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Perception favorable du stage et de la P.I.E terrain et maintien du SEP chez Paola

7. ANALYSE DES DONNEES ET DISCUSSION

7.5 Facteurs favorisant l’engagement en cours de formation

7.5.4 Perception favorable du stage et de la P.I.E terrain et maintien du SEP chez Paola

Le stage a toujours été perçu comme une option dans son processus de réinsertion professionnelle. Ceci peut expliquer son ouverture vis-à-vis de EVE et son implication tout au long de la formation et ce même si elle est confrontée à des difficultés. Elle débute d’ailleurs l’interview de cette manière :

« Pour moi la formation, je l’ai bien vécue. Je peux que la conseiller, c’est très bien euh… » (p. 6, ligne 6)

74 D’autres critiques positives émises sur la formation EVE rendent compte de son adhésion :

«|…| C’est vrai que le premier jour c’était pas top. Mais après le deuxième, troisième, ça allait tout seul, j’étais même contente. J’ai même eu un pincement au coeur que ça s’arrête. |…|» (p. 6, lignes 34-36)

« Sincèrement, j’ai trouvé que c’était très bien... J’ai pas à critiquer le système, c’est même très bien ! Celui qui a inventé ça, je lui dis « chapeau hein » ! Il a eu une très bonne idée, c’est très bien. » (p. 9, lignes 149-151)

«|…| J’ai pas de points négatifs que je peux vous donner… Le seul point que je peux dire par rapport à tout ça, c’est que voilà, dommage que c’est pas assez longtemps, c’est ça qu’on disait aussi en groupe, un mois c’est court. » (p. 13, lignes 330-333)

Ainsi son positionnement en cours de formation est similaire à celui de l’entrée (cf. 7.2.6).

Toutefois, concernant la P.I.E. terrain qu’elle expérimentait principalement dans les années 90, elle constate qu’elle est moins adaptée à l’heure actuelle, où les postulations s’effectuent majoritairement via internet (cf. 8.2.1). «|…| Même c’est ce que j’ai dit à la conseillère, j’ai tellement écrit, j’ai tellement fait et pour finir je ne sais plus où aller chercher du travail parce que, dans le monde d’aujourd’hui, tout passe par internet. Donc que ce soit dans le domaine de la vente, aux Ressources Humaines, l’assurance, c’est écrire et tu attends. Ce système-là, ça aurait pu marcher dans les années 90. Mais maintenant là, au 21ème siècle, on est en 2015, ça marche mais c’est difficile… » (p. 11, lignes 263-268)

Nous pouvons nous arrêter sur la dynamique motivationnelle positive (cf. 3.1) qui anime probablement Paola. La recherche d’un stage est valorisée par Paola (perception de la valeur de la tâche), car elle répond à un but personnel (facteur individuel). D’autre part, celle-ci ne mentionne pas de difficultés majeures à se rendre dans les entreprises (perception favorable de son SEP à mettre en œuvre la tâche). Nous partons du principe que, malgré les obstacles, elle se sentait en capacité d’effectuer la tâche. D’autre part, elle planifie, organise, anticipe ses recherches sur le terrain et est ainsi acteur dans son processus (haute perception d’autonomie). « Ben trouver au bon moment, donc les après-midis quand c’est un peu plus calme ou le matin. Les responsables ils sont plus là l’après-midi, tout dépend. Ou alors des fois j’appelle pour savoir s’ils sont là, c’est une façon pour préparer mon terrain. « A quelle heure il est là le gérant ? Est-ce qu’il est là toute la journée ? » Et si on me dit « ah non, l’après-midi il est pas là », je sais que je dois aller par rapport à mon emploi du temps. Je me dis « là bon c’est bientôt midi, donc le temps que j’arrive à Genève… bon c’est pas

75 possible ». Donc je sais que le matin vers 10 heures, je peux le rattraper voilà ! » (p. 12, lignes 270-276) De plus, tout au long de la formation, elle s’est sentie soutenue par le groupe ainsi que par le formateur et le conseiller IPT (facteur situationnel). Et d’autre part, certains interlocuteurs sur le terrain l’ont également conseillée et encouragée (facteur situationnel). «|…| Encore une fois, c’était quand… à la fin justement de la formation, j’ai été à Halles aux chaussures. C’était bien, j’ai bien sympathisé avec la vendeuse. Elle m’a donné quelques tuyaux. Elle m’a dit : « Essaye dès fois, même par mail, ça marche. |…|» (p.11, lignes 246-248) En outre, la persuasion verbale est ici appuyée par une expérience active de maîtrise (Gist & Mitchell, 1992). Suite à la mise en contact avec une entreprise du réseau de la Fondation IPT, elle obtient un entretien puis décroche un stage (maintien d’un SEP favorable).

