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La présente thèse est constituée de cinq chapitres. Passons en revue ce qui  retiendra  notre  attention  dans  chacun  d’entre  eux.  Nous  amorçons nos recherches  en  nous  penchant  sur  le  thème  de  la  culture  politique.  Bien  qu’il  s’agisse là d’un sujet très vaste, nous estimons qu’il est tout à fait utile de nous y  intéresser. Deux raisons peuvent d’ailleurs être évoquées. D’abord, au cours de  la  dernière  décennie,  le  Guatemala  a  reçu  relativement  peu  d’attention  dans  le  domaine de l’étude politique. En fait, si le pays de quinze millions d’habitants est  largement connu pour ses problèmes de violence et de narcotrafic, on sait très peu de chose sur les comportements et sur les opinions de ses citoyens.

Identifier les principales « habitudes politiques » des Guatémaltèques nous permettra  ainsi  de  nous  familiariser  avec  notre  cas  d’étude  avant  de  nous  engager dans une analyse plus approfondie. Par ailleurs, nous estimons que nous  intéresser  à  la  culture  politique  sous  un  angle  théorique  s’avérera  un  exercice fructueux. Riches en idées, les débats sur la relation entre culture et démocratie nous permettront d’établir des principes directeurs qui nous guideront tout au long de nos recherches.

Il est serait difficile d’étudier le thème de l’appui à la démocratie sans nous  attaquer de front à la variable culturelle. Le premier chapitre de cette thèse se penche sur la culture politique et examine les arguments qui établissent un lien entre les problèmes que connaissent les démocraties latino-américaines et des cultures qui seraient défavorables à la démocratie. Nos discussions seront amorcées  en  évoquant  le  point  de  vue  voulant  qu’il  existe  au  Guatemala  un consensus  autre  que  celui  de  l’appui  à  la  démocratie.  Ce  point  de  vue  est  souvent défendu par des politologues qui, en analysant les résultats d’enquêtes  d’opinion, concluent que les Guatémaltèques sont peu nombreux à être satisfaits  de la démocratie, à sympathiser avec les partis politiques, à démontrer de l’attachement pour les institutions de la démocratie, etc.

Les particularités des attitudes des Guatémaltèques sont souvent mises en évidence à l’aide de comparaisons. Dans le premier chapitre, nous proposons de comparer les habitudes et les opinions politiques de ces derniers avec celles des citoyens des autres pays de l’isthme centraméricain (Belize, Salvador, Honduras,  Nicaragua, Costa Rica et Panama). Cet exercice nous permettra de mieux cerner, dans son contexte régional, ce qui caractérise la culture politique du

Guatemala. À ce sujet, nous observerons notamment que la participation aux élections  est  généralement  plus  faible  au  Guatemala  qu’elle  ne  l’est  ailleurs. 

L’abstentionnisme  électoral  au  Guatemala ne peut toutefois être interprété comme un désintérêt marqué et généralisé pour la démocratie, d’autres formes  de participation politique étant particulièrement prononcées dans le pays.

En plus des comparaisons entre pays, nous proposons de mettre en relief les différences qui existent au sein même de la société guatémaltèque. À ce sujet,  nous  tenterons  d’identifier  les  « traits » propres aux Indígenas et aux Ladinos. Brièvement, nous établirons que les premiers tendent à être moins enclins à énoncer leurs opinions sur la politique que ne le sont les seconds. En fait, contrairement aux observateurs qui affirment que les Indígenas sont des acteurs politiques passifs, nous déterminerons plutôt qu’ils sont très divisés entre,  d’une part, ceux qui participent activement à la vie politique et, d’autre part, ceux  qui en sont exclus (ou qui s’en excluent eux-mêmes).

Nos recherches aborderont également des questions de nature théorique.

Nous examinerons les arguments et contre-arguments qui établissent un lien entre culture et démocratie. Le fondement de ces débats repose essentiellement sur la direction de la causalité entre les deux variables. Alors que certains chercheurs estiment que la culture influence le type d’institutions et de régimes  politiques,  d’autres jugent que la « structure » est ce qui façonne la culture.

