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Des difficultés manifestes d’Interpol

Section 1. L’institutionnalisation progressive de la coopération policière internationale

A. Une coopération marquée par une relation ambivalente avec le champ politique

A. 2. Des difficultés manifestes d’Interpol

En dépit du rôle de facilitateur de la coopération policière d’Interpol, des contestations relatives à son fonctionnement et à son mandat même sont apparues de la part de policiers nationaux, remettant en cause la pertinence de l’organisation comme solution au problème iden- tifié de l’internationalisation de la criminalité. Deux défaillances majeures ont été au cœur des critiques formulées à l’encontre d’Interpol et traduisent les interactions encore ambiguës entre la coopération policière et le champ politique (§1). Les policiers européens se sont révélés par- ticulièrement actifs dans cette remise en cause. Face à ce nouveau diagnostic, ils ont cherché à modifier le fonctionnement interne d’Interpol dans une dynamique d’adjonction institution- nelle267, sans y parvenir pour autant (§2). Cela les a conduits à développer en parallèle des struc-

tures de coopération strictement européennes (§3).

A.2. §1. L’impossible coupure avec le champ politique

Deux problèmes opérationnels d’Interpol ont été soulevés, notamment par les policiers européens que nous analysons successivement Premièrement, l’atout même de l’organisation, fondée sur une coopération des polices issues d’un maximum d’États dans le monde, hors de toute considération politique ou idéologique, a été dénoncé comme constituant également son point faible. De plus, la volonté de distanciation d’Interpol par rapport au champ politique, en

265 Réponses écrites d’un ancien membre de la direction d’Europol, avril 2018.

266 M. Richardot, « Interpol, Europol », art. cit. ; C. Chevallier-Govers, De la coopération à l’intégration policière

dans l’Union européenne, op. cit., p. 127.

excluant notamment de son mandat toute forme de criminalité pouvant être l’objet d’une pres- sion politique, a été pointée du doigt comme proposant une action trop restrictive de l’organi- sation.

De prime abord, le nombre et la qualité des membres d’Interpol ont suscité une méfiance exacerbée des policiers européens participant à Interpol. En effet, le mouvement de décoloni- sation et l’affirmation d’indépendance de nouveaux États ont mené à une forte croissance du nombre de membres de l’organisation. Le problème a alors été double. D’une part, les policiers européens ont dû faire face à certaines tensions et rivalités vis-à-vis d’autres régions du monde ou d’autres États. Cette tension fait écho à nos observations précédentes sur le fait que la coo- pération policière n’est pas dénuée d’enjeux idéologiques et politiques et de tentatives d’impo- sition d’un modèle de police plutôt qu’un autre268. D’autre part, les policiers européens ont

éprouvé une méfiance à transmettre leurs données par le biais d’Interpol. Cette réticence est liée à la participation à Interpol de certains gouvernements soupçonnés de « sponsoriser »269 le terrorisme, de soutenir la production de drogues ou encore considérés comme étant des adver- saires politiques dans le contexte de Guerre froide. De ce fait, ces policiers européens ne veulent pas prendre le risque que leurs données envoyées à Interpol soient utilisées à des fins différentes que celles qui leur ont été assignées. Dans ce sens, un ancien membre de la direction d’Europol a dressé le constat suivant : « Nous avions le réseau Interpol, mais il impliquait des États qui n’étaient pas toujours sécurisés … les agences européennes ne s’y fiaient pas réellement »270.

En second lieu, le statut légal d’Interpol a posé problème aux yeux des membres euro- péens de l’organisation. Comme mentionné supra, la volonté initiale d’autonomie d’Interpol par rapport au champ politique et le passé de l’organisation ont mené à ce que son mandat ne comprenne que les formes de criminalité commune. Ont donc été exclues toutes les formes de criminalité comportant une dimension politique, religieuse ou raciale (et militaire depuis 1956). Ce mandat restreint s’est révélé être une lacune essentielle aux yeux des policiers européens. En raison de la survenue d’attaques sur le territoire européen, ceux-ci se sont concentrés dès les

268 Le problème s’est posé par exemple face aux Américains qui ont utilisé Interpol également pour servir leur

politique étrangère sous le prétexte de la « guerre contre les drogues » de Richard Nixon (D. Bigo, Polices en

réseaux, op. cit., p. 72).

