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La notion de rationalité133 est une déclinaison de la notion philosophique de raison. Cette déclinaison, récente par rapport au parcours historique d’une notion comme celle de la raison, surtout inscrite dans les champs disciplinaires philosophiques et théologiques, se retrouve dans quatre mouvements théoriques : à savoir la théorie de la décision, science normative de l’action mobilisant les probabilités ; la théorie des jeux, fondée sur une interrogation et une recommandation en matière de conduite individuelle face à l’imprévisibilité du comportement d’autrui ; les prémisses du développement de la science économique, se cristallisant à partir des travaux des Lumières et d’Adam Smith ; la

psychologie cognitive s’interrogeant sur la fiabilité de l’usage spontané de la raison, par

exemple dans les estimations liées aux probabilités ou dans la détermination des relations de causalité (BOUDON, 2009). Cependant, il s’agit dans un premier temps de remonter plutôt aux origines même de cette déclinaison, notamment dans la distinction opérée entre rationalité du discours et rationalité liée à l’action individuelle, distinction difficile à faire étant donné que ces deux formes de rationalité se correspondent et se répondent. Cette approche permet, en effet, de mettre en avant, l’influence toujours prégnante d’une rationalité dite monofonctionnelle, c’est-à-dire d’une rationalité linéaire (qui est aussi collective, dans le cadre du projet), en dépit de l’existence de multiples formes de rationalité.

La rationalité du discours, tirée du logos, amène à une spécification de ce même logos. Ce dernier, à son origine, s’applique à la parole synonyme de dialogue politique d’une Grèce classique, par opposition à la parole des anciens rois archaïques strictement hiérarchisée, s’imposant comme un acte de magie. Cette confrontation se retrouve dans l’Iliade, témoin du passage d’un système palatial, fondé sur le religieux, hérité de la civilisation mycénienne, dont le symbole est l’Acropole, à un autre système toujours guerrier mais fondé sur la politique et sur un nouveau centre, l’Agora, comme le montre Paul Blanquart (1997). Elle se cristallise en particulier dans les caractères opposés d’Agamemnon et de Priam. Ce dernier, revêtu d’une autorité presque divine, tel un oracle, impose un texte déjà écrit d’avance, à l’inverse d’un Agamemnon dont le pouvoir terrestre est source de critiques. Deux types de paroles en ressortent et se succèdent, opposant un système pyramidal à un système de guerriers aristocrates qui échappe au sacré pour entrer dans le politique :

« La parole-dialogue se substitue à la profération magico-religieuse (…). L’assemblée de guerriers, côté grec, forme un cercle au milieu duquel sont déposés le butin ou les prix mis en concours. Ainsi s’établit une équivalence entre le milieu et ce qui est commun, public, appartenant à tous. Cette assemblée est aussi le lieu où chacun peut également prendre la parole : quiconque veut s’exprimer sur ce qui intéresse le groupe s’avance au milieu et prend le sceptre en main. (…) Une activité proprement politique, distincte du religieux et autonome se constitue. (…) Ainsi se concrétise la rupture entre le guerrier aristocrate et le sacré » (BLANQUART, 1997, pp. 41 - 42).

Cette même opposition est aussi rappelée par Lucien Sfez (1992), dans la perspective historique qu’il offre à propos de l’élaboration du concept de décision. La période des rois

