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La situation actuelle du système de justice, dans lequel sont contraintes d’évoluer plusieurs personnes sans l’assistance essentielle d’un conseiller juridique, pose également problème sur le plan du droit à l’égalité, tel que le souligne le professeur Lafond :

Si le droit et le système judiciaire sont réservés aux riches et aux plus puissants, leur fonction devient alors inutile car ils ne servent en ce cas qu’à confirmer la loi du plus fort. Pour combattre cette loi qui sévit à l’extérieur de l’arène juridique et montrer que le droit peut faire une différence, il est essentiel que toute personne puisse être tenue égale face à l’institution judiciaire443.

Le système judiciaire évolue depuis plusieurs décennies à deux vitesses, ce qui est problématique sur le plan de l’égalité réelle. La perspective égalitaire devrait guider l’interprétation des autres droits prévus par la Charte canadienne, et donc, teinter les arguments que nous avons exposées précédemment. La juge L’Heureux-Dubé, dans les motifs concordants qu’elle énonce dans l’arrêt G.(J), adopte cette vision :

[112] […] Comme le juge McIntyre l’a écrit dans l’arrêt Andrews c. Law Society of British Columbia, [1989] 1 R.C.S. 143, à la p. 185:

La garantie offerte par le par. 15(1) est la plus générale de toutes. Elle s’applique et sert d’appui à tous les autres droits garantis par la Charte.

Tous les droits garantis par la Charte se renforcent et s’appuient mutuellement […], et l’art. 15 joue un rôle particulièrement important dans ce processus. Le prisme interprétatif que constitue la garantie d’égalité doit donc guider l’interprétation des autres droits garantis par la Constitution, s’il y a lieu […].

Il devrait donc s’agir d’un prisme d’égalité englobant qui permet d’évaluer, en conjonction avec les autres droits prévus par la Charte canadienne, le droit d’avoir accès à un conseiller juridique aux frais de l’État.

Le droit à l’égalité est protégé par l’article 15 de la Charte canadienne en ces termes :

15(1) La loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous,

et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques.

Il est établi depuis longtemps par la Cour suprême que le droit à l’égalité protégé est l’égalité réelle, par opposition à l’égalité formelle444. Puisqu’un « traitement identique peut

fréquemment engendrer de graves inégalités445 », il ne suffit donc pas de traiter tout le

monde de la même façon pour atteindre une situation d’égalité réelle. Trois éléments distinctifs doivent être prouvés afin d’établir une atteinte au droit à l’égalité : (1) une différence de traitement; (2) basée sur un motif de discrimination; et (3) un préjudice, sous forme de fardeaux, de désavantages ou de négations de bénéfices446.

La Cour suprême a établi un test en deux étapes afin conclure à l’existence du premier critère, soit la différence de traitement447. Il sera nécessaire de démontrer :

(1) L’existence d’une distinction préjudiciable défavorisant la personne, par rapport à d’autres personnes en vertu d’une caractéristique personnelle protégée soit par un motif énuméré à l’article 15 ou par un motif analogue ;

(2) Que cette distinction est de nature à porter atteinte à l’objet de l’article 15.

L’objet auquel réfère cette deuxième étape est « la lutte contre la discrimination, au sens de la perpétuation d’un désavantage et de l’application de stéréotypes448 », qui doit être

analysé en fonction de quatre facteurs contextuels449, à savoir :

(1) La distinction a-t-elle été imposée de manière arbitraire ou sans tenir compte de la situation réelle du groupe visé450 ?

(2) La personne alléguant la violation fait-elle partie d’un groupe faisant l’objet de stéréotypes ou d’un « désavantage historique dans la société » ?

(3) La mesure contestée contribue-t-elle à améliorer la situation d’un groupe plus défavorisé que celui auquel appartient la personne qui allègue la violation ?

(4) La nature du droit de la personne touchée par la mesure est-elle importante ?

444 Andrews, supra note 156; Law c. Canada (Ministre de l’emploi et de l’immigration), [1999] 1 RCS 497 [Law]. 445 Ibid à la p 164.

