute idée d’administration et d’ensemble serait détruite, si chaque préfet pouvait prendre pour règle de conduite son opinion personnelle sur une loi ou sur un acte du Gouvernement. Il devient simple citoyen, quand, au lieu de se borner à exécuter, il a une pensée qui n’est pas celle du Gouvernement, et sur-tout quand il la manifeste.

Les idées générales doivent partir du centre ; c’est de là que doit venir l’impulsion uniforme et commune : et je vois avec peine que quelques-uns de vous, dans des intentions louables sans doute, s’occupent du soin d’interpréter les lois ; qu’ils parlent aux administrés par des circulaires,

294

Circulaire du ministre de l’Intérieur aux préfets, 24 germinal an VIII (13 avril 1800), inRecueil des lettres circulaires… op. cit., p. 175.

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des placards, qu’ils remplissent les journaux du récits de leurs œuvres. Ce n’est pas ainsi que le Gouvernement désire qu’on administre […]. Imitez l’exemple qu’il vous donne : il fait des actes et non des écrits ; il gouverne, mais il parle peu. »295

De toute évidence, Lucien Bonaparte considérait qu’en publiant leur opinion ou en commentant leur action, les préfets non seulement outrepassaient les limites de leurs attributions, mais plus gravement encore tentaient d’exercer une autorité propre qui entrait en concurrence avec celle de l’Etat. C’était d’autant moins tolérable que les propos de certains préfets étaient en désaccord avec la pensée du gouvernement. Mettre ainsi sur la place publique des dissensions – volontaires ou non – entre les préfets et le gouvernement central ne pouvait à l’évidence que produire un effet désastreux alors que le régime souhaitait renforcer l’autorité de l’Etat.

Cette dimension apparaissait encore en creux dans une circulaire aux préfets de Jean-Antoine Chaptal, nommé ministre de l’Intérieur le 7 novembre 1800, datée de nivôse an IX (décembre 1800-janvier 1801) :

« J’ai remarqué, citoyen, que divers préfets avaient pris des arrêtés sur des objets d’administration et qu’ils les faisaient exécuter sans avoir préalablement obtenu l’autorisation du ministre que ces objets concernent. L’autorité supérieure se voit ainsi souvent réduite à la triste nécessité d’annuler ces dispositions qui reçoivent déjà leur exécution. […] Il en résulte de la défaveur pour le magistrat, du désordre dans la marche administrative, et de l’incohérence dans la législation des divers départements »296.

La nécessité d’annuler les arrêtés pris illégalement par les préfets posait principalement problème sur le plan juridique (ces arrêtés introduisaient entre les départements des différences de législation malvenues) et disciplinaire (ces arrêtés devaient être annulés, ce qui ne pouvait que nuire à la carrière du préfet qui les avait pris). On ne peut cependant exclure que le ministre avait également à l’esprit les conséquences sur l’opinion de telles mesures, tant concernant le préfet (il perdait certes la faveur du pouvoir, mais on peut supposer que l’annulation de ses décisions était susceptible de le discréditer également auprès de la population) que concernant l’Etat central lui-même, puisqu’apparaissait au grand jour une certaine difficulté à se faire obéir de ses représentants. Même si cette dimension n’est pas

295 Circulaire du ministre de l’Intérieur aux préfets, 6 floréal an VIII (28 avril 1800), in Recueil des lettres circulaires… op. cit., p. 182-183.

296

Circulaire du ministre de l’Intérieur aux préfets, nivôse an IX (décembre 1800-janvier 1801), inRecueil des lettres circulaires… op. cit., p. 382.

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explicitement évoquée dans la circulaire, ces annulations mettaient donc bien en cause l’autorité des préfets et celle de l’Etat.

A partir du passage de Jean-Antoine Chaptal au ministère de l’Intérieur, les circulaires se firent plus techniques et la question des relations des préfets avec la population passa au

second plan297, sans pour autant disparaître totalement. Le contenu de ces quelques circulaires

était, en outre, similaire à celui des précédentes. A titre d’exemple, dans la lettre datée du 5 vendémiaire an XI (27 septembre 1802) qu’il adressa aux préfets pour les informer du fait qu’il était désormais chargé des attributions jusqu’alors dévolues au ministère de la Police, le ministre de la Justice reprit ainsi à son compte les règles de comportement évoquées dans les

circulaires de l’an VIII298. De même, lorsqu’il redevint ministre de la Police en 1804, Joseph

Fouché adressa aux préfets des consignes de modération en tout point semblables à celles que

Lucien Bonaparte leur avait prodiguées299.

