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7. ANALYSE DES DONNEES ET DISCUSSION

7.9 Regard croisé : formateur-candidats

7.9.4 Vision qui diffère formateur-candidats

Sous ce point, nous avons regroupé en thématiques les principaux points divergents entre formateur et candidats. Cette mise en relation n’a pas pour but de valider ou d’invalider les propos tenus par l’un ou l’autre des acteurs (un regard croisé impliquant inévitablement des perceptions différentes d’une même situation) mais avant tout d’affiner notre compréhension concernant le positionnement des uns et des autres et d’attirer notre attention sur la nécessité de prendre du recul vis-à-vis de nos interprétations qui peuvent ou non coïncider avec la réalité du candidat.

Haute estime personnelle qui masque une confiance en soi

Le formateur emet l’hypothèse que l’attitude de Ana (une haute estime personnelle et une affirmation de soi récurente) est une carapace qui dissimule un manque de confiance en elle.

Effectivement la situation de sans emploi pèse sur les candidats et affecte leur estime personnelle et leur SEP vis-à-vis de leur recherche d’emploi. Mais, selon notre analyse, pour

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Ana, le simple fait de devoir sortir de chez elle et de se retrouver du jour au lendemain dans un environnement bienveillant avec des accompagnants qui soutiennent et qui ne jugent pas, des candidats qui vivent la même situation, et où elle bénéficie d’un espace de parole et est reconnue, a grandement contribué à la reconstruction d’une confiance en soi qui a été ébranlée. Ainsi, un besoin constant de s’affirmer et de se valoriser, peut être perçu comme un manque de confiance en soi par le formateur alors que le candidat interviewé peut au contraire faire état d’un regain de confiance et d’un moral qui revient, dès l’entrée en formation, parce qu’il bénéficie d’un cadre fortement stimulant. En outre, d’autres données peuvent fournir des explications à un tel comportement (cf. 7.9.2.1 « Besoin de reconnaissance « )

Peur du rejet lors des phases de la P.I.E.

Selon ses observations, Ana est en réaction lors de la première tâche (aborder les inconnus) parce qu’elle craint de n’être pas accueillie et/ou pas reconnue par ses interlocuteurs. « Eh ben ça a été un peu trash dans le sens où, elle m’a dit : « C’est n’importe quoi votre truc ! C’est n’importe quoi ! » |…|» (p. 62, lignes 200-201) Il en va de même lors de la phase terrain.

« Alors au début c’était même pas en rêve hein. La première partie c’était : « C’est quoi ce truc et tout ! C’est du n’importe quoi ! On va pas aller se présenter comme ça sans demander et tout, sans se préparer, sans savoir qui on va voir, sans avoir un rendez-vous ! » Donc c’était ça. Et pour moi c’était vraiment une question de confiance et d’assurance, c’est-à-dire le besoin de se sentir… de se savoir attendu et accueilli fait que du coup, la situation est moins confrontante et donc est plus acceptable. Et au fur et à mesure et ben elle a quand même pu démarcher des entreprises sans forcément y être attendue, parce qu’elle se rendait compte qu’on l’accueillait. » (p. 62, lignes 190-197)

En revanche, notre analyse met en évidence un SEP élevé en ce qui a trait à la mise en œuvre des tâches. Cette dernière peut ainsi réagir à la faible perception de la valeur des activités proposées dans sa situation (cf. 3.2.2.1), au fait de devoir prouver qu’elle est apte à les accomplir (ce qui lui donne l’impression que l’on doute de ses compétences), ou encore à certaines consignes qu’elle juge directives et qui lui donnent l’impression que l’on contrôle son action (cf. 7.2.1 citations Gaelle et Ana), dernier point qui réfère au besoin d’autonomie (cf. 3.2.2.2) La réaction de Ana, lorsque nous lui demandons de quelle manière elle a occupé les plages horaires dévolues à la recherche d’un stage sur le terrain, appuie notre réflexion, soit un besoin de reconnaissance et d’être

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considérée en adulte. « Non, mais moi je suis pas une gamine à l’école, moi je suis quelqu’un de responsable, je sais ce que je fais et…» (p.28, ligne 522-523)

Manque de confiance en soi, faible estime de soi et impact sur les recherches de stage

En règle générale, le formateur émet l’hypothèse que la situation de sans emploi qui affecte l’estime personnelle et la confiance en soi du candidat complexifie les démarches terrain ; le candidat craignant la réaction de son interlocuteur qui ne l’attend pas ou un refus qui ferait écho aux recherches d’emploi infructueuses. Cette réflexion renvoie à notre hypothèse 4 (cf.

chapitre 9) qui n’a pu être validée avec les quatre entretiens menés.

Ne pas assumer son image de bénéficiaire de l’Hospice Général peut effectivement impacter sur la motivation du candidat à se rendre dans les entreprises. Nos données ont toutefois révélé que le fait de questionner la pertinence d’une activité, l’un des déterminants majeurs de la motivation, aura un impact majeur sur la motivation et aura pour effet d’influer sur la confiance en ses aptitudes à mener à bien la tâche. Ceci rejoint l’idée développée que « c’est l’interaction expectancy-value qui joue le rôle central dans le processus motivationnel, les autres facteurs (individuels, situationnels) n’intervenant qu’en

« amont », comme éléments qui conditionnent cette interaction » (Bourgeois, 1998, p. 103).

Ainsi avoir l’impression que l’objectif et les tâches à effectuer à cette fin ne font pas sens, vis-à-vis de son projet, ses besoins, ses préoccupations, son but personnel, peut influer négativement sur le SEP à accomplir la tâche, sur la confiance en soi, occasionner des résistances et renforcer la démotivation à se rendre sur le terrain. Ou alors, quand bien même le candidat a confiance en lui, s’il ne trouve pas la pertinence dans la tâche, ceci freinera sa motivation. En revanche, même si à l’origine la confiance en soi et le SEP vis-à-vis des recherches d’emploi/de stage ont été affectés, si la tâche répond à un besoin et si de plus le candidat se sent soutenu tout au long de ses démarches, ceci encouragera l’action.

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7.9.5 Quelle prise en compte des facteurs d’engagement majeurs