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3.3. Phase d’identification des PME responsables

3.3.1.2. Pré-test du questionnaire

Afin de « mettre à l’épreuve la forme des questions, leur ordonnancement et vérifier la compréhension des répondants ainsi que la pertinence des modalités de réponse proposées »

(Thiétart et al., 1999 : 228), nous avons procédé à un pré test de la première version du

questionnaire. Nous l’avons alors administré en face à face à un dirigeant, un cadre ainsi que deux chercheurs en management pour pouvoir recueillir aussi bien leurs réactions verbales que non verbales. A la fin de ce pré test, nous avons pu obtenir les principaux commentaires et remarques suivants :

162 D’abord, les personnes interrogées ont particulièrement apprécié la clarté et le nombre concis de questions ce qui réduisait la durée nécessaire pour y répondre.

Un chercheurs a relevé la faible présence des ONG en Tunisie et a proposé de garder l’item correspondant aux ONG comme il a été utilisé par Turker (2009a) et de rajouter une description tout en citant des exemples d’associations pour ne pas se limiter aux ONG.

De même, le dirigeant et le cadre interrogés ont cherché des explications relatives aux deux items : « Notre entreprise investit dans la création d’une vie meilleure aux générations futures » et « Notre entreprise cible une croissance durable qui tient compte des générations futures. ». Nous avons alors ajouté ces explications en notes de bas de page du questionnaire. Nous avons également suivi les recommandations d’un chercheur pour étayer l’item « Notre entreprise participe à des campagnes et projets qui cherchent à promouvoir le bien-être de la société civile » avec des exemples concrets.

Suite à ce pré-test, nous avons entamé la phase de l’administration du questionnaire. 3.3.1.3. Administration du questionnaire

Pour l’administration du questionnaire, nous avons choisi de recueillir les données auprès des dirigeants de PME en raison de leur position hiérarchique qui leur permettait d’être bien informés des différentes pratiques responsables de leur organisation.

Plusieurs modes d’administration du questionnaire sont envisageables : par voie postale, en face à face, par téléphone ou par voie électronique. Le mode d’administration que nous avons privilégié pour cette enquête est le face à face pour les dirigeants qui se trouvaient sur la zone du Grand Tunis. Le recours à ce mode est motivé par la possibilité d’apporter les explications nécessaires au cas où les répondants rencontrent des difficultés pour répondre aux questions. Par ailleurs, il permet de mieux contrôler la représentativité de l’échantillon. Afin d’éviter d’influencer les répondants, nous avons opté pour une attitude neutre et nous faisions attention à ne pas exprimer notre opinion, tout au long de l’administration du questionnaire. Toutefois, pour les dirigeants basés à l’extérieur du Grand Tunis, nous avons opté pour une administration par téléphone. Nous avons également proposé à ces dirigeants de leur envoyer une version électronique par courriel.

CHAPITRE 3 : Positionnement de la recherche

163 Notre enquête porte sur la population des PME tunisiennes38. En Tunisie, il y a environ 17567 PME ayant une activité industrielle manufacturière, commerciale, de transport ou de services39. Pour constituer notre échantillon, nous avons adopté comme base de données les informations fournies par l’API40. Dans un souci de variété et d’équilibre, nous avons intégré dans notre échantillon des PME ayant formalisé leur engagement ainsi que des PME environnementales et sociales. Les certifications et labels les plus courantes chez les PME tunisiennes sont : ISO 14000, OHSAS 18001, SA 8000, label bio et label ecocert.

Pour les PME industrielles, nous avons recouru à l’annuaire des entreprises industrielles41, pour les PME de services, nous avons utilisé l’annuaire des entreprises de services42 et enfin pour les entreprises certifiées, nous avons mobilisé les données existantes sur le portail de l’industrie tunisienne43. Dans le but de faciliter l’accès au terrain et de garantir un taux de réponse satisfaisant, nous avons également cherché à identifier parmi nos connaissances et notre entourage des dirigeants de PME conformes à nos critères d’échantillonnage.

