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L’élaboration d’un style sous le Consulat et le Premier empire (1799-1814/5)

A. Le choix des préfets

1. Les premiers préfets

Les premiers préfets furent collectivement nommés par le décret du 11 ventôse an VIII

(2 mars 1800)129. Il s’agissait, pour la Meurthe de Jean-Joseph Marquis, pour la Meuse de

Pierre Dieudonné Louis Saulnier, pour la Moselle de Jean Victor Colchen et pour les Vosges

de Zacharie-Henry Desgouttes130

. La procédure de nomination ainsi que les critères ayant

présidé au choix des consuls sont bien connus131. Puisqu’il ne pouvait naturellement pas

encore exister de cursus précis pour les candidats à la fonction de préfet, il s’agissait – dans la mesure du possible – de sélectionner des hommes capables, dont on pouvait espérer qu’ils seraient de bons administrateurs, mais aussi des hommes aptes à exercer correctement l’autorité de l’Etat. Bien que les candidats à ces postes très exposés aient été relativement rares132

et que la faveur et la recommandation aient joué un rôle majeur dans le processus de sélection, les gouvernants parvinrent néanmoins à choisir des hommes qui étaient, en théorie, capables d’exercer l’autorité que le régime attendait d’eux.

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Sur cette catégorie de documents, voir Jean-Yves PIBOUBES, « Les dossiers de carrière des fonctionnaires »,

in Louis HINCKER (dir.), Réflexion sur les sources écrites de la « biographie politique ». Le cas du XIXe siècle, Paris, CNRS, 1999, p. 21-28.

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AN, F/1bI/150-152, Arrêté du premier Consul, 11 ventôse an VIII (2 mars 1800).

130 On se reportera, pour de plus amples renseignements sur les préfets évoqués tout au long de ce travail, au dictionnaire biographique présenté en annexe, p. 474-473.

131 Si le décret de nomination était signé Bonaparte, celui-ci, connaissant mal le personnel administratif, s’en remit, en ce qui concerne le choix des hommes, à Cambacérès, Lebrun, Talleyrand, Maret, au général Clarke ou encore à son frère Lucien, chargés de lui présenter des candidats. Voir Jacques-Olivier BOUDON, « La création du corps préfectoral en l’an VIII », Revue du souvenir napoléonien, n° 428, 2000, p. 9-15 ; Thierry LENTZ, Le Grand Consulat… op. cit., p. 215-216 ; Pierre HENRY, Histoire des préfets. 150 ans d’administration provinciale, 1800-1950, Paris, Nouvelles éditions latines, 1950, p. 19 ; Jacques REGNIER, Les Préfets du Consulat et de l’Empire, Paris, éd. de la Nouvelle Revue, 1907, p.5-6 ; Jean TULARD, « Les préfets de Napoléon », in Jacques AUBERT et alii, Les Préfets en France (1800-1940), Genève, Droz, 1978, p. 6-7.

132 Comme le souligne Jean TULARD (« Les préfets de Napoléon », art. cit., p. 6), les candidats à la fonction de préfet étaient peu nombreux ; les choix de Bonaparte étaient donc relativement contraints. Cela n’enlève cependant rien aux qualités des hommes choisis.

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Désireux que les préfets fussent capables d’imposer leur autorité par leur compétence,

leur savoir-faire et leur habileté, les consuls optèrent pour des hommes d’expérience133. Tous

avaient d’abord suivi une formation classique, sur les bancs des collèges puis à l’université. Colchen avait d’abord suivi les cours du collège royal de Metz, puis il étudia l’allemand à Mayence et obtint une licence en droit à Paris. Marquis, après avoir fréquenté le collège Saint-Claude de Toul, avait suivi les cours de droit de l’Université de Pont-à-Mousson. Quant à Saulnier il avait fait des études de droit, puisqu’il était avocat.

