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Unité de vie familiale et visite conjugale De surcroît, le droit au respect de sa vie

Dans le document La réforme pénitentiaire (Page 157-159)

DU DROIT PÉNITENTIAIRE NATIONAL

P ARAGRAPHE 2 L E MODÈLE EUROPÉEN PRESCRIPTEUR D ’ OBLIGATIONS POSITIVES ET NÉGATIVES

96. Unité de vie familiale et visite conjugale De surcroît, le droit au respect de sa vie

privée s’inscrit également dans un droit à l’intimité familiale et à la sexualité conjugale934 pour le détenu, lequel peut bénéficier de visites935. Si, en Belgique, sont organisées des visites intimes de quelques heures sans surveillance936, au Royaume-Uni, « les visites conjugales et les visites de famille privées de longue durée (pendant le week-end, par exemple) ne sont pas acceptées »937. En France, le droit est bien plus souple. Le détenu peut bénéficier d’une visite

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Notons qu’un plus large recours à la sonorisation a déjà pu être préconisé dans un avis budgétaire, dans le but de lutter contre la radicalisation dans les prisons, proposant ainsi que les bibliothèques, les salles de sport, les salles d’attente des unités sanitaires, les salles de culte, les parloirs et les cours de promenade, lieux de socialisation soient sonorisés à l’avenir. (Cf. LARRIVÉ (G.), Avis budgétaire n° 2267 fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’Administration générale de la République sur le projet de loi de finances pour 2015, Tome IV, Justice. Administration pénitentiaire, 9 oct. 2014, p. 24). Dans ce cas, il s’agirait de doter certains personnels de la qualité d’officier de police judiciaire. Cela avait déjà été préconisé une année auparavant : Cf. HUYGHE (S.), Avis budgétaire n° 1435 fait au nom de la commission des Lois sur le projet de loi de finances pour 2014, crédits du programme « Administration pénitentiaire », Tome VI, proposition n° 8, pp. 27-28. Si cette proposition paraît respectueuse des conditions d’autorisation de l’ingérence, elle paraît davantage relever de la prévention excessive.

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Au sujet de la sexualité en prison : Cf. not. CALIFANO (N.), Sexualité incarcérée, rapport à soi et rapport à

l’autre dans l’enfermement, éd. L’Harmattan, 2012 ; LANCEVELÉE (C.), « Une sexualité à l’étroit. Les unités de

visite familiale et la réorganisation carcérale de l’intime », Sociétés contemporaines, 2011/3, n° 83, pp. 107-130 ; CARDON (C.), « L’organisation de la sexualité comme instrument de gestion des longues peines », Revue

internationale de criminologie et de police technique et scientifique, 1999, n° 3, pp. 315-321. À cette occasion,

et parce que les relations sexuelles entre codétenus sont connues, une politique de prévention contre le syndrome de l’immunodéficience acquise (SIDA) est mise en place dans les établissements, lesquels peuvent distribuer des préservatifs. Concrètement, il s’agit de tenter d’enrayer, du moins de limiter le phénomène de la contamination par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) : « Je connais personnellement des personnes qui sont sorties il n’y a pas très longtemps des « Baumettes », la prison marseillaise, qui étaient séronégatives au VHC en entrant, positives en sortant ». Témoignage d’un ancien détenu retranscrit dans le rapport 2011 de l’Observatoire International des Prisons (OIP), op. cit., ; ROTILY (M.) et AL., « Connaissances et attitudes du personnel de surveillance pénitentiaire face au VIH et/ou SIDA : une enquête européenne », Santé publique, 2001/4, vol. 13, pp. 325-338.

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Plusieurs fois, le CPT a demandé aux États de prévoir des visites conjugales. Cf. Rapports au gouvernement relatifs aux visites du CPT effectuées entre les 6 et 18 oct. 1996 (CPT/Inf (98) 7, p. 60) et entre les 14 et 26 mai 2000 (CPT/Inf (2001) 10, p. 54).

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Droit comparé - Cf. REBERIOUX (M.), « Approche des visites intimes en milieu carcéral entre équilibre affectif et contrôle », Revue de Droit pénal et de Criminologie, I, janv. 2010, pp. 19-31, spéc. p. 27.

