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Construction des sous-types TDA avec ou sans H

Le débat sur l’articulation des symptômes d’instabilité motrice (l’hyperactivité) et mentale (le déficit d’attention) n’est pas nouveau. Dès le milieu des années 70, des psychiatres revendiquent la possibilité d’un diagnostic « défaut d’attention sans hyperactivité » qui corresponde aux observations empiriques177 qui, elles, ont déjà mis en évidence le caractère

central (et parfois isolé) de l’inattention. Ces considérations ont conduit les auteurs du DSM- III à préciser la description symptomatologique de la réaction hyperkinétique (rappelons que c’était alors la terminologie retenue dans le DSM-II).

La distinction par l’APA au sein de la même entité de deux sous-groupes de symptômes mérite qu’on s’y arrête. Relevons au préalable que l’OMS n’a pas retenu le « trouble déficitaire de l’attention », dans la CIM-10 même si « d’un point de vue comportemental, il est clair que les difficultés d’attention constituent une caractéristique essentielle de ces

176Dans le DSM-III-R, la gravité d’un trouble est évaluée selon les critères de « léger » « moyen » ou « grave » qui tiennent compte « du nombre et de l’intensité des signes et symptômes du trouble ainsi que de l’altération du fonctionnement social et professionnel qui en résultent » (DSM-III-R)

177« In response to observations that attention probles nearly always accompany this disorder (e.g. Douglas and Peters, 1979) the disorder was renamed attention-deficit disorder with hyperactivity in DSM-III » (Sourcebook DSM, chap.8, 112).

syndromes hyperkinétiques » (CIM-10, 1992, 234). Les auteurs refusent délibérément d’utiliser le terme de « trouble déficitaire de l’attention », arguant : « (1) il implique une connaissance des processus psychologiques en cause, ce qui n’est pas encore le cas et (2) il incite à inclure dans cette catégorie diagnostique des enfants sujets à des préoccupations anxieuses, ou des rêveurs apathiques, dont les difficultés sont probablement de nature différente » (CIM-10. 1992, Masson, 234). La CIM-10 inclut donc comme symptôme – non comme syndrome - « une perturbation de l’attention » (décrite comme un « manque de persévérance et une inattention excessive par rapport à l’âge et au Q.I. »). En abandonnant, par rapport à sa version précédente les sous-types du Trouble déficitaire de l’attention (314.00, Sans mention d’hyperactivité, et 314.01 Avec hyperactivité), et en gardant uniquement la terminologie Trouble hyperkinétique, la CIM-10 n’évolue pas dans le même sens que le DSM, sur cette question de l’articulation des symptômes d’inattention et d’agitation motrice. Ainsi, malgré la volonté proclamée de rapprochement entre le DSM et la CIM, les dernières versions de l’une et l’autre classification témoignent d’une divergence notable, du point de vue de l’organisation des symptômes. Alors que la CIM-10 exige que la perturbation de l’attention et l’activité excessive soient « simultanément présentes », le DSM défend justement la possibilité de diagnostics séparés et travaille à centraliser l’inattention dans la définition du trouble.

Après avoir justifié dans son chapitre 8, que la distinction des caractéristiques diagnostiques en deux domaines (inattention d’un côté et hyperactivité-impulsivité de l’autre) est plus pertinente que la liste unique (du DSM-III-R) d’une part, et que la séparation en 3 domaines d’autre part, le sourcebook consacre un chapitre complet (chap. 10) à la légitimation du diagnostic « déficit d’attention sans hyperactivité » (en anglais : attention-deficit disorder

without hyperactivity [ADD/WO]), rendu désormais possible grâce à la nouvelle organisation

des items. Le DSM-III-R ayant éliminé le regroupement des caractéristiques diagnostiques par symptômes (tout en proposant une catégorie correspondante intitulée « undifferenciated ADD »), les auteurs du DSM-IV justifient sa réintroduction pour 3 raisons : (1) la catégorie « indifférenciée » tend à décourager le diagnostic ; (2) un diagnostic spécifique d’inattention est légitime ; (3) le risque d’amalgame du diagnostic « indifférencié » qui pourrait suggérer que les inattentifs souffrent également d’hyperactivité. Une « cluster analysis » effectuée à partir de mots-clé issus d’études existantes montre que la séparation des critères en deux dimensions symptomatiques est consistante (« taxometric evidence »), mais que cela n’implique pas la constitution de deux syndromes distincts. On le voit ci-dessous, l’argument pour maintenir dans un syndrome unique les deux dimensions est notamment le « besoin de traitement » (sous-entendu d’un même traitement) des déficitaires d’attention et des hyperactifs.

