• Aucun résultat trouvé

Vision et valeurs fondamentales : guider et encadrer l’action

Encadré 4 : Les 7 types de biais cognitifs possibles d' après H Laroche (1991)

III. La seconde approche : vision et idéologie : d’une stratégie entrepreneuriale à une stratégie idéologique

III.2 Vision et valeurs fondamentales : guider et encadrer l’action

Comme le constate Schmidt (1993) : « Préserver les valeurs [fondamentales de l’entreprise], s’assurer qu’elles sont partagées et soutenues par les membres de l’organisation est primordial car elles représentent un guide pour l’action au jour le jour. » De même, Pettigrew (1979) note « [qu’une] vision n’est pas seulement le dessein de l’organisation, même si elle peut impliquer un tel dessein, elle représente aussi un système de croyances. »

Toutefois, trouver une définition cohérente de ce que sont ces valeurs fondamentales au sein de l’organisation est très difficile. Si tous les auteurs utilisent le concept, bien peu le

définissent précisément. Pire, quasiment aucun ne propose une opérationalisation de la notion27.

D’après Schmidt toujours (Ibid), si la vision est une réponse au « quoi faire ? » et la raison d’être une réponse au « pourquoi le faire ? », les valeurs fondamentales répondent, elles, à la question « comment l’accomplir ? »28

Pour Collins & Porras (1996a), les valeurs sont « les fondements essentiels et résistants de l’organisation, un ensemble restreint de principes généraux directeurs ; à ne pas confondre avec les pratiques opérationnelles ou les cultures spécifiques. » Généralement une entreprise aura de 3 à 6 valeurs fondamentales. En outre, ces deux auteurs spécifient bien qu’il n’y a pas de lot universel de valeurs.

Humble & al. (1994) quant à eux, définissent les valeurs fondamentales, comme étant :

27

Seuls Collins & Porras (1996a) proposent une méthode pour mettre en lumière ces valeurs fondamentales. Encore celle-ci demeure-t-elle relativement artisanale et floue. Les auteurs proposent en effet de constituer un groupe d’employés représe ntatifs de la diversité de l’entreprise (ce qu’ils appellent le « code génétique » de l’organisation.) Il s’agit ensuite pour ce groupe de se poser les questions suivantes :

• Quelles valeurs centrales apportez-vous à votre travail ? (valeurs qui sont si fondamentales que vous les garderez toujours qu’elles soient récompensées ou non ?)

• Quelles sont les valeurs que vous présenteriez à vos enfants comme étant celles de votre travail ? Quelles sont les valeurs que vous voudriez qu’ils aient plus tard ?

• Si vous aviez assez d’argent pour arrêter de travailler, continueriez -vous à appliquer ces valeurs ? • Seraient-elles encore valables dans 100 ans ?

• Garderiez-vous les mêmes si elles devenaient un désavantage ?

• Si vous deviez bâtir une nouvelle organisation (quelque soit le secteur d’activité) quelles valeurs centrales auriez-vous ?

Si cette méthode peut avoir une certaine utilité pratique , remarquons toutefois le caractère quelque peu tautologique de la première proposition. Pour définir les valeurs de l’organisati on on examine les valeurs de ses membres sans savoir ce que recouvre ce terme.

28

Notons que pour Collins & Porras (1996a) les valeurs répondent à la question « pourquoi est-on ici ? » alors que tous les autres auteurs réservent cette question à la définition de la raison d’être. Collins & Porras eux - mêmes proposant d’ailleurs eux -mêmes la méthode des « 5 pourquoi » pour définir ce dessein (Cf. note n°25)

« Le petit nombre de croyances qui sont tenues comme importantes pour le succès d’une organisation donnée.

Ces croyances et convictions qui dirigent substantiellement le comportement des gens au sein d’une organisation. »

Pourtant ces définitions se révèlent insuffisantes car elles ne permettent pas de caractériser une valeur fondamentale dans la pratique. Il nous faut donc préciser encore le concept. Pour cela, revenons en à la définition des termes.