En outre, lorsqu’ils furent nommés, ils avaient déjà derrière eux une longue carrière,

au cours de laquelle ils avaient exercé des responsabilités souvent éminentes134. Le fait,

souvent souligné, que les premiers préfets étaient issus du personnel politique de la Révolution s’explique en grande partie par le fait que Bonaparte n’avait guère le choix : il

avait besoin que ces hommes fussent au fait des affaires politiques et administratives135. Avant

d’être nommé préfet de la Moselle, Jean-Victor Colchen avait déjà exercé des responsabilités dans l’administration, d’abord en tant que subdélégué à l’intendance de Pau et d’Auch, puis en tant que chef de division au ministère des Affaires étrangères. Devenu secrétaire, puis

commissaire des Relations extérieures, il fit, de facto, office de ministre des Relations

extérieures du 14 ventôse an III (4 mars 1795) au 15 brumaire an V (5 novembre 1796). Rompu à la diplomatie, il fut, du reste, alors qu’il était devenu préfet de la Moselle quelques mois plus tôt, chargé de négocier la paix avec l’Angleterre en 1801, ce qui aboutit à la signature du traité d’Amiens les 25 et 27 mars 1802. Quant au préfet de la Meurthe, Jean-Joseph Marquis, il avait exercé d’importantes fonctions politiques, administratives et judicaires tout au long d’une carrière déjà longue et bien remplie. En effet, d’abord avocat, il avait ensuite été élu député de baillage de Saint-Mihiel aux Etats généraux en 1789. Appelé par le département de la Meuse à faire partie du tribunal de Cassation créé en 1790, il fut désigné par le sort pour être un des quatre Grands-Juges de la Haute Cour nationale d’Orléans, créée le 5 mars 1791, qui fut notamment chargée de juger les complices de la fuite

133 Edward Whitcomb note à cet égard qu’on peut supposer que « an experienced administrator, by and large, is likely to be better at his job than an inexperienced one ; a trained administrator is probably better than an untrained one ; an administrator who rises through the ranks by promotion is likely to be better than one who does not ; and a stable administration is preferable to an unstable one » (Edward A. WHITCOMB, « Napoleon’s prefects », art. cit., p. 1109). Voir également Michel BIARD, Les Lilliputiens… op. cit., p. 278.

134 De manière générale, les premiers préfets avaient tous exercé d’importantes fonctions : quarante des quatre-vingt-dix-sept premiers préfets avaient siégé dans les assemblées de la Révolution, soit 40% du total (Edward A. WHITCOMB, « Napoleon’s prefects », The American Historical Review, vol. 79, n° 4, octobre 1974, p. 1092). Voir également Isser WOLOCH, Napoleon and his Collaborators. The Making of a Dictatorship, New York-Londres, Norton and Company, 2001, p. 54-55.

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Cela a notamment été souligné par François MONNIER, « Préfet », in Jean TULARD (dir.), Dictionnaire Napoléon op. cit., p. 1386 et par Isser WOLOCH, Napoleon and his Collaborators… op. cit.

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du roi les 20 et 21 juin 1791. Elu député de la Meuse à l’assemblée Constituante en 1792, il fut ensuite membre du Conseil des Cinq-Cents sous le Directoire. Il en démissionna en 1797. En 1799, il fut nommé commissaire du gouvernement à Mayence, chargé d’organiser les

quatre départements de la rive gauche du Rhin136

. Malgré un parcours moins impressionnant, Pierre Saulnier avait également une belle carrière administrative à son actif lorsqu’il fut nommé préfet de la Meuse. Avocat de formation, il fut président de l’administration municipale de Nancy, puis membre de l’administration départementale de la Meurthe sous le Directoire, ce qui lui donnait une bonne connaissance des rouages administratifs locaux. Ces trois hommes disposaient donc d’une solide expérience, qui pouvait apparaître d’autant plus nécessaire qu’ils devaient mettre en place la nouvelle administration départementale. Seul faisait exception le préfet des Vosges, Zacharie Desgouttes, qui devait sa nomination à Lazare Carnot, et qui avait d’abord été négociant à Genève, sa ville natale, puis qui fut envoyé de Genève à Paris sous le Directoire.

Par ailleurs, il semble bien qu’aux yeux des consuls, il fallait que les nouveaux préfets, afin d’imposer leur autorité à leurs subordonnés et aux notables locaux, fussent des hommes sages et responsables. Sans être très âgés – Colchen avait 49 ans, Desgouttes 38 ans, Marquis

53 ans et Saulnier, le plus jeune, 33 ans137 –, ils étaient déjà entrés dans l’âge mûr. En outre,

deux d’entre eux étaient mariés et pères de famille, ce qui pouvait apparaître non seulement

comme un gage de respectabilité, mais aussi de sérieux et de sens des responsabilités138. Sur le

plan politique, il importait de choisir des hommes réputés pour leur modération, et

visiblement attachés à l’ordre et au régime qu’ils servaient139. Comment, en effet, auraient-ils

pu, autrement, incarner l’autorité de l’Etat ? Lorsqu’ils furent nommés, Colchen, Desgouttes et Saulnier étaient considérés comme attachés au premier Consul. Marquis, qui avait siégé à de nombreuses reprises dans les assemblées de la Révolution, faisait indéniablement partie du camp des modérés. Proche de la Gironde et de la Plaine à la Convention nationale, il vota notamment pour que Louis XVI soit retenu en otage jusqu’à la paix et se prononça pour l’appel au peuple et le sursis.