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Droit comparé - LOUCKS (N.) et PADFIELD (N.), « Le système pénitentiaire en Angleterre et au Pays de Galles » in CÉRÉ (J.-P.) et JAPIASSÚ (C.E.A.), Les systèmes pénitentiaires dans le monde, op. cit., p. 5 s., spéc. p. 9.

pouvant durer de six à soixante-douze heures938. En effet, les Unités de Vie Familiale (UVF) directement implantées dans les établissements pénitentiaires permettent une organisation matérielle plus disposée à recevoir le détenu et les membres de sa famille939. Inspirée d’expériences étrangères, notamment celles du Danemark ou du Canada940, l’UVF permet aussi de favoriser le respect de l’intimité et le maintien de la vie conjugale dans des conditions qui assurent la discrétion nécessaire au détenu et à son conjoint941. En réalité, les relations sexuelles ne sont ni interdites ni autorisées942 ; cela dépend en fait de la tolérance de l’établissement pénitentiaire, mais on remarquera tout de même que l’article R. 57-7-2 3° du Code de procédure pénale sanctionne « le fait, pour une personne détenue, d’imposer à la vue d’autrui des actes obscènes ou susceptibles d’offenser la pudeur »943. Un auteur soulève que réglementer les relations sexuelles du détenu « pourrait provoquer un tollé aussi bien au niveau de la population qu’au niveau des surveillants de prison »944, ce qui peut justifier l’absence de réglementation et donc d’information à l’égard des citoyens libres.

L’accès à une UVF est ouvert prioritairement aux condamnés945 qui n’auraient pas bénéficié d’une réponse positive à la demande d’un aménagement de peine d’emprisonnement (un régime de semi-liberté par exemple) ou d’une modalité de l’exécution de leur peine

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Droit comparé - Les visites familiales sont encouragées au Danemark, en Suède, en Espagne (entre une et trois heures : DE LA CUESTA (J. L.), « Le système pénitentiaire espagnol à l’aube du XXIème siècle », Rev. pénit., Numéro spécial 2007, p. 103 s.) et au Canada (durée maximale de soixante-douze heures). Aux Pays-Bas (généralement, les visites sont surveillées) et dans plusieurs landërs allemands, seuls certains détenus bénéficient des visites familiales. Cf. HERZOG-EVANS (M.), L’Intimité du détenu et de ses proches en droit comparé, éd. L’Harmattan, coll. Logiques juridiques, 2000 ; SÉNAT, Le maintien des liens familiaux en prison, (Allemagne,

Angleterre et Pays de Galles, Danemark, Espagne, Italie, Pays-Bas, Suède, Canada), Les documents de travail du Sénat, Série Législation comparée, n° LC 163, mai 2006.

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Sur l’expérience valorisante de l’accès à une UVF pour les détenus : Cf. RAMBOURG (C.), « L’assignation

identitaire des unités de visites familiales », Dév. et soc., 2009/1, vol. 33, pp. 51-67.

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Droit comparé - Cf. VACHERET (M.), « Le système pénitentiaire canadien » in CÉRÉ (J.-P.) et JAPIASSÙ (C. E. A.) (dir.), Les systèmes pénitentiaires dans le monde, op. cit., p. 91, spéc. p. 97.

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Circ. de la Direction de l’Administration pénitentiaire du 26 mars 2009 relative aux unités de vie familiale, NOR : JUSK0940004C ; V. aussi : SÉNAT,Le maintien des liens familiaux en prison, Les documents de travail

du Sénat, Série Législation comparée, n° LC 163, mai 2006.

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La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté déplore que les personnes détenues ne puissent pas bénéficier d’un « droit effectif à la sexualité » en cellule ou dans les parloirs : CGLPL, Rapport annuel

d’activité 2014, éd. Dalloz, 2015, p. 100 ; FLEURIOT (C.), « Quelle vie sexuelle dans les lieux de privation de

liberté ? », D. actu., 18 mars 2015.

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Sur cette question, plusieurs articles de presse relatent des situations où le détenu aurait été sanctionné par la commission de discipline pour avoir eu des relations sexuelles au parloir. Cf. not. PIQUEMAL (M.), « L’amour au

parloir », Liberation.fr, 17 avr. 2015.

944

MATHIEU (G.), Les droits des personnes incarcérées dans les pays de la Communauté européenne, Th., op.

cit., p. 109 s.

945

Même si l’homosexualité est dépénalisée depuis la loi n° 82-683 du 4 août 1982 tendant à l’abrogation de l’art. 331 al. 2 du Code pénal en France (JORF 5 août 1982), les UVF s’adressent uniquement aux familles dites traditionnelles avec un père, une mère et des enfants.

comme une permission de sortir946 ; dans les autres cas, les relations sexuelles ont lieu souvent dans les parloirs sous le regard des surveillants, des autres détenus et de leurs visiteurs947. La naissance des enfants conçus au parloir démontre, d’ailleurs, cette réalité amputée d’intimité et vécue comme dégradante par les détenus, par les visiteurs et les gardiens948 et, plus tard, par les enfants.

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