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CHAPITRE 2 UN ENJEU CENTRAL DE LA COMPARAISON DES LANGUES : LES COMPETENCES

2.2 La comparaison des langues : un travail métalinguistique et pluriel sur les langues

2.2.1 Deux cadres fondateurs pour la comparaison des langues

2.2.1.1 Une matière-pont pour la comparaison des langues : le mouvement Language Awareness et l’éveil aux langues

La confrontation des élèves avec d’autres systèmes linguistiques que celui de leur langue maternelle, tant les aider à se centrer sur les aspects formels de la langue que dans la perspective de finalités éducatives plus larges, est le principe général dans lequel va s’ancrer l’idée de comparer les langues entre elles.

Deux pistes se dessinent, que nous suivrons l’une après l’autre : l’une repose sur l’idée de créer une matière spécifique dédiée à l’étude du fonctionnement des langues en général ; l’autre consiste à mettre la LE étudiée dans le cursus en relation avec la L1. Dans l’articulation L1/LE deux configurations sont alors à distinguer : dans le cadre de l’enseignement de la langue maternelle, la mise en relation consiste à profiter de l’étude obligatoire d’une LE à l’école pour en contraster le fonctionnement avec celui de la L1. Dans le cadre de l’enseignement de la LE, il s’agit de reconsidérer la place de la langue maternelle comme langue d’appui à l’acquisition d’une nouvelle langue.

La première piste est celle suivie par Eric Hawkin dans les années 1980, en Grande Bretagne : il propose l’intégration dans le cursus scolaire d’une « matière-pont », lieu d’étude privilégié du fonctionnement des langues et du langage. Appelé « awareness of language » (« réflexion sur le langage »24 ou « prise de conscience méta-linguistique25 »), cette approche vise à établir des liens entre les différentes langues présentes à l’école, qu’elles soient spécifiquement enseignées comme l’anglais et les langues étrangères, ou non enseignées comme les « langues des communautés » (Hawkins, 1984, p. 4). Cette matière, conçue pour accompagner l’élève dans ses apprentissages langagiers présents et futurs, ne se substitue pas à l’enseignement spécifique de la L1 ou d’une L2. Il s’agit d’un programme complémentaire à l’étude de l’anglais et des LE qui entend apporter des solutions aux problèmes que rencontre l’institution scolaire anglaise au tournant des années 1980 (de Pietro, 2002, p.65) :

« les difficultés d’intégration et les échecs scolaires des élèves issus de la migration, celle des élèves anglophones dans l’apprentissage de langues étrangères et celles de tous les élèves en anglais, attribué au niveau trop limité de leurs capacités langagières ».

Les constats d’Hawkins (1992, p. 42) concernant les lacunes dans la formation linguistique des élèves sont les mêmes que ceux que nous avons faits en 3.1.4.

24Traduction de « Awareness of Language » par Hawkins, 1992, p.41

38 « (…) la plupart de nos élèves quittent l'école sans être conscients du rôle capital joué par le langage. Ils étudient de près le fonctionnement de l'univers physique, chimique, biologique ainsi que d'autres disciplines difficiles. Mais les questions linguistiques importantes qui ne sont jamais abordées dans le programme traditionnel forment malheureusement une liste fort longue ».

Parmi ces questions, Hawkins cite, par exemple, l’origine du langage, la différence entre le langage parlé et le langage écrit, l’évolution des langues, etc. et il expose que l’objectif du programme est de « redonner une place importante aux stratégies «d'apprendre à apprendre» les langues ; dans ce but, (a) Le programme offre à ceux qui en ont besoin une « formation de l'oreille» continue et progressive (b) Il élabore une propédeutique à l'enseignement des langues vivantes à l'école élémentaire qui vise, selon l'expression d'Albane Cain de l'INRP (citée dans C.LUC, 1992), à développer chez les élèves une plasticité d'accueil chez les élèves aux langues étrangères ».

Concrètement, les activités élaborées mobilisent « des capacités peu exercées habituellement, telles que l'observation, l'analyse, la comparaison, qui sont travaillées sur des matériaux provenant de langues diverses et nombreuses, mais aussi de systèmes sémiotiques différents » (de Pietro, 2002, p.166).