La raréfaction des circulaires relatives aux rapports entre les préfets et la population ne témoigne évidemment pas d’un déclin de l’intérêt porté par les gouvernants à cette question. Mais cela se traduisait désormais d’une manière différente, par la surveillance du comportement des préfets.

2. Surveiller les comportements

Le pouvoir central, désireux de mesurer l’efficacité de ses préfets, mit progressivement en place un dispositif d’évaluation des préfets passablement artisanal. En l’absence d’une inspection générale, les ministères de l’Intérieur et de la Police, chargés de la surveillance des préfets, disposaient, pour les renseigner, de différents informateurs, certains

réguliers – les commissaires de police300, les généraux commandants de places militaires, les

maires des grandes villes – d’autres occasionnels – notamment les conseillers d’Etat envoyés

297

Igor MOULLIER, Le Ministère de l’intérieur… op. cit. (Thèse consultée en ligne, non paginée).

298 AD 88, 71 M 1, Lettre du Grand Juge, ministre de la Justice au préfet de la Meuse, 5 vendémiaire an XI [27 septembre 1802].

299

Emmanuel de WARESQUIEL, Fouché, les silences de la pieuvre, Paris, Taillandier et Fayard, 2014, p. 411.

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en mission par le Premier consul en l’an IX dans les différentes divisions militaires301 et les

commissaires extraordinaires envoyés en province par l’empereur en 1814302, qui adressaient

au chef de l’Etat de volumineux rapports où étaient notamment évoqués l’action et le comportement des préfets. Si la multiplicité des agents chargés de la surveillance pouvait susciter certaines réserves – l’ancien préfet de la Moselle Vincent de Vaublanc parlait même

d’espionnage303

– elle n’empêchait pas le dispositif d’être efficace.

Ce dernier avait certes pour but d’évaluer la qualité de l’administration du préfet, mais il permettait également de juger de la bonne qualité de ses relations avec ses administrés, et éventuellement d’adresser aux préfets des consignes visant à réformer leur conduite. Même si une partie vraisemblablement importante des renseignements transmis aux ministres, échangés oralement dans le secret des cabinets et des rencontres mondaines, est tombée dans

l’oubli304, on dispose d’une masse relativement volumineuse de rapports écrits, qui

contiennent un certain nombre d’appréciations, positives ou négatives, sur les comportements des préfets avec la population. Il n’est cependant pas toujours aisé de les rassembler, car les informations relatives au comportement des préfets n’ont que rarement été réunies dans des documents synthétiques, malgré quelques tentatives intéressantes. Ainsi, en l’an IX, les dirigeants, soucieux de savoir si les premiers préfets accomplissaient leur travail convenablement, réunirent un certain nombre d’informations dans un tableau, jadis publié par

l’historien Alphonse Aulard305. Souvent lapidaires, surtout si le jugement émis était positif306,

les remarques formulées sur les préfets n’en sont pas moins intéressantes pour notre propos, dans la mesure où les difficultés rencontrées par certains préfets dans leurs relations avec la population y étaient parfois évoquées. Puis en l’an XI, en l’an XII, en 1806 et en 1809, quatre évaluations générales des préfets furent effectuées. Celle de 1806 est particulièrement intéressante, car l’administration centrale expérimenta alors une notation chiffrée des préfets. Dix-sept critères furent définis : 1. dévouement aux devoirs de sa place ; 2. moralité privée ;

301 Félix ROCQUAIN, L’Etat de la France au 18 brumaire d’après les rapports des conseillers d’Etat chargés d’une enquête sur la situation de la République avec pièces inédites de la fin du Directoire publiés pour la première fois et précédés d’une préface et d’une introduction, Paris, Didier et Cie, 1874, LXXV-426 p.