Selon le Robert, les valeurs sont « ce qui est vrai, beau, bien selon un jugement personnel plus ou moins en accord avec la société de l’époque ». Une valeur définit donc le « bien » à l’échelle de l’individu ou, ici, de l’organisation. La définition du mot « principe », fait également progresser notre réflexion. Un principe est ainsi « une règle d’action s’appuyant sur un jugement de valeur, et constituant un modèle, une norme, un but [... ou] les règles morales auxquelles une personne ou un groupe est attaché. » Campbell & Yeung (1991a) soulignent également cette dimension morale : « les valeurs sont des croyances et des principes moraux qui soutiennent la culture d’entreprise. » Et pour Thévenêt (1984), « les valeurs peuvent s’édicter [...] en terme de « il faut » ou « il ne faut pas ».

Rockeach (1968) quant à lui donne la définition suivante du mot « valeurs » :

« Une valeur est une croyance durable disant qu’un comportement ou un résultat sont socialement ou individuellement préférables à un autre. »

(1968:103)29

Les valeurs ont donc ici deux objets : d’une part la façon de conduire l’existence et d’autre part la finalité de l’exist ence. On distingue ainsi les valeurs instrumentales des valeurs terminales30 . Par ailleurs, ces valeurs instrumentales sont soit des valeurs qui transposent au plan de l’entreprise des valeurs morales individuelles : honnêteté ; justice etc., soit des valeurs de compétences qui donnent à une fonction ou à un domaine particulier de la gestion une place primordiale : le service clientèle d’IBM ou la ponctualité à la SNCF. (Antoine, 1996)

29

« A value is an enduring belief that a specific mode of conduct or end-state of existence is personally or

socially preferable to an opposite or converse mode of conduct or end-state of existence. » (1968:103)

30

Pour notre part, nous nous considérerons les seules valeurs instrumentales, les valeurs terminales étant incluses d’aprè s nous dans la raison d’être de l’entreprise.

« Les valeurs donnent [donc] du sens aux normes et aux standards de comportements [...] et jouent le rôle « d’hémisphère droit » d’une organisation. » (Campbell & Yeung, 1991a:15) Les principes, les valeurs, induisent donc une certaine normativité : ils orientent la pensée, la perception et l’action de l’entreprise. « Les valeurs servent de référence lors des choix que fait l’entreprise. [Ceux-ci pouvant concerner] de grandes décisions stratégiques mais aussi la conception, l’utilisation et le développement d’outils de gestion. Elles ne se caractérisent pas par le type de décisions qu’elles permettent de fonder : pour une entreprise, ces valeurs seront prégnantes lors de choix financiers, organisationnels, commerciaux ou sociaux. » (Thévenêt, 1984:95).

En outre, les véritables valeurs fondamentales de l’entreprise ne se conten te pas d’être affirmées. « [Elles] sont opérationnelles ; elles ne sont pas que des croyances ou pétitions de principes : elles fonctionnent dans la réalité quotidienne de l’entreprise à travers ses modes de gestion, ses procédures. » (Ibid.).

Ainsi, pour résumer cette discussion nous retenons que : les valeurs fondamentales de l’organisation peuvent s’appréhender comme des règles s’édictant en terme de « il faut » ou de « il ne faut pas ». Elles sont soit des valeurs morales soit des valeurs de compétences. Elles se placent en amont des comportements et forment un référentiel commun, un élément de rationalité, de cohérence dans la perception et les manières de procéder au sein d’une organisation. Par ailleurs, pour être qualifiées de valeurs fondamentales, elles doivent être reliées à la réalité des actions, objectifs et/ou aux modes de gestion de l’organisation.

Les valeurs apparaissent comme un élément utile pour guider l’action de l’organisation au quotidien. Elle participe donc au pilotage de l’entrepris e. A ce titre, il nous paraît judicieux de les intégrer dans notre cadre conceptuel de pilotage de l’entreprise.