269 Ibid., p. 69‑70.

années 1970 sur les enjeux du terrorisme, pensé comme une forme de criminalité politique271.

Ainsi, il n’a pas été possible pour ces acteurs d’utiliser Interpol comme canal de transmission des informations. De plus, même s’ils avaient pu l’utiliser, la diversité des membres de l’orga- nisation aurait posé problème pour les raisons évoquées précédemment, ce qui a mené à sa « paralysie quasi structurelle »272. Déconnectée des enjeux sociaux et politiques régissant le travail de police, le recours à Interpol n’a plus été perçu par les policiers européens comme une solution satisfaisante aux problèmes rencontrés dans leurs activités et par rapport à leurs pra- tiques de travail, les menant à des tentatives de transformations internes273.

A.2. §2. L’échec des policiers européens à initier un changement interne Face au constat précédemment dressé, les policiers européens ont sous-utilisé Interpol et transformé leur utilisation des outils proposés. Ils ont dans ce sens arrêté de transmettre des données essentielles par le biais d’Interpol, mobilisant ce dernier surtout comme une « boîte aux lettres »274 pour les commissions rogatoires internationales ou pour les avis de recherche. Ce fossé les a amenés dans un deuxième temps à des tentatives d’aménagement interne d’In- terpol. Nous devons souligner à ce stade qu’une conférence régionale européenne existe déjà depuis 1971, mais elle fait surtout office de réunion sur des enjeux politiques et stratégiques relatifs à la coopération policière. Elle ne permet pas aux policiers européens de résoudre les problèmes rencontrés dans la réalisation de leurs activités. Pour pallier la méfiance à l’égard des autres polices nationales et optimiser les échanges par le canal Interpol, les participants européens ont défendu la nécessité de créer leur structure propre au sein de leur organisation.

271 Entre autres I. Sommier, « Du « terrorisme » comme violence totale ? », Revue internationale des sciences so-

ciales, 2002, 174, 4, p. 525‑533 ; D. Duez, « De la définition à la labellisation : le terrorisme comme construction sociale » dans K. Bannelier et al. (eds.), Le droit international face au terrorisme. Après le 11 septembre 2001, Cahiers internationaux, Paris, Pedone, 2004, p. 105‑118 ; J. Friedrichs, Fighting Terrorism and Drugs: Europe

and International Police Cooperation, Londres ; New York, Routledge, 2008, p. 22.

272 D. Bigo, Polices en réseaux, op. cit., p. 70.

273 Nous pouvons pour autant noter qu’une quête de dépolitisation du terrorisme a été entreprise par le secrétariat

général d’Interpol afin de pouvoir agir sur cette question. Cependant, la définition même du terrorisme a soulevé et soulève encore des difficultés et débats quant à son approche, son traitement, ses causes (J. Friedrichs, Fighting

Terrorism and Drugs, op. cit.). La solution a été trouvée assez tardivement puisque l’article 3 du statut légal d’In-

terpol n’a été modifié qu’en 1984 pour pouvoir inclure le terrorisme à la suite d’une résolution de l’assemblée générale qui a proposé que chaque demande d’assistance soit étudiée individuellement (« recueil de pratiques : application de l’article 3 du statut d’Interpol dans le contexte du traitement d’informations par le canal d’Interpol », deuxième édition, 2013, disponible sur https://www.interpol.int/.../6/.../article%203-french-fe- bruary%202013vb%20CD.pdf (consulté le 20 décembre 2017)). Ce changement est arrivé par conséquent après que d’autres structures et enceintes se soient appropriées cette question, comme nous le développons par la suite.