Dans un premier temps, nous avons tenté de prendre contact avec des dirigeants des PME de notre base de sondage par appels téléphoniques afin de leur présenter les objectifs de notre étude et tenter de prendre rendez-vous avec eux pour administrer le questionnaire. Au total, nous avons contacté 178 PME. Nous avons pu joindre et discuter avec 132 dirigeants, toutefois nous n’avons reçu l’accord que de 113 parmi eux.

Au final, le questionnaire a été administré aux dirigeants des 113 PME retenues. Seuls 106 ont été valides (Tableau 3.6). Le recueil des données s’est fait en face à face pour la majorité des PME implantées sur le grand Tunis. Pour les PME implantées à l’extérieur de ce périmètre, nous avons eu recours à l’administration par téléphone. Même si le recours à ces deux modes a nécessité un temps de réalisation important (d’octobre 2012 à janvier 2013, soit quatre mois) et beaucoup de déplacements, ce choix nous a permis d’atteindre un niveau de contrôle satisfaisant de l’échantillon et de nous assurer que les répondants sont conformes à nos critères de sélection.

38 Le décret N° 94-814 du 11 avril 1994 définit la PME en Tunisie selon le critère d’effectif, comme une entreprise dont le nombre d’employés est compris entre 10 et 200.

39 « Caractéristiques du tissu industriel tunisien en 2011 - Cadre institutionnel et Financement des PME » Rapport de la Direction Centrale des Etudes Economiques, Ministère de la planification et du développement régional.

40 Agence de promotion de l’industrie et de l’innovation : http://www.tunisianindustry.nat.tn/fr/statinfind.asp

41http://www.tunisieindustrie.nat.tn/fr/dbi.asp 42http://www.tunisieindustrie.nat.tn/fr/dbs.asp 43http://www.tunisieindustrie.nat.tn/fr/certifdbi.asp

164 Tableau 3. 6: Données générales sur les entreprises de l’échantillon

Variables démographiques Effectif Pourcentage

Age de l’entreprise

entre 1 et 3 ans 9 8,5

entre 3 et 5 ans 10 9,4

entre 5 et 10 ans 13 12,3

plus que 10 ans 74 69,8

Statut de l’entreprise

filiale multinationale 11 10,4

unique et indépendante 54 50,9

filiale groupe nationale 41 38,7

Pourcentage du CA à l’export non exportatrice 55 51,9 moins de 10% 13 12,3 entre 10 et 24% 10 9,4 entre 25 et 49% 11 10,4 entre 50 et 90% 5 4,7 plus de 90% 12 11,3 Certification aucune certification 60 56,6

système de management qualité 14 13,2

certification et/ou labellisation

environnementale 6 5,7

certification OHSAS18001 1 ,9

certifications qualité et

environnement 14 13,2

système intégré (qualité,

environnement et OHSAS) 7 6,6

3.3.2. La méthode d’analyse des données

Suite à la collecte des données, notre démarche méthodologique et d’analyse des données a été la suivante : Une analyse factorielle a d’abord été opérée pour regrouper les variables en dimensions sous-jacentes. Ensuite, une analyse typologique a été menée afin d’identifier des groupes de PME en fonction de la nature des pratiques sociétales qu’elles ont intégrées. La classification a été faite en recourant conjointement à l’analyse hiérarchique avec la méthode de Ward et l’analyse non hiérarchique avec la méthode des nuées dynamiques.

Les données ont fait l’objet d’un traitement statistique (logiciel SPSS version 18) en trois étapes que nous reprenons en détail ci-dessous :

La première étape de l’analyse des données consiste en une analyse factorielle (Annexe 2.1). L’intérêt de cette analyse est de regrouper les variables en identifiant des dimensions sous-jacentes (Tableau 3.7). Son applicabilité est validée par le constat statistique de corrélations entre les variables (Test de sphéricité de Bartlett < 0,05 et Mesure de précision de l’échantillonnage de Kaiser Meyer Olkin (KMO) > 0,5).