L’idée d’une matière-pont pose la question de son articulation avec les enseignements spécifiques d’une langue en particulier. Ils doivent être envisagés comme complémentaires l’un de l’autre, la réflexion sur le langage devant même précéder l’apprentissage spécifique d’une langue :

« on considère qu’avant, et en même temps, que s’effectue le travail sur les langues, scolaires, familiales, ou bien étrangères, et le passage à l’écrit dans les unes comme dans les autres, il est nécessaire d’amener l’apprenant à s’interroger sur la spécificité et l’originalité de la communication humaine, en développant une réflexion sur le langage et, de manière plus spécifique, sur les langues et les cultures ». Moore (1995, p. 26)

A la suite d’Hawkins, Louise Dabène évoque, en 1992, l’intérêt « d'une éducation au langage, transversale par rapport aux actuels contenus disciplinaires, et intervenant dès l'école élémentaire », qui reprend l’idée de mettre en comparaison des langues diverses :

« Les objectifs qu'on peut assigner à cette orientation éducative sont les suivants :

- éveiller la conscience métalinguistique de l'enfant par des activités portant à la fois sur la langue maternelle et sur diverses langues étrangères mises en confrontation,

- l'entraîner à jeter ainsi un regard distancié sur sa propre langue et à la relativiser,

- l'amener à la découverte d'autres modes d'expression, d'autres moyens de rendre compte de la réalité, qui ne constituent pas de simples calques de la langue maternelle,

- lui faire prendre, plus généralement, conscience du caractère à la fois arbitraire et systématique des faits de langue.

- prolonger dans le domaine culturel cette attitude d'ouverture linguistique pour développer un esprit de tolérance et d'accueil de l'autre ». (Dabène, 1992, p.17)

Les développements rapides qu’a connus le mouvement Language Awareness26 dans le monde francophone se sont aujourd’hui stabilisés sous l’appellation éveil aux langues et ont

donné lieu à des expérimentations d’envergure, notamment en Suisse autour du projet

26 La matière-pont « awareness of language » a donné naissance au British Language Awareness Movement (BALM), raccourci en « Language Awareness »

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EOLE (Education et Ouverture aux Langues à l’Ecole, Perrégaux et al., 2003) et dans divers pays européens dans le cadre des projets EVLANG et Janua Lingarum (voir Candelier, 2003 a et 2003b). L’éveil aux langues a pour finalité de « contribuer à la construction de sociétés solidaires, linguistiquement et culturellement pluralistes » (Candelier & Macaire, 2008) et diversifie les langues à l’étude, qui ne se limitent pas aux langues présentes à l’école.

« Selon la définition qui a été donnée de l’éveil aux langues dans le cadre des projets européens qui ont

permis de le développer plus largement, « il y a éveil aux langues lorsqu’une part des activités porte sur des langues que l’école n’a pas l’ambition d’enseigner ». Cela ne signifie pas que la démarche porte uniquement sur ces langues. Elle inclut également la / les langue(s) de l’école et toute langue autre en cours d’apprentissage. Mais elle ne se limite pas à ces langues «apprises». Elle intègre toutes sortes d’autres variétés linguistiques, de la famille, de l’environnement … et du monde, sans en exclure aucune ». (CARAP, 2010, p.6)

Les buts de l’éveil aux langues prolongent ceux du Language Awareness. Ces buts sont les

suivants :

« - le développement de représentations et attitudes positives : 1) d’ouverture à la diversité linguistique et culturelle ; 2) de motivation pour l’apprentissage des langues (développement des

attitudes ou savoir-être) ;

- le développement d’aptitudes d’ordre métalinguistique / métacommunicatif (capacités d’observation et de raisonnement) et cognitif facilitant l’accès à la maîtrise des langues, y compris à celle de la ou des langues de l’école, maternelle(s) ou non (développement des aptitudes ou savoir- faire) ;

- le développement d’une culture langagière (= savoirs relatifs aux langues) qui 1) sous-tend ou

soutient certaines composantes des attitudes et aptitudes ci-dessus ; 2) constitue un ensemble de références aidant à la compréhension du monde multilingue et multiculturel dans lequel l’élève est amené à vivre. » (Candelier, 2003a, 2003b)

Nous reviendrons sur ces buts dans la section 3.3, consacrée à l’évaluation des compétences métalinguistiques à travers le programme EVLANG. Avec la didactique intégrée des langues et l’intercompréhension que nous avons déjà évoquées en 1.4, l’éveil aux langues forme un ensemble conceptuel majeur auquel nous consacrerons le chapitre suivant, les approches plurielles, dont nous retiendrons pour l’instant qu’il s’agit d’« approches

didactiques mettant en œuvre plus d’une langue ». (Candelier, 2002).