« the identification of two dimensions does not necessarily imply that there are two syndromes of ADD ; all children who are judged to be in need of treatment could be deviant on both dimensions. Fortunately, this issue has been adresse using the technique of cluster analysis » (Source book, chap. 10, 172).

Une évaluation des corrélations entre ces deux dimensions et d’autres facteurs est alors effectuée (distinction clinique des deux catégories : ADD/WO et ADD/H). Une des conclusion montre par exemple que les sujets ADD/H font preuve de déficits cognitifs, de problèmes moteurs fins, d’une faible réponse au changement de routine, d’une faible estime de soi et d’un comportement anti-social croissant. Les enfants inattentifs sans hyperactivité [ADD/WO], qui présentent aussi des déficits cognitifs et une faible estime d’eux-mêmes, n’exhibent pas, eux, d’impulsivité, d’« instractibility » ou de comportements antisociaux croissants (Sourcebook, chap. 10, 175). Ces constats, qui paraissent évidents, servent à « justifier » à la fois la distinction symptomatique et le maintien de l’unité du syndrome. Des études sur les relations entre pairs permettent de conclure – selon les auteurs du sourcebook - que les deux types d’enfants (déficitaires d’attention et hyperactifs) sont plutôt impopulaires aux yeux de leurs camarades, mais que la forme d’impopularité est différente : les premiers étant mal-aimés du fait de leur retrait social, les seconds du fait de leur comportement actif. (Sourcebook, chap.10, 177). Un autre argument en faveur de l’unité du

syndrome est puisé dans les études sur le degré de « sous-réussite » scolaire (« academic underachievement »178) qui montrent que ce risque est plus élevé tant pour les enfants

hyperactifs que pour les inattentifs. D’autres études sur le fonctionnement neuropsychologique et cognitif (par le biais de tests sur la rapidité visuelle) sont brièvement relatées, qui montrent quelques différences de résultats mais aboutissent à la conclusion que ces différences ne sont pas significatives.

Finalement, c’est l’effet du médicament qui constituera l’argument déterminant de cette discussion sur la validité du diagnostic « déficit d’attention sans hyperactivité » comme sous type de l’entité diagnostique TDAH, et ce, malgré la rareté des études sur le sujet.

« One of the more pervasive arguments that could be made for the validity of differentiating ADD into two types of disorders would be differential responses to treatment. Given the wide acceptance of stimulant medication and the large amount of research on its efficacity in treating ADD/H, it is not surprising that initial attemps to test the differential response to treatment of the types of ADD have focused on the response to stimulants. However, only four studies have described the use of stimulant medication with children with ADD/WO, and only one of these provided data directly comparing the response of children with ADD/H with that of children with ADD/WO. » (Source book, chap.10, 182).

Après une présentation sommaire des quelques résultats existants (issus d’études effectuées sur des échantillons allant de 10 à 40 enfants ADD/WO) les auteurs concluent que ces enfants « sans hyperactivité » mais ayant un défaut d’attention, pourraient répondre aussi favorablement à une médication par psychostimulant que les cas hyperkinésiques (à un dosage peut-être plus faible).

« Taken together, these studies suggest that children with ADD/WO may respond favorably to stimulant medication in much the same manner as children with ADD/H, although perhaps at lower dosages » (Sourcebook, chap.10, 183).

Ces arguments confirment une fois encore une des hypothèses centrales dans ce travail, sur laquelle nous reviendrons : l’usage du médicament et son efficacité qui constitue un enjeu thérapeutique et économique important a contribué et contribue encore à la construction nosologique du trouble, c’est-à-dire à sa définition diagnostique récente.