L’intégralité de ces paramètres (les facteurs situationnels en interaction avec le facteur individuel) influe positivement sur ses croyances motivationnelles et soutient son implication dans l’activité.

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7.6 Quelle évolution de la perception d’autonomie, du sens donné à l’action et des motifs d’engagement en cours de formation ?

Les informations recueillies concernant les perceptions des candidats vis-à-vis de l’objectif EVE et de la méthodologie de recherche utilisée (P.I.E.) en cours de formation, nous permettent à nouveau de nous pencher sur les concepts de sentiment d’autodétermination, du sens donné à l’action et sur les motifs d’engagement.

A : apprentissage P : participation

Entrée en formation En cours de formation Entrée en formation En cours de formation Sentiment

d’autodétermination Sentiment

d’autodétermination Sens de l’action Sens de l’action Joe Motivation extrinsèque

Motifs d’engagement en début de formation Motifs d’engagement en cours de formation

Extrinsèque Intrinsèque Extrinsèque Intrinsèque

A P A P A P A P

Joe Economique Prescrit Vocationnel Economique

Ana Gaelle Vocationnel Dérivatif Epistémique

Socio-affectif Vocationnel Dérivatif Epistémique Socio-affectif

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En cours de formation, le profil motivationnel des candidats évolue et se révèle davantage autodéterminé, si l’on se réfère au continuum de Ryan & Deci (2000), puisque les réponses explorant la motivation extrinsèque identifiée pour Joe et Paola, et la motivation extrinsèque intégrée pour Ana et Gaelle, ont été les plus souvent citées.

Joe et Paola ne sont plus animés par la contrainte. Le premier devient acteur de son processus et s’investit pleinement en formation (comme s’il s’agissait de son activité professionnelle) de sorte à en retirer un bénéfice personnel. « J’ai tout fait, j’ai tout fait parce que si on vous dit : « Fais ça !», c’est de ma responsabilité à mon travail. Pour le moment, l’Hospice c’est mon employeur et je ne voulais pas rester avec… je ne voulais pas rester là ! Donc j’ai profité de faire le maximum pour m’aider dans ma situation et de travailler… |…|» (p.

57, lignes 351-354) Ou encore : «|…| Donc pour le moment, je cherche du travail… C’est pour ça je fais tout ce que je dois faire… ce n’est pas pour rien, c’est pour moi ! Donc je suis con si je ne fais pas mes responsabilités. » (p. 57, lignes 357-359) Et Paola persiste dans ses efforts, car la formation a de la valeur à ses yeux. Ceci nous permet d’étayer l’hypothèse formulée par Bourgeois « qu’un engagement du sujet en formation au départ complètement contraint de l'extérieur peut en fait lui donner l’occasion de réaliser une expérience complètement inconnue et nouvelle qu’il n’aurait autrement jamais eu l’occasion de vivre » (2009a, p. 55) et qui favorise la naissance de différentes formes de motivation : intrinsèque pour Paola avec le motif socio-affectif et extrinsèque avec le motif vocationnel pour Joe et Paola, ou les motifs hédonique et dérivatif pour cette dernière uniquement. «|…|

De sortir un peu de la maison parce que c’est lourd le quotidien, le matin on se lève : l’ordinateur, les recherches,… Pas seulement l’ordinateur, écrire des lettres. Et puis on reçoit plein de négatifs, c’est fatiguant, c’est démoralisant au bout d’un moment… » (Paola, p. 7, lignes 77-80).

Et en toute logique, le sens donné à leur action n’a plus une fonction de légitimation (situationnel), mais pour le premier de légitimation (intériorisé) ; les contraintes intériorisées sont transformées en défis personnels. « Euh… non… je me suis dit : bon, Bon Joe, fais un stage, si tu peux trouver un travail, fais un stage… J’ai juste lâché… j’ai juste pris chaque jour avec chaque jour… J’ai fait le travail, j’ai fait les démarches de candidature. Si ça marche je vais faire et si ça ne marche pas, on attend. J’ai juste pris chaque jour avec chaque jour. |…|» (p. 53, lignes 193-196) Et pour la seconde, de légitimation (personnel) : la formation répond à ses attentes et incite à l’action.

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Cette même fonction se retrouve chez Gaelle, elle prend des initiatives durant EVE.

