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Le contrôle de l’accès aux pêcheries

L’INTEGRATION DE L’ENVIRONNEMENT MARIN DANS LA REGLEMENTATION DES ACTIVITES HUMAINES

Chapitre 1 Le droit applicable à la pêche

1.3. Le contrôle de l’accès aux pêcheries

L’accès aux pêcheries doit être autorisé par une licence ou autorisation de pêche (1.3.1), il peut être encadré par un accord de pêche (1.3.2.).

1.3.1. Les licences et autorisations de pêche

La licence ou autorisation de pêche est l’acte administratif, par lequel le Ministre chargé des Pêches confère à un navire le droit d’exercer la pêche dans les eaux sous juridiction mauritanienne373.

366 Par la suite, dans cet ouvrage, afin de faciliter la lecture, lorsqu’un texte mentionnera l’institution nationale chargée de la recherche halieutique, nous ferons directement référence à l’IMROP.

367 Chérif A. M. 2004 "Histoire des pêcheries mauritaniennes : la tension entre les aspirations nationales et les pressions internationales" in CHAVANCE (Pierre), Moctar BÂ, Didier

GASCUEL, Jan Michael VAKILY & Daniel PAULY (éd.), 2004. — Pêcheries maritimes, écosystèmes & sociétés en Afrique de l’Ouest : Un demi-siècle de changement, actes du symposium international, Dakar (Sénégal), 24-28 juin 2002, Bruxelles, Office des publications officielles des Communautés européennes, XXXVI-532-XIV p.

368 Art. 30 Code des Pêches L. 2000-035 modifié. 369 Ibid.

370 Art. 32 Code des Pêches L. 2000-035 modifié. 371 Art. 42 et suivants du Décret n°2002-073 modifié.

372 Belhabib D., Koutob V., Sall A., Lam V. W. Y., Pauly D., 2014 “Fisheries catch misreporting and its implications: The case of Senegal”. Fisheries Research, Vol. 151, p. 1-11.

1.3.1.1. Règles générales en matière de licence et autorisation de pêche

Le Code des pêches précise que le droit de pêche appartient à l’État qui en autorise l’exercice374. Dès lors,

les activités de pêche sont soumises à l’obtention d’une autorisation préalable auprès du Ministre chargé des pêches. Les trois régimes de pêche autorisés pour l’exploitation des ressources halieutiques sont l’acquisition, l’affrètement et la licence libre. Ils sont définis par arrêté mais certaines règles générales s’y appliquent. Les pêcheurs artisanaux mauritaniens ont longtemps bénéficié d’un libre accès à la ressource. Mais en 1995 est institué un droit d’accès pour la pêche artisanale. La demande d’autorisation n’est pas automatiquement attribuée pour les navires mauritaniens. Le Ministre en charge de la Pêche peut en refuser l’octroi notam- ment, pour la préservation de l’état de la ressource et de l’environnement marin : si nécessaire en vue de garantir un aménagement et une gestion adéquate des ressources halieutiques ; si le navire considéré ne res- pecte pas les normes techniques nationales et internationales de sécurité et de navigation ; si les opérations de pêche pour lesquelles la licence est demandée ne sont pas jugées opportunes compte tenu des objectifs de la politique d’aménagement et de développement des pêches ou des dispositions du plan d’aménagement ou en application du principe de précaution375.

Nous préciserons les types de pêches, catégories, et licences associées (1.3.1.1.1.), les conditions réglemen- taires pouvant assortir une licence (1.3.1.1.2.) et les conditions de retrait de la licence (1.3.1.1.3.).

1.3.1.1.1. Type de pêche, catégorie et licences associées

Le Code des pêches distingue 4 sortes de pêches en fonction de leur finalité.

• La pêche de subsistance est pratiquée sous forme traditionnelle. Elle vise principalement l’obten-

tion d’espèces comestibles pour la subsistance du pêcheur et de sa famille. La majeure partie de capture n’est donc pas vendue.

• La pêche à des fins de recherche scientifique ou technique vise l’étude et la connaissance des

ressources halieutiques et de leur environnement, des navires, des engins et autres matériels et tech- niques de pêche.

• La pêche sportive est pratiquée sans but lucratif à des fins récréatives376.

A l’inverse, la pêche commerciale poursuit un but lucratif. Elle est sub-divisée en 3 types définis dans le Code des pêches : la pêche artisanale, la pêche côtière, la pêche industrielle377.

