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LES ENTREPRISES PRIVEES : PARTIES PRENANTES DE L’ORGANISATION DU CLUSTER PORTUAIRE

4.1.1. Définir l’« entreprise portuaire »

Définir ce que nous appelons « entreprise portuaire » n’est pas tâche facile. D’ailleurs « on a du mal à identifier ce que représentent globalement les activités économiques liées à la mer » (Desclèves, 2012). Jacques Guillaume (2014) parle de l’Etat comme « entrepreneur portuaire ». La notion d’« entreprise portuaire » est donc délicate à cerner. Nous faisons une nette distinction entre l’appellation utilisée par Jacques Guillaume et notre objet d’étude qui s’intéresse aux entreprises privées localisées sur la zone portuaire. En ce sens, nous avons fait le choix de nous intéresser aux entreprises localisées au sein de la circonscription portuaire car dans l’optique d’une étude des modes de gouvernance portuaire, nous avons considéré que leur localisation au sein du périmètre administré par l’autorité portuaire devrait leur permettre d’intégrer le processus de gouvernance.

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La catégorie des entreprises localisées sur la circonscription portuaire est très hétérogène. On y trouve plusieurs sous-catégories : les entreprises locales ou internationales, les sièges sociaux ou les établissements, les entreprises liées à la production industrielle ou les entreprises liées au secteur maritime et portuaire, c’est-à-dire typiquement issues de l’activité maritime et portuaire. Par ailleurs, le port regroupe un nombre très important de métiers liés directement au transport maritime reposant soit sur le service aux navires soit sur le service à la marchandise ou encore des métiers indirectement liés à l’activité maritime et portuaire mais qui s’agglomèrent dans les ports du fait des externalités de localisation. Toutes ces entreprises font donc partie du cluster portuaire au sens large. Peter De Langen a effectué une classification des activités du cluster portuaire :

Figure 34 – Activités comprises dans le cluster portuaire

Composants du cluster Activités

Manutention de fret

Chargement, déchargement et activités de transbordement

Pilotage Ingénierie portuaire

Transport

Services de transport Services de transport intérieur

Services de sauvetage Courtiers maritimes Transport ferroviaire Transport par pipeline Services de transport routier

Logistique

Intermédiaires de transport (transitaires et agents maritimes)

Entreposage et stockage Services de conseil en logistique

Fabrication

Raffinage de pétrole Meunerie Fabrication de coke

Fabrication de produits chimiques de base Autres fabrications de produits chimiques

Production de fer et d’acier Construction et réparation navale Fournisseurs spécialisés aux industries

portuaires

Commerce

Intermédiaires commerciaux dans le pétrole, le carburant et les produits chimiques Intermédiaires commerciaux en métaux,

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Grossistes en carburant, céréales, métaux et huiles minérales

Source : De Langen, 2004

Au Havre, les organismes ayant réalisé des statistiques portuaires tels que l’INSEE et le GPMH ont classifié les activités du port en deux catégories : le cluster maritime et portuaire et le cluster industrie et service. Il s’agit d’une classification distinguant le passage de la marchandise et la production reprenant ainsi l’idée de ZIP. Pour parler du cluster portuaire au sens large, nous choisissons de garder cette nomenclature car elle permet d’englober l’ensemble des activités qui se retrouvent dans les ports de commerce de taille internationale dont le fonctionnement général est approximativement le même.

Concernant la définition de l’entreprise portuaire, il faut mobiliser plusieurs variables. Pour les économistes, l’entreprise est une « unité économique et juridique produisant des biens et des services pour les vendre sur un marché afin de réaliser un bénéfice » (Capul, Garnier, 2013). L’aspect juridique définit le statut de l’entreprise : entreprise individuelle, société anonyme ou groupe par exemple. L’aspect économique étudie la taille de l’entreprise et leur concentration notamment. L’entreprise portuaire fait intervenir une dimension géographique dans l’étude de la structure économique des ports. Jacques Guillaume (2014) propose une distinction entre la définition de l’entreprise de manière générale et la définition du port de commerce. Pour lui, une entreprise est « une organisation juridiquement indépendante, théoriquement maîtresse de sa destinée, et tenue vers la production de biens et de services aisément identifiables. Rien de cela n’existe dans l’acception la plus courante du port de commerce qui est à la fois une entité gestionnaire, une somme d’activités et de services rendus par une multitude de prestataires aux formes juridiquement diverses ». L’activité économique du port résulterait donc des entreprises privées qui s’y agglomèrent. Leur organisation horizontale en réseau au sein de la chaîne logistique globale leur assigne le rôle de maillon.

Dans une économie de marché, la production est principalement issue de l’activité des entreprises. Il en existe cependant une très grande diversité, du petit commerce aux grandes sociétés employant de très nombreux salariés. Une entreprise est une unité de production qui vend ses produits sur un marché. Elle produit donc des biens et des services marchands. En revanche, une administration est une unité de production de services non marchands, ce n’est donc pas une entreprise. Il ne faut pas confondre, enfin, entreprise et

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établissement. Une entreprise peut être constituée d’unités situées à des endroits différents (usines, ateliers, siège social, agence commerciale, etc.). Pour l’INSEE, « l’établissement est une unité de production géographiquement individualisée, mais juridiquement dépendante de l’entreprise. […] L’établissement, unité de production, constitue le niveau le mieux adapté à une approche géographique de l’économie. […] La population des établissements est relativement stable dans le temps et est moins affectée par les mouvements de restructuration juridique et financière que celle des entreprises ». La plupart des entreprises localisées dans les ports sont des établissements.

Nous définissons l’entreprise portuaire comme étant une entreprise travaillant au sein du port, utilisant les infrastructures portuaires (chenaux d’accès, routes, quais, concessions, bassins, écluses ou terminaux par exemple) et les services portuaires liés à la sûreté (douane) ou au remorquage (capitainerie) et dont la majorité des activités est liée au trafic maritime et portuaire d’où un intérêt de localisation. Il s’agit logiquement des entreprises exerçant leur activité sur le territoire administré par l’autorité portuaire, c’est-à-dire ayant une présence « physique », bien que leurs bureaux administratifs puissent être localisés hors de la circonscription portuaire. Nous précisions que nous comptons dans la catégorie entreprises portuaires celles liées à l’industrie, dont leur proximité géographique avec la mer leur permet de développer leurs activités.

Ce cadre dressé, nous comprenons que notre objet d’étude est très hétérogène. Avant de décrypter la composition du secteur des entreprises privées dans les ports, nous proposons de montrer les différences de structures économiques en présentant les trafics portuaires dans la mesure où nous pensons que ceux-ci montrent la composition du secteur privé dans les ports.