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1.2. Le métier de dirigeant de PME

1.2.1. Les traits de personnalité du dirigeant de PME

1.2.3.6. Typologie de Jaouen (2008)

Plus récemment, Jaouen (2008) dans un travail portant sur les TPE, identifie quatre profils de dirigeants selon, d’une part la caractéristique majeure de la vision stratégique et de la prise de décision (rationalité ou affect), et d’autre part la perception de l’environnement (optimiste ou pessimiste). Elle différencie alors :

- Les carriéristes adoptant une stratégie de recherche d’opportunités ; leur objectif étant l’ascension sociale, ou la réussite professionnelle.

- Les hédonistes faiblement averses au risque. Ce type cherche à vivre de sa passion et de créativité, en se basant sur une stratégie intuitive.

84 - Les dirigeants à vision alimentaire se préoccupent principalement de la survie de leur entreprise. Ils manquent de ressources financières, leur stratégie est émergente et sont dépourvus de ressources.

- Les paternalistes, se trouvant souvent à la tête d’entreprises familiales, se sentent investis d’une mission vis-à-vis de leurs salariés et l’affectif prédomine dans les relations qu’ils entretiennent avec leur entreprise, leurs employés et leurs clients. Ce type ressemble ainsi au profil d’entrepreneur PIC (Pérennité – Indépendance – Croissance) de Julien et Marchesnay (1996).

Tableau 2.8 : Une revue de la littérature des typologies de dirigeants21

Auteurs Données descriptives des typologies

Cole (1959) Quatre types d’entrepreneurs : l’entrepreneur « pratique », l’entrepreneur « informé », l’entrepreneur « sophistiqué » et l’entrepreneur « mathématiquement articulé ».

Smith (1967), (a)

(b) (c) Deux types d’entrepreneurs : L’artisan et l’entrepreneur d’affaires / opportuniste. Smith et al, 1992 Trois types : Entrepreneurs artisan, opportuniste et technologique.

Collins et Moore

1970 Deux types d’entrepreneurs : L’entrepreneur administratif et l’entrepreneur indépendant Boswell (1971) Trois types : conservateur, rationnel et expansionniste.

Chalvin (1971) (d) Trois types : Le participatif, l’'entreprenant et le maximaliste.

Laufer (1975) Quatre types d’entrepreneurs : Le manager ou l’innovateur, l’entrepreneur orienté vers la croissance, l’entrepreneur orienté vers l’efficacité, l’entrepreneur artisan. Stanworth et

Curran (1976) (a) Trois types : Entrepreneurs artisan, classique, manager. Braden (1977) (a)

(b) (e) Deux types : Entrepreneur attentionné ou manager.

Glueck (1977) Trois types de personnes autonomes : l'entrepreneur, le dirigeant d'entreprise familiale et le propriétaire-dirigeant de petite ou moyenne entreprise Miles et Snow

(1978) (c) Trois types d’entrepreneurs : prospecteur / innovateur / suiveur / réacteur.

Gasse (1978) Deux types d'idéologies entrepreneuriales : l'entrepreneur artisan et l'entrepreneur d'affaires. Filley, Aldag

(1978) (b) (e) Trois types d’entreprises : artisanales, évolutives, administratives. Chicha et Julien

(1979) Trois catégories de PME : Traditionnelles, entrepreneuriales, administratives Schollhammer

(1980) Cinq ensembles d'entrepreneurs : administratif, opportuniste, acquisitif, incubatif et imitatif. Vesper (1980)

Au moins 11 types d’entrepreneurs : 1. Travailleurs autonomes travaillant seuls 2. Bâtisseurs d’équipes

21 Ce tableau est adapté du travail de Daval et al (2002) auquel nous avons ajouté de nouvelles typologies à partir

CHAPITRE 2 : Des logiques d’action des dirigeants de PME

85 3. Innovateurs indépendants

4. Multiplicateurs de modèles existants 5. Exploitants d’économies d’échelle 6. Rassembleurs de capitaux

7. Acquéreurs

8. Artistes qui achètent et vendent 9. Constructeurs de conglomérats 10. Spéculateurs

11. Manipulateurs de valeurs apparentes Dunkelberg et

Cooper (1982) Trois types d’entrepreneurs : artisan, orienté vers la croissance, indépendant. Stevenson et

Gumpert (1985) Le promoteur / l’administrateur.

Miner (1986) (f) Entrepreneurs / managers / entrepreneurs à forte croissance. Carland, Hoy,

Carland (1988) Entrepreneur ou propriétaire de petite entreprise. Davidson (1988) Entrepreneur / Manager / Dirigeant propriétaire. Chaussé (1988) Gestionnaire / Entrepreneur.

