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La diversité des rapports au territoire

Dans le document Thèse de doctorat Présentée (Page 134-137)

économiques centrés sur l’usage

3.1.1. La diversité des rapports au territoire

L’approche de l’ « économie de (la) fonctionnalité » est fortement perméable aux partenariats entre acteur(s) privé(s) et acteur(s) public(s). Si certaines entreprises telles que Michelin, Xerox ou Elis, ont su convertir une partie de leur activité sans le soutien des pouvoirs publics, elles restent des cas d’école de cette logique. Le financement considérable des équipements, de leur installation, des espaces nécessaires à leur fonctionnement, et de leur maintenance, ne peut se concevoir sans une conciliation avec une (exemple du financement d’initiatives publiques sous forme de Partenariats Public-Privé) ou plusieurs (cas des Syndicats Mixtes d’Exploitation). L’effet vertueux de ce type de configuration sur le territoire est double. D’une part, de manière directe, il est dynamisé par son aménagement : par l’activité qui est favorisé par son aménagement et par la

réduction des externalités négatives qu’il est censé générer. Les services de mobilités, urbaines, qui incarnent la logique d’ « économie de (la) fonctionnalité » en sont l’illustration. La mise à disposition de biens éco-conçus rend leurs usages accessibles au plus grand nombre, tout en réduisant les nuisances relatives aux transports individuels (pollution, nuisances sonores, etc.). D’autre part, de manière indirecte, une partie de la valeur créée est redistribuée au territoire par la voie de la fiscalité.

Le courant du « peer-to-peer » promeut un modèle de gouvernance coopératif qui permet de démultiplier l’accès aux connaissances, aux compétences et aux biens matériels, et ce dans des perspectives de développement locales et globales. Les ressources mises à disposition, considérées comme un « (bien) commun », sont administrées par une communauté d’usagers. Vocation sociale de l’économie, accessibilité à l’outil de production et distribution des responsabilités individuelles sont autant de principes qui relient cette approche à la démarche d’ « économie sociale et solidaire ». Le « peer-to-peer » incarne un contre-modèle communautaire qui entend prolonger dans le monde physique les schémas de production et de diffusion propres au « logiciel libre ». Du point de vue du consommateur, ce processus de désintermédiation se traduit par une suppression des coûts. De par son ambition d’émancipation sociale, la décentralisation de la gestion d’un « commun » que propose l’approche du « peer-to-peer » peut être complémentaire avec l’action des pouvoirs publics. Alors que les échanges en « peer-to-peer » se tiennent à distance de la sphère marchande, ils ne sont pas sans générer une économie. Le libre accès à des ressources telles que des données (open data) ou des outils (open source), détenues préalablement par quelques acteurs privés ou publics, fait émerger de nouveaux usages qui stimulent l’activité économique.

D’un côté, l’accessibilité accrue aux données permet à des entreprises du secteur numérique de proposer de nouveaux services. De l’autre, le partage de connaissances facilite l’appropriation des usages d’un « commun », à tel point qu’il est en mesure de concurrencer des entreprises privées. Le succès des distributions Linux en fournit un exemple. L’implication des usagers dans la conception et dans l’actualisation du noyau de systèmes d’exploitation Linux, dont l’usage est gratuit, lui a permis de s’imposer comme

une alternative stable à des produits soumis à l’acceptation d’une licence (cas des distributions proposées par Microsoft et Apple).

La diffusion massive de cette innovation « open source » permet à des acteurs tiers de proposer des services spécifiques à ses utilisateurs (cas des systèmes de gestion de base de données fournis par la firme Oracle). Par ailleurs, la capacité de résilience du « commun » lui permet de soutenir le développement d’innovations périphériques. Non soumise aux désagréments liés à la bureaucratie et à la hiérarchie, l’agrégation des tâches de production des « peers » est plus rapide que dans le cadre d’une organisation verticale. Ainsi, plusieurs systèmes d’exploitation Linux ont permis de vulgariser les usages éducatifs de plates-formes électroniques (Arduino, Raspberry Pi, etc.). De la même manière, un ensemble de biens matériels peut être mis à disposition par une communauté d’usagers motivés par des objectifs non lucratifs, et générer une activité économique.

Les plates-formes privées qui se revendiquent de l’« économie collaborative » remettent en question la nature de la relation qui associe traditionnellement une entreprise avec le territoire qui supporte son activité. D’une part, elles exploitent, en partie sur le modèle du commissionnement, les compétences et/ou les biens de leurs clients (uniquement reliés à l’entreprise par un contrat commercial), échappant ainsi à la fiscalité sur le travail en vigueur sur le territoire où l’échange a lieu. D’autre part, les régimes fiscaux favorables sont à la source de leur déploiement international.

L’argument avancé pour faire taire la critique relative à l’ « évaporation fiscale » pratiquée par la majorité de ces plates-formes invite à découpler production de valeur et reconnaissance de la souveraineté du régime fiscale en vigueur sur le territoire qui la rend possible. C’est par la voie de la dynamisation économique des territoires (allongement de la durée des séjours du fait de leurs moindres coûts, augmentation du chiffre d’affaires des commerces locaux, etc.) que cette entreprise entend redistribuer indirectement la valeur captée. Cette perspective a notamment été utilisée par l’entreprise Airbnb, un des fleurons des plates-formes privées d’ « économie collaborative », pour justifier son activité en région parisienne :

Par ailleurs, l’étude révèle que les voyageurs qui utilisent Airbnb effectuent des séjours plus longs et dépensent plus d’argent à Paris et notamment dans des quartiers qui ne sont habituellement pas fréquentés par les touristes. (Communiqué de presse émis par Airbnb, le 13 juin 2013)143.

3.1.2. La mise à contribution du consommateur : entre

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