La justification des sous-types diagnostiques du DSM-IV du sourcebook conclue donc sur la « clear evidence » empirique que des enfants présentant des difficultés d’attention mais pas d’hyperactivité motrice « are maladjusted in some aspects of their development, most often in social and academic areas » (Sourcebook, chap.10, 184). Les études suggèrent une différence cliniquement significative entre le ADD/WO et le ADHD, les deux types présentant un déficit social (impopularité) avec leurs pairs, et un déficit dans leur performance scolaire ou leur succès académique. Les auteurs du chapitre 10 du Sourcebook ajoutent que « malheureusement », les deux domaines qui pourraient être d’une grande importance pour tester la validité des deux sous-types ADD, à savoir le traitement et le pronostic à long terme, n’ont pas fait l’objet de beaucoup d’études empiriques. Ainsi « longitudinal and treatment studies of children with ADD/WO particularly in comparison with children with ADD/H are clearly a priority for the future » (Sourcebook, chap.10, 184). De telles études impliquent que des traitements (en l’occurrence médicamenteux) soient prescrits à des enfants qui présentent un déficit d’attention mais pas d’hyperactivité. Cet exemple de démonstration effectuée par l’APA et relatée dans son sourcebook, illustre le type de raisonnement qui préside les changements de la nomenclature diagnostique, qui s’appuie plus sur une logique statistique, (une reconstitution théorique et synthétique de données issues de recherches déjà effectuées) que sur une approche clinique, d’étude de cas concrets.

178 « Academic underachievement is typically defined as achievement in at least one academic area that is significantly below that predicted by a child’s age and overall intelligence » (Sourcebook, chap. 10, 177, souligné par moi).

L’issue de ces débats et des changements qui s’ensuivent ne sont pas sans conséquences pratiques, notamment dans le fait que la population concernée par le diagnostic s’élargit. Le sourcebook reconnaît que les changements apportés aux critères diagnostiques du DSM-IV notamment la distinction des domaines symptomatiques (l’inattention d’un côté et l’hyperactivité-impulsivité de l’autre) augmentent la flexibilité du syndrome, ou plutôt son applicabilité aux différentes tranches d’âge et aux différences de sexe.

Nous verrons plus loin que la promotion du diagnostique déficit d’attention sans hyperactivité permet de rééquilibrer par exemple la prévalence du trouble en fonction du sexe, ou plus exactement d’augmenter la proportion de filles diagnostiquées, qui sont par nature (ou plutôt

par culture) plus dociles, se manifestent moins par des comportements moteurs ou une

agitation physique et présentent donc moins de symptômes les plus visibles et les plus perturbateurs de la pathologie. Faire connaître et diffuser un diagnostic axé sur le trouble de l’attention sans hyperactivité aurait l’avantage – selon les auteurs du DSM – de favoriser le repérage des filles qui, même si elles dérangent moins pourraient elles-aussi bénéficier d’une prise en charge (ou d’un traitement) à condition évidemment d’être diagnostiquées. La mise en évidence plus claire de ce sous-type insiste sur le fait que les symptômes d’inattention sont moins visibles que ceux d’hyperactivité et qu’il serait dommage de passer à côté d’un diagnostic et de ne pas remarquer « qu’un problème spécifique de déficit de l’attention est responsable des mauvaises performances du sujet » (DSM-IV, Cas cliniques, 1997 FR, 15).

Comorbidité

Le débat sur la comorbidité (présence simultanée de deux pathologies) constitue un enjeu majeur de la légitimité diagnostique, et de son isolement. Voyons comment les auteurs du DSM règlent le problème de la comorbidité du TDAH avec des troubles associés qui pourrait ébranler la légitimité de l’isolement du trouble (révéler que ses contours sont arbitraires).

« The development of a conceptual model for understanding the high rate of comorbidity in ADHD is complicated by controversy regarding the validity of ADHD itself as a distinct clinical entity » (Sourcebook, chap.9, 146).

« les données actuelles plaident en faveur de l’individualisation d’un ensemble de troubles dont l’hyperkinésie est le problème central » (CIM-10, 1992, Masson, 234).

L’enjeu est d’autant plus crutial, qu’avec le TDAH, les taux de comorbidité sont élevés, bien que variés, notamment avec les troubles suivants : trouble des conduites, troubles oppositionnel avec provocation (qui font partie tous les deux de la même section que le TDAH : « troubles : déficit d’attention et comportement perturbateur »), troubles de l’humeur, notamment dépression majeur, troubles anxieux179, troubles de la personnalité borderline ou

antisociale (qui ne sont pas spécifiques à l’enfance), troubles des apprentissages, retard mental, syndrome de Gilles de la Tourette.