• La pêche artisanale : toute activité de pêche, s’exerçant à pied ou à l’aide de navires non pontés,

motorisés ou non, d’une longueur hors tout inférieure ou égale à 14 mètres et opérant avec des engins de pêche manuels, à l’exception de la senne tournante coulissante.

• La pêche côtière : toute activité de pêche s’exerçant à l’aide de navires motorisés, non pontés d’une

longueur hors tout supérieure à 14m et inférieure ou égale à 26m ou de navires motorisés pontés, d’une longueur inférieure ou égale à 26 m, et dépourvus de tout moyen de congélation, de chalut ou de drague.

374 Art. 3 al. 2 Code des Pêches L. 2000-035 modifié. 375 Art. 28 Code des Pêches L. 2000-035 modifié. 376 Art. 5 Code des Pêches L.2000-035 modifié. 377 Art. 6 Code des Pêches L.2000-035 modifié.

• La pêche industrielle : toute pêche commerciale qui ne répond pas aux définitions prévues aux

alinéas précédents378.

A chaque type de pêche correspond un type de licence. La licence de type I est la licence de pêche artisanale, celle de type II est la licence de pêche côtière et celle de type III est la licence de pêche industrielle. A chaque type de licence correspondent plusieurs catégories de pêche associées à des zones autorisées (voir carte n°5) et parfois à des engins particuliers.

Tableau : Classification des licences pour la pêche commerciale

Licence Catégorie Engins

Type I  : Licence de

pêche artisanale CéphalopodesCrustacés Pot à poulpe, casiers, turlutteFilet, casier, nasse

Poissons Lignes, filet, senne de plage, nasse, épervier Type II  : Licence de

pêche côtière CéphalopodesCrustacés Pot à poulpe, casiers, turlutte, nasseFilet, casier, nasse Poissons démersaux Filet, ligne, palangre, casier, nasse Petits poissons pélagiques Filet, Petite senne

Type III  : Licence de

pêche industrielle Petits pélagiquesThon Chalut pélagique, senneCanne, palangre de surface, senne

Céphalopodes Chalut de fond

Crevettes lagostinos Chalut de fond à crevettes et tangon Crevettes Gambas Chalut de fond à crevettes

Merlu Chalut de fond à merlu ; palangre de fond Poissons démersaux autres que le

merlu Filet maillant, ligne à main, nasse, palangre, senne pour la pêche des appâts Poissons démersaux Chalut de fond

Langouste rose Casier

Crabe profond Casier

1.3.1.1.2. Conditions réglementaires pouvant assortir une licence

La licence est émise pour un navire donné exerçant un type de pêche précis, à l’aide d’un équipement donné, dans une zone déterminée et pour une durée maximale d’un an. Sauf disposition réglementaire contraire, un navire ne peut bénéficier simultanément de plusieurs licences. Cependant, il convient de noter que dans la pratique certaines licences attribuées englobent plusieurs catégories de pêche. C’est le cas par exemple de la licence « crustacés autres que langouste «379.

Le Ministre chargé des Pêches fait inscrire dans une licence de pêche les conditions spéciales dont il juge le respect opportun et notamment :

• le type et la méthode de pêche de toute activité de pêche autorisée ;

378 Art. 13 Décret n° 2002-073 modifié par le Décret n° 2010-153 du 8 juillet 2010 modifiant certaines dispositions du Décret n° 2002-073 du 1er octobre 2002 portant règlement général d’application de la Loi 2000-025 du 24 janvier 2000 modifiée et complétée par l’Ordonnance n° 2007-022 du 9 avril 2007.

• la zone à l’intérieur de laquelle le navire est autorisé à pêcher ; • les périodes pendant lesquelles le navire est autorisé à pêcher ;

• les espèces de produits de pêche et les quantités dont la capture est autorisée y compris, le cas échéant, des restrictions concernant les captures accessoires ;

• l’embarquement et le débarquement de chercheurs scientifiques ;

• l’embarquement et le débarquement d’observateurs scientifiques, de contrôleurs ou autres agents char- gés de l’étude, du suivi ou du contrôle de pêche à bord380.