446 Daniel Proulx, « Droit à l’égalité », dans Stéphane Beaulac et Jean-François Gaudreault-Desbiens (dir), JurisClasseur Québec - Droit constitutionnel, coll. Droit public, Toronto, LexisNexis, 2015 (mis à jour annuellement), fascicule 9 au para 16.

447 Dans l’arrêt R. c. Kapp, 2008 CSC 41, [2008] 2 RCS 483. 448 Ibid au para 24.

449 Law, supra note 444.

Une réponse positive au premier facteur est suffisante afin de conclure à une violation du droit à l’égalité. Les trois facteurs suivants sont davantage des indicateurs incitant à conclure à une telle violation451.

L’état du système judiciaire est susceptible de toucher de manière systémique452 plusieurs

communautés dont le droit à l’égalité est garanti par notre système constitutionnel. Nous nous pencherons successivement sur la protection offerte par le droit à l’égalité aux personnes en situation de pauvreté, aux femmes, à d’autres communautés en situation de vulnérabilité et aux personnes aux prises avec des problèmes de littératie. Nous n’analyserons pas en profondeur chacun des critères énoncés précédemment. Nous nous contenterons de dresser un portrait global de la situation de chacun de ces groupes au sein de l’appareil judiciaire, puisque plusieurs aspects de notre démonstration antérieure ont déjà établi les éléments qui appuient la prétention que ces groupes sont victimes de discrimination.

La condition sociale

Nous l’avons exposé précédemment453, seules les personnes très démunies sur le plan

financier ont accès à l’aide juridique, et encore, dans certains cas restreints en matière civile. Toute une catégorie de citoyens qui sont pauvres sans par ailleurs être admissibles à l’aide juridique sont d’office exclus d’une participation significative du forum judiciaire de par leur incapacité à se procurer l’assistance d’un conseiller juridique. Ainsi, les personnes en situation de pauvreté – qui ne sont pas nécessairement « les plus pauvres » – sont de ce fait clairement désavantagées dans l’arène judiciaire.

La Charte québécoise compte la condition sociale parmi les motifs énumérés par sa disposition qui protège contre la discrimination454. Le Tribunal des droits de la personne a

interprété ce terme comme faisant référence à « la situation qu'une personne occupe au sein d'une communauté, notamment de par ses origines, ses niveaux d'instruction, d'occupation et de revenu, et de par les perceptions et représentations qui, au sein de cette

451 Ibid.

452 Buckley, supra note 37 à la p 584.

453 Voir la section « La nécessité d’étendre le financement de l’État » à la p 41. 454 Charte québécoise, supra note 32 à l’art 10.

communauté, se rattachent à ces diverses données objectives455 ». La Cour d’appel a

mentionné que cet état « résulte le plus souvent d’une situation dont la personne ne peut s’affranchir facilement et qui n’est pas la conséquence d’un choix délibéré456 ».

La condition sociale est également un motif de discrimination énuméré dans les lois sur les droits de la personne du Nouveau-Brunswick457 et des Territoires du Nord-Ouest458.

Certaines autres lois provinciales protègent la discrimination à l’encontre de motifs s’en rapprochant459.

À l’inverse, la Charte canadienne ne prévoit pas explicitement ce motif. Il pourrait toutefois s’agir d’un motif analogue à ceux qui y sont énoncés. Les critères à remplir afin de conclure qu’un motif est analogue ont été établi par la Cour suprême dans l’arrêt Corbière :

En conséquence, quels sont les critères qui permettent de qualifier d'analogue un motif de distinction? La réponse est évidente, il s'agit de chercher des motifs de distinction analogues ou semblables aux motifs énumérés à l'article 15 – la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques. Il nous semble que le point commun entre ces motifs est le fait qu'ils sont souvent à la base de décisions stéréotypées, fondées non pas sur le mérite de l'individu mais plutôt sur une caractéristique personnelle qui est soit immuable, soit modifiable uniquement à un prix inacceptable du point de vue de l'identité personnelle. Ce fait tend à indiquer que l'objet de l'identification de motifs analogues à la deuxième étape de l'analyse établie dans Law est de découvrir des motifs fondés sur des caractéristiques qu'il nous est impossible de changer ou que le gouvernement ne peut légitimement s'attendre que nous changions pour avoir droit à l'égalité de traitement garantie par la loi. Autrement dit, l'art. 15 vise le déni du droit à l'égalité de traitement pour des motifs qui sont immuables dans les faits, par exemple la race, ou qui sont considérés immuables, par exemple la religion. D'autres facteurs, que la jurisprudence a rattachés aux motifs énumérés et analogues, tel le fait que la décision produise des effets préjudiciables à