Le problème de la comorbidité entre TDAH et troubles des apprentissages est difficile à établir mais la distinction est importante d’un point de vue thérapeutique. Les études menées s’attellent à trouver une différence180 car « The identification of these differences may have

major clinical and educational signifiance, because the two disorders require different intervention approaches » (Sourcebook, chap.9, 154). En même temps, concluent les auteurs du sourcebook, il n’y aurait pas de grande différence, du point de vue de l’impulsivité

179« L’anxiété voire la dépression, peuvent également s’ajouter au tableau » (Science & Vie, mars n.222, 2003, 121).

180Ce constat a l’air d’étonner les auteurs du sourcebook qui semblent avoir oublié que les symptômes sont étroitement liés aux normes scolaires et que le diagnostic TDAH est posé précisément lorsque l’échec scolaire menace.

et de la réponse aux stimulants, entre les enfants DA/H et les enfants DA/H associé à un trouble des apprentissages :

« Ackerman et al. also failed to find difference between ADHD + learning disabilities versus ADHD children on measures of impulsivity and response to stimulants ». (Sourcebook, chap.9, 154)

Nous allons voir que l’argument du traitement médicamenteux est également utilisé pour justifier le fait de ne pas regrouper le syndrome du DA/H et le trouble des conduites, qui pourtant sont souvent associés.

« Proponents of this position to the similarities between children with ADHD and children with conduct disorder frequently reported in studies of correlates, outcome, and treatment responses » (Sourcebook, chap. 9, 149).

La comorbidité entre le TDAH et le trouble des conduites toucherait 30 à 50 % des enfants diagnostiqués. Ce constat a amené les chercheurs à interroger la dissociabilité de ces 2 troubles, pour savoir s’il faut les regrouper ou non. Ceux qui considèrent ces troubles comme

indistinguables, pointent la proximité des symptômes, ainsi qu’un manque de différence

significative entre les enfants présentant ces deux troubles dans les facteurs psychosociaux, neuro-développementaux, et périnataux. On le voit, dans ce débat (relaté dans le

Sourcebook, mais pas dans le DSM) la question étiologique apparaît sporadiquement, de

même que les critères thérapeutiques. Ceux qui pensent que ces 2 troubles sont et doivent rester indépendants auront gain de cause dans ce débat, parce qu’ils montrent que le devenir de ces enfants présentant des troubles associés est bien souvent pire181 que celui

des enfants seulement TDAH. Ces défenseurs de la différenciation des syndromes arguent que les études sur les facteurs familiaux prédisposants ne sont pas les mêmes : les parents présentant des comportements anti-sociaux et alcooliques sont associés aux enfants ayant des troubles des conduites et moins aux enfants ADHD182. On voit apparaître ici un

raisonnement qui tient compte du contexte familial, considéré comme facteur influençant le comportement de l’enfant.

Les études qui montrent que la réponse aux stimulants améliore les symptômes TDAH chez les sujets TDAH avec ou sans trouble de la conduite associé, ne suffisent pas à regrouper les deux troubles, et donc ne résolvent pas le débat mais invitent à poser un double diagnostic en cas de comorbidité.

« Although these two studies cannot help resolve the debate regarding the independence of ADHD and conduct disorder, they support the clinical relevance of diagnosing both ADHD and conduct disorder when the disorders co-occur (…) Data from treatment studies have thus far not resolved the debate » (Sourcebook, chap. 9 150).

L’issue de ce débat sera donc de garder deux entités distinctes, et de promouvoir un double diagnostic qui pourrait aider à déterminer un sous-groupe d’enfants (ceux qui présentent les deux troubles associés) dont le pronostic serait plus sérieux, dont les facteurs de risques « family-genetic » sont différents, et qui requiert une intervention thérapeutique compréhensive spécialisée (Sourcebook, chap. 9, 150).

181 Le trouble des conduites considéré comme ayant un « strong predictive power » de futurs problèmes psychiatriques, problèmes d’adaptation, personnalité anti-sociale, alcoolisme, criminalité. Les auteurs font l’hypothèse que les comportements délinquants et les abus de substance dans les études longitudinales de garçons hyperactifs seraient plus liés à un trouble de l’enfant anti-social plutôt qu’au syndrome ADHD lui-même. (Sourcebook, chap. 9, 150).