Leur objectif est, grâce à la proximité cognitive et professionnelle des policiers européens d’États dont les gouvernements sont proches, de pouvoir échanger plus librement, comme nous l’a expliqué un ancien membre de l’EPE :

Interpol est mondial et des pays très corrompus en sont aussi membres, donc ce n’est pas réellement un environnement sûr pour envoyer vos données. Vous devez échanger avec des États criminels, vous ne pouvez pas être seul, mais échanger des données sensibles, des données criminelles avec Cuba ou à l’époque le Libye était impossible. On savait que les États européens étaient différents, mais avaient plus ou moins la même culture275.

Cette demande, ainsi que la transformation de l’utilisation d’Interpol, ont révélé une ten- tative d’adjonction institutionnelle comme ajout de nouvelles règles à celles déjà existantes, menant à une superposition d’éléments au sein même d’une institution qui serait alors compo- sée de plusieurs couches276. Néanmoins, ce changement ne peut avoir lieu que si les acteurs portant cette transformation parviennent à mettre à mal la résistance des acteurs dominants d’une institution, ce qui n’a pas été le cas au sein d’Interpol. En effet, face aux propositions des policiers européens de créer une sorte de division européenne au sein d’Interpol pour assurer cette confidentialité, une résistance du secrétariat général de cette organisation, soutenu par les participants non européens, a émergé. Ces derniers ont perçu une tension irrésoluble entre le projet initial de mondialisation d’Interpol et la défense d’intérêts restreints à une zone géogra- phique277. De plus, selon un ancien membre de la direction d’Europol, ces acteurs ont craint de la sorte une appropriation encore plus poussée d’Interpol par les Européens qui dominaient déjà numériquement les échanges d’informations :

Beaucoup d’efforts ont été faits pour créer un secrétariat européen au sein du se- crétariat général d’Interpol, un nouveau département européen indépendant avec ses propres méthodes. Mais l’ancien secrétariat général craignait que l’influence européenne ne devienne encore plus forte sur Interpol. Les autres États non euro- péens d’Interpol ont dit que nous n’avions qu’à nous occuper de nos propres af- faires, mais pas dans cette organisation et que nous pouvions faire ce que nous voulions, mais en créant une autre organisation régionale. Il y a eu certaines né- gociations et des efforts durant trois ou quatre ans, mais sans succès et les acteurs politiques et chefs des agences de police ne voulaient pas attendre si longtemps. Alors, ils ont dit que nous allions nous occuper de nos affaires, mettre plus d’argent, suivre notre culture policière et organisationnelle et que nous pouvions faire

275 Entretien avec un ancien membre de l’EPE (B), juillet 2017. 276 K. A. Thelen, « Comment les institutions évoluent », art. cit., p. 30. 277 D. Bigo, Polices en réseaux, op. cit., p. 74.

quelque chose qui corresponde à nos besoins et soit compatible avec nos structures et nos droits nationaux278.

Si une forme d’opposition à ce recentrage européen de la part des acteurs dominant In- terpol a été perceptible dans les années 1960 et 1970, une transformation de l’organisation a toutefois été entreprise par la création d’un secrétariat régional européen en 1985. Néanmoins, face à l’urgence perçue de l’internationalisation de la criminalité et à la suite de cet échec des services européens de police à modifier l’institution conformément à leurs représentations so- ciales, un sentiment de frustration a émergé. Ces acteurs ont recherché une solution alternative, celle de structures strictement européennes de coopération policière, mises en place dans les années 1970279.

A.2. §3. Une coopération policière européenne multi-niveaux

Nous avons mis en lumière les relations nouées dès le XVIIIème siècle entre les policiers européens, été intensifiées au XIXème siècle. Le partage de frontières a renforcé leur construc- tion et convergence d’un mythe associant la mondialisation à l’insécurité280. Le XXème siècle

marque dans un premier temps l’avènement d’une coopération internationale, faisant écho à une menace criminelle perçue comme dépassant le cadre européen. Pour autant, le développe- ment d’Interpol n’a pas mis fin aux formes informelles de coopération bilatérale et multilatérale restreinte entre des policiers européens qui échangent directement et se font confiance. Cette relation de confiance a été fondée sur les rencontres faites lors des conférences internationales de police, les formations à l’étranger qui se sont développées progressivement ou par le biais des échanges de policiers281. Le primat accordé à la coopération policière internationale ne sup- prime donc pas la collaboration entre des policiers européens, néanmoins restreinte de prime abord aux régions frontalières.

