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comme innovation territorialisée

Dans le document Thèse de doctorat Présentée (Page 120-124)

Notre étude de terrain nous a plusieurs fois amené à nous déplacer à Lille. Tout d’abord, la Chambre de Commerce et d’Industrie du Grand Lille y organise fréquemment des cycles de conférence sur le concept d’ « économie de la fonctionnalité ». Ensuite, nous y avons rencontré le dirigeant de Lokéo (filiale de Boulanger), l’une des deux seules entreprises françaises (avec UZ’it, filiale d’Evollis) se revendiquant - d’après notre veille - de l’économie de fonctionnalité134. Enfin, nous nous sommes mis en relation avec un membre

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L’intervention de Christian Du Tertre au Colloque « Consommations émergentes » organisé par l’ObSoCo, le 21 janvier 2014, va dans ce sens. Il y a fortement critiqué la possibilité d’un capitalisme plus vertueux.

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Les deux entreprises sont citées dans l’article de presse suivant : Quiret, M., 2013, « Et si on louait plutôt qu’acheter ? », Les Echos, Mercredi 11 septembre 2013

du « Club Noé », qu’ « ATEMIS, la CCI Grand Lille, […], la Région Nord-Pas de Calais […] ont lancé pour soutenir de nouveaux modèles économiques et développement durable vers l’économie de la fonctionnalité et de la coopération. »135. Les informations collectées nous permettent de compléter notre description du modèle d’ « économie de la

fonctionnalité ».

2.3.1. Relations des activités d’ATEMIS avec une

collectivité

L’influence des travaux de recherche de Christian Du Tertre, qui travaille depuis longtemps avec le Conseil Régional du Nord-Pas de Calais (cf. extrait ci-dessous), ne semble pas étrangère à l’intérêt que manifestent les acteurs de ce territoire pour le concept qu’il défend.

[…] alors, c’est la Région Nord Pas-de-Calais qui, en 1993, m’a demandé de piloter la reconversion économique de la Région Nord Pas-de-Calais, c’est-à-dire de piloter l’ensemble des chercheurs au service de la reconversion économique. […] Ils ne me connaissaient pas, c’est Jean Gadrey, qui lui est un lillois, qui voulait que la première conférence de ces assises ne soit pas faite par un lillois, compte tenu des problèmes. Ils ont dit : qui vous connaissez en dehors de Lille ? […] Il dit : vous devriez vous adresser à Du Tertre. Alors, je suis venu faire la conférence inaugurale sur l’impasse de l’industrie, le redéploiement par les services, comment il faut accompagner la place laissée au travail, etc. […] Et ils m’ont mis dans le wagon, et je suis devenu le responsable de l’ensemble de l’expertise jusqu’en 1998, de 1993 à 1998, mais avec des bagarres politiques énormes, [...]. C. D. T.

La question lancée à la rentrée 2014 par le Club de l’Économie de la Fonctionnalité et du Développement Durable » sur son groupe LinkedIn témoigne de la difficulté à renouveler les cas d’étude : « Connaissez-vous des entreprises se réclamant de l'économie de la fonctionnalité ? Je ne parle pas de celles citées en exemple (Xerox ou Michelin...) mais bien de celles revendiquant ce modèle. ». Au fil de la discussion, l’interrogation se précise : « Le sens de la question initiale est bien de savoir si des entreprises utilisent le terme économie de la fonctionnalité comme un "label" et si elles le font, quel contenu donnent-elles à ce "label" ? Pour le moment nous (dans le club EF "parisien") n'en avons pas trouvé. ».

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Ainsi, après avoir mené plusieurs expérimentations, avec le soutien du Conseil Régional du Nord-Pas de Calais, Christian Du Tertre crée le Club de l’Économie de la Fonctionnalité et du Développement Durable, avant de déployer la même stratégie de diffusion du concept dans d’autres régions. La puissance publique semble par conséquent avoir fourni un soutien d’ordre politique à la promotion de la désignation « économie de la

fonctionnalité ».

Ensuite, création du club en 2006, développement de ce débat, expériences avec des entreprises, La Poste, EDF, La RATP, non, la RATP ça ne s’est pas fait finalement, Solvay. Et puis, des PME qui commencent à venir. Donc, avec le Nord Pas-de-Calais, on monte, en 2009, 2010, des accompagnements de réseaux de PME. On en monte dans le Nord Pas-de-Calais, on en monte dans le PACA. C’est un dispositif que j’ai proposé de monter au Conseil Régional. C. D. T.

2.3.2. La revue comme espace d’innovation mêlant

science et politique

Bien que les activités du cabinet ATEMIS contribuent fortement à la diffusion de la désignation « économie de la fonctionnalité », la revue scientifique Développement Durable et Territoires y joue également un rôle déterminant. Ainsi, d’après les résultats de nos requêtes, cette revue est à l’origine de 25,6% de l’ensemble des publications qui concernent l’ « économie de la fonctionnalité », contre seulement 3,3% de la totalité de celles qui traitent d’ « économie de fonctionnalité » 136. Comment expliquer un tel écart ? Résulte-t-il d’un choix éditorial ? Comme permet de le constater la présentation de la revue, elle est composée en majorité d’acteurs scientifiques et institutionnels du Nord-Pas-de-Calais. Développement Durable et Territoires réunit : « une quarantaine de chercheurs en sciences humaines et sociales, issus de différentes disciplines, et principalement des

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Les données utilisées sont les mêmes que précédemment, respectivement 190 publications sur 741, et 7 publications sur 211 (% arrondis à 10-1).

Universités et laboratoires de recherches de la région Nord-Pas-de-Calais. »137. Par ailleurs, le comité d’orientation est exclusivement constitué de représentants de collectivités territoriales de la région Nord-Pas de Calais (vice-président du Conseil

régional Nord-Pas de Calais, délégué régional de l’ADEME Nord-Pas de Calais, etc.)138.

Si Christian Du Tertre nous a précisé que seulement certains acteurs du Conseil Régional sont prêts à s’investir dans la promotion de l’ « économie de la fonctionnalité », il est vraisemblable qu’ils le fassent notamment par l’intermédiaire de cette revue : « La revue Développement Durable et Territoiresa bénéficié du soutien institutionnel et financier des partenaires suivants : l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME) du Nord-Pas-de-Calais, l’Agence de l’Eau Artois-Picardie, Le Conseil régional Nord-Pas-de-Calais, La Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DREAL) Nord-Pas de Calais. »139.

Le Conseil Régional [du Nord Pas-de-Calais], n’est pas engagé dans son ensemble dans l’économie de la fonctionnalité, ce n’est pas vrai, voilà. Donc, il y a certains membres qui sont convaincus et qui ouvrent à l’intérieur du Conseil Régional, mais dans son unité, le Conseil n’y est pas. C. D. T.

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La page de présentation du site internet administré par la revue Développement Durable et Territoires permet de d’accéder à la liste intégrale des laboratoires et des institutions partenaires : « Elle [la revue scientifique Développement Durable et Territoires] bénéficie du partenariat scientifique des laboratoires suivants : Centre Lillois d’Études et de Recherches Sociologiques et Économiques (CLERSE), Centre d’Études et de Recherches Administratives, Politiques et Sociales (CERAPS) ; Territoires, Villes, Environnement et Sociétés (TVES) ; et des institutions suivantes : le Centre national de la recherche scientifique, la Maison européenne des SHS Nord-Pas de Calais. », http://developpementdurable.revues.org/3918 [page consultée le 15 août 2015]

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http://developpementdurable.revues.org/1268 [page consultée le 15 août 2015]

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Dans le document Thèse de doctorat Présentée (Page 120-124)