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Crise de vocation du clergé et déclin de l’institution catholique

Dans le document L'église s'engage dans la politique (Page 41-44)

Les institutions catholiques et civiles au Brésil

I.1.1 Crise de vocation du clergé et déclin de l’institution catholique

En 1970, d’après le recensement de l’Institut de géographie et statistique (IBGE), les catholiques étaient 90% de la population ; et en 2000 ils passent à 73,8%. Si la situation du catholicisme brésilien tient sans doute comme à ailleurs au processus de sécularisation et de pluralisme religieux, la crise de l’Eglise brésilienne s’explique par différents facteurs qui lui sont propres.

La Constitution de 1934 avait proclamé l’État laïque et le nom de Dieu disparait de la charte, l’assistance au culte religieux aux forces armées était facultative et les relations diplomatiques avec le Vatican étaient rompues. Mais en 1939, le président Vargas, après avoir reçu l’épiscopat, affirma qu’il fallait une collaboration mutuelle entre le pouvoir clérical et le pouvoir politique. L’Église, en la personne du cardinal archevêque Sebastiao Leme, avait scellé quelques années auparavant des relations de confiance avec le président. Vargas avait alors fait un geste

en participant de l’inauguration de la statue du Christ Rédempteur, sculptée par le Français Paul Lindowsky et a reconnu divers droits à l’Église catholique : 1 – fin de la période positiviste ; 2 – reconnaissance des droits civiques aux religieux ; 3 – liberté de culte, pas d’entraves pour créer un ordre religieux ; 4 – assistance spirituelle aux institutions militaires ainsi que l’interdiction aux couples de divorcer.

En 1947, le Brésil comptait 1 cardinal, 17 archevêques, 65 evêchés et 25 prelazias, 7 809 prêtres et une croissance graduelle de cultes afro-brésiliens. L’Eglise brésilienne connaît dès cette époque une crise des « vocations ». Ce déclin s’est amorcé dès les années 50 et 60. Alors que l’on pourrait penser que le Brésil a un taux satisfaisant d’encadrement des fidèles catholiques, il n’en est rien. Les séminaires ne sont pas en nombre suffisant pour former des prêtres et des religieux, qui viennent alors d’Europe, du Canada et des Etats-Unis. Sur 100 élèves qui commençaient le petit séminaire, seulement 15 arrivaient à la philosophie, 10 à la théologie et moins de 5 à l’ordination. Cela signifie qu’environ 65 à 70% des séminaristes initiés à la philosophie se désistaient avant d’arriver au sacerdoce, et parmi ceux qui commençaient la théologie, l’évasion était de 50 à 55%.

Le recrutement se faisait surtout dans les régions rurales. Ceux qui entraient au petit séminaire pour étudier subissaient une discipline autoritaire. Le sociologue Brésilien, Antonio Carlos Boa Nova parle d’un processus éducationnel qui réprime l’affectivité et toute relation du corps avec le monde extérieur. Les conditions de formation rappellent les éléments du processus « vocationnel » mis en lumière par Charles Suaud. La « vocation » sacerdotale, loin d’être le fruit d’une révélation ex-ante est le plus souvent le produit d’une socialisation réussie à l’institution catholique. Les motivations pesant sur les candidats à la vocation sont généralement tout à fait prosaïques : nombres d’entre eux sont envoyés chez les prêtres par souci d’économie dans les familles nombreuses, d’autres encore préfèrent entrer au séminaire pour échapper au travail rural. A Medellin, en 1968, Hélder Camara propose moins de rigueur pour les candidats au clergé, dans un texte sur le nouveau mode de vie de l’Eglise. Il plaide dans une lettre aux évêques du tiers-monde en faveur d’un assouplissement de l’entrée en sacerdoce : « Que des hommes mariés soient ordonnés prêtres sur l’indication de leur communauté ; que le prêtre ait, s’il le veut, la possibilité de se marier, sans devoir pour cela abandomner son minstère. Que de tels cas relèvent de la compétence de l’ordinaire. Que les prêtres puissent exercer une profession et vivre de leur travail ». L’évêque Pedro Casaldaliga (diocèse de São Felix do

Araguaia), région amazonienne) va encore plus loin et souligne que l’Eglise devrait donner plus de place à la femme : « rien ne justifie que la femme ne puisse pas être prdonée prêtre ». Son avis est partagé par le théologien Leonardo Boff.

Actuellement, d’après le Centre de statitstiques religieuses et de recherches sociales (CERIS), organisme attaché à la CNBB, la proportion de prêtres au Brésil est l’une des plus faibles au monde parrmi les pays catholiques et le clergé est en nombre insuffisant pour rendre service aux fidèles. Alors qu’au Brésil il y a en moyenne un prêtre pour 10 000 habitants, en Italie il y en a un pour 1 000 habitants. Cette proportion reste faible, même si nous comparons aux pays qui ne sont pas forcément catholiques comme les Etats-Unis, qui comptent un prêtre pour 6 350 habitants, et en Allemagne, avec 1 prêtre pour 4 500 habitants. La France, estimée à 63 millions d’habitants, compte environ 20 000 prêtres. Selon l’affirmation du CERIS, la majorité des prêtres brésiliens viennent de la région du Sudeste (45%) ou du Sud (25%), ont en moyenne 51 ans, et 56% viennent d’une zone rurale.

La crise de l’institution catholique brésilienne va quant à elle se manifester à partir de 1960 après Vatican II et avec la politisation de l’Eglise et du clargé. Deux dates témoignent de cette politisation : la conférence de Medellin (1968 en Colombie), organisée par le Conseil épiscopal latino-américain (CELAM) y discute des problèmes économiques et politiques, de la dépendance économique et des régimes autoritaires en Amérique du Sud. La conférence de Puebla (au Mexique en 1979) marque l’engagement préférentiel pour les pauvres.

On prendra comme exemple le conflit de Botucatu (province de São Paulo) : le clergé, pour s’opposer à la nomination d’un évêque conservateur, rédige une pétition de protestation en

menaçant d’abandonner la prêtrise. Le 1er mai 1968, vingt-trois prêtres de ce diocèse démissionnèrent après la nomination comme archevêque de Mgr Zioni, prêlat de style « pré- conciliaire ». Ils déclarent qu’il était impossible de continuer leur ministère dans ces conditions. Le nonce revint sur la nomination et Alberti, considéré comme avancé par le clergé brésilien, fut nommé à la place de Zioni. En juillet de la même année, 350 prêtres de Rio, São Paulo et du Parana publient un manifeste, selon eux, des laïcs conscients s’écartent de l’Eglise ; malgré les changements de Vatican II, l’Eglise ne vit pas la réalité sociale et les laïcs sont déçus par l’aisance ecclésiale. L’institution catholique est compromise avec les puissants.

change pas son modèle, elle sera abandonnée par les masses, car la tendance est d’enterrer Medellin et d’oublier Puebla. L’ancien catholique devenu adventiste avoue que : « les séminaires ne forment plus de prêtres capables de reprendre avec courage le flambeau de la

lutté pour la terre » . Il défend la thèse que l’Eglise devait accentuer l’engagement pour la terre.

I.1.2 Conservateurs, réformistes et progressistes : l’institution épiscopale

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