Quelle est la pertinence de passer en revue une causalité déjà maintes fois analysée ? Les discussions sur la culture et la démocratie nous permettront de renforcer notre démarche de recherche en vue de l’étude du thème de l’appui à la  démocratie. En puisant dans les débats théoriques et en évaluant ce qui en ressort, nous reconnaîtrons, entre autres, l’importance d’examiner les opinions et  les comportements politiques en les rendant indissociables du contexte politique dans lequel ils sont relevés. Plus concrètement, nous jugerons malavisé d’expliquer les opinions sur la démocratie au Guatemala sans aborder l’ambigüité  qui plane autour de cette même démocratie ce pays. En fait, il y a lieu de croire que ce dernier alimente, d’une certaine façon, la forte perplexité que ressentent  plusieurs Guatémaltèques lorsqu’ils sont interrogés sur la démocratie. La cause  de ce flou est consubstantielle à un contexte politique dans lequel le mot

« démocratie » a longtemps été employé pour décrire des régimes qui violaient les  principes  de  droit  et  de  liberté.  L’ambigüité  ressentie  par  plusieurs  citoyens 

alors  qu’on  leur  demande  d’énoncer  une  opinion  sur  « la démocratie » s’accompagne  souvent  d’un  doute  quant  au fait que leur pays serait véritablement démocratique.

Dès la première phase de nos recherches nous tentons de faire preuve de nuance. Par exemple, nous évitons de décrire les Guatémaltèques comme étant simplement  portés  à  l’apathie  ou  au  désintérêt  politique. Le fait que la participation politique s’organise largement en marge des partis politiques, que de  nombreux citoyens ne participent pas aux scrutins ou encore que plusieurs sondés  ne  s’expriment  pas  ouvertement  sur  la  « démocratie » ne justifie pas l’étiquetage de la culture politique du Guatemala comme étant « autoritaire » ou incompatible avec la démocratie. Derrière les comportements observés se cachent des attitudes complexes que nous aurions tort de dissocier de l’environnement dans lequel elles sont relevées.

Avant d’entamer l’examen des opinions et de leurs liens avec le contexte,  nous jugeons opportun d’effectuer une parenthèse méthodologique. Le deuxième  chapitre de cette thèse a pour objectif d’approfondir nos connaissances au sujet  des sondages  d’opinion  et,  plus  particulièrement,  des  grandes  enquêtes  internationales, aussi appelées baromètres. Comme l’indiquent Anthony Heath et al.,  depuis  le  début  de  la  dernière  décennie,  la  production  des  enquêtes  s’est  rapidement répandue allant des pays industrialisés aux pays moins développés (2005 : 311). Le phénomène de « mondialisation  de  la  recherche  sur  l’opinion  publique »  décrit  par  les  auteurs  nous  permet  aujourd’hui  d’avoir  accès  à  une  quantité considérable d’informations sur les opinions des Guatémaltèques et des citoyens qui habitent d’autres pays d’Amérique latine. Cependant, la disponibilité  de cette information et surtout la publication de nombreux rapports où sont schématisés les points de vue poussent parfois les étudiants à utiliser les données d’enquêtes sans s’interroger préalablement sur la manière dont elles ont  été  recueillies.  Ainsi,  il  semble  important  d’examiner  à  la  fois  ce  que  sont  les  concepteurs des grandes enquêtes et de quelle manière est amassée l’information mise à notre disposition.

L’un des principaux avantages associés à l’utilisation de données « prêtes à l’emploi» est qu’elles épargnent aux politologues la très lourde et coûteuse tâche  de mener eux-mêmes des enquêtes auprès de centaines de personnes qui résident dans plusieurs pays. S’ils économisent temps et argent, les utilisateurs 

de données doivent néanmoins composer avec une contrainte notable. Leurs sources primaires sont basées sur des questionnaires uniques où figurent des indicateurs qui ne conviennent peut-être pas entièrement à leurs besoins. Bref, afin de retirer le maximum des grandes enquêtes, il convient de bien connaître en quoi elles consistent et sur quelle méthodologie elles reposent. C’est dans cette  optique que nous entreprenons notre deuxième chapitre.

Au Guatemala, la plupart des sondages (de nature politique) qui sont réalisés  par  des  firmes  nationales  ont  pour  but  d’évaluer  les  intentions  de  vote  des électeurs. Ces enquêtes, généralement commandées par les partis politiques ou par les journaux, n’abordent  que  très  rarement  la  question  de  l’attachement  des citoyens à la démocratie. En contrepartie, les groupes de sondages internationaux tels le Latinobarómetro et  l’AmericasBarometer (LAPOP) effectuent périodiquement des enquêtes qui ont parmi leurs objectifs d’évaluer les  opinions des Guatémaltèques sur la démocratie. Le second chapitre de cette thèse  s’attarde  sur  les travaux des deux principaux baromètres qui opèrent au Guatemala et ailleurs en Amérique latine. En examinant ces baromètres sous divers angles, nous observons des différences marquées tant au niveau de leurs populations  cibles,  des  indicateurs  qu’ils  utilisent,  que  de  l’information  qu’ils  divulguent sur les procédures de recueil des données.