136 Il s’agit des départements de Mont-Tonnerre, de la Sarre, de Rhin-et-Moselle et de la Roër, que le Directoire avait créé en 1797 en Cisrhénanie.

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Voir l’annexe 3, tableau 1, p. 548.

138 Sur l’importance de la famille au sein de la bourgeoisie, voir Philippe ARIES et Georges DUBY (dir.), Histoire de la vie privée, 4, De la Révolution à la Grande Guerre, Paris, Seuil, 1987, notamment p. 121 et sq. ; Jean DELUMEAU et Daniel ROCHE (dir.), Histoire des pères et de la paternité, Paris, Larousse, 2000, p. 289 et sq.

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On ne pouvait confier l’exercice de l’autorité de l’Etat qu’à des hommes appartenant aux catégories sociales à la fois les plus aisées et les plus influentes. On l’a dit, les préfets devaient être en mesure de s’intégrer pleinement au monde des élites départementales. Ils devaient pour cela recevoir et mener grand train, et ils se devaient de maîtriser les codes de la bonne société d’alors. De fait, ils disposaient tous manifestement d’une certaine fortune. Les données relatives aux revenus des préfets, autres que leur traitement, disponibles dans les

dossiers de personnel140

sont rares et très peu fiables141

. Elles permettent néanmoins de

souligner que les hommes choisis pour être préfets, sans être d’une extrême richesse142,

jouissaient d’une réelle aisance, voire d’une certaine indépendance financière, ce qui, aux yeux des dirigeants, était un gage de probité, puisqu’on pouvait supposer qu’ils pourraient davantage résister aux pressions et aux tentatives de corruption que s’ils n’avaient disposé que

de leur seul traitement143. Ainsi, à son entrée en charge, divers créanciers auraient dû à

Jean-Victor Colchen quelque 60 000 francs, ce qui lui rapportait environ 3000 francs d’intérêts annuels. Jean-Joseph Marquis était, au moment où il fut nommé préfet, à la tête d’une fortune

qui s’élevait semble-t-il à 100 000 francs144. Pour renforcer l’insertion des préfets dans le

monde des élites locales, Bonaparte n’hésitait pas à les intégrer à cette nouvelle aristocratie que constituaient les membres de la Légion d’honneur. Pierre Saulnier fut créé chevalier dès 1803. Jean-Joseph Marquis et Jean-Victor Colchen furent à leur tour promus en 1804. L’appartenance au monde des élites ne tenait cependant pas seulement à la position personnelle des préfets, mais aussi, plus globalement, à la situation de leur famille. Aucun des

140 Ces dossiers sont conservés aux AN dans la sous-série F/1cI.

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Les chiffres donnés peuvent en effet parfois sembler surprenants, voire contradictoires pour un même personnage, il convient donc de ne les considérer que pour ce qu’ils sont : des estimations grossières, tout au plus des ordres de grandeur. Voir Jacques CARITEY, « Comment étudier l’histoire du corps préfectoral au XIXe siècle dans un département ? », La Revue administrative, 46e année, n° 276, novembre-décembre 1993, p. 616, et Guy THUILLIER, « Comment étudier l’histoire du corps préfectoral ? », Pour une histoire de la bureaucratie en France, tome 1, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1999, p. 463.

142 Dans leur enquête sur les notables du Premier Empire, Louis BERGERON et Guy CHAUSSINAND-NOGARET estiment que des revenus situés entre 1000 et 5000 francs par an permettaient de vivre avec une certaine aisance ; des revenus de 5000 à 20 000 francs dans une réelle richesse ; et au-delà de 20 000 francs dans la fortune (Les Masses de granit… op. cit., p. 51-52).

