• Aucun résultat trouvé

Tiers opposant et notion de tiers : l’exclusion finale

Dans le document Le tiers en droit administratif (Page 119-122)

Conclusion de chapitre

Section 1 : Le tiers dans la tierce opposition

B. Tiers opposant et notion de tiers : l’exclusion finale

Le but de cette section est de savoir s’il est possible d’intégrer la notion de tiers opposant dans la future notion de tiers. Le premier problème est que cette notion de tiers n’est, pour le moment, pas définie pleinement. Nous sommes seulement en possession d’un postulat de base : le tiers est une personne extérieure ou étrangère à un groupe ou à une situation juridique. Le second problème rencontré vient lui de la notion de tiers opposant. En effet, nous avons conçu le tiers opposant comme un terme reflétant deux réalités différentes : une première réalité qui est celle des personnes n’ayant pas pu être entendues par le juge administratif et une seconde réalité qui est celle des tiers. Or le doute s’installe. Nous sommes de plus en plus sceptiques sur cette distinction concernant le tiers opposant. Pour chaque espèce étudiée précédemment, nous n’avons pas trouvé de « tiers véritable » compris comme une personne étrangère à une situation juridique. Bien au contraire, les tiers opposants avaient tous un lien, plus ou moins fort, avec la situation juridique concernée, ce lien leur permettant, d’ailleurs, d’obtenir la qualification de tiers opposant. Le problème vient peut être de la première catégorie. L’expression « être entendue » exprime un concept particulièrement élastique et englobant, amenant alors à des confusions. Ainsi nous proposons de redéfinir le tiers opposant. Le tiers opposant n’est ni partie, ni représenté à l’instance, de plus il s’agit de tous les tiers n’ayant pas été entendus à l’instance alors que cela aurait dû être le cas. Le tiers opposant est toute personne qui n’a pas pu être entendue à l’instance.

Quelle conclusion faut-il tirer de la confrontation réalisée entre la notion de tiers opposant et de la notion de tiers proposée ? Le tiers opposant est une personne qui n’a pas pu être entendue à l’instance initiale contre laquelle tierce opposition est formée. Ainsi le tiers opposant est resté étranger à l’instance initiale. Or le tiers est une personne étrangère à une situation juridique. Nous pouvons considérer que l’instance initiale constitue une situation juridique à part entière. Dans ce cas, il est possible d’inclure les tiers opposants dans la notion de tiers. Cependant ce n’est pas la solution que nous proposons de retenir. En effet, si nous considérons qu’une instance est égale à une situation juridique indépendante de la situation donnant naissance au contentieux, nous obtiendrions un état du droit bien trop schématique et ne reflétant pas la réalité des choses. La situation juridique initiale qui donne naissance au contentieux initial est appelée situation juridique A, l’instance de tierce opposition est appelée

117

situation juridique B, or les situations juridiques A et B seraient indépendantes et autonomes l’une par rapport à l’autre. L’instance de tierce opposition (situation juridique B) est forcément reliée à la situation juridique ayant donné naissance au contentieux et donc à l’instance initiale (situation juridique A). La situation juridique B intègre forcément l’instance initiale et donc la situation juridique A. Ainsi le tiers opposant, s’il était tiers par rapport à l’instance initiale A, se retrouve acteur dans la situation juridique B. Or comme A et B sont liées, il ne peut être étranger à la situation juridique A. Tiers opposant et tiers ne font plus partis de la même unité : l’un des deux n’est plus étranger à une situation juridique. Or s’il n’est plus étranger, c’est tout simplement parce qu’il n’aurait pas dû être étranger à l’instance initiale A. Un tiers opposant n’est pas automatiquement un tiers.

Nous proposons ainsi d’exclure la notion de tiers opposant de la future notion de tiers. Cette exclusion, si elle est nécessaire pour construire la notion de tiers, n’est pas préjudiciable à la notion de tiers opposant puisque celle-ci bénéficie d’une définition précise. Par cette exclusion, il s’agit seulement d’exclure la qualification de tiers opposant de la notion de tiers. En effet, quand la définition du tiers sera complète, quand les critères de détermination auront été donnés, nous pourrons prendre en compte une procédure de tierce opposition et rechercher, à ce moment-là, si le tiers opposant en question peut répondre ou non aux critères de détermination du tiers proposés et donc obtenir la qualification de tiers en plus de celle de

tiers opposant. Il faut donc relever que par principe, le tiers opposant n’est pas un vrai tiers (395). Mais après étude contentieuse et confrontation avec les critères du tiers, il pourrait

obtenir une telle qualification. Nous retenons donc un avis fait de nuances, puisqu’il sera peut être possible par la suite de trouver des tiers parmi les tiers opposants. Nous nous rapprocherions alors des propos de M. Dubouchet qui expliquaient que si tous les tiers ne sont pas tiers opposant, les tiers opposant représentent tous les tiers (396).

395 J. BENTZ, Le tiers à l’acte administratif, RPDA 1958, n° 12, p. 7. « La tierce opposition en droit

administratif est ouverte beaucoup plus aux véritables intéressés qu’aux tiers eux-mêmes ; ceci résulte du jeu du contentieux administratif de l’annulation. »

396 P. DUBOUCHET, La tierce opposition en droit administratif, contribution à une théorie normative de l’institution, op. cit., p. 764. « […] vous ne pouvez pas expliquer la tierce opposition par le prétendu rôle ou la

prétendue importance des tiers puisque la totalité, l’immense majorité de ces derniers n’a pas accès à la tierce opposition qui, à la suite de chaque décision rendue, n’est ouverte qu’à ceux qui peuvent justifier d’un intérêt

lésé, et qui appartiennent à une catégorie de tiers définie de façon précise, de façon restrictive. »

118

tiers, parce qu’ayant le plus proche intérêt, il parle au nom de tous les autres, au nom de la Société elle-même et, comme l’avait fort bien remarqué Georges Scelle, joue aussi le rôle d’une sorte de Ministère Public », p. 765.

119

Dans le document Le tiers en droit administratif (Page 119-122)