• Aucun résultat trouvé

LES ENTREPRISES PRIVEES : PARTIES PRENANTES DE L’ORGANISATION DU CLUSTER PORTUAIRE

4.2. Les clusters spécialisés : quelle plus-value pour les territoires portuaires ?

4.2.2. Le cluster pétrochimique : un cluster emblématique structurant

4.2.2.1. Quelques éléments comparatifs

Pour débuter notre analyse, nous présentons quelques éléments permettant de comparer l’activité dans le secteur pétrochimique des principaux ports de la rangée nord-ouest européenne. Pour cette comparaison s’appuyant sur des données quantitatives, nous avons utilisé le site web europétrole qui répertorie les sites pétroliers de production et de stockage à travers le monde ainsi que les données des autorités portuaires. Pour chaque port, nous détaillerons le nombre de raffineries et leurs capacités de production, les trafics de vracs liquides ainsi que les volumes par sous-catégories et pour finir les capacités de stockage dans ce secteur.

180 Figure 51

Cette carte localise les raffineries sur la rangée portuaire nord-ouest européenne et à proximité immédiate en spécifiant le nombre de barils de chaque raffinerie par jour. Aucune raffinerie ne ressort particulièrement en termes de nombre de barils. On note tout de même une concentration plus forte autour des ports d’Anvers et de Rotterdam.

Pour compléter cette carte, voici un tableau montrant les capacités de production des raffineries des ports du Havre, d’Anvers, de Rotterdam et d’Hambourg.

181

Figure 52 – Capacités de production des raffineries implantées dans les principaux ports de la rangée nord-ouest européenne (en millions de tonnes par an)

Le Havre Anvers Rotterdam Hambourg

BP - - 19 -

ExxonMobil - 13,5 11 -

Total 12 18 - -

Gunvor Petroleum - 6,5 5 - Hansen & Rosenthal - - - 15 Holborn Europa (Tamoil) - - - 5,2

Neste Oil - - 1 -

Shell - - 21 -

TOTAL 12 38 57 20,2

Source : www.euro-petrole.com, 2018 – Réalisation : Anne-Solène Quiec, 2018

Nous dénombrons une raffinerie au Havre dont la capacité de production est de 12 millions de tonnes par an (une autre, la raffinerie Exxonmobil de Gravenchon, se situe sur la commune de Lillebonne dans la circonscription portuaire de Rouen), trois à Anvers dont les capacités totales sont de 38 millions de tonnes par an, cinq à Rotterdam pour un total de 57 millions de tonnes et deux à Hambourg représentant 20,2 millions de tonnes par an.

Le port de Rotterdam est celui qui concentre le plus de raffineries et dont la capacité de production est la plus importante, suivi du port d’Anvers. A eux deux, Anvers et Rotterdam ont la capacité de produire 95 millions de tonnes par an. Les sites de transformation sont donc les plus nombreux dans ces deux complexes portuaires.

Intéressons-nous désormais aux trafics portuaires liés au secteur pétrochimique. L’activité liée à ce secteur est principalement comptabilisée dans la catégorie des vracs liquides. Sur le graphique présentant les trafics par type de marchandises, exposé précédemment, nous avions soulevé le pic d’activité du port de Rotterdam concernant les trafics de vracs liquides. S’agissant d’une explicitation des clusters spécialisés, il convient de revenir sur cet élément.

182

Figure 53 – Trafics des vracs liquides dans les ports du Havre, d’Anvers, de Rotterdam et d’Hambourg (en tonnes en 2017)

Sources : rapports d’activité des autorités portuaires, 2017 – Réalisation : Anne-Solène Quiec, 2018

En effet, le trafic de vracs liquides dans ce port est très nettement supérieur aux autres ports. Les trafics aux ports du Havre, d’Anvers et d’Hambourg peuvent être regroupés comme indiqué sur le graphique. Le Havre et Anvers ont des tonnages très proches. Ceux d’Hambourg sont relativement faibles.

Il convient de détailler la répartition de ces trafics totaux de vracs liquides par sous-catégories 0 50 000 000 100 000 000 150 000 000 200 000 000 250 000 000

183

Figure 54 – Volumes importés et exportés par sous-catégories de vracs liquides (pétrole brut, produits pétroliers raffinés et autres vracs liquides)

Sources : rapports d’activité des autorités portuaires, 2017 – Réalisation : Anne-Solène Quiec, 2018

La comparaison présentée dans le graphique ci-dessus est très intéressante. Elle montre la disparité dans la répartition des trafics de pétrole brut, de produits pétroliers raffinés et des autres vracs liquides dans les quatre ports.

Nous relevons globalement que le port du Havre et celui de Rotterdam présentent à nouveau une structure similaire, tout comme Anvers et Hambourg de leur côté. Pour les premiers, le trafic de pétrole brut domine, suivi des produits pétroliers raffinés et enfin de la sous-catégorie des autres vracs liquides. S’agissant des deuxièmes, le trafic de produits pétroliers raffinés domine, s’en suivent les autres vracs liquides puis le pétrole brut. Cela nous amène à conclure que Le Havre et Rotterdam sont des ports qui traitent davantage de produits sous forme de matière première et qu’Anvers et Hambourg sont davantage des ports qui transforment la matière première.

