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CHAPITRE 8 ANALYSE DES CARACTERISTIQUES GENERALES DES SEANCES DE COMPARAISON

8.3 Classe B

Les neuf séances filmées dans la classe B (collège) interviennent dans l’emploi du temps des élèves en tant qu’heure de « Familhas de lengas », dont nous avons parlé en tant que ressources pour la comparaison des langues (cf chapitre 4). En tant que matière, « Familhas de lengas » vise l’intégration curriculaire des langues du collège à travers leur comparaison. Par langues du collège, il faut entendre l’occitan et le français, mais aussi les deux LE apprises dès la sixième : l’anglais et l’espagnol. Il s’agit là d’une « base » de quatre langues, sur laquelle viennent se greffer d’autres langues, en fonction des objectifs. L’enseignante qui est en charge de ce cours enseigne également l’anglais et la littérature, à la fois en occitan et en français. Elle conçoit cette matière dans la transversalité avec les autres disciplines du programme. Pour cette raison, elle n’utilise pas les outils du fichier Familhas de lengas (cf. chapitre 4) : elle dispose d’un archivage de supports authentiques en lien avec les projets développés par ailleurs en sciences, en arts et qui a des ramifications avec tout le reste du programme et des matières étudiées.

Code SEANCE CONTENUS LANGUES IMPLIQUEES

DANS L’ETUDE B-1 Familhas

de lengas Corpus « joyeux Noël ». Identifier des familles de langues, Identifier les mots « joyeux » et « Noël »

Faire des hypothèses sur le fonctionnement des langues du corpus : place de l’adjectif et du nom.

langues multiples (40)

B-2 Familhas de lengas

Corpus « Bonne année » et « Joyeux Noël » Mise en commun des hypothèses faites en B1 et vérification de ces hypothèses.

Langues multiples (40)

B-3 Familhas de lengas

Suite de la validation collective des hypothèses formulées dans les séances précédentes

Langues multiples (40) B-4 Familhas

de lengas Corpus bilingue « Orphée et Eurydice » Relier mots/expressions dans les deux langues Comparaison occitan/latin

Latin / occitan

B-5 Familhas de lengas

« Familhas de mots » Corpus de mots latins Identifier les racines des mots

Construire un corpus de mots dérivés à partir de racines latines

latin/français/ occitan/ espagnol/anglais

B-6 Familhas

172 Identification des catégories grammaticales sur les

corpus de mots dérivés B-7 Familhas

de lengas

Continuité de la séance précédente.

Sur corpus de mots dérivés, identifier le procédé de dérivation par classe grammaticale et par langues (isoler racine + suffixe)

Français/occitan/ espagnol/anglais

B-8 Familhas

de lengas Découverte de l’italien (1) Compréhension écrite : le bowling Italien B-9 Familhas

de lengas Découverte de l’italien (2) Compréhension orale (vidéo) : recette de cuisine Italien

Tableau 54 Caractéristiques générales de la classe B

L’enseignante privilégie le fait de pouvoir mener un même travail sur plusieurs séances. Pour cette raison, on distinguera deux sous-groupes de séances, qui forment, des ensembles distincts d’un point de vue didactique. :

- séances B1, B2 et B3 : une approche de type éveil aux langues

- séances B4, B5, B6, B7, B8 et B9 : découverte de nouvelles langues, le latin et l’italien

8.3.1 Une approche des langues de type Eveil aux langues

Dans les séances B1, B2 et B3, les élèves travaillent sur les façons de souhaiter « Joyeux Noël » et « Bonne année » dans 40 langues (dont l’occitan, mais pas le français). Ils ont une consigne : identifier, dans chaque langue, l’adjectif et le nom.