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archaïques consacre un ensemble d’énoncés théogoniques, une généalogie mythique mettant en avant l’origine divine des hommes. La décision n’existe pas, au profit de rôles distribués d’avance, et où l’espace même est qualifié en fonction de l’exercice d’une parole magique et non pas envisagé de façon quantitative, c’est-à-dire comme un espace partageable. Selon Lucien Sfez, avec la Polis, l’espace devient différent : il est déqualifié, quantifiable et mesurable dans toutes ses parties. A l’image du cercle de guerriers mesurant leur part du butin de guerre, évoqué auparavant, cet espace est aussi un espace d’échanges et de négociations. L’instrument de sa mesure sera le logos, « la raison qui mesure et qui partage, la discussion égale entre partenaires » (SFEZ, 1992, p. 43). C’est la naissance de la décision rationnelle contre la parole-acte magique, du compromis entre partenaires égaux contre les décrets arbitraires (Ibid.). Pour Lucien Sfez, à la pyramide, deux nouvelles figures s’imposent, celle du cercle et de la ligne, structurant le modèle de la décision, le cercle symbolisant le lieu du partage, la ligne symbolisant les distinctions entre vrai et faux, bon et mauvais, beau et laid. Pour arriver à l’action de partage, il faudra désormais instituer un dialogue, un discours en règle, c’est-à-dire une parole qui institue une distance. Le dialogue est, en effet, ce « qui advient à la loi à travers (dia) la parole, instaure une distance (dia) entre le fait et la loi (nomos), entre faire et dire » (SFEZ, 1992, p. 43). L’édifice de la décision ne s’arrête pas cependant à la période antique : universalité de la décision chrétienne libre, raison thomiste et doute cartésien participent bien sûr à cet édifice (SFEZ, 1992). Cependant, le logos du cercle démocratique, la ligne droite de la droite raison persistent aussi et structurent le champ de la rationalité.

Quel lien, cependant, a lieu entre la rationalité d’une façon générale et le concept de linéarité ? La linéarité, prise dans sa signification cartésienne, consiste en un ordre des choses : elle possède ainsi une signification éminemment temporelle. L’analyse cartésienne du temps de l’acte volontaire se structure autour d’une chaîne continue d’activités, entre deux bornes délimitées, la conception du projet ou désir pour son commencement, et la satisfaction du désir en fin de chaîne (SFEZ, 1992). Entre ces deux limites, la délibération et la décision constituent les termes intermédiaires. L’absence d’une ou de plusieurs de ces étapes ou de ces limites entraîne des maladies de la volonté. La linéarité cartésienne suppose que, pour atteindre un point déterminé, il faille passer par les autres éléments inscrits dans un ordre précis. L’ordre est ainsi défini par Descartes dans sa réponse aux Secondes Objections :

« L'ordre consiste en cela seulement que les choses qui sont proposées les premières doivent être connues sans l'aide des suivantes, et que les suivantes doivent après être disposées de telle façon, qu'elles soient démontrées par les seules choses qui les précèdent » (DESCARTES, 1967, p. 581).

Cette linéarité suppose aussi de la discontinuité, paradoxalement : elle constitue une série continue alliant des moments différents, qui ont leur particularité. La ligne est, en effet, morcelé de points qui ne sont pas interchangeables : délibération et décision, par exemple, dans ce schéma linéaire de la décision cartésienne évoqué par Lucien Sfez (1992), ne peuvent se confondre. Par ailleurs, elle a pour conséquence une conception du temps particulière, un temps découpé et séquencé, mettant surtout en valeur des présents successifs, au détriment d’un futur inexistant :

« Le présent seul compte, discontinu, s’efface au profit du présent nouveau qui advient. Il est tout de suite passé : le passé fait de présents successifs est digne de foi, le futur

par contre n’a pas d’existence du tout, et tout ce qui a trait à lui ne peut être une science » (SFEZ, 1992, p. 56).

Ce temps-là n’est finalement pas si éloigné de la vision proposée par la doctrine fonctionnaliste134, tel que rapportée par Jean-Yves Toussaint (2003). Dans le cadre de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme, il ne s’agit pas à proprement parler de l’existence d’une rationalité mais plutôt de l’existence de multiples formes de rationalité, qui peuvent d’ailleurs entrer en conflit entre elles : rationalité organisationnelle et économique dans la formation de la réalité urbaine opposée aux formes de rationalisation plastique ayant lieu en architecture et en morphologie urbaine, économie des usages et de la production, rationalité du zonage, rationalité instrumentale, rationalité urbanistique, etc. (TOUSSAINT, 2003). Cette énumération s’inscrit aussi dans les trois rationalités généralement à l’œuvre en matière de décision, qui constituent trois visions de pouvoir et trois visions du monde (SFEZ, 1992). La première se veut universelle, spatiale, autoritaire, celle de l’imposition d’une vision du haut, du supérieur dans un processus hiérarchisé, où l’espace et le temps sont soumis à cet ordre supérieur :

« Une chaîne de représentants de cet ordre supérieur devra unir le plus petit médiocre des sujets (le local) à l’ordre quasi divin qui est celui de la raison et que représente l’autorité centrale. Il y a bien de la théologie rationnelle dans les opérations de décentralisation, dans les plans directeurs et, en général, dans les administrations centrales vis-à-vis des communautés qu’elles gèrent » (SFEZ, 1992, p. 481).

