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– Accepter Une trahison t

Dans le document A la plus belle / Paul Féval (Page 117-123)

Ou bien, continua le nain, mettre ta large main sur l'é-paule du finaud et lui dire Au nom du duc François, mon seigneur, vous êtes mon prisonnier, sire 1

Mettre la main sur le roi 1

Ah 1 Jeannin

Jeannin

t tu ne seras jamais chevalier.

Et ta

fille pleurera

tant

qu'elle mourra 1

Ma fille

s'écria

Jeannin qui le regarda ébahi.

A ce moment, Jeanninepassa le seuil de 1~ salle. Elle

était toute

pâle et bien changée. Elle portait un costume de voyage.

Mon père, dit-elle,je pars pour Dol, sous votrebon

plai-sir.

Et

quand reviendras-tu?

Je

ne sais; ma grand'mèreLe Priol veut bien que j'habite avec elle.

Jeannin croyait rêver. Sa fille était née au manoirdu Roz.

Pourquoice départ? Pour la première fois, la lumière essaya de se faire dans l'esprit du bon écuyer. Il regarda du côté de

Fier-à-Bras tourna la tête. Jeannin hésita Fier-à-Bras. Mais Fier-à-Bras tourna la tête. Jeannin hésita avant de parler.

– Tu

ne veux donc plus demeurer au manoir, ma fille?

~manda-t-il

avec une sorte de timidité.

La voix de Jeanninedevint plusbasse et tremblalégèrement.

Je ne le peux plus, mon père, répondit-elle.

Oh 1 oh 1 oh s'écria en ce moment le nain qui se guinda sur l'appui de la croisée voyez voyez f

Jeannin et sa fille regardèrent au dehors. Dans le cliemin qui descendait au Marais de Dol, les derniers rayons du soleil couchant mettaient de rouges reflets aux casques et cuirasses d'une troupe d'hommes d'armes. Au centre de la troupe, l'homme au surcot brun chevauchait sur son humble bidet.

Maître Pierre Giiïot

n'était

pas entré à l'étourdie sur le do-maine de son cousin de Bretagne t

Jeannin détourna les yeux de ce spectacle et les reporta sur

sa fille.

Enfant,dit-ilen la baisantau front,

tu

es commeta mère;

ce que tu penses est bien pensé. Va demeurer avec ton aïeule, et que Dieu nous protège t

Dame Fanchon Le Priol, grommela le nain, loge vis-à-vis de l'hôtel de Maurever. Vous verrez que désormais messire Aubry ne se fera plus prier pour rendre visite à sa belle cou-sine 1

XIV

LE LOGIS DE BERTHE

A la place fut commencée, quelques années plus

tard,

cettemagnifiquecathédralede Dol, qui tombera en poussière

avant d'être achevée, la rue Miracle descendaittortueusement vers le champ de foire. C'était le quartier noble. Il y avait jusqu'àcinq hôtels projetant leurs pignonspointussur l'étroite

voie, et ces cinq hôtels faisaient l'achalandage principal de dame Fanchon Le Priol, autrefois métayère au bourg de Saint-Jean, présentement mercière.

Dame Fanchon ouvrait sa boutique, bien fournie de rubans, lacets, agrafes, cordonnets de soie et touffesde laines tressées, juste en face de l'Hôtel de Maurever. Elle avait de l'âge, la bonne femme, mais elle gardait honnêtemine et buvait encore

son écuellée de cidre d'une seule haleine. Simon Le Priol, son mari, dormaitdepuis longtemps au cimetière.

L'hôtei de Maurever

était

un édifice assez grand, qui

abri-tait

sa porte massive dans un enfoncement en forme de niche.

La viergeMarie et sainteAnne étaient dans deux autresniches plus petites auxdeux côtés de l'huis. Le soir, on allumaitdeux petits cierges de résine sous les pieuses images, et

c'était

l'uniqueéclairage de la plus belle rue de Dol.

Nous penchons même à croire qu'on l'appelaitla rue Miracle à cause de ces deux lampions protecteurs,car, à cette époque,

c'était

vraimentmerveille qu'une lumière brillant dans la nuit d'une ville bretonne 1

Deux petites tourelles, de hauteur et de formes inégales,

avançaient sur la rue aux deux cornes du portail; celle de droite avait un balcon de fer qui faisait saillie sous son dais de granit festonné. Sur ce balcon s'ouvrait la fenêtre de Berthe-Mathilde de Maurever, demoiselle de Montfort, fille

d'Enguerrand de Maurever, seigneur de Montfort et du

Bosc, cadet de feu M. Hue.