Outre les travaux du Latinobarómetro et du LAPOP, nous passerons notamment en revue ceux du World Values Survey, de l’International  Social  Survey Programme, de l'Eurobaromètre et de l'Afrobarometer. Même si ces baromètres  n’opèrent  pas  au  Guatemala,  il  est  approprié  de  nous  y  intéresser  afin de parfaire nos connaissances sur les enquêtes internationales et nous familiariser avec les différentes manières de mesurer l’appui à la démocratie en  Amérique  latine  comme  ailleurs.  Nous  proposons  d’examiner  les  travaux  des  principaux baromètres en portant attention aux techniques employées par ceux-ci pour recueillir les opinions des citoyens et, plus particulièrement, pour évaluer leurs préférences démocratiques.

Notre intérêt pour les indicateurs employés dans les enquêtes internationales pour mesurer l’appui à la démocratie nous amène à constater que ceux-ci sont aussi nombreux que diversifiés. Afin de mieux identifier les fonctions et les caractéristiques de ces indicateurs, nous élaborons une typologie en cinq catégories. Nous distinguons ainsi les indicateurs monolithiques de ceux de types

polyarchique, « bathymétrique » (qui sert à mesurer la profondeur des opinions) et référentiel au contexte. Particulièrement critiques envers les indicateurs monolithiques qui cherchent à connaître le niveau de soutien des citoyens à un objet aussi abstrait que « la démocratie », nous tentons, dans nos recherches, d’avoir davantage recours aux autres types de questions de sondage.

Les deux premiers chapitres sont certes très différents l’un de l’autre, mais  ils ont tous deux comme but de préparer notre réflexion sur la manière dont s’articule  l’appui à la démocratie. Cette réflexion se fait principalement en nous  penchant  sur  l’influence  qu’exercent  le  contexte  politique  et  les  valeurs  des  citoyens sur les opinions. Afin de  bien  expliquer  l’effet  du  contexte,  nous  développons dans le troisième chapitre un outil d’analyse que nous intitulons « le temps court de l’appui à la démocratie». À l’aide de ce dernier, nous démontrons  que dans certaines circonstances, les opinions sur les droits, les libertés et les procédures démocratiques peuvent devenir très malléables. Cette malléabilité est observable  et  mesurable  d’au  moins  deux  façons.  D’abord,  il  est  possible  d’interroger  les  citoyens  pour  savoir  si,  dans  des  circonstances  précises (par exemple,  en  cas  d’une  hausse  marquée  de  l'inflation  ou  de  graves  tumultes  sociaux), ils appuieraient des mesures restrictives en matière de droits et de libertés. Des moyens moins hypothétiques sont également à notre disposition. Il est aussi possible d’examiner les opinions à des moments où les citoyens furent 

« réellement » confrontés à une crise politique ou à des évènements extraordinaires.

Dans nos travaux nous nous penchons sur le temps court des opinions. Afin de développer un instrument qui nous permettra de comprendre de quelle manière évoluent les opinions lors de circonstances extraordinaires (c’est-à-dire dans des situations de crise ou de tumultes politiques), nous puisons dans les théories de la psychologie politique, et notamment dans les théories des perspectives et des bifurcations. L’instrument d’analyse que nous proposons sert  à expliquer comment les attitudes sur des mesures non-démocratiques (ou non constitutionnelles) peuvent rapidement se transformer en devenant plus favorables ou plus hostiles à la démocratie. Ces changements soudains des points  de  vue  des  citoyens  (lorsqu’ils  se  produisent)  sont  étroitement  liés  à  l’évaluation que font ces derniers de la conjoncture. Par exemple, pensons à une situation où les citoyens réagiraient à une crise politique menaçante à leurs yeux.

