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Quand un fait devient un événement Le discours comme méthode de valorisation de l’information.

MISE EN PLACE D’UNE METHODOLOGIE DE RECHERCHE : L’OBJET DE L’ANALYSE DISCURSIVE DE L’ALTERITE ET LA

3.2 Quand un fait devient un événement Le discours comme méthode de valorisation de l’information.

Les informations (news) présentées dans la presse écrite ne sont pas un phénomène naturel, mais elles sont socialement et culturellement définies. Les journalistes, les éditeurs et tous les acteurs qui se cachent derrière l‟institution de la presse sont des acteurs sociaux dans un réseau de relations sociales, qui offrent aussi leur point de vue à l‟égard des nouvelles publiées. Ainsi, les informations ne sont pas l‟événement en soi, mais justement un rapport partial et idéologiquement cadré de l‟événement.

Ce qu‟on appelle « l‟information » ou « l‟actualité » comporte en effet trois dimensions indissociables : c‟est un bien symbolique dont la production suppose un certain travail intellectuel, mais qui, en outre, doit être économiquement rentable (c‟est-à-dire vendable) et qui par ailleurs, peut produire objectivement des effets politiques de publication, voulus ou non. Eric Macé définit comme information «le résultat d’une sélection drastique entre ce dont on peut parler en

quelques pages ou en quelques minutes et la somme quasi infinie de ce dont on ne peut pas parler. L’observation de ce processus de sélection montre qu’il s’agit d’une action collective et conflictuelle dont les journalistes ne représentent qu’une partie » [MACE, 2006 ; 39].

Les énoncés dans la presse écrite composent un type spécifique de discours médiatique, lequel, pour beaucoup de personnes, a une place privilégiée et prestigieuse dans la hiérarchie de leurs valeurs culturelles. Principalement, dans les sociétés occidentales, les gens sont exposés au langage médiatique, probablement plus qu‟à n‟importe quel autre type de langage, car la production médiatique est immense. Le public, regarde ou lit les nouvelles, car il considère que les nouvelles concernent la réalité.

Cependant, le concept de « nouvelles médiatiques /news » est ambigu. Il implique que, dans un premier temps, une source va divulguer une nouvelle information au public, et que, dans un second temps, cette information sera diffusée de manière objective. Néanmoins, les nouvelles restent une reconstruction de la réalité à travers le regard de gens différents : des journalistes, des interviewés, des institutions citées, etc. Dès lors qu‟il s‟agit d‟une réalité observée, elle dépend de la façon dont elle est regardée. Pour reprendre E. Morin « l’information est un concept problématique, non un concept solution. C’est un concept indispensable, mais ce n’est pas encore un concept élucidé et élucidant » [MORIN, 2005 ; 37].

Nous allons parler, par la suite, des effets que le discours de l‟altérité apporte aux représentations d‟un individu ou d‟un groupe et au « faire social » envers l‟Autre.

3.2.1 Le discours de l’altérité dans la presse écrite : quels

sont ses effets sur la réalité sociale ?

La construction de l‟altérité dans les énoncés de la presse écrite se fait à partir de l‟usage d‟un discours précis et coordonné, qui présente des caractéristiques souvent homogènes. Plusieurs sont les effets du discours utilisé pour exprimer la différence dans la presse écrite à la façon dont les représentations se forment, se propagent, se renforcent et se préservent.

L‟une des hypothèses défendues dans ce travail est le fait que la presse écrite dispose du pouvoir d‟attirer l‟attention du public sur un nombre des sujets définis et limités. La classification de la presse comme une institution organisée suscite une méthode précise pour la réalisation de la « couverture de l‟actualité ». L‟un des pouvoirs particuliers de la presse écrite est celui de donner de l‟importance, de limiter ou de condamner au silence les sujets de l‟actualité. Cet aspect du pouvoir médiatique est souvent présenté sous l‟étiquette de l‟ « agenda setting ». D‟après cette approche, les médias orientent l‟attention du public vers certains sujets. Pour le faire, ils présentent certains sujets comme éminents, et en même temps d‟autres sujets se présentent de façon restreinte, tandis que d‟autres ne figurent pas à l‟agenda du jour. De cette façon la presse participe à la formation du débat public autour des sujets choisis ; dans un premier temps, l‟institution de la presse, à travers ses acteurs, choisit l‟Autre ou les Autres, qui seront présentés au public, et dans un second temps, le discours utilisé définit la façon dont l‟altérité sera présentée.

L‟agenda de la presse peut alors construire intégralement les représentations de l‟altérité ; commençant par le choix du sujet, la sélection des sources et des citations qui vont encadrer l‟événement, jusqu‟à la place et la taille qu‟aura un article, le discours de la presse fait plus que seulement représenter l‟Autre. Via le discours utilisé pour exprimer l‟altérité, la presse tente d‟expliquer et de légitimer des pratiques sociales, qui définissent un regard précis envers l‟Autre. En d‟autres mots, le discours essaie de justifier plus explicitement les représentations.

Un exemple significatif de la façon dont la presse contribue à la légitimation des représentations est le choix des sources, qui seront convoquées pour parler d‟un événement. D‟après une liste faite par Whitaker [WHITAKER, 1981 ; 31], les sources suivantes figurent au sommet des sources d‟information de la presse : le Parlement, les comités locaux, la police, les services d‟urgence, la justice, les bureaux de presse, les événements qui se répètent chaque année, et d‟autres médias. La presse reçoit aussi ses informations par les communiqués de presse de différentes organisations et des conférences de presse. Des individus font aussi quelques déclarations publiques.

Cependant, les discours sont liés aux sources citées. Les discours de tous ces groupes, décrits par Whitaker, deviennent ainsi la matière première pour le langage des énoncés de la presse écrite. Et le public se trouve devant une présentation des événements sous le prisme d‟un discours, la plupart du temps, officiel et formel. L‟occupation des références et des citations par des institutions dominantes de la société à laquelle le journal appartient, conduit à adopter un regard coordonné et, nous pourrions dire même, manipulé envers l‟Autre.

Dominique Maingueneau qualifie les textes de la presse quotidienne ou hebdomadaire, de textes semi-ouverts. Dans ces textes Ŕ là, nous dit l‟auteur de

l’Analyse du Discours, « même si le rôle du contexte est important une bonne part des

informations ne sont accessibles que si le lecteur dispose d’une certaine connaissance de l’environnement social, événementiel *…+ immédiat. Cette ouverture sur l’univers extradiscursif rend ces énoncés difficilement détachables de leur contexte d’énonciation » [MAINGUENEAU, 1991 ; 126]. Le discours de l‟altérité exige également une connaissance antérieure de l‟Autre. C‟est pour cette raison que nous croisons souvent dans notre corpus le traitement des mêmes sujets. Et c‟est aussi pour cette raison que la presse insiste sur des sujets largement connus par le public, et dans lesquels, l‟Autre a déjà une place prédéfinie. De cette façon, les textes de la presse contribuent à l‟évaluation d‟un savoir déjà partagé.

Cependant, la presse a été souvent confrontée à l‟accusation d‟avoir donné des informations biaisées sur l‟Autre et d‟avoir présenté des événements de façon

subjective. Ce fait suscite des questions sur la vérité, le biais et la manipulation des informations.

Point d’étape

Les effets du discours de l’altérité :

- Définir l’agenda sur le traitement ou non des sujets concernant l’Autre.

- Légitimer les représentations, à travers le choix des sujets et les sources y utilisés.

- Créer ou renforcer le sentiment d’appartenance. - Contribuer à l’évaluation du savoir partagé

3.2.2 Quels critères pour que l’Autre apparaisse dans

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