La deuxième rationalité se veut historique, démocratique, spatio-temporelle. Elle s’exerce sous la forme d’un compromis, entre la nature et le travail humain, entre le grand et le petit, entre les hommes dans le cadre de discussions démocratiques (SFEZ, 1992). L’histoire, faite par et pour les hommes, son devenir, doit être faite progressivement, en plusieurs étapes. On y retrouve des inspirations rousseauistes, notamment sur ce contrat social à passer entre le peuple et la nature (SFEZ, 1992). Enfin, la troisième forme de rationalité est celle des temps nouveaux, issue d’un compromis entre les deux formes précédentes de rationalité (Ibid.). Le point de départ en est local, porté sur l’associatif et le petit groupe, mais aussi empreint d’une idéologie de totalisation, portée par une vision technique prédominante.

Concernant la conception fonctionnaliste et ses inspirations, elle rappelle fortement la première forme de rationalité, telle qu’évoquée par Lucien Sfez (1992). Par ailleurs, elle mobilise un rapport du temps à l’espace particulier. L’espace devient déroulement et support d’un temps séquencé et prévisible :

« Le mouvement et le déroulement organisent l’espace en séquences nécessaires : tout comme les tâches productives sont décomposées en gestes nécessaires qui organisent l’espace de l’atelier et, plus généralement, l’espace de la production au sein de l’entreprise, les activités humaines sont décomposées en mouvements nécessaires qui organisent l’espace du monde… » (TOUSSAINT, 2003, p. 156).

134 Jean-Yves Toussaint entend par doctrines fonctionnalistes, l’ensemble des doctrines architecturale et urbanistique et d’aménagement, issues des travaux du IVème Congrès International d’Architecture Moderne (CIAM) et de Le Corbusier, dont l’optique est de faire advenir un nouvel espace moderne, accordé selon les nouvelles pratiques tayloriennes de la production industrielle (TOUSSAINT, 2003).

Dans le cadre conceptuel qu’il élabore pour le schéma fonctionnaliste, Jacques Dreyfus note aussi ce rapport particulier au temps (et conjointement à l’espace), et dont l’exercice n’est pas sans rappeler la notion d’opération d’urbanisme ou la vision d’un projet comme outil de planification. La satisfaction des besoins de l’homme, fondement supposé du bonheur de l’homme, se fait selon deux variables. La première, l’espace, défini selon les fonctions, est découpé et différencié. Mais le temps est aussi découpé de manière à ce qu’à « (…) chaque besoin corresponde, à la fois une partie de l’espace et un morceau du temps » (DREYFUS, 1973, p. 92).

Il en ressort un ordre linéaire et répétitif, inscrit dans une forme de déterminisme fataliste. Il est à noter que ce déterminisme fataliste se retrouve aussi dans la conception du temps comme chaîne causale au XIXe siècle, tel que soulignée par Georges Poulet :

« (…) le temps du XIXe siècle apparaît essentiellement comme un mouvement continu qui se saisit à partir de sa cause originelle : il est un devenir qui est toujours futur. (…) La réalité n’est plus, comme dans le devenir aristotélicien, la chose achevée, mais le processus génétique lui-même par lequel la cause engendre ses effets » (POULET, 2006, p. 41).