CHAPITRE 3 : Positionnement de la recherche

165 L’extraction des facteurs a été faite selon la méthode d’analyse en composantes principales, avec une rotation Varimax afin de faciliter l’interprétation des résultats. La qualité de représentation des variables est à vérifier grâce au seuil de supérieur à 0.5. Les variables ne respectant ce critère ont été supprimées. Pour la sélection des facteurs, nous avons retenu les critères : valeur propre supérieure à 1, variance expliquée supérieure à 60%.

Suite à l’identification des facteurs de pratiques RSE, nous avons cherché à constituer des groupes de PME tels que les entreprises soient aussi semblables que possible au sein d’un même groupe et aussi dissemblables que possible d’un groupe à l’autre. La ressemblance des PME est définie à partir des variables de pratiques RSE.

Les groupes d’engagement RSE ont été formés à partir d’une analyse typologique (Annexe 2.2). La typologie vise à réduire le nombre des observations en les regroupant dans des classes (ou types) homogènes et différenciées, ce qui correspond à notre objectif. Nous appliquons donc une analyse typologique sur les moyennes des facteurs. Pour cela, nous devons d’abord nous assurer que les différentes variables utilisées pour le regroupement ne souffrent pas d’une colinéarité significative (Hair et al., 1998) et que tous les facteurs d’inflation de la variance VIF sont égaux à 1.0, ce qui indique une absence de colinéarité. Les deux principales modalités de l’analyse typologique sont les méthodes de classification hiérarchique et non hiérarchique. Afin de profiter des avantages de chacun de ces procédés de regroupement, nous avons recouru aux deux méthodes successivement comme cela a été recommandé par Hair et al. (1998).

Nous appliquons d’abord la méthode hiérarchique de Ward avec le carré de distance euclidienne comme mesure de proximité entre objets dans le but d’établir le nombre le plus significatif de groupes. La procédure de classification hiérarchique utilise un algorithme qui traite chaque observation dans une classe distincte et les combine jusqu’à obtention d’une seule classe. L’examen du dendrogramme ou arbre hiérarchique permettra alors de déterminer le nombre de sous-ensembles à retenir, autrement dit, le nombre de groupes résultant de la classification hiérarchique. En effet, l’examen de l’arbre hiérarchique permet d’identifier différentes possibilités. Le choix du nombre de groupes le plus significatif parmi les possibilités proposées se fait sur la base de trois règles : (i) les groupes retenus doivent être interprétables en termes de nature de l’engagement sociétal, (ii) les effectifs des groupes ne doivent pas être trop déséquilibrés, et (iii) une solution comprenant un groupe dont l’effectif est inférieur à 10% de l’échantillon est rejetée (Maurer, 2001).

166 La méthode hiérarchique de Ward utilisée présente l’avantage de retenir les groupes qui maximisent la variance inter-groupes. Mais l’inconvénient majeur de ce type d’agrégation est de chercher à regrouper les classes au maximum, alors qu’il pourrait exister des classes plus fines. Ce n’est pas le cas de l’algorithme K-means dont la procédure de ré-allocation sélectionne les centres de classes initiaux et les affine de façon interactive. C’est la raison pour laquelle nous avons jugé préférable d’apprécier la nature de l’engagement sociétal des PME à partir des groupes générés par une analyse non hiérarchique (Hair et al., 1998 ; Mauer, 2001).

Afin de vérifier la validité globale de la classification obtenue, nous procédons à une analyse de variance à un facteur. Pour les quatre variables d’agrégation, la variabilité intra-groupe doit être plus faible que la variabilité inter-groupes. Outre la vérification des différences existant entre les moyennes des groupes, il est intéressant de déterminer quelles moyennes diffèrent. Le test d’intervalle post hoc de Duncan permet d’identifier les sous-groupes homogènes de moyennes qui ne diffèrent pas les uns des autres, et est donc fréquemment employé à cet effet.