Par ailleurs, le port de Rotterdam domine nettement les volumes importés et exportés de pétrole brut par rapport aux autres ports de la rangée nord-ouest européenne. Dans cette sous-catégorie, le port du Havre, bien que très loin des tonnages du port de Rotterdam, présente tout de même des volumes significatifs, notamment par rapport à

0 20 000 000 40 000 000 60 000 000 80 000 000 100 000 000 120 000 000

Le Havre Anvers Rotterdam Hambourg Pétrole brut

Produits pétroliers raffinés Autres vracs liquides

184

Anvers et à Hambourg. Anvers n’importe quasiment pas de pétrole brut, ce qui nous interpelle. En effet, cela pourrait s’expliquer par la difficulté d’accès au port en fond d’estuaire, compensé par le réseau de pipeline entre Anvers et Rotterdam. Concernant les produits pétroliers raffinés, le port de Rotterdam se distingue toujours nettement mais l’écart avec le port suivant, Anvers, est moins important que pour la précédente catégorie. Anvers présente des volumes relativement important dans ce domaine mais toujours bien plus faibles que ceux de Rotterdam. Le Havre et Hambourg ont de très faibles volumes.

Une autre comparaison peut être opérée pour évaluer les surfaces de stockage de produits liés à l’industrie pétrochimique dont disposent les ports.

Figure 55 – Comparaison des capacités de stockage des produits liés au secteur pétrochimique (en m3)

Source : www.euro-petrole.com, 2018 – Réalisation : Anne-Solène Quiec, 2018

Nous observons que la capacité de stockage la plus importante se situe également dans le port de Rotterdam. Celle du Havre et d’Anvers sont équivalentes, ce qu’il est intéressant de souligner. Celle d’Hambourg est nettement inférieure. Il serait intéressant de connaître les taux de remplissage de ces espaces de stockage mais nous ne disposons pas de ces chiffres. Nous disposons par contre du nombre de dépôts pétroliers dans chaque port, de leurs noms et de leurs capacités individuelles de stockage.

0 2 000 000 4 000 000 6 000 000 8 000 000 10 000 000 12 000 000

185

Figure 56 – Capacité de stockage de pétrole dans les ports du Havre, d’Anvers, de Rotterdam et d’Hambourg

Port Nom du dépôt Capacité de stockage en m3

Le Havre CIM-CCMP 4 100 000

SHMPP (Société Havraise de Manutention de

Produits Pétroliers) 366 000 LBC SOGESTROL 1 225 190 LBC SOGESTROL 2 144 620 SEPP (Société d'Entreposage de Produits

Pétroliers) 54 000 Sigalnor (stockage de GPL) 4 500 TOTAL 6 dépôts 4 894 310 Anvers Oiltanking 1 147 120 APTC de VTTI 965 000 Sea-Tank quai 210 873 000 Vesta 830 000

STTA (Sea Tank Terminal Antwerp) – quai

254-316 515 000 ACS Vopak 467 000 Eurotank Vopak 467 000 ADPO 275 000 LBC 228 339 STTA quai 405-415 200 000 ITC Rubis 110 000 TOTAL 11 dépôts 5 112 459

Rotterdam Europoort de Vopak 3 300 000

Shell Europoort 2 100 000

Odfjell 1 600 000

HES Hartel Tank Terminal 1 300 000 (mise en service fin 2019)

Euro Tank Terminal B.V. de VTTI 1 118 000 Laurenshaven de Vopak 924 000 MOT (Maasvlakte Olie Terminal) 708 000 Koole Pernis 520 000

Botlek Tank Terminal 480 000 (extension à 620 000 prévue en 2019) STR de Burango - Lukoil 240 000 Rubis Botlek 161 600 LBC 83 000 TOTAL 12 dépôts 11 234 600 (12 674 600 en 2019) Hambourg Oiltanking 871 840 Vopak Dupec 631 148 Bomin 120 000 TOTAL 3 dépôts 1 622 988

186

Le dépôt pétrolier de la CIM-CCMP au Havre est celui qui concentre l’essentiel de la capacité de stockage. Les sociétés d’entreposage de pétrole au port d’Anvers sont plus nombreuses qu’au port du Havre. La répartition des capacités y est plus homogène. Le port de Rotterdam a des capacités de stockage beaucoup plus importantes que dans les autres ports. Les entreprises sont nombreuses mais équivalentes au port d’Anvers qui est pourtant moins dense en terme de densité de raffinerie sur sa circonscription. Le port d’Hambourg dispose de peu de capacité de stockage même si les entreprises ont pourtant individuellement des capacités assez importantes par rapport aux capacités de la majorité des entreprises havraises dans ce domaine.

L’observation de ces données issues de la base de données europetrole et des rapports d’activité des ports du Havre, d’Anvers, de Rotterdam et d’Hambourg, nous permet de tirer plusieurs conclusions. Tout d’abord nous observons que Rotterdam se dégage nettement des autres ports concernant les trafics liés au secteur pétrochimique et les capacités de stockage pour ce type de marchandises. De plus, contrairement à l’analyse des trafics totaux des ports, le port du Havre ne présente pas les trafics de vracs liquides, ni les capacités de production et de stockage, les plus faibles de la rangée nord-ouest européenne. Ceux-ci sont même équivalents à ceux du port d’Anvers.

Or, jusqu’à très récemment et depuis le début de notre étude, le port d’Anvers faisait la promotion de son cluster pétrochimique en revendiquant que celui-ci était le premier cluster pétrochimique intégré d’Europe et le deuxième du monde après Houston aux Etats-Unis. Même son puissant concurrent Rotterdam ne met pas autant en avant l’importance de ce secteur dans son port. Mais, la mise à jour des informations montre que cela n’est plus mentionné sur le site internet de l’autorité portuaire. Cela laisse donc une question en suspens : comment un tel revirement est-il possible ?

Il semble compliqué de répondre avec certitude à cette question mais nous allons tenter de donner des éléments de réponse en éclairant la composition des clusters industriels spécialisés dans le secteur pétrochimique des ports de Rotterdam et d’Anvers.