« (…) l’objectif est pour aujourd’hui de remettre à plat les hypothèses que les élèves avaient construites dans l’élucidation des langues et à savoir dans l’élucidation des mots et des mots nadal

[oc] noël [fr]et l’adjectif qui était joint et donc ils avaient tu t’en souviens ils avaient euh échafaudé

plein d’hypothèses euh sur la taille des mots citer lister toutes les hypothèses et les vérifier dans une seconde situation qui est très semblable à la précédente mais pas sur les mêmes expressions qui est pour souhaiter la bonne année » (Entretien ante séance B2)

Les élèves travaillent en groupes, dans une démarche hypothético-déductive qui va les conduire, sur trois séances, à formuler différentes hypothèses sur le fonctionnement des langues. Dans la séance B1, ils n’ont que le corpus plurilingue « Joyeux Noël », et, à partir de B2, l’enseignante leur donne le corpus « Bonne année » afin de pouvoir étayer leurs hypothèses. Toute la démarche repose sur la comparaison des langues du corpus entre elles : en comparant les multiples signifiants du corpus, ils abordent différents questionnements propres aux langues et au langage : ici, il s’agit principalement de la place des mots et des relations signifiants/signifié. Dans sa mise en œuvre, nous voyons de nombreux points communs entre ce travail et les activités propres à l’éveil aux langues, comme l’indique le tableau ci-dessous.

173 EMPAN

Contenus linguistiques Langues

TYPE 4 Large Large

L’empan en termes de contenus est large car l’exploration des élèves les amène à explorer divers aspects du fonctionnement des langues et du langage. L’empan linguistique est également large puisque les élèves travaillent sur un corpus multilingue constitué de langues inconnues des élèves.

Tableau 55 Classement des situations comparatives pour les séances de type Eveil aux langues

8.3.2 Découverte d’une LE

On distingue, dans le deuxième sous-groupe de séances, deux approches différentes dans la façon de mener la découverte de nouvelles langues. Une approche par l’écrit dans l’esprit grammaire-traduction pour le latin, et une approche communicative pour l’italien

8.3.2.1 Approche par l’écrit dans l’esprit grammaire-traduction

Les séances B4, B5, B6 et B7 illustrent la volonté de l’enseignante de travailler en lien avec les autres disciplines, puisque les séances consacrées à la découverte du latin sont menées en lien avec ce qui est fait, au même moment, en littérature. Elles forment un ensemble cohérent, dans lequel on peut cependant isoler une phase centrée sur la compréhension d’un texte en latin traduit en occitan (B4) suivi d’un prolongement dans laquelle une analyse sur la formation des mots est menée (B5, B6, B7).

Dans la première séance, les élèves essaient d’apparier les mots ou les groupes de mots en latin et en occitan.

« Alors c’est à la demande des enfants que je leur ai proposé un texte dans le texte latin de + Virgile parce que nous avons dans le cadre du programme de littérature nous avons travaillé le mythe d’Orphée (…) donc je leur ai proposé ça avec une traduction occitane et ils ont commencé eux-mêmes à chercher quel était le mot occitan qui correspondait au mot latin et euh donc voilà on va on a juste juste fait quelques minutes dessus et on va vraiment faire une séance entière là-dessus là aujourd’hui » (Entretien ante séance B4)

Dans cette séance, les deux langues, latin et occitan, sont, d’emblée, mises en regard et les élèves, placés dans une démarche hypothético-déductive, vont laisser libre cours à leurs hypothèses concernant leurs choix pour apparier les mots ou les groupes de mots, en explorant continuellement la forme et le sens. Cette recherche les amène à questionner divers aspects du fonctionnement des langues et du langage, puisqu’ils se rendent compte que les deux langues ne restituent pas le sens de la même manière (nombre de mots, voie passive/voie active…).

La situation comparative présente des points communs avec B1, B2 et B3, puisqu’elle repose sur la confrontation de tous les signifiants du corpus entre eux pour répondre à une consigne. Elle relève, également, d’une configuration de type grammaire-traduction, à la fois par la nature du support de travail : un texte latin traduit en occitan, et par l’exploitation qui va en être faite la suite, comme nous allons le voir. Mais il ne s’agit là que d’une tendance car, d’une part, ce ne sont pas les élèves qui ont effectué la traduction et, d’autre part, l’enjeu ne porte pas sur l’apprentissage de la langue cible. Il s’agit seulement de se centrer sur quelques aspects de son fonctionnement pour en découvrir le prolongement

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dans d’autres langues connues des élèves. On proposera donc un premier classement pour cette seule séance, qu’on distinguera des trois suivantes.