2.2.1.2 La comparaison des langues dans l’articulation L1/L2

Le second cadre fondateur de la comparaison des langues recentre les enjeux comparatifs sur le domaine de l’étude de langue, dans le paysage francophone. Elle est particulièrement étudiée du côté de la didactique du français, qui voit en l’étude précoce d’une langue étrangère (au niveau du primaire) une occasion à ne pas manquer :

« L’apprentissage d’une ou plusieurs langues étrangères peut leur permettre de faire un pas de côté pour questionner le système des marques morphologiques en français : par exemple catégorisation nom / verbe, relation sujet / verbe, accords en nombre. Ces notions, qui sont précisément au cœur des programmes 2002 d’ORL (Observation réfléchie de la langue), peuvent faire l’objet d’observations comparatives ». (Garcia-Debanc et al., 2004, p.81)

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Cette proposition est une illustration de ce qui peut se faire en didactique intégrée des langues au niveau micro de l’intégration des enseignements de langues tel que nous l’avons défini dans le chapitre 2. On se situe là spécifiquement dans la perspective de l’enseignement du français, où l’on compte tirer profit de l’étude d’une deuxième langue pour travailler des faits de langue en L1.

« En tant que didacticiennes du français, nous nous situons ici plus particulièrement du point de vue des apprentissages de la langue de scolarisation, pour essayer de montrer comment la comparaison de langues peut constituer une occasion favorable au développement d’attitudes de curiosité par rapport au fonctionnement de la langue française et, sous certaines conditions, peut être l’occasion de construire des connaissances utiles pour la maîtrise de la langue de scolarisation ». (ibid, p.83)

A cet égard, l’introduction dans les curriculums d’une première langue étrangère, généralisée progressivement dans l’enseignement primaire jusqu’à être rendue obligatoire (aujourd’hui à partir du Cours Préparatoire (1ère année de primaire) : loi d'orientation et de programmation pour la refondation de la République du 8 juillet 2013), a été saluée comme un pas en avant chez les didacticiens, (Ducancel, 1992), qui ont pu y voir une opportunité de renouveler la question de la réflexion sur la langue en français. Ce renouvellement se situe à la fois dans la façon d’envisager la langue elle-même, dans « une perspective élargie de la grammaire » et dans ses interactions avec l’environnement potentiellement plurilingue (de Pietro, 2003, p.162). L’envergure de la recherche est telle que nous ne pourrons pas procéder à une revue détaillée. Nous renvoyons à la synthèse que propose Ulma (2009, p.115).

Dans le contexte de l’étude de la L1, les enjeux métalinguistiques sont, selon Dabène (1992, p.16), de « faire réfléchir » l’élève « sur des phénomènes dont celui-ci possède une connaissance intuitive ». L’introduction d’une LE permet de remettre en question le « bain métalinguistique » monoligue tel que le décrivent Castellotti et Moore (2005, p.107), avec les failles qu’il comporte:

« Ce « bain métalinguistique », dans lequel les enfants sont immergés tout au long de l’école élémentaire et du collège, devrait logiquement les amener à adopter des conduites réflexives vis- à- vis des apprentissages langagiers en général et à transférer le savoir ainsi acquis lors de l’accès à d’autres langues. Tout se passe comme si, au contraire, cette culture métalinguistique, construite le plus souvent au seul contact et sur le seul appui de la langue considérée comme maternelle (donc « naturelle » et « allant de soi »), les enfermait dans un rapport unilatéral à celle-ci et les empêchait d’élaborer des stratégies globales et transversales ». (Castellotti et Moore, 2005, p. 107)