Plus les citoyens se sentiront vulnérables à la menace en question, plus ils tendront à appuyer des mesures extraordinaires destinées à apaiser la situation et à rétablir un retour à la normale. Lors de situation de crise, la volonté d’endiguer  la  menace  rend,  en  quelque  sorte,  secondaires  les  considérations  d’ordre démocratique, ce qui permet aux dirigeants politiques de mettre en œuvre  des mesures non-démocratiques  ou  qui  ont  l’effet  d’amenuiser  les  droits et les libertés. Toutefois, il est prévisible que l’appui  à  de  telles  mesures  restrictives  s'essoufflera rapidement si ces dernières étaient maintenues quand la situation tendrait  à  se  normaliser.  À  l’inverse,  la  réaction  des  citoyens  pourrait  être  de vouloir protéger les principes de la démocratie s’ils jugeaient que les dirigeants  tentaient d’imposer des restrictions excessives ou inutiles par rapport à la gravité  de la situation.

Dans  cette  thèse,  nous  tentons  d’évaluer  la  « réactivité » des Guatémaltèques au contexte. Nos recherches se donnent précisément comme objectif  d’analyser  les  attitudes  dans  ces  circonstances  extraordinaires.  Pour  examiner la facette circonstancielle de l’appui à la démocratie, nous utilisons les  grandes enquêtes14 et nous nous basons principalement sur les indicateurs de type référentiel. Bien que ces indicateurs mesurent des opinions concernant des évènements hypothétiques, ils nous fournissent tout de même des renseignements utiles sur la propension des Guatémaltèques à accepter (ou à rejeter) des mesures non-démocratiques. Comme nous le constaterons, de façon générale, les Guatémaltèques qui affirment qu’ils appuieraient des mesures non -démocratiques sont généralement minoritaires. Malgré ce constat, nous observons tout de même que les Guatémaltèques présentent une sensibilité particulière  à  la  criminalité,  les  poussant  à  affirmer  qu’ils  seraient  ouverts  à  l’emploi  de  mesures  non-démocratiques afin de contrer une poussée de criminalité. Dans l’ensemble, les Guatémaltèques restent toutefois aussi attachés à la démocratie, et particulièrement lorsque les enquêteurs évoquent la possibilité d’avoir recours à l’armée pour gouverner le pays. 

14 Notre  intérêt  pour  les  grandes  enquêtes  s’explique  en  partie  par  le  fait  qu’elles  sont  les  principales sources sur  les opinions  dans une région (et  un pays) où assez peu d’études  nationales sont réalisées. Le fait qu’il existe peu de données nationales a d’ailleurs amené  de nombreux chercheurs à utiliser les résultats des enquêtes-baromètre, mais sans nécessairement s’interroger sur leur fiabilité.

L’analyse  du  temps  court  de  l’appui  à  la  démocratie  s’effectue  aussi  en  nous intéressant à des faits « vécus ». En examinant l’histoire démocratique du  Guatemala  nous  constatons  qu’un  certain  nombre  d’évènements  ont  pu,  à  des  moments particuliers, affecter les opinions des citoyens sur les droits, les libertés et les procédures constitutionnelles.  L’un  de  ces  événements  parmi  les  plus  importants est la tentative de coup d’État civil orchestrée par le président Jorge  Serrano en 1993. Nous proposons d’analyser ce coup d’État et de comprendre ce  qui  a  amené  les  Guatémaltèques  à  s’y  opposer.  La  décision  d’analyser  la  réaction des citoyens à cet évènement est en partie liée à son potentiel de comparaison,  ou  plutôt,  à  la  possibilité  d’établir  des  parallèles  avec  d’autres  coups d’État qui se sont produits ailleurs en Amérique latine. Les comparaisons  entre l’autogolpe de 1993 et d’autres évènements similaires nous permettent à la  fois  d’en  apprendre  davantage  sur  la  réaction  des  Guatémaltèques  et,  bien  entendu, de pouvoir tester la pertinence de nos arguments de temps court de l’appui  à  la  démocratie.  Dans  nos  recherches  nous  comparons  la  manœuvre  anticonstitutionnelle de Serrano au coup d’État effectué en 1992 par le président  péruvien  d’Alberto  Fujimori  ainsi  qu’au  renversement  du  gouvernement  de  Manuel Zelaya au Honduras en 2009. Il est intéressant de noter que dans ces trois cas, les citoyens ont réagi de manière différente. Nous constaterons que ces différences sont étroitement liées à la question du contexte et de l’évaluation de  celui-ci qu’ont fait les citoyens des trois pays de celui-ci. Si les Guatémaltèques estimaient  que  les  difficultés  sociopolitiques  qui  menèrent  Serrano  à  s’engager  dans une démarche autoritaire ne justifiaient en rien un coup d’État, la gravité de  la  crise  que  connaissait  le  Pérou  en  1992  favorisa  l’approbation  de  nombreux  Péruviens  au  coup  d’État.  Le  Honduras,  quant  à  lui,  fait  figure  de  cas  intermédiaire,  où  la  population  était  beaucoup  plus  divisée  sur  les  manœuvres  militaires mises de l’avant pour forcer le renvoi du président. Cette division n’était  pas étrangère au contexte, qui, bien que marqué par des tensions entre le président déchu et ses opposants, ne laissait pas tout à fait présager une crise que les institutions de l’État auraient pu résoudre.