Berthe possédait un grand héritage du chef de sa mère, qui

ctaiL de la maisor. de Combourg,et

n'avait

pas de frère.

La fenêtre de Berthe, haute et large, coupait son cintre en ogive très évasée. Les carreaux s'enchâssaient dans des trèfles d'ébcnc, reliés par des couronnes ovales et ouvertes comme celles qui se tiennent suspendues sur la tête des saints. La chambre

était

hexagone. Le pan qui faisait face à la croisée rentrait dans le corps de logis et formait une énorme alcôve, au fond de laquelle se dressait un prie-Dieu entre deux chan-deliers d'argent à branches. A droite de l'alcôve une porte vitrée donnait issue sur un jardin suspendu, communiquant par des terrasses tournantesavec les grands parterresde l'hô-tel.

A gauche, c'était le /~cfu~pour s'a/u.s<'er la toilette.

Berthe avait dix-huitans, il lui fallait peu de soins pour se

faire beU~. Elle n'avait qu'à ne point trop cacher ses brillants cheveuxà reflets perlés, sous le cône rigide que la mode impo-saitalors aux têtesdes nobles dames; elle n'avait qu'à montrer

sa taille hr rdie et flexible, ses belles mains blanches et son petit pied cie fée; elle

n'avait

qu'à relever les longs cils de la paupière, voilant la fierté douce et tendre de ses yeux bleus;

elle n'avait qu'à sourire.

Elle

était

grande; il y avait un peu de hauteur dans sa grâce, mais beaucoup de naïveté. Les pauvres gens de Dol sa-vaientsi elle était charitable et bonne1

Elle avait perdu sa mère dès l'enfance, son père qui l'avait

élevée,

était

un assez beau portrait de famille. Il suivait la

cour de Nantes. Au temps de la Praguerie c'avait. été un su-perbe capitaine.

Nous entrons à l'hôtel de Maurever quinze jours après la visite que fit Pierre Gillot, de Tours en Touraine, au manoir du Roz. Il

n'était

pas encore midi Berthe achevait sa toilette.

Javotte,

sa fille de chambre, grosse brune aux yeux rieurs, étageaitle long de ses joues les tresses lustrées de sa coiffure et bavardait comme il convient à une caméristc doloise. Les caméristes doloises ressemblent aux filles de chambre des autres pays.

Pour quant à ça qu'il est gentil, mais gentil

tout

plein,

oh Seigneur Dieu du ciel 1 disait-elle en supprimant les vir-gules pour ne rien perdre, c est la vérité vraie, je ne mens pas 1 Quand il chevauche dans la rue avec Jeannin, son écuyer, (encore un qui est beau, c'est sûr!), toutes les demoiselles se

mettent aux fenêtres pour le voir passer. Que c'est même effronté, à elles, on peut le dire, de se pendre aux croisées pour dévisager les hommes

d'armes!

Tournez voir un petit peu votre tête, demoiselle

Berthe.. Là!

Quoique ça, la

Haou-lette Guennec (depuis qu'il est échevin, son père a

tant

grossi, qu'il se tientde côtépourpasser à la portedu Champ-DoIcuL1),

la Raoulettc lui sourit

tant

qu'elle peut, à l'écuyer

Jeannin.

– Tu

es médisante, petite

Javotte,

dit Berthe doucement.

Moi, médisante, demoiselle ah

mi

Jésus Croyez-vous que ça ne m'est pas bien égal que la Raoulette, et même Fan-chon du Haut-Lieu, sans parler d'Yvonne la Rousse, fassent les doux yeux à l'écuyer Jeannin? Mais dame si mais dame

si ça m'est bien égal Tout ça

c'était

pour vous dire que messire Aubry perd la tête à cause de vous Depuis quinze jours, il vienten la ville de Dol matinet soir. Il passe, il repasse bonté des anges1 Parla rue Miracle, a pied, à cheval, le matin,

le

soir.

Ec jamais il ne franchit le seuil de l'hôtel interrompit Berthe avec tristesse.

Ah 1 mais dame r ah 1 mais dame 1 s'écria la grosse

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