EMPAN

Contenus linguistiques Langues

TYPE 3 Large Restreint

Les contenus abordés à travers la mise en regard du texte bilingue sont larges puisque l’exercice d’appariement des mots/groupes de mots implique des questionnements portant sur plusieurs aspects du fonctionnement du latin et de l’occitan. L’empan linguistique est restreint dans la mesure

où seules deux langues sont mobilisées.

Tableau 56 Classement des situations comparatives dans la séance de découverte du poème bilingue latin-occitan

Dans les séances B5, B6 et B7, la compréhension du texte en latin est évacuée, et l’enseignante passe à une étape d’analyse morphologique sur la langue : une fois les élèves familiarisés avec les vers latins sur lesquels ils ont travaillé l’enseignante met en place une situation dans laquelle ils vont être amenés à explorer le principe de la formation des mots par suffixation. D’abord, ils doivent apprendre à identifier le radical des noms latins : « (…) je leur demanderai de choisir quelques mots deux trois mots et d’identifier la racine du mot la racine latine et sur cette racine voir ce que l’occitan et le français ont construit comme mots c’est-à-dire de de bâtir une dérivation euh une dérivation voilà et dans les deux langues (Entretien ante séance B4)

Puis, dans une seconde étape, ils construisent des dérivations, en intégrant une troisième langue, le castillan :

« (…) parmi les mots les plus significatifs75 je voilà j’ai j’ai fait une liste j’ai sélectionné quelques mots et je vais leur demander de à partir de ces racines-là de bâtir des groupes des des familles de mots c’est-à-dire d’identifier la racine et de construire différents mots euh de faire une dérivation en fait en occitan en français et en castillan voilà c’est-à-dire par exemple à partir de palmas [lat] le mot

latin euh quels sont tous les mots français qui peuvent dériver de cette racine tous les mots occitans et tous les mots castillans et ensuite on verra la comparaison que nous pouvons en faire dans une séance future »

Enfin, dans une dernière étape, d’autres langues sont intégrées, dont l’anglais, qui n’est cependant pas mentionné dans l’extrait ci-dessous :

« d’abord un premier petit temps où euh ils vont euh peaufiner leurs dérivations qui avaient déjà été très bien largement entamées la dernière fois peaufiner et peut-être les ouvrir les enrichir donc j’ai amené d’autres dictionnaires pour aller peut-être un petit peu plus vite dans l’élargissement à toutes les autres langues et ensuite on va mettre ça en commun (…) on va essayer de voir sur les dérivations construites euh à partir à partir des natures des mots quelles sont les suffixations qui servent à former quoi voilà c’est-à-dire on fait le relevé de tous les noms communs dans les toutes les langues et on voit ce qui peut être -eur en français qu’es-ce que c’est en occitan on va voir que

c’est –or et euh voilà –oro en italien euh on voit des choses comme ça voilà j’aimerais bien euh

arriver à mettre en relief la suffixation de la substantivation (Entretien ante séance B6)

Ces extraits révèlent une situation intéressante, et, somme toute, originale : le fait que les élèves aient eux-mêmes construit le corpus à partir duquel la comparaison des langues peut

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se mettre en place. En effet, ce n’est qu’après avoir construit un corpus de mots dérivés dans plusieurs langues, à partir du latin, qu’ils ont sous les yeux un ensemble de signifiants (des mots), dont la confrontation met en évidence des principes de formation communs. La démarche consiste donc à partir d’une langue inconnue des élèves pour mettre en évidence un principe de fonctionnement à la fois commun à cette langue et aux langues connues d’eux, car étudiées en tant que matière par ailleurs (le français, l’occitan, le castillan). Dans la mesure où l’activité est menée sur des langues présentes dans le curriculum (français, occitan, castillan et anglais), on a donc affaire à une démarche qui consiste à rapprocher les langues enseignées au sein d’une même réflexion tout en les rattachant, d’un point de vue épistémologique, à leur langue commune, le latin.