1.3.1.1.3. Conditions de retrait ou de suspension de la licence

La capacité du Ministre à suspendre ou retirer une licence de pêche pour des motifs de préservation de la ressource est relativement large. En effet, la loi réserve à celui-ci le droit de suspendre ou de retirer une licence de pêche pour des motifs liés à l’exécution des plans d’aménagement et de gestion des pêcheries adoptés ou à une évolution imprévisible de l’état des stocks exploités. Il semble donc que l’adoption d’un plan d’aména- gement postérieur à l’attribution d’une licence puisse permettre le retrait ou la suspension de celle-ci. En outre, la compensation garantie par l’Etat mauritanien dans ce cas de figure n’est pas extrêmement élevée dès lors qu’elle correspond au simple remboursement des redevances versées au titre de la période de validité non utilisée381.

1.3.1.2. Les différents régimes de licences et autorisations de pêche

Le régime actuel des licences est précisé par des circulaires de 2006382. Elles précisent les trois régimes de

licences existant : le régime d’acquisition (1.3.1.2.1), le régime d’affrètement (1.3.1.2.2) et le régime de la licence libre (1.3.1.2.3) incluant les licences libres attribuées dans le cadre d’accords de pêche (1.3.1.2.4) et les conditions financières qui y sont associées.

1.3.1.2.1. Le régime d’acquisition

Il vise les navires de la flotte nationale383. Ils sont acquis par des opérateurs mauritaniens ou dans le cadre de

sociétés mixtes de droit mauritanien384.

Une Société Mauritano-Chinoise de Pêche (MCP) a été mis en place sur la base de ce régime. Ce système n’a pas entièrement donné satisfaction ni en terme de gestion de la ressource ni en terme de protection des intérêts mauritaniens.

1.3.1.2.2. Le régime de l’affrètement

Il vise les cas de location de navire étranger par un affréteur mauritanien sur la base d’une clé de répartition des produits et des charges. Il est soumis à des obligations similaires à celles des navires de la flotte nationale.

380 Art. 26 Code des Pêches L.2000-035 modifié. 381 Art. 27 Code des Pêches L.2000-035 modifié.

382 Circulaires /MPEM du 29 juin 2006 et n° 38/MPEM du 31 juillet 2006. 383 Stratégie de gestion durable du secteur des pêches et de l’aquaculture (2008-2012), p. 7.

384 Niasse M. L., Madieng S., 2011, L’accaparement des ressources marines ouest africaines: Sociétés mixtes de façade et licences de complaisance. Expériences du Sénégal et de la Mauritanie [En ligne]. Dakar, Sénégal : Confédération Africaine des Organisations de Pêche Artisanale (C.A.O.P.A.).

Ils ont notamment l’obligation de débarquer leurs captures en Mauritanie385. Ce système a coexisté avec un

système d’accès à la ressource par l’entreprise de société mixte de droit mauritanien promu dès la fin des an- nées 70 pour encourager l’intégration du secteur de la pêche à l’économie nationale, donc le développement de la pêche mauritanienne. Elles ont permis le développement d’infrastructures à terre et l’acquisition de navires ainsi qu’un transfert de technologie et de savoir faire386. Il concerne essentiellement les navires ciblant

les espèces pélagiques, plus exceptionnellement, les céphalopodes et crevettes387.

1.3.1.2.3. Le régime de la licence libre

Il vise les navires étrangers non affrétés par un opérateur mauritanien et en dehors du cadre des accords de pêche entre la Mauritanie et l’Etat de son pavillon. Ces licences visent essentiellement les pélagiques et rare- ment les démersaux (crevettes)388. Le tarif des redevances pour ces licences est lié à l’espèce recherchée et à la

jauge du navire. Le Code des pêches les présente comme exceptionnelles389. Une caution peut être demandée

à l’armateur.

1.3.1.2.4. Licences libres attribuées dans le cadre d’accords de pêche

Les licences peuvent également être attribuées dans le cadre d’accords de pêche. Dans ce cadre l’Etat ou la communauté d’Etats verse une enveloppe globale qui ouvre la possibilité pour ces licences spécifiques et l’armateur paye ensuite une redevance pour le prix de sa licence390.

1.3.2. Les accords de pêche avec les pays tiers

Les accords de pêche sont des conventions prévues par le droit international de la mer (1.3.2.1). Ils sont enca- drés par le droit national mauritanien (1.3.2.2) qui fait l’objet de mises en œuvre régulières (1.3.2.3).

1.3.2.1. Les accords de pêche en droit de la mer

La Convention sur le droit de la mer de 1982 stipule que l’État côtier doit viser une exploitation optimale des ressources biologiques de sa ZEE. Dès lors, après y avoir fixé le volume admissible des captures, il détermine sa propre capacité d’exploitation de ces ressources.