Ettinger (1989) Entrepreneur solitaire / Créateur d'organisation Gartner (1989a) Entrepreneur / propriétaire de petite entreprise Lafuente et Salas

(1989) L’artisan / L’entrepreneur orienté famille / Manager / Preneur de risque Lafuente et Salas

(1989) Quatre types de nouveaux entrepreneurs basés sur leurs aspirations : Artisan, Orienté vers le risque, Orienté vers la famille, Managérial Miner (1990) Trois types : l'entrepreneur, l'entrepreneur axé sur la croissance et le manager Chell, Haworth et

Brearley (1991) (i)

Quatre types : Entrepreneur, Quasi-entrepreneur, Administrateur, Entrepreneur attentionné.

Marmuse (1992) Trois types : artisan, manager, entrepreneur.

Siu (1995) Cinq types : Le citoyen, le travailleur, le swingueur, l’Idéaliste, le voltigeur Varlet (1996) Quatre types : Le manageur, le propriétaire, le chef de petite entreprise, l’artisan

Julien et

Marchesnay (1988 ; 1996)

Deux types de propriétaires-dirigeants : PIC (pérennité, indépendance, croissance) et CAP (croissance forte, autonomie, peu de pérennité).

Ivanaj et Géhin

(1997) Deux types de dirigeants de PME : Managérial (avec une recherche de croissance avec prise de risque) et patrimonial (prise de risque très limitée). Marchesnay

(1997) Artisan « réactor »/ Entreprenant « innovator »/ Manageur ou Professionnel « adaptor »/ Opportuniste « prospector ». Filion (1997) Sept types de dirigeants propriétaires : Bûcheron / Séducteur / Sportif / Vacancier / Converti / Missionnaire Miner (1997) Le Personnalachiever / le manageur pur / l’expert / le super vendeur

Marchesnay

(1998) Quatre types de dirigeants de PME : L’Isolé / le nomade / le notable / l’entreprenant Hernandez (2001) Quatre types d’entrepreneurs : le manager, l’entrepreneur, l’artisan type et l’exclu. Jaouen (2008) Quatre profils de dirigeants : Les carriéristes, les hédonistes, les alimentaires et les paternalistes.

86 A partir des différentes typologies retrouvées dans la littérature (Tableau 2.8), nous tentons de regrouper les principaux types de dirigeants présentant des caractéristiques communes. Nous présentons dans le tableau 2.9 les différents rapprochements établis.

Tableau 2.9 : Synthèse et rapprochement des principaux types de dirigeants de PME

Catégories de types de dirigeants Caractéristiques communes par catégorie

Artisan (Smith, 1967 ; Gasse, 1977 ; Laufer, 1975) Artisan pur (Hernandez, 2001)

Peu innovant, aversion au risque, peu d’expérience en gestion, forte compétence technique.

Entrepreneur d’affaires (Smith, 1967 ; Gasse, 1978) ; carriériste (Jaouen, 2008) ; prospecteur (Miles et Snow, 1978) ; manager innovateur (Laufer, 1975)

Opportuniste, innovateur, niveau d’expérience et d’éducation élevé, recherche de profit.

Entrepreneur-propriétaire (Laufer, 1975) ; CAP (Julien et Marchesnay, 1996) ; managérial (Ivanaj et Géhin, 1996) ; entrepreneur (Hernandez, 2001) ; génial-technicien (Bauer,

Croissance, indépendande, prise de risque, savoir-faire élevé.

Patrimonial (Ivanaj et Géhin, 1996) ; PIC (Julien et Marchesnay, 1996) ; entrepreneur orienté vers l’efficacité (Laufer, 1975) ; défenseur (Miles et Snow, 1978) ; paternaliste (Jaouen, 2008)

Faible prise de risque, recherche de stabilité et de maintien de la position concurrentielle. Exclu (Hernandez, 2001) ; à vision alimentaire

(Jaouen, 2008) Survie et manque de ressources.

Le passage en revue des différentes typologies portant sur le dirigeant de PME semble confirmer que, qu’il soit entrepreneur, propriétaire ou manager, ce dernier est bien le pivot du système de décision de son organisation. Cependant, Beaucourt et Louart (1995) soulignent que « ce qui importe, ce n’est pas de classer les dirigeants dans des typologies d’acteurs ou de styles de gestion, mais d’élucider avec eux les processus par lesquels ils agissent et

prennent leurs décisions ». C’est dans ce cadre que Faber (2000) préconise d’orienter les

recherches sur les PME vers une perspective basée sur les logiques d’action de leurs dirigeants.

2. D

E LA NOTION DE LOGIQUE D

ACTION

La revue de la littérature sur le concept de logique d’action nous a permis d’identifier trois principales approches : l’approche cognitive dominant les recherches anglo-saxonnes, une approche développementale constructiviste et une approche sociologique dominant les travaux francophones.

CHAPITRE 2 : Des logiques d’action des dirigeants de PME

87 Dans la littérature anglo-saxonne, plusieurs travaux ont porté sur le concept de logique d’action. Nous citons principalement les travaux de Bacharach (1996, 2000 et 2001), Dimaggio (1997) et Frenkel et Kuruvilla (2002). Ayant abordé le concept de logique d’action d’une manière différente que celle des recherches francophones ou encore de celle des travaux portant sur la théorie développementale constructiviste, nous avons choisi de regrouper ces recherches sous une même approche, que nous avons qualifié de cognitive.