455 C.D.P. c. Gauthier, [1994] R.J.Q. 253, 260, [1993] J.T.D.P.Q. no 21. Voir aussi : Modes Cohoe Inc. c. Québec

(Procureur général), (1993) R.J.Q. 2801 (C.A.).

456 Ordre des comptables généraux licenciés du Québec c. Québec (Procureur général), [2004] R.J.Q. 1164, 2004 CanLII 20542 (QC CA) au para 69.

457 Loi sur les droits de la personne, LRN-B 2011, c. 171. Voir le préambule et les art 2, 4, 5, 6 et 8. Toutefois, voir l’article 9 qui pose un tempérament important en autorisant une discrimination fondée sur la condition sociale lorsqu’elle est exigée ou autorisée par une loi.

458 Loi sur les droits de la personne, LTN-O 2002, c. 18. Voir le préambule et l’art 1.

459 Les motifs protégés sont les suivants : Alberta Human Rights Act, RSA 2000, c. A-25.5, « source of income »;

The Saskatchewan Human Rights Code, SS 1979, c. S-24.1, « receipt of public assistance »; The Human Rights Code, CCSM, c. H175, « source of income » et « social disadvantage »; Human Rights Act, RSNS 1989, c. 214,

« source of income »; Human Rights Act, RSPEI 1988, c. H-12, « source of income », ; Human Rights Code, SRNL 1990, c. H-14, « source of income »; Human Rights Act, RSY 2002, c. 116, « source of income »; Human

une minorité discrète et isolée ou à un groupe qui a historiquement fait l'objet de discrimination, peuvent être considérés comme émanant du concept central que sont les caractéristiques personnelles immuables ou considérés immuables, caractéristiques qui ont trop souvent servi d'ersatz illégitimes et avilissants de décisions fondées sur le mérite des individus460.

(nos soulignés)

De manière générale, les tribunaux canadiens ne considèrent pas que la pauvreté devrait être incluse au rang des motifs analogues de discrimination461. Ceux-ci soutiennent

généralement qu’il ne s’agit pas d’une caractéristique immuable462. Selon plusieurs auteurs,

il s’agit d’une vision déconnectée de la réalité d’une personne vivant dans une situation de précarité économique. Le fait de se retrouver dans cette position ne peut être considéré comme un choix, tel que l’expose l’auteur Joseph Arvay :

In my opinion it is arguable that in our society poverty is generally not something that an individual can change of his or her own accord. There is ample research to support the proposition that it is the Canadian social and economic system that keeps many individuals in a state of poverty, not a lack of personal initiative on the part of the individuals. It could be argued that by “immutable” and “constructively immutable,” the Supreme Court of Canada must have meant that the characteristic is beyond the individual’s own present capacity to change, and that poverty is such a characteristic. While poverty may not be “inherent” in the same sense as a person’s physical attributes are “inherent,” nevertheless it is not something that most people come to by “voluntary choice,” nor through “behaviour,” nor is it something over which most people have individual control. […]

It could be argued and evidence could be presented that in Canadian society poverty is inherent in the economic and social system, and that these systems, more than any personal characteristic, determines who among the citizenry will be poor. Further, many of the wealthy in Canada in fact acquired their wealth through inheritance (literally). Thus poverty is analogous to the enumerated grounds both in that it is beyond most people’s own present capacity to change, and also in that it is largely imposed by society rather than through a person’s behaviour463.

(nos soulignés)

460 Corbière c. Canada (Ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), [1999] 2 RCS 203 aux pp 219 et 220.

461 Voir notamment : Polewsky, supra note 233; Boulter v. Nova Scotia Power Incorporation, 2009 NSCA 17. 462 Arvay, supra note 397 à la p 49.

