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Le découplage selon différentes échelles géographiques Les problèmes environnementaux apparaissent à différentes échelles géographiques.

Dimensions et mesure du découplage

Section 1. Le découplage : un concept multidimensionnel

1.3. Le découplage selon différentes échelles géographiques Les problèmes environnementaux apparaissent à différentes échelles géographiques.

Ces échelles géographiques sont principalement au nombre de trois : mondiale, régionale et nationale. Les problèmes environnementaux rencontrés ainsi que les possibilités de parvenir au découplage peuvent varier d’une échelle à une autre.

1.3.1. Découplage à l’échelle mondiale

Bon nombre de problèmes environnementaux se posent à l’échelle mondiale. Ces problèmes environnementaux portent sur tous les types de dommages : qualité de l’air (gaz à effet de serre), qualité de l’eau (pollution des océans), épuisement des ressources naturelles, déforestation, disparition de certaines espèces animales et végétales. La participation des Etats dans la formation de ces dommages est très disparate. Par exemple en 2009, les principales économies mondiales (les pays du G8, la Chine, l’Inde, le Brésil, l’Afrique du Sud, le Mexique, la Corée du Sud, l’Indonésie et l’Australie) représentaient à elles seules 80% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Ces problèmes environnementaux risquent de s’aggraver dans le futur avec l’émergence d’autres économies parmi les pays en voie de développement si rien n’est fait pour inverser la tendance. Autrement dit, si on ne parvient pas à découpler de plus en plus ces pressions sur l’environnement de la croissance économique, ces problèmes environnementaux risquent de s’aggraver.

Le découplage des pressions sur l’environnement de la croissance économique au niveau mondial prend tout son sens lorsqu’on s’intéresse aux dommages environnementaux qui ont

un caractère transfrontalier (gaz à effet de serre, pollution des océans, etc.). La particularité de ces dommages est qu’ils se diffusent sur de très longues distances jusqu’au-delà des frontières des pays où ils ont été causés. Découpler ce type de pollution de la croissance mondiale nécessite une gestion au niveau international. Ainsi, depuis le début des années 1970 une certaine prise de conscience a amené les Etats du monde à coopérer pour gérer les problèmes environnementaux auxquels notre planète est confrontée, comme le changement climatique, la déforestation… Cette prise de conscience s’est traduite par la prise d’initiatives (notamment les accords internationaux, organisations des sommets) allant dans le sens du découplage des pressions sur l’environnement de la croissance économique mondiale. Ces initiatives ont porté particulièrement sur la réduction des émissions des gaz à effet de serre.

Cependant, malgré ces efforts, le découplage absolu reste encore difficile à réaliser au niveau mondial, notamment dans le cas des gaz à effet de serre (figure 15). Entre 1970 et 2004, les émissions globales des gaz à effet de serre ont augmenté de 70% (GIEC, 2007, p. 3).

Figure 15. Découplage des émissions de CO2 de la croissance économique entre 1990 et 2010 (monde)

Source : auteur ; Données OCDE

Les preuves d’un découplage absolu dans le cas des émissions des gaz à effet de serre au niveau mondial sont pour le moment inexistantes. Comme nous verrons plus tard dans la dernière section de ce chapitre, cette situation semble s’expliquer par un plus grand nombre de pays dans le monde qui peinent à réaliser le découplage des émissions de dioxyde de carbone de la croissance économique. Par contre à l’échelle régionale ou sous-régionale, les progrès

réalisés par certaines régions du monde en matière environnementale aboutissent parfois à un découplage au niveau de ces régions et sous-régions.

1.3.2. Découplage à l’échelle régionale ou sous-régionale

A l’image des dommages transfrontaliers à ampleur planétaire, certains problèmes environnementaux se posent principalement à l’échelle régionale ou sous régionale (au sens d’un ensemble de pays). Ces problèmes peuvent concerner : la pollution d’un cours d’eau qui traverse plusieurs pays, la disparition de certaines espèces animales qui vivent dans une zone géographique partagée par plusieurs Etats, les polluants de l’air qui peuvent toucher deux villes frontalières. Lutter efficacement contre ces types de pollution peut nécessiter une gestion au niveau sous-régional ou régional. Cette nécessité devient encore plus légitime si les Etats de cette région ou sous-région (l’Union européenne, l’Amérique du Nord, la CEDEAO30, par exemple) partagent une même zone économique. Ainsi, évaluer le découplage de l’impact environnemental de la croissance économique à ces échelles (régionale ou sous-régionale) peut avoir aussi une certaine pertinence. En plus, cela permet aussi de comparer les efforts des différentes régions du monde dans la résolution des problèmes environnementaux à enjeu planétaire.