Ces espaces d’échanges cristallisent la perception d’une menace criminelle transfronta- lière et des besoins urgents de coopération des policiers européens. Cette représentation sociale est au fondement de la création de la Cross Channel Intelligence Community. Cette dernière

278 Entretien avec un ancien membre de la direction d’Europol, janvier 2016.

279 M. Anderson, « The Agenda for Police Cooperation » dans Malcolm Anderson, M. den Boer et European Con-

sortium for Political Research (eds.), Policing across National Boundaries, Londres ; New York, Pinter Publish- ers, 1994, p. 3‑21.

280 M. Deflem, « Bureaucratization and Social Control », art. cit., p. 752‑754. 281 D. Bigo, Polices en réseaux, op. cit., p. 81‑82.

réunit annuellement depuis 1968 les services de douane et de police de Belgique, du Royaume- Uni, de la France et des Pays-Bas situés dans les régions frontalières de la Manche et de la mer du Nord282. De même, dans l’Euregio Meuse-Rhin, la région frontalière entre la Belgique, les Pays-Bas et l’Allemagne, une convention entre les autorités belges et allemandes a été signée dès 1960. Elle permet la création d’un échange de renseignements et d’un service de liaison et a été consolidée par la création de la NEBEDEAC-Pol en 1969. Celle-ci, sous la forme d’un groupe de travail ayant le statut d’une association de droit privé, rassemble les policiers de ces trois États, toujours dans cette optique d’échange283. C’est également dans ce sens que peut être compris le traité signé entre les États du Benelux d’extradition et d’entraide judiciaire de 1962 dans le cadre de la libre circulation des personnes, marchandises, capitaux et services liée à la mise en place de l’Union économique Benelux en 1958.

Une transformation de la coopération policière européenne est cependant visible dans les années 1970 avec la mise en place de « clubs ». Ces derniers sont des structures de coopération généralement informelles, souvent opaques et qui ont permis des rencontres régulières entre des policiers qui ont pu nouer de la sorte des relations personnelles approfondies. Au-delà de l’État et en-deçà du niveau mondial284, la différence majeure entre ces clubs et les structures de

coopération préexistantes est qu’ils ne sont pas restreints aux zones frontalières. De plus, ils sont généralement centrés sur des formes particulières de criminalité au cœur des agendas po- litiques et sécuritaires européens et internationaux des années 1970 et qui suscitent des diffi- cultés particulières dans le cas d’Interpol285.

Premièrement, une multitude de clubs ont été créés autour des enjeux de la lutte contre le trafic de drogues. Cet angle précis se comprend en raison de la conception des stupéfiants comme l’un des plus importants marchés criminels, objet d’une pression internationale de la part des États-Unis. Par conséquent, la constitution d’un régime international de prohibition et la convergence des politiques nationales de lutte contre le trafic de drogues sont visibles depuis les années 1960286. Toutefois, les policiers européens se méfient des implications de certains gouvernements dans cette forme de criminalité et n’utilisent pas tellement Interpol à cette fin.

282 J. Sheptycki, In Search of Transnational Policing, op. cit.

283 S. Brammertz, « La coopération policière en Europe et dans l’Euregio Meuse-Rhin », Déviance et société, 1992,

16, 2, p. 219‑229.

284 D. Bigo, Polices en réseaux, op. cit., p. 75. 285 Ibid., p. 53.

286 M. Elvins, Anti-Drugs Policies of the European Union: Transnational Decision-Making and the Politics of

L’un des premiers clubs sur cette question du trafic de stupéfiants a été le groupe Pompidou, créé en 1971 à cheval entre les ministères de la Santé et des Affaires sociales et ceux de la Justice et de l’Intérieur de sept États287 avant d’être intégré au Conseil de l’Europe en 1980288.

Pour autant, des groupes plus restreints à la police ont existé, comme le groupe StAR créé en 1972 sur une initiative allemande et qui a impliqué notamment la France, les Pays-Bas, le Luxembourg, le Danemark, la Suède.