Actuellement, en France, les prescriptions institutionnelles concernant l’étude de la langue vont dans le sens d’une réflexion métalinguistique sur le français ouverte à d’autres réalités linguistiques. Les programmes de 2002 ont été novateurs en affirmant que « l’observation comparée de quelques phénomènes simples dans des langues différentes (dont la langue française) crée chez les élèves une distance qui leur permet d’être plus sensibles aux réalités grammaticales et renforce la maîtrise du langage ». Les nouveaux programmes de cycle 3 redéfinis, entrant en vigueur en 2016, affirment quant à eux que l’étude de la langue doit permettre aux élèves de « réfléchir sur son fonctionnement, en particulier pour en comprendre les régularités et assurer les principaux accords orthographiques ». La comparaison des langues est explicitement mentionnée : « En français, en étude de la

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langue, on s'attache à comparer le système linguistique du français avec celui de la langue vivante étudiée en classe» (BO spécial n°11, 25 novembre 2015).

Du côté de l’enseignement des langues étrangères, les enjeux de la mise en relation L1/L2 sont différents. Comme le note Dabène (1992, p.16), à l’inverse de ce qui se passe en L1, où le travail de réflexion métalinguistique peut constituer « une activité isolable, doté de sa propre valeur formatrice » (ibid, p.16), en LE, « d’une part la réflexion métalinguistique ne s’appuie sur aucun acquis intériorisé préalable, d’autre part elle ne trouve sa justification qu’au niveau de la production langagière de l’apprenant dont elle ne saurait être dissociée » (ibid, p.16). Comme pour l’enseignement du français, la mise en place de pratiques comparatives pose la question de la réflexion sur la langue, avec deux questions sous-jacentes qui font toujours débat en didactique des langues 1) Quelle place pour la description explicite du fonctionnement de la langue cible ? 2) Quelle place pour la L1 dans cette description ?

En didactique des langues, ce qui joue en faveur d’une mise en relation de la L2 avec la L1 se situe notamment dans la dynamique des questionnements autour du transfert des compétences métalinguistiques chez l’élève. La didactique des langues est amenée à reconsidérer les potentialités de l’analyse contrastive et à en proposer des nouvelles orientations (analyse contrastive « revisitée », Dabène, 1996). On cherche là, principalement, à rendre l’apprenant conscient de la distance qui existe entre son propre système et le système-cible, ce qui modifie la place faite à la L1 dans l’enseignement/apprentissage :

« Il ne s’agit alors plus, ainsi que le préconisait Lado27, d’éviter la langue maternelle dans l’acte didactique mais au contraire de la poser comme objet de comparaison avec la langue d’apprentissage ». (Desoutter, 2005, p.121).

On considère, également, que les compétences métalinguistiques héritées de la L1 deviennent précieuses pour l’acquisition d’une seconde langue, en dotant les élèves « d’un certain nombre d’outils heuristiques à caractère métalinguistique utilisables tout au long du parcours de déchiffrage ». (Dabène, 1996, p. 397). C’est ainsi qu’Audin (2004) appelle de ses vœux une « dialectique métalinguistique pertinente dès le cycle 3 » à travers l’apprentissage d’une langue étrangère, tandis que Deyrich et Olivé (2004), questionnant les articulations entre le français et les langues étrangères et régionales, explorent la notion de transférabilité des apprentissages à l’école.

Besse (2005), à partir d’un questionnement sur les interférences de la L1 sur la L2 au niveau du métalangage, va dans le même sens qu’Audin (2004) en affirmant l’intérêt de développer une étude comparative de la terminologie grammaticale avec la L1 lors de l’apprentissage de la L2. La nécessité de ne pas négliger le fait que les élèves « arrivent déjà avec une certaine culture grammaticale dans leur langue maternelle » (Schweitzer et Simonnot, 1920 p.144) est ici une idée forte, que Besse propose d’exploiter, en se fondant sur l’idée de Lamiroy selon laquelle « la confrontation de terminologies grammaticales peut avoir l’effet d’une véritable heuristique » (Lamiroy, 2002, p.65).