Lorsqu’on analyse l’évolution des émissions du dioxyde de carbone dans les différentes régions du monde entre 1990 et 2009, nous constatons que les performances varient sensiblement d’une région à une autre. Par exemple, dans le cas de l’intensité des émissions de CO2 dues à l’énergie31, l’Union européenne (UE 27) est la région qui a enregistré la plus

forte baisse 37% entre 1990-2010, suivie de l’Amérique du Nord (Etats-Unis et Canada) avec une baisse de 31,5%… , 11,1% pour l’Afrique et 8,5% pour l’Amérique latine. Par contre, nous observons la tendance inverse pour le Moyen-Orient qui a connu une hausse de 73,6% sur la même période. Cette performance de l’Union européenne semble se confirmer au niveau de l’ensemble des gaz à effet de serre où il y a eu un découplage absolu entre 1996 et 2007 (Laurent, 2011, p. 245).

30 Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest 31

Dans le cas de l’utilisation des ressources de la croissance économique, l’Union européenne a réussi à baisser aussi son intensité d’utilisation du pétrole et stabiliser son intensité d’utilisation du gaz naturel entre 1990 et 2011 (figure 16).

Figure 16. Evolution de l’intensité d’utilisation des ressources (R/PIB) entre 1990 et 2011 (UE27)

Source : auteur ; Données : Eurostat

Aujourd’hui, le découplage des pressions sur l’environnement de la croissance économique à l’échelle régionale ou sous-régionale permet un certain optimisme au regard des progrès réalisés dans certaines régions du monde depuis le début des années 1990 (notamment dans le cas de l’Union européenne). Cependant, que ce soit à l’échelle mondiale ou à l’échelle régionale ou sous-régionale, le découplage peut, à cause d’une certaine divergence d’intérêts entre les Etats concernés, poser des problèmes de gouvernance environnementale. Ce problème de gouvernance ne se pose quasiment pas dans la gestion des problèmes environnementaux à l’échelle nationale.

1.3.3. Découplage à l’échelle nationale

Qu’ils soient d’ampleur mondiale, régionale ou sous-régionale, la plupart des problèmes environnementaux sont gérés d’abord au niveau national. Cette prééminence de gestion des problèmes environnementaux au niveau national s’explique par le fait que non seulement certains problèmes environnementaux se posent uniquement à l’échelle nationale,

mais aussi du fait que l’intensité des dommages environnementaux est variable d’un pays à un autre. Ces différences en termes d’intensité des dommages environnementaux entre les Etats impactent les priorités et la motivation de chaque Etat dans la résolution des problèmes environnementaux. D’un autre côté, la sensibilité aux problèmes environnementaux de la population diffère aussi d’un pays à un autre. Ainsi, réussir le découplage à l’échelle nationale paraît essentiel pour parvenir au découplage à des échelles plus grandes.

Le découplage à l’échelle nationale peut être étudié selon plusieurs niveaux d’analyse dans l’économie. Ces niveaux d’analyse sont principalement au nombre de trois : le niveau macroéconomique, le niveau mésoéconomique et le niveau microéconomique. Etudier le découplage à chacun de ces niveaux d’analyse revêt une certaine importance.

1.3.3.1. Niveau macroéconomique

Le découplage au niveau macroéconomique se rapporte au découplage des pressions sur l’environnement de la croissance économique à l’échelle nationale. Les indicateurs de découplage portent sur les agrégats nationaux,comme le SO2/PIB. L’analyse du découplage à

ce niveau peut se révéler particulièrement utile dans l’élaboration des politiques nationales (rapport OCDE, 2008, p. 17), notamment les politiques sur la conservation des ressources, les politiques commerciales, les politiques sur l’évolution des différents types de pollution… Elle permet aussi d’évaluer l’efficacité des stratégies nationales de développement durable. Le principal avantage de la gestion des problèmes environnementaux à l’échelle nationale par rapport aux autres échelles (régionale et mondiale) est l’autonomie de l’Etat dans sa prise de décision. Chaque Etat décide librement de la politique à adopter et de son degré de sévérité, alors qu’avec les autres échelles, les Etats doivent faire généralement des compromis pour élaborer une politique commune. Cette liberté dans la prise de décision à l’échelle nationale dans la gestion des problèmes environnementaux peut faire la différence entre les Etats en termes de performance dans le découplage. Cependant, elle peut aussi amener certains Etats à pratiquer le dumping écologique. Cette stratégie consiste à rendre les politiques environnementales dans un pays moins contraignantes qu’ailleurs afin non seulement de rendre ses entreprises plus compétitives, mais aussi d’attirer plus d’entreprises étrangères.

Aujourd’hui, les pays développés sont généralement ceux qui parviennent le mieux au découplage (section 3 de ce chapitre).

1.3.3.2. Niveau mésoéconomique

Le niveau mésoéconomique est le deuxième niveau d’analyse du découplage qui vient

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