302

Louis BENAERTS, Les Commissaires extraordinaires de Napoléon Ier en 1814 d’après leur correspondance inédite, Paris, F. Rieder et Cie, 1915, 239 p. Il s’agissait, pour la division militaire de Metz du sénateur Chasset et pour celle de Nancy de l’ancien préfet Jean-Victor Colchen.

303 Vincent-Marie VIENOT DE VAUBLANC, Mémoires… op. cit., p. 409.

304 Guy THUILLIER et Vincent WRIGHT, « Notes sur les sources… » art. cit., p. 149.

305

« Tableau contenant des renseignements sur l’esprit public, les ministres du culte, les préfets, les sous-préfets, les émigrés en l’an IX », in Alphonse AULARD (éd.), L’Etat de la France en l’an VIII et en l’an IX, avec une liste des préfets et des sous-préfets au début du Consulat, Paris, Société d’histoire de la Révolution française, 1897, p 78-136.

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3. s’il est aimé dans son département ; 4. considération dont il jouit ; 5. sagesse ; 6. caractère ; 7. désintéressement ; 8. formes et aménité ; 9. représentation ; 10. impartialité ; 11. capacité ; 12. connaissance ; 13. assiduité au travail ; 14. exactitude dans la correspondance ; 15. ses rapports avec l’autorité supérieure ; 16. zèle pour les améliorations ; 17. exécution des lois dans son département. Chaque préfet était évalué par une note, située sur une échelle allant de

-3 à 3. Les résultats furent consignés dans un tableau synthétique307

. Enfin, en 1812, Jean-Pierre de Montalivet, ministre de l’Intérieur depuis 1809, désireux de mieux connaître les préfets, demanda que soit élaboré un outil de travail rassemblant l’ensemble des informations disponibles sur les préfets et destiné à être complété au fur et à mesure que les renseignements se feraient plus précis. Si la majeure partie des rubriques concernaient les compétences administratives des préfets, d’autres étaient consacrées à leurs rapports avec leurs administrés :

« En conséquence, il sera préparé un registre à colonnes, qui contiendra les noms des préfets, leurs titres et dotations dus à la munificence de Sa Majesté, et en titres obtenus par la formation de leurs majorats, leur âge, leur qualité de marié, veuf ou célibataire, le nombre et le sexe de leurs enfants, l’indication de leurs enfants mariés et à qui, la fortune personnelle du préfet, celle de sa femme avant la préfecture et depuis qu’il est préfet, l’âge de sa femme, ses qualités et son influence sur son mari, la direction vers les soins du ménage, la frivolité, les actes de bienfaisance, leurs familles et leur ancienne existence, leurs relations sociales et habituelles, leur manière de vire, le goût du mari pour le vin, la chasse, les femmes, les maisons de campagne ; la considération personnelle du préfet, celle de sa femme, si le préfet est membre d’une société littéraire, d’agriculture ou autre.

Sous le rapport administratif, des colonnes présenteront le montant des frais fixes de la Préfecture, le nombre de employés, l’opinion sur la force ou la médiocrité des bureaux, sur leur influence, comment le préfet administre la comptabilité communale, la comptabilité départementale, les prisons, les dépôts de mendicité, les routes, les conscriptions, etc, comment il vit avec les tribunaux, avec la gendarmerie, avec les maires des principales villes, avec les sous-préfets, avec le clergé, avec les militaires de terre ou de mer. »308

Néanmoins, ces outils d’évaluation synthétiques ne durèrent guère. La plupart du temps, les ministres recevaient les informations concernant l’autorité des préfets de manière très

307

AN, F/1bI/150-152, « Liste des préfets, accompagnée de notes sur leur administration et leur caractère. Les notes sont exprimées en lettres et en chiffres dont la clé est jointe à la liste », an XIV [1806]. Voir le tableau en annexe 11, p. 709.

308

Circulaire du ministre de l’Intérieur, Montalivet, citée dans Guy THUILLIER, Témoins de l’administration,

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classique, par des rapports et des lettres, qui traitent par ailleurs de bien d’autres sujets309, et

dont le dépouillement exhaustif se révèle de peu d’intérêt, dans la mesure où il exige la lecture