De plus, en considérant les obstacles sociaux et culturels qui découlent du fait de vivre dans la pauvreté, ces personnes peuvent avoir une connaissance limitée de leurs droits et se sentir une légitimité moindre de les faire valoir464.

Ce faisant, l’analyse actuelle des tribunaux canadiens est inadéquate et ne se colle pas à la réalité des personnes défavorisées. En effet, il existe une croyance répandue des causes de la pauvreté qui veut que l’état d’indigence des personnes dans le besoin leur soit initialement attribuable. Pour cette raison, on sera moins enclin à considérer que l’État a une obligation de leur venir en aide. C’est cette conception des causes de la pauvreté qui entrave en partie la pleine reconnaissance de la condition sociale comme motif de discrimination par les tribunaux canadiens465. À l’inverse, lorsque l’on considère que la

pauvreté s’explique principalement par des éléments de conjonctures sociale et économique, on concevra plus facilement que l’État doive prendre à sa charge les laissés pour compte466. La volonté d’agir en ce sens fait tout simplement défaut au Canada.

Quant au désavantage préexistant et aux stéréotypes, des analyses factuelles démontrent que les citoyens possèdent une perception négative des personnes vivant en situation de pauvreté467. Les personnes recourant à l’aide sociale sont d’ailleurs le groupe étant le plus

largement victime de préjugés de la part de la population au Québec468.

À notre sens, la pauvreté remplit tous les critères énoncés par la Cour suprême afin d’être reconnu comme motif analogue à l’article 15 de la Charte canadienne et devrait être consacrée à ce titre. Cette reconnaissance serait conséquente avec les valeurs de dignité, de respect et d’estime de soi centrales à la protection du droit à l’égalité469.

464 Margaret McCallum, « Is There a Constitutionally-Protected Right to Legal Aid in Canada? » dans Vicki Schmolka (dir), Une cause justifiée : le droit à une représentation juridique rémunérée par l’État au Canada, Association du Barreau Canadien, 2002, 133 à la p 144 [McCallum].

465 Cette conception est bien démontrée dans l’analyse des causes de la pauvreté par la Cour supérieure dans

Gosselin c. Québec (Procureur général), [1992] RJQ 1647, aux pp 1675 et ss; et l’analyse de la juge McLachlin

dans Gosselin c. Québec (Procureur général), 2002 CSC 84, [2002] 4 RCS 429 au para 48.

466 Robert Tétrault, « Le droit à un niveau de vie décent » dans Pierre Bosset et Lucie Lamarche, dir, Droit de

cité pour les droits économiques, sociaux et culturels, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2011, 207 à la p 221.

467 Pierre Noreau et Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, Rapport sur la perception

des Québécois à l’égard de la diversité, Montréal, décembre 2015 à la p 70.

468 Ibid.

Une telle reconnaissance serait d’ailleurs conforme aux obligations internationales du Canada. En effet, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels470 et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques471 (ci-après, le

« PIDCP ») proscrivent la discrimination fondée sur l’origine sociale et la fortune. Le Canada a signé et ratifié ces deux traités. D’ailleurs, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l’Organisation des Nations Unies, dans ses plus récentes observations finales, se dit préoccupé que la situation sociale ne figure pas comme motif de discrimination reconnu au Canada et recommande une telle inclusion472.

Bien des personnes sont touchées par le problème d’accessibilité à la représentation juridique même si elles ne sont pas pauvres à proprement parler et donc, ne pourraient être visées par le motif analogue de la condition sociale. Plusieurs personnes sont aussi laissées en plan par ce motif de discrimination puisque le problème d’accessibilité à la justice est beaucoup plus vaste que l’exclusion des personnes pauvres au sens le plus traditionnel du terme.

Le sexe

La situation actuelle du système de justice civile est également susceptible d’être discriminatoire pour les femmes. En plus d’être un motif protégé par l’article 15 de la Charte canadienne, celle-ci prévoit une disposition particulière qui vise précisément l’égalité entre les sexes. L’article 28 de la Charte canadienne se lit comme suit :

28. Indépendamment des autres dispositions de la présente charte, les

droits et libertés qui y sont mentionnés sont garantis également aux personnes des deux sexes.

