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Analyse empirique des déterminants structurels du découplage

Les principaux déterminants du découplage

Section 2. La structure de l’économie

2.2. Découplage pendant un changement structurel dans l’économie

2.2.3. Analyse empirique des déterminants structurels du découplage

Après une analyse des mécanismes par lesquels la structure de l’économie peut impacter sur le découplage, nous avons tenté de chercher une validation empirique à ces différentes hypothèses. A cet effet, nous avons estimé le degré de découplage sur la période 1980-2005 dans le cas du dioxyde de carbone (tableau 2) à partir d’un certain nombre d’indicateurs de la structure d’une économie. Ces indicateurs ont été exprimés en taux de croissance absolu58 entre 1980 et 2005 (l’évolution de la part d’un secteur dans l’économie entre 1980 et 2005), et non en pourcentage de 2005 (la part d’un secteur dans l’économie à une année T) comme on pourrait parfois le penser. Ce choix s’explique par le fait que ce n’est pas la structure de l’économie en tant que telle qui est à la base du découplage, mais plutôt son évolution. Autrement dit, c’est la recomposition de la structure de l’économie qui est susceptible d’entraîner un processus de découplage. Ainsi, le fait d’utiliser la proportion de chaque secteur dans l’économie à une date T nous permettra seulement de connaître l’ampleur de l’impact de chaque secteur sur le découplage, mais sans l’ombre d’un doute, tous ces secteurs auront un impact négatif sur le découplage. En effet, comme nous avons tenté de le souligner dans les sous-sections précédentes, tous les secteurs de l’économie génèrent de la pollution mais à des intensités différentes. Par conséquent, ils ont tous un impact négatif sur le découplage. Donc, en fin de compte, c’est bien seulement l’utilisation des taux de croissance de chacun des principaux secteurs de l’économie qui peut nous permettre d’estimer l’impact du changement structurel sur le découplage.

Ainsi, nous avons sélectionné trois secteurs clés de l’économie qui semblent jouer un certain rôle dans le découplage des pays qui sont parvenus à un découplage absolu. Le secteur industriel (industrie lourde), le secteur manufacturier (industrie légère) et le secteur des services. Ces données portent sur 99 des 124 pays de notre échantillon (tableau 2) et

58 Il s’agit du taux de croissance global entre deux périodes par opposition au taux de croissance annuel moyen

 

1 1 n D A V DA V   

  . Cependant, il convient aussi de faire la distinction entre le taux de croissance

global relatif A D D V V V     

 et le taux de croissance global absolu

VAVD

qui nous intéresse ici, avec V

comme une grandeur quelconque.

proviennent de la base de données des Nations-Unies sur les échanges internationaux (comtrade).

Le secteur industriel (industrie lourde)

Regroupant des activités comme l’extraction minière, la production d’armement, la métallurgie ou encore la sidérurgie, le secteur industriel est considéré comme le secteur dont l’intensité de pollution est la plus élevée dans une économie. Ainsi, toute augmentation de la part de ce secteur dans l’économie aura un impact négatif sur le découplage, ce qui correspond à un coefficient positif dans la régression.

Le secteur manufacturier (industrie légère)

Le secteur manufacturier est un secteur qui regroupe les activités de transformation des biens ainsi que l’installation et la réparation des équipements industriels. C’est un secteur dont l’intensité de pollution se trouve à un niveau intermédiaire entre celle du secteur industriel et celle du secteur tertiaire. Étant plus proche d’une activité industrielle que d’une activité de service, nous nous attendons aussi à un impact négatif de l’augmentation de ce secteur sur le découplage, mais à un degré plus faible que dans le cas du secteur industriel.

Le secteur des services:

Le secteur des services regroupe généralement les activités considérées comme immatérielles (finances, enseignement, gardiennage, assurance…). Cette immatérialité d’un bon nombre de ces activités rend ce secteur moins intensif en pollution que les deux autres secteurs (industriel et manufacturier). De ce fait, l’évolution de la structure de l’économie en faveur de ce secteur devrait avoir un impact positif sur le découplage, ce qui devrait se traduire par un signe positif de son coefficient au niveau de la régression.

Tableau 10. Estimations des déterminants structurels du découplage

Modèle avec l’ensemble des variables Modèle avec variables significatives Degré de découplage Niveau de découplage

Constante 1,10 (15,74)*** Constante 1,079 (17,79)*** txind 0,021 (3,17)*** txind 0,022 (3,95)*** txmanuf 0,011 (1,473) txmanuf 0,012 (1,88)* txservice -0,0043 (-0,613) - R2 0,191 R2 0,187 F (7,474)*** F (11,09)***

Nbre obs 99 Nbre obs 99

* : significatif au seuil de 10% ; ** : significatif au seuil de 5% ; *** : significatif au seuil de 1% (.) : t-statistiques et F-statistiques

Les résultats des estimations ont été présentés dans deux parties du tableau (tableau 10). La première partie porte sur l’estimation avec l’ensemble des trois variables. Quant à la deuxième estimation, elle ne contient que des variables significatives sélectionnées automatiquement (par le logiciel économétrique) à partir d’une procédure de stepwise. Les deux modèles sont globalement très satisfaisants (les F-de Fisher sont significatifs au seuil de 1%). Nous avons un coefficient de détermination qui tourne autour de 20%. Cela signifie que le changement structurel explique près de 20% des variations du découplage dans un pays, ce qui n’est pas négligeable dans la mesure où ce n’est pas l’évolution de la structure de l’économie qui explique seulement le découplage. Rappelons que les deux autres principaux déterminants (niveau de développement et rapport socio-économique à l’environnement) du découplage sont censés expliquer chacune une part (voire plus grande) des variations du découplage.

Lorsqu’on s’intéresse à l’impact marginal de chaque secteur sur le découplage, nous voyons que toutes les variables portent des signes attendus (+ pour les secteurs industriels et manufacturiers et – pour le secteur tertiaire). Nous voyons aussi que dans les deux modèles, l’augmentation du secteur industriel a un impact plus fort sur le découplage par rapport au secteur manufacturier. C'est-à-dire dans le deuxième modèle, une augmentation d’une unité du secteur industriel va se traduire par une diminution de 0,22 du degré de découplage contre une diminution de 0,12 dans le cas du secteur manufacturier. Enfin, dans le premier modèle, nous constatons que le secteur des services est celui dont l’évolution a l’impact le plus faible sur le découplage par rapport aux autres secteurs. Ces écarts en termes d’impact entre les différents secteurs pourraient s’expliquer par les différences de potentialités dans l’amélioration de l’efficacité de pollution entre ces secteurs. En d’autres termes, plus le

secteur est intensif en pollution, plus son potentiel en termes d’intensité de pollution est élevé. Cela semble aussi expliquer les degrés de significativité différents entre ces trois secteurs dans le modèle 2 : une significativité au seuil de 1% pour le secteur industriel ; une significativité au seuil de 10% pour le secteur manufacturier et une non significativité du secteur des services. Ainsi, à la lumière de ces résultats, nous pouvons dire que c’est une baisse du secteur industriel qui a plus d’impact sur le découplage, et que tout changement structurel dans l’économie limité aux deux autres secteurs (manufacturiers et services) n’aura que peu sur le découplage. Par ailleurs, comme nous le verrons dans la sous-section suivante, la tertiarisation de l’économie ne signifie pas toujours qu’il y aura une tendance au découplage entre la croissance économique et l’impact environnemental.

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