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Vers la Classification Internationale du Fonctionnement, du Handicap et de la Santé

1. D’une histoire agitée et d’une perception confuse du handicap

2.1. Le handicap au cœur des conjonctures dans la première moitié du XXe siècle

2.2.2. Vers la Classification Internationale du Fonctionnement, du Handicap et de la Santé

En 1992, pour réagir aux critiques qui n’ont pas manqué d’être formulées37, l’OMS

engage un processus de révision de la CIH qui aboutit cinq ans après en juin 1997 à la publication d’une première version provisoire intitulée : Classification internationale des

déficiences, des activités et de la participation sociale. Un manuel des dimensions de l’invalidation et des aspects fonctionnels. Version provisoire Bêta-1 pour essai sur le terrain. Une seconde version provisoire sera proposée en juillet 1999 sous le titre : Classification internationale du fonctionnement et du handicap, version provisoire Bêta-2,

sur la base des résultats des tests d’évaluation réalisés avec les collaborateurs (Australie, Canada, Etats-Unis, France, Pays-Bas, Grande-Bretagne, Japon, Suède) et avec d’autres institutions dans le domaine de l’enfance, de la santé, de l’environnement, etc. Cette seconde version est ensuite mise en test de validation, après quoi l’OMS a pu proposer en décembre 2000 une troisième version encore provisoire. Cette dernière sera soumise au Comité exécutif de l’OMS en janvier 2001 qui l’adoptera et la fera définitivement ratifier en mai 2001 par l’Assemblée mondiale de la santé sous le titre : Classification internationale du

fonctionnement, du handicap et de la santé38.

37Par exemple, les terminologies de la CIH restaient aussi équivoques et difficiles à cerner d’après le Docteur

Bernard Azéma : « il faut en convenir, soutient-il, la pénétration des idées et concepts de la Classification proposée par Wood et l'OMS ne s'est pas faite facilement » (Azéma, B., 2001, p. 29).

38Azéma, B., Barreyre, J.-Y., Chapireau, F., & Jaeger, M., (2001), Classification internationale des handicaps et santé mentale. Paris : CTNERHI.

Elaborée suite à de nombreuses séries d’enquêtes et de tests de validation, la nouvelle Classification Internationale du Fonctionnement, du handicap et de la santé, connue sous le sigle CIF, remplacera la CIH et sera adoptée par au moins 200 pays de par le monde. Elle nourrit le but de « proposer un langage uniformisé et normalisé ainsi qu’un cadre pour la description des états de la santé et des états connexes de la santé » (« CIF », 2001, p. 3). Pour Jamet (2003), l’originalité de la CIF est d’avoir « proposer un troisième modèle qui permet d’unifier les deux modèles du handicap, le biomédical et le social, non pas en en faisant la somme, mais en conceptualisant un nouveau modèle tridimensionnel. Il se compose du modèle biomédical, du modèle psychologique (c’est-à-dire de la dimension individuelle) et du modèle social » (Jamet, F., 2003, p. 167). Nous rappelons que la « dimension individuelle » dont parle Jamet (2003), distinguée dans la CIF par l’appellation « facteurs personnels » (l’âge, le sexe, les conditions sociales, les expériences de vie, etc.) ne fait pas l’objet d’une classification particulière dans la CIF ; elle y est notifiée comme pouvant être intégrée dans l’application de la CIF par les utilisateurs (« CIF », 2001, p. 224). Ci-dessous la redéfinition des paramètres de catégorisation du handicap par la CIF :

- La fonction organique qui désigne l’ensemble des fonctions corporelles, les fonctions physiologiques du système organique (fonctions sensorielles, digestives…) et les fonctions psychologiques (fonction mentale…). Par exemple, la paralysie d’un bras entraîne une réduction de la fonction de motricité.

- La structure anatomique qui concerne les parties du corps humain telles que les organes, les membres et leurs composantes. Par exemple, une personne amputée d’un bras (ou ayant un bras en plus) est concernée par cette structure.

- L’activité et la participation qui désignent l’implication dans la vie réelle, sociale, domestique, civique, etc., depuis les apprentissages les plus élémentaires ou l’observation, aux domaines plus complexes ; on y évalue les performances et les capacités. Par exemple, les relations ou la communication avec autrui, l’occupation d’un emploi, apprendre à lire, lancer ou attraper un objet, prendre son bain ou faire le ménage, etc.

- Les facteurs environnementaux enfin qui « constituent l’environnement physique, social et attitudinal dans lequel les gens vivent et mènent leurs vies » (« CIF », 2001, p. 177). Cela désigne tout ce qui est facteur extérieur potentiellement handicapant.

Par exemple, les situations de pauvreté, la famille, les professionnels, les systèmes techniques, les transports, etc.

Une personne qui présenterait un écart ou une atteinte concernant un ou plusieurs de ces quatre paramètres est alors désignée comme une personne en situation de handicap. Ainsi, on dénombre aujourd’hui sur le modèle de la CIF plus d’un milliard de personnes, c’est-à-dire environ 15% de la population mondiale (OMS : Handicap et santé, 2014) qui présenteraient une forme ou une autre de handicap, un taux toujours en hausse en raison du vieillissement des populations, de la propagation rapide des maladies chroniques, des nouvelles méthodologies de mesure du handicap, etc. La CIF est la toute dernière classification internationale du handicap en date, et de ce fait peut être considérée comme la référence internationale dans le champ du handicap. Pendant qu’elle est vue d’une part comme ayant contribué à positiver les termes utilisés afin de minimiser les stigmatisations (Hamonet, C. & De Jouvencel, M., 2005), d’autre part, certains auteurs à l’instar de Marc Maudinet, la voient dans sa conceptualisation comme une « nomenclature » l’estimant proche des modèles classificatoires qu’utilisaient les zoologistes ou botanistes du XVIIIe siècle (Jamet, F., 2003). Pour notre part, nous pensons que si la CIF reste un cadre essentiel pour l’appréhension de la santé et du handicap, elle est cependant appelée à se faire plus opérationnelle en ouvrant le champ du handicap à des jours plus modernes ; elle doit servir de fournisseur stratégique d’équilibre entre les secteurs sociaux et médicaux, et enfin elle doit « ouvrir » la société pour que les personnes en situation de handicap puissent jouir de leurs chances et de leurs droits, à égalité avec les autres citoyens.

2.3. La loi de 2005 ou une (re)définition nationale du handicap