Plus  haut,  nous  proposions  l’idée  que  l’appui  à  la  démocratie  était une notion multiface.  Nos  travaux  se  donnent  d’ailleurs  comme  mandat  d’explorer  l’une des faces de l’appui à la démocratie en étudiant les opinions des citoyens  dans des circonstances extraordinaires. Cependant, si le soutien à la démocratie est par moment étroitement lié au contexte, il est aussi détaché de celui-ci. En

fait,  nous  estimons  qu’en  plus  d’être  malléables  (donc  sensibles  aux  évènements), les opinions sur la démocratie peuvent aussi être rigides et stables, constituant une autre caractéristique importante du phénomène que nous examinons. La dureté et la durabilité des opinions dont il est ici question sont régulièrement observables lorsqu’on interroge les citoyens sur ce qu’ils pensent,  en général, des principes de la démocratie. Le quatrième chapitre de cette thèse se penche sur ce que nous nommons, le temps long de l’appui à la démocratie.

Cette thèse s’intéresse à la question de la stabilité et de la cohérence des  opinions sur la démocratie. Avant de présenter ce qui retiendra notre attention dans le reste de cette thèse, nous jugeons convenable de revenir sur des arguments qui cherchent à démontrer que les points de vue des citoyens ne sont ni stables ni cohérents. Ces observations sont notamment celles de Converse et de Zaller, qui se sont intéressés à la persistance des opinions et aux liens entre celles-ci. Selon le premier des deux chercheurs, les réponses données par la majorité des gens dans les sondages sont souvent aléatoires et ne sont généralement  pas  ancrées  dans  une  structure  d’attitudes définies (1975 : 89).

Énoncés de manière spontanée (Converse et Dupeux, 1962 : 17), les points de vue auraient nécessairement tendance à être instables dans le temps. Moins porté à croire que les citoyens participent aux enquêtes comme s’ils jouaient à un jeu de hasard, mais s’interrogeant également sur la profondeur et la stabilité des  opinions, Zaller estime que la plupart des gens prennent position en puisant dans les idées qui leur viennent immédiatement en tête au moment où ils répondent aux questions  des  sondeurs.  Le  politologue  juge  ainsi  que  si  l’on  interroge  les  citoyens  à  plus  d’une  reprise  sur  un  même  sujet,  il  faudra  s’attendre  à  ce  que  leurs opinions changent puisque celles-ci reposeront d’une fois à l’autre sur « des considérations différentes » (1992 : 36). Évidemment, ces constats mettent en doute la possibilité que les citoyens aient des opinions qui soient durables et consistantes. Bien que valables, ces conclusions, toutefois ne sont pas sans faille.

Des  questionnements  d’ordre  méthodologique et conceptuel peuvent être évoqués concernant les observations de Zaller et de Converse. D’abord, notons  que le premier développe son argumentation en examinant les réponses des sondés à des questions qui sont, dans certains cas, d’une grande complexité. Par exemple,  le  politologue  analyse  les  opinions  des  Américains  sur  l’aide 

qu’apportaient  les  États-Unis  aux  paramilitaires  nicaraguayens  à  l’époque  de  la  Guerre  froide.  Rappelons  qu’aux  États-Unis comme ailleurs, les questions de politique étrangère figurent parmi celles sur lesquelles les citoyens ont le plus de

qu’apportaient  les  États-Unis  aux  paramilitaires  nicaraguayens  à  l’époque  de  la  Guerre  froide.  Rappelons  qu’aux  États-Unis comme ailleurs, les questions de politique étrangère figurent parmi celles sur lesquelles les citoyens ont le plus de

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