Dans G.(J.), la Cour suprême ne traite pas explicitement de la question du droit à un conseiller juridique sous l’angle du droit à l’égalité. Cet argument était toutefois invoqué devant les instances inférieures473. Dans les motifs concurrents rendus par la juge

L’Heureux-Dubé, auxquels ont souscrit les juges Gonthier et McLachlin, les questions du droit à l’égalité et de la féminisation de la pauvreté sont abordées de front:

470 Pacte international relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels, 16 décembre 1966, 993 RTNU 14531 (entrée en vigueur : 3 janvier 1976, accession du Canada 19 août 1976) à l’art 2(2).

471 Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 19 décembre 1966, 999 RTNU 171 (entrée en vigueur : 23 mars 1976, accession du Canada 19 mai 1976) à l’art 2(1) [PIDCP].

472 Observations finales concernant le sixième rapport périodique du Canada, Doc off CDH NU, 114e sess, 3176e et 31773 séances, Doc NU CCPR/C/CAN/CO/6 (2016) aux para 17 et 18 [Observations finales].

[113] La présente affaire soulève des questions relatives à l’égalité des sexes, car les femmes, notamment les mères célibataires, sont touchées, de façon disproportionnée et particulière, par les procédures relatives à la protection des enfants […]. Le présent pourvoi traite de la question importante de la représentation par avocat dans le contexte familial pour ceux et celles qui n’ont pas les ressources financières suffisantes pour se permettre cette représentation. Comme je l’ai écrit dans l’arrêt Moge c. Moge, [1992] 3 R.C.S. 813, à la p. 853, « Au Canada, la féminisation de la pauvreté est un phénomène social bien établi. » La tendance des relations vécues dans le cadre des liens du mariage veut que les femmes assument, de façon disproportionnée, le soin des enfants, qu’elles renoncent à des possibilités d’avancement, sur le plan financier, dans le marché du travail et qu’elles souffrent de dénuement économique, par voie de conséquence: Moge, précité, à la p. 861. Les questions qui concernent les parents pauvres touchent nécessairement les femmes de façon disproportionnée, de sorte qu’elles soulèvent des soucis d’égalité et la nécessité d’examiner leur point de vue.

(nos soulignés)

Selon cette vision, la perspective d’égalité entre les sexes – en plus des principes d’égalité garantis par l’article 15 – devrait guider et influencer l’interprétation et la portée de la protection offerte par l’article 7474. L’analyse d’égalité des genres devrait donc faire partie

intégrante du cadre d’analyse du droit à la sécurité prévu par l’article 7475.

Il pourrait être argumenté que le système d’aide juridique actuel fait défaut de couvrir certaines causes qui touchent plus souvent les femmes et donc, qu’il les laisse plus souvent pour compte476. Par exemple, tel que le souligne bien la juge l’Heureux-Dubé, les affaires

domestiques sont plus souvent susceptibles de toucher les femmes. En considérant cette perspective, le défaut d’inclure certaines matières de manière suffisante dans les plans de couverture d’aide juridique constituerait de la discrimination basée sur le genre477. Plusieurs

auteurs supportent cette prétention, comment l’illustrent Mossman et Baldassi: In the legal aid literature, a recurring assertion about inequality in legal aid services focuses on gender. As Hughes commented, “it is a fair working assumption that in collective terms, women and men use the legal system for different purposes (as well, of course, for the same purposes);” in particular, statistics suggest that higher proportions of men, by comparison with women, are accused of criminal offences; and that women are more

474 Ibid au para 112. 475 Ibid au para 115.

476 Patricia Hughes, « A Constitutional Right to Civil Legal Aid » dans Vicki Schmolka (dir), Une cause justifiée :

le droit à une représentation juridique rémunérée par l’État au Canada, Association du Barreau Canadien, 2002,

99 à la p 102 [Hughes]. 477 Ibid à la p 103.

likely than men to require legal services for family law matters. Thus, if legal