Aujourd’hui, les programmes scolaires pour l’enseignement des langues vivantes ou régionales pour le cycle 3 exposent qu’ « un début de réflexion sur le fonctionnement de la

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langue permet aux élèves d'acquérir une certaine autonomie dans la réception et dans la production et renforce la maîtrise du langage » (BO spécial n°11, 26 novembre 2015). Nous proposons dans le tableau suivant une mise en perspective des dernières instructions officielles (2002, puis 2015) concernant l’enseignement du français et des langues vivantes/régionales

Français, cycle 3 Langues vivantes ou régionales, cycle 3 BO spécial

n°1, 14

février 2002

« On ne saurait apprendre à maîtriser le langage, en particulier écrit, sans une observation réfléchie de la langue française (grammaire, conjugaison, orthographe, vocabulaire) ».

« L'enseignement des langues étrangères ou régionales a été rapproché de cette découverte du fonctionnement de la langue française » BO spécial n°11, 26 novembre 2015)

« Le cycle 3 marque une entrée dans une étude de la langue explicite, réflexive, qui est mise au service des activités de compréhension de textes et d'écriture » ; « l’étude de la langue « permet aux élèves de réfléchir sur son fonctionnement, en particulier pour en comprendre les régularités et assurer les principaux accords orthographiques »

« En français, en étude de la langue, on s'attache à comparer le système linguistique du français avec celui de la langue vivante étudiée en classe » (« Comprendre, s’exprimer dans une langue étrangère ou régionale », domaine 1 Les langages pour penser et communiquer ) »

« Un début de réflexion sur le fonctionnement de la langue permet aux élèves d’acquérir une certaine autonomie dans la réception et dans la production et renforce la maîtrise du langage »

Tableau 1 Les programmes 2002 et 2015 pour le français et pour les langues vivantes ou régionales

De ces instructions, nous retenons que c’est à travers l’étude comparée de leurs fonctionnements respectifs que français et langues régionales sont aujourd’hui rapprochés. C’est, précisément, ce dont il est question dans l’expérimentation menée par Fabre et Lobier (1992) du groupe INRP de Nîmes, dans le cadre d’une situation d’enseignement de l’occitan au cycle 2. Les auteurs montrent comment les élèves se sont construit, à travers la comparaison avec le français, des savoirs « expérientiels, opératoires et conceptuels » utiles pour l’entrée dans l’écrit de la LM et pour l’apprentissage d’une troisième langue au cycle 3. Dans un cas comme dans l’autre (articulation L1/L2 ou discipline à part entière), la transversalité dans l’approche des langues en jeu est indissociable d’une collaboration entre les enseignants en charge de disciplines linguistiques. Ainsi, dans le cas spécifique de la mise en relation L1/L2, le rapprochement entre les deux langues ne doit en aucun cas se faire dans une démarche isolationniste : il ne s’agit pas pour l’enseignant de L1 de considérer simplement la L2 comme une ressource linguistique utile, mais de développer une collaboration avec l’enseignant de cette langue, autour d’objectifs communs. L’un d’entre eux, sans doute le plus remarquable par sa portée englobante, est celui proposé par Dabène (1992) :

43 « (…) ce rapprochement - s'il est appelé à prendre corps à travers des réalisations pédagogiques - doit être mis en œuvre, à notre sens, sous forme d'activités transversales englobant l'apport de toutes les disciplines langagières et se donnant pour but un objectif qui leur est commun, à savoir le développement des compétences métalinguistiques, quelles que soient, par ailleurs, les questions que pose ce type de compétences par rapport à l'apprentissage (GOMBERT, 1990) ». (Dabène, 1992, p.14)

Aujourd’hui, qu’on recommande l’appui sur la L1 dans l’apprentissage de la L2 (en didactique des langues, ou que l’on reconnaisse l’intérêt de confronter les élèves à des codes étrangers pour le renforcement de la compréhension du fonctionnement de la L1 (en didactique du français), force est de constater que les compétences métalinguistiques occupent une place centrale dans la démarche. Outils heuristiques susceptibles de servir en L1 comme en LE, qui plus est transférables d’une langue à l’autre, on sait, désormais, qu’il faut compter avec elles, et sur elles, dans l’enseignement des langues.