La linéarité suppose une continuité du temps, dont le présent serait la continuité d’un passé et dont l’analyse pointue et détaillée permettrait d’expliquer les circonstances actuelles (SFEZ, 1992). Cette vision mécaniste sert de support à la prévision, cette dernière se différenciant de la prospective :

« Toute la différence entre prévision et prospective vient de ce que l’une, la prévision, considère le futur comme une dépendance linéaire d’un état des choses, et que l’autre envisage (ou essaye) un futur coupé du présent, brisé, un possible, dans l’éventail des possibles (…) » (SFEZ, 1992, p. 320).

A propos des plans, Jean-Yves Toussaint (2003) souligne aussi des scripts et des scénarios, mais s’inscrivant plutôt dans l’imposition de la vision d’un organisateur, rendant prévisible chaque acte et situant chaque position dans l’espace et dans le déroulement. En dépit des affirmations d’étapes de projets ne se réalisant pas forcément de façon successive, c’est-à-dire dans un ordre donné une fois pour toute, il ressort finalement que, parmi les différentes retranscriptions des dimensions temporelles des projets que nous citons en exemple par la suite135, certaines restent influencées par cette linéarité cartésienne. Il se produit ainsi une sorte d’hybridation paradoxale : entre des représentations liées au mode

projet (TOUSSAINT, 2003) tirées d’exemples de projets d’espaces publics lyonnais décrits

plus tard, inscrites dans une linéarité affichée et un texte écrit revendiquant, cependant, une disposition non forcément successive des étapes, par exemple136. La linéarité n’est pas seulement symbolisée par la figure de la ligne. Si Alain Avitabile met en avant un schéma itératif des trois composantes-clés du projet urbain, la représentation qu’il propose cache aussi, cependant, de la linéarité137. La critique qu’offre Lucien Sfez à propos de la linéarité

135 Cf. IV. C. a. pp. 188 – 193. 136 Cf. IV. C. b. pp. 197 – 202. 137

permet de mettre en exergue une des autres caractéristiques de la linéarité, l’opposant à la notion de système, dans le cadre des graphes en semi-treillis138 et en arbre139 :

« En somme un schéma en semi-treillis est encore linéaire en ce que ces éléments sont en nombre finis et posés préalablement ; les relations sont cependant plus fines, révèlent la complexité et les interdépendances. Mais dans le cas du semi-treillis comme dans le cas de l’arbre, ce qui compte avant tout ce sont les éléments en nombre fini » (SFEZ, 1992, p. 86).

A l’inverse, la notion de système se base sur les relations : le nombre des éléments importe peu. L’exemple de la famille est donné pour illustrer cette notion : dans une famille de quatre enfants, les rapports des parents et enfants et les rapports des enfants entre eux importent, si deux enfants sont retirés, les rapports demeurent entre les membres de la famille restant (SFEZ, 1992). La famille est donc un système. Pour en revenir au schéma triangulaire et circulaire d’Alain Avitabile à propos du projet urbain, ce sont surtout les composantes-clés (en nombre défini et dans la description de leur contenu) qui ressortent, au détriment des relations les liant. Il existe donc bien une certaine linéarité sous-jacente à la description proposée par Alain Avitabile à propos du projet urbain.

La linéarité renvoie à une mono-rationalité quand il s’agit d’évoquer la causalité, en particulier de la causalité linéaire cartésienne. La définition de la ligne, telle qu’établie par Descartes suppose un mouvement continue, un ordre successif engendrant des mouvements perceptibles par la raison, non par les sens : ces lignes composées ou simples peuvent être décrites « par un mouvement continu, ou par plusieurs qui s’entresuivent et dont les derniers soient entièrement réglés par ceux qui les précèdent » (DESCARTES, 2009, p. 429). Cette construction de l’esprit met en place un ordre orchestré par la raison et appliqué à la discontinuité des points : « elle [la raison] lie, mesure, range, et peut par là même expliquer (déployer) une chaîne continue entre des mouvements discontinus » (SFEZ, 1992, p. 58). La confusion s’opère entre cet enchaînement et la causalité : le moment postérieur est expliqué par ce qui advient antérieurement. La cause se trouve dans l’ordre de successions. La rationalité comportementale provient alors d’un enchainement causal clair : « Mon comportement, mon choix est rationnel si tous les moments de ma motivation à l’exécution sont clairement ordonnés, si chaque moment engendre le suivant de manière à former une chaîne de déductions transparentes à l’entendement » (SFEZ, 1992, p. 58). Chez Descartes, c’est surtout la cause motrice qui est retenue plutôt que la cause finale : la cause finale, c’est-à-dire ce vers quoi l’agent tend, est sujette à l’erreur et aux incertitudes, et est de nature sensuelle et matérielle. Dans cette configuration, le passé et le présent s’imposent au détriment d’un futur jugé trop incertain et aléatoire.