143 Napoléon considérait manifestement l’indépendance financière comme un gage de probité, puisque Las Cases prétendit que l’Empereur aurait souhaité rendre la fonction de préfet gratuite, ce qui aurait permis d’écarter « les nécessiteux qui jamais ne s’appartiennent à eux-mêmes, dont les besoins pressans créent l’immoralité politique ; j’eusse amené l’opinion à solliciter ces emplois pour la pure considération ; ils fussent devenus d’honorables magistratures […] remplies par les plus grandes fortunes, chez qui la vocation, la philanthropie, une honnête ambition eussent été les premiers guides et le gage assuré d’une noble indépendance » (Emmanuel de LAS CASES, Mémorial de Sainte-Hélène… op. cit., volume 7, p. 137, jeudi 7 novembre 1816).

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quatre premiers préfets n’appartenait à l’ancienne noblesse145, mais tous étaient issus de la

bourgeoisie moyenne. Les pères de Jean-Victor Colchen et de Jean-Joseph Marquis avaient exercé des professions juridiques, puisque Jean Colchen avait été procureur à la cour de Metz et Joseph Marquis conseiller au baillage de Saint-Mihiel. Ceux de Zacharie Desgouttes et de Pierre Saulnier étaient de riches marchands. Combinant ainsi fonction administrative, richesse et appartenance aux catégories qui formaient alors les élites sociales locales, les préfets

appartenaient pleinement au monde des notables146

.

Si les dirigeants s’efforcèrent donc de nommer des hommes capables d’imposer leur autorité et celle de l’Etat, il n’était, cependant, pas question de confier cette charge nouvelle à des personnalités charismatiques. Les préfets devaient certes parvenir à se faire obéir, mais ils restaient tout de même étroitement inféodés à l’Etat central, dont ils n’étaient que les représentants. Il aurait donc été contre-productif, voire dangereux de choisir des meneurs d’hommes. C’est pourquoi le choix se porta sur des hommes qui avaient certes une réelle expérience des affaires, mais qui, comme Pierre Saulnier n’avaient exercé que des fonctions subalternes, ou qui, comme Marquis ou Colchen, ne s’étaient pas imposés par leur charisme

dans l’exercice de fonctions prestigieuses. Ce dernier, connu pour son ardeur au travail147 était

considéré comme un fin connaisseur du droit – juriste de formation148, il avait parfait sa

connaissance des lois en participant aux travaux des commissions ad hoc dans les différentes

assemblées auxquelles il avait appartenu149 – ainsi que comme un administrateur de qualité –

il avait déjà eu l’occasion d’en faire la preuve lorsqu’il administrait les quatre départements

de la rive gauche du Rhin150. Il était, en revanche, réputé être un piètre orateur151. Pour sa part,

145

Notons tout de même que Jean-Victor Colchen devint comte de l’Empire en 1808, puis qu’il reçut le titre de baron de Louis XVIII en 1819, et que Pierre Saulnier devint chevalier de l’Empire en 1808. Ces titres nobiliaires ne leur furent toutefois accordés qu’après qu’ils eurent quitté leur poste de préfet.

146 Louis BERGERON propose de définir le notable de la façon suivante : « Le notable est tout à la fois l’homme qui a su par le passé et reste susceptible de se rendre utile à l’Etat par ses capacités et celui qui présente tous les signes de la notoriété » (« Napoléon ou l’Etat post-révolutionnaire », in Colin LUCAS (dir.), The French Revolution and the Creation of Modern Political Culture, tome 2, The Political Culture of the French Revolution, Oxford, New-York, Pergamon Press, 1988, p. 437). André-Jean TUDESQ va dans le même sens lorsqu’il affirme que « la fortune, l’exercice de fonctions dirigeantes, l’appartenance à un milieu familial apparaissent comme trois critères solidaires du grand notable » (Les Grands notables en France (1840-1849). Etude d’une psychologie sociale, tome 1, Paris, PUF, 1964, p. 10).

147 Charles-Auguste SALMON, Etude sur Jean-Joseph Marquis, avocat et membre de l’assemblée constituante, juge au tribunal de cassation et premier préfet de la Meurthe, Saint-Mihiel, Typographie de Casner, 1847, p. 17

148

Ibid., p. 4.

149 Ibid., p. 11 et 13.

150 Ibid., p. 15-16.

151

Son biographe, Charles-Auguste SALMON, notait à cet égard : « Il était d’une taille élevée, mais sa voix manquait de timbre et de volume ; la moindre interruption l’eût couverte », Ibid., p. 11-12.

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Jean-Victor Colchen était considéré comme un bon administrateur, ayant « très bon esprit »,

mais « sans éclat ni un grand caractère »152.