EMPAN

Contenus linguistiques Langues

TYPE 1 Restreint Restreint

L’empan en termes de contenus est restreint car ceux-ci portent uniquement sur de la morphologie lexicale. L’empan linguistique est considéré comme restreint dans la mesure où il implique les

langues connues des élèves : langues de scolarisation (occitan et français) et les deux langues vivantes étudiées par ailleurs (espagnol et anglais).

Tableau 57 Classement des situations comparatives pour les séances sur les dérivations

8.3.2.2 Approche communicative en LE

Nous avons déjà, pour la classe A, évoqué le cas des séances portant sur la découverte d’une LE dans une approche communicative : l’élève est placé dans une situation où il reçoit des données dans la langue cible (à l’oral ou à l’écrit), qu’il essaye de comprendre. Ceci n’est pas en soi, une situation comparative, dans la mesure où son attention est centrée sur l’accès au sens et non sur l’observation simultanée de plusieurs langues. Cependant, la comparaison de langues entre elles a des chances de survenir puisque dans cette quête du sens, les élèves peuvent être amenés à faire appel à leurs connaissances dans d’autres langues. A condition qu’elles soient verbalisées, ces démarches peuvent donner lieu à des comparaisons entre les langues mobilisées. C’est ce qui est prévu par l’enseignante de la classe B pour la découverte de l’italien :

(…) c’est un travail sur la langue italienne (…) et donc l’objectif c’est de voir comment ils mobilisent (…) leurs savoirs en occitan pour rentrer dans cette langue nouvelle que nous n’avons jamais abordée encore vraiment à proprement parler depuis le début de l’année juste (…) et comme on avait déjà pas mal travaillé sur le latin c’est une suite qui me semblait intéressante voilà donc comment ils mobilisent leurs savoirs en occitan pour rentrer dans cette langue et puis comment ils arrivent à mutualiser tout ça (…) (Extrait entretien ante B8)

Comme l’enseignante de la classe A, celle de la classe B envisage le bilinguisme occitan-français des élèves comme un atout. Elle compte, par ailleurs, sur leurs connaissances, toutes récentes, du latin, pour les aider à la compréhension de l’italien, mais elle n’envisage pas l’étude de faits de langue en particulier. Les séances B8 et B9 se rapprochent également de la séance A5, dans la mesure où l’enseignante aborde la langue dans une perspective

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communicative : entrée dans la langue à travers des documents audio et des supports écrits monolingues.

EMPAN

Contenus linguistiques Langues

TYPE 3 Large Restreint

L’empan en termes de contenus est large car la langue italienne peut être abordée dans toutes ses dimensions. L’empan linguistique est, quant à lui, restreint car l’enseignante attend des élèves qu’ils mobilisent leurs savoirs dans les langues qu’ils connaissent, qu’elles soient étudiées régulièrement ou

croisées à l’occasion d’une découverte (latin).

Tableau 58 Classement des situations comparatives pour les séances d’italien

Les séances observées dans la classe B montrent une grande diversité dans les démarches. Au-delà de la distinction générale faite au préalable entre les séances ayant pour objet la diversité linguistique et celles ayant pour enjeu la découverte d’une langue inconnue, on se rend compte que, dans cette dernière, des approches très variées sont mises en œuvre, combinant différemment l’importance donnée à l’accès au sens, la façon d’accéder à celui-ci et la mise en place de moments réflexifs d’observation des langues.

Séance concernée Type de situation comparative

Séance de type éveil aux langues Type 4 Séance de découverte du poème bilingue

latin-occitan Type 3

Séance sur les dérivations Type 1

Séance de découverte de l’italien Type 3

Tableau 59 Synthèse des situations comparatives pour la classe B