Contraintes Méthodes

Conditions propres aux variables Données métriques et standardisées

Nombre d’observations / Nombre de variables > 5 Indicateurs statistiques de

corrélations entre les variables

Matrice des corrélations Test de sphéricité de Bartlett < 0,05

Mesure de précision de l’échantillonnage de Kaiser Meyer Olkin (KMO) > 0,5 Extraction de facteurs Valeurs propres > 1 % de variance expliquée > 60% Saturations > 0,6 Saturations > 0,5

Qualité de représentation des variables > 0,5 Nombre de facteurs retenus

CHAPITRE 3 : Positionnement de la recherche

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3.4.Phase d’étude des cas multiples

Le recours à l’étude de cas nécessite de faire plusieurs choix en vue d’assurer la validité de cette stratégie de recherche notamment concernant le nombre de cas et leur choix (Hlady Rispal, 2002, Wacheux, 2005). L’enjeu central est de favoriser la richesse des données collectées en favorisant la variation des situations rencontrées, dans la mesure des contraintes de ressources du chercheur (Laarraf, 2010).

S’agissant du choix des cas, Hlady Rispal (2002, p.82) stipule que « l’échantillon sur lequel portent les observations et analyses n’est pas représentatif d’une population statistique, mais

de l’objet de recherche. ». Pour procéder à l’échantillonnage, l’auteur précise cinq critères :

1/ la représentativité théorique : « Un cas doit posséder « suffisamment de traits en commun » avec les autres cas ; il sera exclu s’il possède « une différence fondamentale » par rapport

aux autres » (Glaser et Strauss, 1967, cités par Hlady Rispal, 2002, p.83) ;

2/ la variété : Pour une meilleure compréhension du phénomène et de sa complexité, il est important de traiter des cas appartenant à une même population théorique mais connaissant des situations diversifiées ;

3/l’équilibre : Il s’agit de tenter de composer un échantillon de cas se caractérisant par une variété équilibrée de situations différentes ;

4/ le potentiel de découverte : Ce critère implique la sélection de cas présentant une richesse des données disponibles ainsi qu’un potentiel de collecte et d’analyse des données ;

5/ la prise en compte de l’objectif de la recherche : L’importance accordée à chacun des critères précédents pour la sélection des cas va dépendre fortement de l’objectif de recherche visé.

S’agissant de la détermination du nombre de cas pour l’approche par cas multiples, elle constitue une question délicate en raison de l’idée répandue d’une forte corrélation entre scientificité et échantillon important sans tenir compte des différentes contraintes relatives à une recherche en profondeur et de ses conséquences. Pour résoudre ce problème, les chercheurs proposent les concepts de saturation théorique ou de réplication introduits par Glaser et Strauss (1967) et Yin (1990).

Définie par Hlady Rispal (2002, p.87) comme « le moment à partir duquel l’apprentissage

incrémental est minime », la saturation théorique est atteinte lorsque « les chercheurs

observant des phénomènes déjà constatés » (Glaser et Strauss, 1967, p. 62). Yin (1990)

168 permettant la généralisation de l’étendue. Pour Yin (1990), le nombre de cas est déterminé en fonction des principes de réplication latérale et réplication théorique. La réplication latérale évoque le degré de certitude souhaité à travers l’examen des conditions d’observation de résultats semblables. Quant à la réplication théorique, elle est inhérente à l’ampleur des différences constatées et porte sur les conditions d’émergence de résultats divergents. La réplication s’achève quand l’analyse de données ne fournit aucun nouveau résultat.

Toutefois, dans les exemples de recherche donnés par Yin, le nombre de cas n’excède pas les 12 cas. Eisenhardt (1989) précise, quant à elle, que la plupart des recherches de ce type inclut un nombre compris entre quatre et dix cas.