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Lors d’un atelier organisé par le GRAIM et l’association des chefs de village de la communauté rurale de Fandène le 11 mai 2011, un intervenant illustre les problèmes de la décentralisation. « La politique de décentralisation avec tout son arsenal de compétences transférées et sa clé de répartition des tâches et fonctions des acteurs au niveau local semble mal assimilée par les autorités locales à la base, en l’occurrence les chefs de village qui peinent à se retrouver dans ce système. Leurs connaissances en gouvernance locale (administration et gestion des collectivités locales) sont généralement très limitées alors qu’ils constituent un maillon incontournable dans le processus de décentralisation, dans l’élargissement de la démocratie locale et la bonne gouvernance des communautés rurales, explique Boubacar Sidibé, Consultant-formateur en Décentralisation et Gestion des Collectivités Locales. Or, cette méconnaissance, poursuit-il, peut engendrer des dysfonctionnements, voire des blocages dans la bonne marche des organes de la communauté rurale amenant des confusions de rôles, mésententes et défiances entre les conseillers ruraux et les autres acteurs locaux, des retards dans le traitement de dossiers, etc. »

Sur le même propos, lors de l’atelier du 28 avril 2011, regroupant les conseillers ruraux, les chefs de village et le sous-préfet : « Le processus de décentralisation au Sénégal se caractérisant par un transfert progressif de compétences de l’État en faveur des collectivités locales (communautés rurales, communes et régions), cela s’est traduit par une responsabilisation des élus et des acteurs locaux, dont les Chefs de village, a indiqué Boubacar Sidibé, Consultant-formateur en Décentralisation et Gestion des Collectivités Locales. Cependant, a-t-il ajouté, ce contexte de décentralisation est aujourd’hui émaillé de contraintes majeures, dont, entre autres, la confusion et non maitrise par les élus et autres acteurs locaux de leurs rôles et responsabilités spécifiques, leur manque de formation, l’absence de dialogue et de collaboration effective entre les populations et les autorités locales qui passent outre le plus souvent leur obligation de rendre compte. Ce qui n’a pas manqué de soulever des problèmes entre acteurs dans la communauté rurale de Darou Khoudoss. A ce propos, Bassirou Fall, 1er Vice-président du Conseil rural, fera observer que c’est le constat unanime des relations conflictuelles et heurtées entre les Conseillers ruraux et les chefs de village qui a inspiré le Président du Conseil rural à initier la présente session de formation qui, espère-t-il contribuera au règlement définitif et durable des dits conflits qui s’opposent de façon permanente au fonctionnement normal et régulier de la communauté rurale en menaçant dangereusement son développement. »

Source : extraits tirés de la lettre d’information de juin 2011 du GRAIM.

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Ces extraits illustrent deux faits : tout comme pour les mutuelles, les chefs de village, dans le cadre de la décentralisation, ont du mal à s’approprier leur rôle ; la décentralisation, en se basant sur certains acteurs comme les chefs de village, s’inscrit dans un contexte institutionnel bien particulier, avec des rapports de pouvoirs, qu’il est nécessaire de comprendre pour ne pas aboutir à des situations telles que celles évoquées dans l’encadré précédent. On constate toutefois, dans le cas bien précis de Thiès, que la concertation entre les acteurs locaux est possible afin d’essayer d’améliorer la coordination à cette échelle locale.

L’exemple de la LOASP

Une autre illustration d’un manque de coordination fort entre les acteurs impliqués dans la santé est la mise en pause du projet de Loi agro-sylvo-pastoral. En 2004 fut promulguée la Loi d’Orientation agro-sylvo-pastorale65, initiant un projet devant durer 20 ans. L’un des objectifs est

la mise en place d’une protection sociale, notamment d’une couverture maladie, pour 85% de cette catégorie de travailleurs, notamment informels, pour 2024. D’après le document de la Stratégie nationale d’extension de la couverture du risque Maladie, près de 6 millions de personnes, en comptant les ruraux et leur famille feraient partie de cette catégorie. Mais la mise en place de telles politiques se fait attendre. Le plan stratégique de développement de la CMU au Sénégal (2013- 2017) n’évoque plus ces dispositifs, l’accent étant mis sur les mutuelles de santé communautaires et le DECAM. Des problèmes politiques et financiers ont freiné sa mise en place, notamment au niveau du CNCR (Conseil national de concertation et de coopération des ruraux, regroupant les principales fédérations paysannes et de producteurs du Sénégal). La transition du système agricole dans le cadre de la LOASP est complexe, elle rencontre des résistances fortes dans la mesure où l’agriculture est fortement libéralisée, notamment sur la question foncière, cherchant à rompre avec l’agriculture familiale sénégalaise, jugée archaïque (Vandermotten, Ba, 2008). Les concertations sont donc complexes par rapport à la LOASP. Ceci illustre le poids de différences de visions dans la coordination des acteurs, dans le domaine ici de l’agriculture.

2.2.5. … Avec l’offre de santé

Les structures de santé comme les collectivités ont un rôle important pour appuyer les mutuelles de santé. Toutefois les liens sont complexes entre les mutuelles et ces acteurs. La qualité de l’offre, sa répartition inégale complique la confiance des populations à adhérer à des mutuelles. Les prestataires de soins ont, de leur côté, du mal à établir des liens viables avec les mutuelles

65 Les métiers de l’agriculture sont définis dans un sens large : agriculteurs, éleveurs, exploitant forestiers, pêchers, artisans ruraux, etc.

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communautaires. Les difficultés de ces dernières rejaillissent sur leur réputation et peuvent mettre en péril des conventions déjà établies avec des retards de remboursements. Divers facteurs contribuent au refus par les prestataires de signer des conventions avec les mutuelles : le manque d’information, la volonté d’éviter une surcharge de travail, la méfiance par rapport à la solvabilité des mutuelles, le mouvement du personnel sanitaire, la peur de perdre une partie de leur autorité, le manque de transparence des situations financières des mutuelles, la peur des abus, des fraudes. Certains établissements exigent des cautions (Ntamwishimiro Soumare, 2006). Les mutuelles doivent aller vers les structures de soins et les convaincre de mettre en place une convention permettant une meilleure prise en charge des membres. Cette problématique de la confiance a été illustrée lors d’entretiens que nous menions auprès de l’offre de santé, comme le monde l’extrait suivant.

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