Elle s’approprie le dispositif de sorte à y trouver un sens par rapport à sa situation singulière, en recherchant un emploi plutôt qu’un stage ou en démarchant les entreprises par téléphones, parce que sa cible professionnelle favorise moins une approche physique. Il en va de même pour Ana qui sort du cadre des entreprises lors des recherches. Leur prise de position se fonde sur leur vécu personnel et/ou professionnel, comme la connaissance du processus de recrutement en ayant travaillé dans les Ressources Humaines pour Gaelle. Ces propos le démontrent :

« Ben en fait, il n’y a pas eu vraiment de finalité parce que j’en n’ai pas fait de stage, j’ai pas fait de demande. Donc je suis restée dans mon objectif qui était : trouver un job absolument…

Prendre des rendez-vous, certes, mais voilà… voir l’association, oui… Alors voir comment fonctionne l’association, ça c’était intéressant pour moi. Maintenant de savoir comment marchait l’administration chez eux, je veux dire, j’ai travaillé en assoc. aussi euh… il y a pas forcément besoin de faire un stage de quinze jours pour apprendre ça. Donc la finalité fait que, j’ai quand même continué à ne pas chercher de stage. » (Gaelle, p. 45, lignes 574-580)

« Mais moi c’est ce que je fais de toute façon ! Je parle à des gens, ça veut dire que je ne vais pas dans des endroits pour proposer ma candidature mais je parle avec des gens, c’est comme ça qu’on trouve un taf. |…|» (Ana, p. 28, lignes 492-494)

Néanmoins, Ana a tout de même démarché quelques entreprises à une fréquence lui permettant de satisfaire aux exigences. « Me rendre directement dans les entreprises ça a servi à pas grand-chose. J’ai fait par-ci, par-là, pour pas mentir quand je leur dis « j’ai fait ça ou ça », mais vraiment… Voilà c’est tout. » (p. 30, lignes 606-607). Elle justifie son attitude par deux raisons principales : premièrement, parce que la méthode est peu adaptée à sa cible professionnelle et deuxièmement, parce qu’elle ne voit pas la pertinence de se rendre en entreprise uniquement pour répondre à une commande. « Non mais sur le terrain, encore une fois, ça veut dire là où c’est pertinent, pas aller pour aller. » (p.30, lignes 591-592). Sa motivation fluctue par rapport à l’accomplissement des tâches relatives à la P.I.E. en étant à la fois introjectée et intégrée. Elle donne ainsi à son action à la fois un sens de légitimation (situationnel) et (personnel) : en conciliant exigences et désirs personnels.

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Enfin, la formation a permis à Gaelle d’approfondir des connaissances qu’elle compte mobiliser dans le futur. Et malgré certains points de désaccord (la finalité de stage, la méthode P.I.E., la taille et l’hétérogénéité du groupe, une aide insuffisante lors de ses recherches) elle a souhaité poursuivre la formation. «|…| C’est pas parce que je pense pas la même chose ou je conçois pas les mêmes recherches par rapport au stage ou autre que je vais m’arrêter. Je suis quelqu’un… voilà je signe un contrat euh… Tu es là un mois… En même temps, si j’avais un boulot, si on m’avait fait une demande de stage… oui j’aurais tout arrêté, parce qu’il y a des priorités. Maintenant j’étais disponible, j’ai dit que je serai là un mois… Je pars toujours du principe d’apprendre des choses, d’avancer dans ce sens donc voilà ! |…|» (p. 42, lignes 468-473) Elle justifie son choix par la fonction d’intelligibilité en se positionnant en tant que sujet malgré les contraintes vécues.

D’une manière générale, les candidats s’engagent principalement pour des motifs extrinsèques que ce soit en début ou en cours de formation et ceux-ci sont principalement orientés sur la participation à la formation, à l’exception du motif vocationnel. Le motif prescrit se retrouve uniquement chez Ana en ce qui concerne le démarchage des entreprises. Et en toute logique, c’est la seule chez qui le motif vocationnel est absent en cours de formation, car à l’exception des simulations d’entretien, elle n’a rien appris de nouveau. Quelques motifs intrinsèques stimulent les candidats (à l’exception de Joe), qui s’axent, là encore, principalement sur la participation (en dehors du motif épistémique) : socio-affectif, mais aussi hédonique pour bénéficier de l’environnement de formation dans sa globalité et des contacts sociaux.

Ainsi chez Ana, les bénéfices externes à l’apprentissage de savoirs ont compensé le manque d’intérêt pour le contenu pédagogique. « Moi ça m’a vraiment donné… ça m’a dynamisée, ok ? Mais ça veut rien dire sur la formation en, elle-même, parce que ça aurait pu être autre chose. C’était le fait vraiment pour moi d’être entourée de gens dans ma situation, ça n’a rien à voir avec le programme du cours. |…| A la limite on s’en fout ! Ça veut dire que peu importe ce qu’il y avait dans ce cours, moi ça m’aurait fait du bien, ok. » (p. 25, lignes 363-369)

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7.7 Autres facteurs ayant joué un rôle dans l’évolution de la posture