Si cette capacité d’exploitation est inférieure à l’ensemble du volume admissible des captures, il autorise d’autres États, par voie d’accords ou d’autres arrangements à exploiter le reliquat du volume admissible. En Mauritanie, il semble pourtant que la flotte nationale soit limitée au profit des navires étrangers en raison de l’importance de la rente fournie par les accords de pêche. Ainsi pour le poulpe, les mesures de conserva- tion ont donné lieu à un gel des licences pour la pêche industrielle nationale391.

Les Etats étrangers qui pratiquent la pêche dans la ZEE d’un autre Etat doivent se conformer à la législation de ce dernier notamment en matière d’aménagement des pêches. Il s’agit notamment de :

385 Oceanic Development, and Megapesca Lda, Evaluation expost du protocole actuel d’accord de partenariat dans le domaine de la pêche entre l’Union Européenne et la Mauritanie, étude d’impact d’un possible futur protocole d’accord - Rapport Final, 2011, 144p., p. 19.

386 Stratégie de gestion durable du secteur des pêches et de l’aquaculture (2008 – 2012) Introduction, p. 2. 387 PAGP Crevette p. 21.

388 PAGP Crevette p. 22.

389 Art. 14 Code des Pêches L.2000-035 modifié.

390 Oceanic Development, and Megapesca Lda, Evaluation expost du protocole actuel d’accord de partenariat dans le domaine de la pêche entre l’Union Européenne et la Mauritanie, Étude d’impact d’un possible futur protocole d’accord - Rapport Final, op. cit, p. 20.

a. "délivrance de licences aux pêcheurs ou pour les navires et engins de pêche, y compris le paiement de droits ou toute autre contrepartie qui, dans le cas des Etats côtiers en développement, peut consister en une contribution adéquate au financement, à l’équipement et au développement technique de l’industrie de la pêche ;

b. indication des espèces dont la pêche est autorisée et fixation de quotas, soit pour des stocks ou groupes de

stocks particuliers ou pour les captures par navire pendant un laps de temps donné, soit pour les captures par les ressortissants d’un Etat pendant une période donnée ;

c. réglementation des campagnes et des zones de pêche, du type, de la taille et du nombre des engins, ainsi

que du type, de la taille et du nombre des navires de pêche qui peuvent être utilisés ;

d. fixation de l’âge et de la taille des poissons et des autres organismes qui peuvent être pêchés ;

e. renseignements exigés des navires de pêche, notamment statistiques relatives aux captures et à l’effort de pêche et communication de la position des navires ;

f. obligation de mener, avec l’autorisation et sous le contrôle de l’État côtier, des programmes de recherche déterminés sur les pêches et réglementation de la conduite de ces recherches, y compris l’échantillonnage des captures, la destination des échantillons et la communication de données scientifiques connexes ;

g. placement, par l’État côtier, d’observateurs ou de stagiaires à bord de ces navires ;

h. déchargement de la totalité ou d’une partie des captures de ces navires dans les ports de l’État côtier ;

i. modalités et conditions relatives aux entreprises conjointes ou autres formes de coopération ;

j. conditions requises en matière de formation du personnel et de transfert des techniques dans le domaine

des pêches, y compris le renforcement de la capacité de recherche halieutique de l’État côtier ;

k. mesures d’exécution"392.

1.3.2.2. La législation nationale en matière d’accords de pêche

Le Code des pêches vise spécifiquement les accords de pêche. Ils peuvent porter sur l’intégralité des eaux sous juridiction mauritanienne. Ils sont soumis à un certain nombre d’obligations :

1. "spécifier le nombre et les caractéristiques techniques des navires de pêche dont les opérations sont per- mises ainsi que les types de pêche, les espèces et les tonnages dont la capture est autorisée ;

2. spécifier, le cas échéant, le nombre et les caractéristiques techniques des navires mauritaniens dont les

opérations sont autorisées dans les eaux de l’État partie à l’Accord ;

3. définir le montant des redevances ou autres paiements ou prestations en espèces ou en nature. Les clauses

financières des Accords ainsi que celles relatives à l’effort de pêche seront de préférence valables pour des périodes au plus égales à douze mois ;

4. contenir une clause relative à la communication périodique et régulière par les armateurs, au service com-

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