Deuxièmement, d’autres clubs ont été centrés sur la lutte contre le terrorisme, enjeu aussi essentiel de l’agenda sécuritaire international et européen comme évoqué précédemment du fait de la survenue d’attaques terroristes. Comme dans le cas du trafic de drogues, l’utilisation d’In- terpol par les policiers européens a été très faible en raison des relations étroites perçues par ces acteurs entre certains États et groupes terroristes. Un premier club dans ce sens est celui de Berne, créé en 1971, qui rassemble des hauts responsables européens et américains des services de sé- curité en charge de la lutte contre le terrorisme289. Un autre exemple est le club de Vienne, fondé en 1979. S’y sont rencontrés plutôt des ministres et hauts fonctionnaires d’Autriche, de Suisse, de France, d’Allemagne, d’Italie, non seulement sur la thématique anti-terroriste, mais aussi afin de lutter contre l’immigration irrégulière. En outre, il est également pertinent de mentionner le Police Working Group on Terrorism, créé en 1979 à la suite de l’assassinat de l’ambassadeur britannique à La Haye par les indépendantistes irlandais. Ont assisté à ses réunions initialement les polices britanniques, néerlandaises, françaises, allemandes avant de s’étendre aux autres États européens. Enfin, nous pouvons mentionner le groupe de Trevi290, fondé en 1975 à la suite du

Conseil européen de Rome. Ce groupe, bien plus médiatisé que les autres291, est le seul à rassem- bler des représentants des 12 États membres de la Communauté européenne. Néanmoins, Trevi reste expressément situé hors du cadre formel de la Communauté292. La spécificité de Trevi est qu’il mêle les forums des professionnels de la sécurité celui de la politique en étant organisé sur

287 Ce groupe a réuni initialement la France, l’Allemagne, l’Italie, le Royaume-Uni et les États du Benelux. 288 D. Bigo, Polices en réseaux, op. cit., p. 92.

289 C’est de ce club qu’est issu le Counter-Terrorist Group créé après les attentats du 11 septembre 2001 qui

aujourd’hui réunit les 28 États membres de l’Union, la Suisse et la Norvège.

290 Le nom de Trevi est l’objet de plusieurs récits. Un premier est que c’est un acronyme pour Terrorisme, Radi-

calisme, Extrémisme et Violence Internationale. Un second est que le dirigeant de l’époque s’appelait M. Fonteijn et la première réunion des participants ayant lieu à Rome il avait été choisi de lui donner en référence le nom de Trevi et l’acronyme aurait été trouvé par la suite.

291 A. Smith, Le gouvernement de l’Union européenne, op. cit., p. 173.

trois niveaux à l’instar de ce qu’il existe dans les groupes de travail du Conseil des ministres293.

L’objectif d’avoir ces trois échelons était de pouvoir permettre une coopération opérationnelle sur des cas précis, une coopération stratégique pour dessiner les liens entre les problèmes natio- naux, ainsi que des discussions à partir de considérations et de besoins issus du terrain pour amé- liorer la coopération. Le groupe de Trevi illustre la politisation naissante de la coopération poli- cière dans les années 1970, au sens de l’intérêt croissant des professionnels de la politique pour ces enjeux, jusque-là traités à distance des sphères politiques294. Pour autant, les débuts difficiles de Trevi attestent de la fermeture encore forte de ce secteur d’action publique aux enjeux poli- tiques et la quête d’un entre-soi entre policiers, cherchant à préserver leur marge de manœuvre. Cette brève présentation, qui n’a pas pour objet d’être exhaustive, permet d’introduire la multiplicité des modalités et enceintes de coopération policière en Europe pensée comme pal- liatifs à Interpol. Ces clubs ont porté sur des objets distincts (terrorisme, trafic de drogues), sur des territoires variés (Europe au sens communautaire ou au sens continental, voire dépassement de l’Europe), ont été de nature distincte (plus ou moins formalisés, plus ou moins reconnus officiellement), et ont impliqué des activités différentes (échanges d’informations, analyse stra- tégique, partage des meilleurs pratiques, perfectionnement des technologies et méthodes de