On comprend mieux, dans cette perspective, pourquoi les Consuls préférèrent dans la mesure du possible faire appel à des hommes étrangers au département qu’ils

administraient153

, même si cette règle ne fut que partiellement et imparfaitement respectée

dans les départements lorrains154

. Zacharie Desgouttes était d’origine genevoise. Jean-Joseph Marquis était né à Saint-Mihiel, dans la Meuse, et il représenta son département d’origine dans plusieurs assemblées, mais il fut nommé dans le département de la Meurthe. Pierre Saulnier était né à Nancy et avait exercé sa carrière dans le département de la Meurthe, avant d’être nommé dans la Meuse. Seul Jean-Victor Colchen fut nommé dans son département de naissance, la Moselle ; mais il en avait été absent vingt années durant. Eloigner, même modérément, les nouveaux préfets de leur département d’origine, permettait non seulement d’éviter que des pressions s’exerçassent sur eux, mais aussi qu’ils fissent usage de leurs réseaux familiaux, amicaux ou clientélaires pour imposer une autorité trop personnelle. On peut, cependant, s’interroger sur le bien-fondé d’une telle règle : n’était-elle pas susceptible de compliquer la tâche des préfets, qui, pour s’imposer à leurs administrés, devaient constituer de

toute pièce leurs propres réseaux ?155

2. Des caractéristiques qui n’évoluèrent guère

Les caractéristiques sociales et personnelles des préfets leur permettaient donc manifestement d’incarner correctement l’autorité de l’Etat. Elles n’évoluèrent donc guère par la suite156

.

152

AN, F/1bI/150-152, Tableau de renseignements sur les préfets, s.d.

153 Michel BIARD, Les Lilliputiens… op. cit., p. 283-299. Pour un autre exemple local, voir Jean-Paul JOURDAN,

Le Personnel de l’administration dans le Sud-Ouest aquitain de la fin de l’Ancien Régime aux années 1880, thèse doctorat d’Etat ès lettres sous la direction de Jean-Pierre POUSSOU, Université Paris-Sorbonne, 2000, 4 vol., p. 433.

154 C’est, de manière plus générale, le cas pour l’ensemble des départements du Nord, de l’Est et du Centre, où divers préfets sont nommés ou bien dans leur département d’origine, ou bien dans un département voisin. Voir Marie-Noëlle BOURGUET, Déchiffrer la France. La statistique départementale à l’époque napoléonienne, Paris, éd. des Archives contemporaines, 1989, p. 136-137.

155

Marie-Cécile THORAL, L’Emergence du pouvoir local… op. cit., p. 72.

156 Notons que les préfets continuaient à être nommés officiellement par Napoléon, sur une liste de candidats proposée par le ministre de l’Intérieur, qui jouait donc un rôle essentiel dans le choix des hommes. Napoléon semble s’être le plus souvent borné à confirmer les nominations (cf. Jean TULARD, « Les préfets de Napoléon », art. cit. p. 7).

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Ainsi les préfets étaient-ils toujours choisis pour leurs compétences. Du point de vue de l’autorité, cela impliquait, de manière de plus en plus impérieuse au cours du temps, qu’ils possédassent une excellente connaissance des pratiques et des rouages administratifs, reposant, éventuellement, sur de solides bases théoriques acquises au cours de leurs études,

mais plus encore sur l’expérience157. On peut en effet considérer à bon droit que l’autorité du

titulaire aurait sérieusement été compromise par une désorganisation des bureaux et une lenteur dans l’exécution des tâches dévolues aux préfectures résultant de l’inexpérience du préfet, alors même que ce dernier ne pouvait plus se justifier en invoquant les contretemps et perturbations inhérents à la mise en place d’un système administratif nouveau. Cependant, la

mise en place d’un cursus impliquant d’avoir fait ses armes dans une sous-préfecture avant de

devenir préfet, et conditionnant l’accès aux préfectures les plus prestigieuses comme celles de la Meurthe et de la Moselle, au fait d’avoir fait ses preuves dans une préfecture plus modeste, comme celles de la Meuse ou des Vosges n’eut lieu que progressivement, et ne s’imposa

réellement que sous les régimes ultérieurs158. Les réseaux, la faveur et le népotisme jouaient

donc un rôle essentiel dans les nominations et dans le déroulement des carrières159.

Cela étant, si dans les premières années du Consulat et de l’Empire, les parcours menant aux préfectures étaient de ce fait encore relativement divers, les titulaires, à l’instar de