Le concept de logique d’action a été également fortement mobilisé dans les travaux portant sur la théorie développementale constructiviste (Piaget, 1954). Cette théorie a été appliquée avec succès au cadre organisationnel (Lichtenstein et al., 1995) et a apporté des éclaircissements sur l’évolution des managers (Fisher et al., 1987), leaders (Torbert 1989, 1994 ; Fisher et Torbert, 1992) et organisations (Quinn et Cameron, 1983; Torbert, 1987). La troisième approche que nous avons identifiée au cours de notre revue de la littérature sur le concept de logique d’action regroupe des recherches francophones, faisant principalement référence à l’ouvrage d’Amblard et al. (1996) où ils présentent l’approche de la sociologie des logiques d’action.

Nous présentons dans ce qui suit ces différentes approches. Pour chacune d’entre elles, nous précisons les définitions apportées du concept de logique d’action, avant de mettre en exergue son apport dans les recherches en sciences de gestion.

2.1. Définitions

2.1.1. Approche cognitive

Beaucoup d’auteurs ont utilisé le terme de logique d’action pour faire référence à un ensemble de représentations ou de contraintes interdépendantes qui influence l’action dans un domaine donné(DiMaggio, 1997). Parfois, le terme est utilisé comme synonyme du terme « idéal-type » (Orru, 1991) ; ou dans les approches d’acteur rationnel, ce terme fait référence à des contraintes situationnelles qui provoquent des comportements parallèles parmi les acteurs ayant des ressources similaires, dans le cadre de règles particulières du jeu (Offe, 1985). Dans cette approche, le concept de logique d’action a été mobilisé dans des domaines diversifiés. Cette utilisation diversifiée a impacté les différentes définitions proposées.

88 Nous citons d’abord une définition proposée par Friedland et Alford (1991) des « logiques institutionnelles » citée par Dimaggio (1997). Elle a émergé dans les travaux portant sur l’économie politique, une approche qui les ancre dans l’interaction entre, d’un côté, les structures mentales des raisons pratiques et de l’autre les exigences institutionnelles. Dans cette perspective, une logique d’action implique que les rituels et les stimuli externes interagissent avec les structures mentales internes pour générer des comportements de routine. Une logique d’action correspond alors à un ensemble d’objectifs, stratégies et bases d’évaluation. A titre d’exemple, la logique marchande met l’accent sur le raisonnement utilitaire, l’efficacité et le calcul des moyens et fins du point de vue individuel.

Prenant appui sur la théorie institutionnelle, Frenkel et Kuruvilla (2002) perçoivent la logique d’action comme un construit conceptuel à la base d’importantes décisions organisationnelles. Les acteurs agissent et justifient leurs décisions en référence à des logiques sous-jacentes. Ils les définissent comme étant des construits de sens-making qui incorporent des interprétations conventionnalistes sur ce qui est approprié et raisonnable concernant la formation des stratégies d’acteurs (Barley et Tolbert, 1997).

Parmi les auteurs qui ont fortement mobilisé le concept de logique d’action dans les recherches anglo-saxonnes, nous retrouvons également Bacharach et al. (1996, 2000). Ces chercheurs définissent ce concept comme étant des logiques générales, des orientations ou cadres cognitifs qui guident le comportement de chaque partie et qui sont sous-jacents aux fins et moyens spécifiques d’un acteur. Présentées comme abstraites, générales et formant une carte cognitive, les logiques d’action peuvent être assimilées à des schèmes (Weick, 1979). Mais contrairement aux schèmes, le concept de logiques d’action est spécifique à la relation moyens-fins que les individus et les parties apportent à un échange.

Ainsi, selon cette approche, et en l’occurrence les travaux de Bacharach (1996, 2000, 2001), les acteurs tendent à approcher une situation avec une orientation cognitive relativement stable, ou logique d’action. Selon Bacharach et al. (2000), cela n’apparait pas surprenant, puisque toute action sociale significative (Weber, 1947) se base sur un calcul de l’acteur des moyens et fins ; c’est à dire le coût des moyens qui vont être utilisés en termes d’investissement de ressources versus les possibilités de fins qu’ils sont en train de poursuivre en termes de stratégies générales (Bacharach et al. 2000).

Les logiques d’action étant en grande partie considérées comme acquises, elles ne sont alors décelables que quand les parties essaient de s’expliquer ou de justifier aux autres la sélection

CHAPITRE 2 : Des logiques d’action des dirigeants de PME

89 de fins et de moyens spécifiques et le lien entre les deux. Ceci fournit, ce que Giddens (1993) appelle « la rationalisation de l’action ».

2.1.2. Approche développementale-constructiviste

Le concept de logique d’action est fortement utilisé dans les travaux se fondant sur la théorie développementale-constructiviste (Piaget, 1954), où il est défini comme étant la manifestation managériale des stades de développement de la conscience. Dans les paragraphes suivants, nous nous intéressons donc à cette perspective développementale en présentant la théorie et ses propositions de base.