Cette rationalité comportementale place au centre de sa problématique un sujet libre responsable de ses actes. Cette prégnance du sujet et de ses démarches rationnelles sont sous-jacentes, par exemple, dans la chronologie du projet de quartier de la Part-Dieu élaborée par Jean-Yves Toussaint, que nous évoquons par la suite140. Il souligne, en effet, « un dessein rationnellement construit par des organisations visant dans l’opération la réalisation de leurs

138 Pour le graphe en semi-treillis, l’auteur le définit ainsi : « En partant d’un point, on peut revenir sur le point de départ en passant par des points différents au retour : on peut faire des boucles, des circuits fermés (même partiellement) » (SFEZ, 1992, p. 84).

139 Le graphe en arbre suppose un circuit non fermé : « (…) partant d’un point pour revenir sur lui-même après avoir parcouru un certain trajet, il faut repasser par les mêmes points qu’à l’aller » (SFEZ, 1992, p. 84).

objectifs propres » (TOUSSAINT, 2003, p. 133). La présentation du projet des Halles par Alain Guez (2008) met aussi en avant cette prégnance du sujet dans la constitution de ses actes futurs, dans une forme de subordination toute rationnelle, où l’intention première, caractérisée par des objectifs, préside d’emblée la conduite du projet. Il n’est ainsi pas anodin que l’auteur, en dépit d’une vision originale de la dimension temporelle du projet, ouvre sa présentation sur les volontés du maire de Paris concernant la mise en place du projet des Halles :

« Il s’agit pour lui [le maire de Paris] de ne pas faire de table rase, ne pas faire une deuxième révolution des Halles qui ne donnerait des résultats pour les habitants que dans quinze ans, contribuer à une résolution progressive d’un certain nombre de problèmes pour donner confiance en l’avenir et dans la volonté d’investissement de la force publique, avoir des résultats dans un laps de temps très court, faire participer la citoyenneté à l’élaboration du projet (…) » (GUEZ, 2008, p. 346).

Le recours à l’étude de définition est présenté comme découlant logiquement de cette modalité politique de mise en œuvre du projet : elle est un outil au service d’un sujet rationnel. Pourtant, la description même des objectifs et des temporalités souhaitées (de préférence dans le court-terme) laisse supposer un déroulement du projet des Halles plus ou moins chaotique, dont ici l’action du sujet (le maire) constituerait finalement une tentative de reprise en main par rapport à un chemin effectué critiqué par ses destinataires. Cette prégnance du sujet en aménagement du territoire et en urbanisme renvoie à la croyance de l’urbaniste en un déterminisme tiède, et donc en sous-main, la croyance en la causalité. Le déterminisme est absolu lorsque toute action humaine est déterminée par avance par l’ensemble des causes conjuguant à sa réalisation. Ce déterminisme absolu garantit finalement une action prévisible. Mais pour pouvoir agir, l’urbaniste doit croire en un déterminisme non absolu, permettant de laisser place à un espace de liberté, espace qui permettrait de changer les choses sans tomber sous le poids d’une fatalité des causes et des conséquences. Cependant, l’urbaniste ne peut non plus refuser tout déterminisme : la causalité lui permet en partie d’expliquer telle situation, ses origines et ses éventuelles évolutions, ainsi que les chances de transformer cette situation donnée en agissant sur les causes supposées l’ayant provoquée et afin d’atteindre le ou les objectifs fixés. Ce déterminisme tiède garantit finalement ce pouvoir d’agir de l’urbaniste.

b. Rationalité et aménagement spatial ou urbain : les conséquences