182« Family studies have schown that childhood conduct disorder, and not ADHD, is associated with parental antisocial behaviors and alcoholism » (Sourcebook, chap.9, 149). Il faut relever que la rubrique « aspects familiaux » qui figure dans le DSM a été légèrement modifiée entre la version III-R et la version IV. En effet, la phrase : « parmi les membres de la famille, on pense que les troubles suivants sont sur-représentés : troubles spécifiques du développement, dépendance ou abus alcoolique, troubles des conduites et personnalité antisociale » (DSM-III-R, 1989 FR, 56) est devenue : « Certaines études suggèrent également une prévalence accrue de troubles de l’humeur, de troubles anxieux, de troubles des apprentissages, de troubles liés à une substance et de personnalité antisociale dans les familles de sujets ayant un DAH » (DSM-IV, 1996 FR, 98).

La classification internationale des troubles mentaux (CIM-10) reconnaît elle aussi que « le diagnostic différentiel avec les troubles des conduites est particulièrement difficile » (CIM-10, 1992, Masson, 236). Elle pose que le diagnostic hyperkinétique « a priorité sur celui de trouble des conduites », même si certains symptômes du premier sont fréquents dans le trouble des conduites et précise qu’il est possible de porter un double diagnostic lorsque cela est nécessaire, double diagnostic pour lequel elle réserve un code particulier (F- 90.1 :« Trouble hyperkinétique et trouble des conduites »).

Le problème des diagnostics associés pose la question de la priorité du diagnostic de l’un ou l’autre syndrome. La CIM présente clairement sa hiérarchie des diagnostics.

« Un autre problème se pose quand une hyperactivité et une inattention, relativement différentes de celles qui caractérisent un trouble hyperkinétique, surviennent en tant que symptômes d’un trouble anxieux ou dépressif. Ainsi, l’agitation typique d’un trouble dépressif agité ne doit pas faire porter un diagnostic de trouble hyperkinétique. Si les critères d’un trouble anxieux (F40.-, F41.-, F43.-, ou F93.-) sont réunis, on ne doit pas faire un diagnostic de trouble hyperkinétique, sauf si l’agitation s’accompagne d’autres symptômes en faveur d’un trouble hyperkinétique. De même, si les critères d’un trouble de l’humeur (F30- F39) sont réunis, on ne doit pas faire un diagnostic additionnel de trouble hyperkinétique sous prétexte qu’il existe des troubles de la concentration et une agition psychomotrice. Un double diagnostic n’est justifié que si le trouble hyperkinétique est manifestement présent séparément, ses symptômes étant indépendant du trouble de l’humeur » (CIM-10, 1992, Masson, 236). Ainsi la CIM-10 invite à exclure les diagnostiques suivants avant de poser celui d’hyperkinésie : Schizophrénie (F20.-) ; troubles anxieux (F41.- ou F93.0) ; troubles envahissants du développement (F84.-) troubles de l’humeur [affectifs] (F30- F39).

La hiérarchie des priorités n’est pas si clairement établie au sein du DSM. Il semble en fait que l’APA tente maladroitement de faire du diagnostic TDAH un diagnostic minimum ou

premier. Nous reviendrons sur cette question à propos de l’analyse de la controverse

genevoise.

La discussion présentée plus haut sur la comorbidité avec le trouble de la conduite est révélatrice du type de débat que relate le Sourcebook, qui tente de justifier l’articulation des syndromes183 présentant des tableaux cliniques proches. En réalité, si tout est justifié, rien

n’est réellement démontré. Les études présentées sont soigneusement choisies, et réinterprétées dans le sens des décisions prises. Par ailleurs, les principaux arguments sont bien souvent le fait d’hypothèses étiologiques et de considérations thérapeutiques que le DSM prétend pourtant ne pas aborder, ni résoudre.

Les suppositions pronostiques sont également au cœur de la discussion sur la comorbidité et sur l’isolement des entités diagnostiques susceptibles de définir des groupes à risque, comme le montre l’exemple qui suit. La comorbidité du TDAH et des troubles de l’humeur (dépressif ou autre) apparaît selon les études dans 15 à 75 % des cas. Certaines études ont montré que le risque est élevé de trouver des enfants TDAH chez les parents souffrants de troubles de l’humeur. Dès lors certains auteurs font l’hypothèse que le TDAH et la dépression majeure pourraient avoir une vulnérabilité familiale commune. Des calculs d’incidences probabilistes aboutissent à la conclusion d’un génotype commun et d’un

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